Je me lance dans une nouvelle fic, ce qui est totalement déraisonnable quand je songe à mon emploi du temps. Je préfère prévenir tout de suite que je n'ai aucune idée du nombre de chapitres (une quinzaine ?) ni du délai de parution.
Je me dois également de vous prévenir que cette fic se passe quelques années après la fin du manga. La vraie fin. THE fin. Le chapitre 83. LE CHAPITRE 83 !
Il y aura donc des spoilers. Rien dans ce premier chapitre, mais plus tard j'y ferai forcément référence. Donc, ceux qui ne veulent pas savoir la fin avant la sortie du tome en français, je me dois hélas de vous déconseiller la lecture de ma fic.
Et cette fic est un drame, je n'ai pas choisi cette catégorie pour rien.
Je vais m'attacher plus particulièrement à un personnage, celui qui, en fait, me séduit le plus : Kyoya. Cette fic sera en très grande partie centrée sur lui, mais pas uniquement. Je ne suis pas sûre de réussir dans l'exercice, parce que ce « charmant » jeune est bien plus froid et intelligent que moi. Je ferai mon possible et j'attends vos critiques avec impatience.
Je remercie beaucoup Enoa2 d'avoir accepté de me relire pour cette nouvelle fic, et je fais un gros bisou à Lazouglou !
Évidemment, rien n'est à moi dans les personnages de cette histoire, puisque tout a été créé par Bisco Hatori.
Bonne lecture.
Kyoya sourit poliment à la serveuse lorsqu'elle posa sa tasse de café devant lui, sans pour autant cesser de suivre la conversation. Deux de ses collègues de MBA à la Chicago Graduate School of Business commentaient avec animation leur dernière étude de cas devant une bière ambrée, mais Kyoya préférait s'en tenir à des boissons non alcoolisées : une longue soirée de travail l'attendait une fois de plus et il voulait conserver les idées parfaitement claires. Il jeta d'ailleurs un discret coup d'œil à sa montre, qui annonçait vingt heures passées, et décida de ne pas tarder plus d'une heure avant de rentrer à son appartement sur le campus.
Kyoya finissait sa tasse lorsque son portable vibra dans la poche intérieure de son costume. Retenant un soupir, certain du nom qu'il verrait s'inscrire sur l'écran, il hésita un instant avant de finalement saisir l'objet. Il haussa très légèrement les sourcils : la première surprise fut de ne pas voir le nom de Tamaki clignoter sur l'écran. La seconde, d'y lire celui de Yuuichi, son frère aîné.
Jamais aucun de ses frères ne l'avait appelé.
Intrigué, Kyoya se leva en s'excusant et décrocha après avoir fait quelques pas à l'écart, vers les baies vitrées du café.
- Kyoya Ootori, annonça-t-il sobrement dans le combiné, comme pour n'importe quel interlocuteur.
- Kyoya, c'est Yuuichi.
Kyoya suspendit son pas. La voix de son frère aîné tremblait d'agitation, d'inquiétude. Or la voix de Yuuichi ne tremblait jamais. Le jeune homme se raidit, conscient soudain de la gravité de ce qui allait suivre.
- …. Je rentre en chirurgie dans quelques secondes. Je...
Un silence, durant lequel Kyoya serra les mâchoires, prêt à tout entendre.
- Il s'agit de ton ami, le fils Suoh. Tamaki Suoh.
Prêt à tout entendre, sauf cela.
- Il vient d'être admis, un terrible accident de voiture, je n'en sais pas davantage. J'ai prévenu notre père, mais... Kyoya, je pense que tu devrais rentrer.
- Bien. Je prends le prochain vol.
- Je dois y aller. Désolé Kyoya.
La ligne fut coupée et Kyoya referma son portable. Il cligna des yeux, pour découvrir son propre visage dans le reflet de la baie vitrée. Étrangement fixe, étrangement immobile et fermé. Les pensées se succédèrent à toute allure, comme d'habitude.
Yuuichi l'avait appelé en second, certainement, juste après leur père. Yoshio se chargerait d'appeler le père de Tamaki. À Kyoya de prévenir les autres. Tous les autres. Il hiérarchisa les priorités et reprit son portable, réservant une place sur le premier vol pour Tokyo. Cela semblait presque absurde, étant donné que le voyage durait quatorze heures, et l'idée de ne pas y aller lui traversa l'esprit. Il la rejeta immédiatement. Au moins, cela lui épargnerait l'attente sinistre dans le hall de l'hôpital, il arriverait lorsque Tamaki serait sorti de chirurgie.
Kyoya consulta sa montre : par chance, le vol quittait Chicago dans moins de deux heures, cela lui laissait juste le temps de gagner l'aéroport et de passer la douane. Il alla régler sa consommation et demanda qu'on lui appelle un taxi, immédiatement. Puis, d'un pas égal, il rejoignit sa table. Ses collègues levèrent les yeux vers lui et froncèrent les sourcils :
- Un problème Ootori ? Tu sembles soucieux.
- Oui. Je suis au regret de devoir vous laisser.
- Ah, alors à demain.
Kyoya resta un instant silencieux, puis secoua doucement la tête :
- Hélas, je ne pense pas. Je me vois dans l'obligation de retourner immédiatement à Tokyo, j'ai un vol dans moins de deux heures.
Après un temps de totale stupéfaction, l'un des jeunes gens présents demanda :
- Quelque chose de grave ?
Oui, on pouvait dire cela comme ça, en fait.
- Un proche vient d'avoir un accident de voiture, cela semble sérieux.
La compassion qu'il décela immédiatement sur les visages de ses condisciples donna envie à Kyoya de les frapper.
- Un parent ?
Kyoya cligna des yeux derrière le verre de ses lunettes.
« Mamaaaaan ! Les enfants sont odieux ! Tu dois faire quelque chose ! Les jumeaux sont encore après ma douce Haruhiiiii ! »
- Oui, un parent. Pardonnez-moi, je dois vous laisser, je vois que mon taxi est arrivé. Bonsoir.
Il quitta le café sans un regard en arrière, l'étui de son portable sous le bras et s'engouffra dans le taxi, énonçant sa destination au chauffeur. Il réalisa soudain qu'il avait toujours son téléphone à la main et se souvint de ce qu'il avait à faire. Pour une des premières fois dans sa vie, Kyoya Ootori hésita. Hésita sur qui il allait appeler, sur ce qu'il allait dire, ce qu'il allait entendre. Il grinça des dents et se morigéna intérieurement : un Ootori ne reculait jamais. Même en un moment pareil. Il chercha le nom dans le répertoire et composa à l'international. A Tokyo, il était plus de dix heures du matin.
« Haruhi Fujioka. Merci de laisser un message après le signal sonore. Au revoir »
Kyoya se détesta pour son premier réflexe : le soulagement de ne pas parvenir à la joindre. Logique, elle était très certainement en cours ou en bibliothèque. Il raccrocha avant le bip : laisser ce genre de message lui semblait inconcevable. Il composa un autre numéro, espérant sincèrement cette fois joindre son interlocuteur :
- Kyoya ? Tu es au Japon ?
L'inquiétude perçait sous l'enthousiasme d'Honey. Évidemment : Kyoya n'appelait jamais depuis les États-Unis, leurs contacts se bornaient à quelques mails envoyés de loin en loin. Kyoya pinça les lèvres avant de déclarer :
- Non. Mon frère m'a appelé : Tamaki a eu un accident de voiture.
Kyoya se refusa à entendre le cri de Honey et continua :
- Il est au Ootori Central Hospital, en chirurgie. Je n'en sais pas plus. Le portable d'Haruhi est coupé, j'ai préféré ne pas laisser de message, mais je doute qu'elle soit déjà au courant. Je suis moi-même en route pour l'aéroport de Chicago, mais je ne serai pas là avant demain, mon vol atterrit à Narita à cinq heures du matin.
- Je... Tu crois que c'est grave ?
- Mon frère est un des cinq meilleurs chirurgiens du Japon. Tamaki est entre de bonnes mains.
Kyoya se demanda s'il tentait de convaincre Honey, ou de se convaincre lui-même. Aucun des deux ne fut dupe, car c'est dans un murmure que son interlocuteur répondit :
- Je me charge de prévenir les autres Kyoya. À demain.
Ils raccrochèrent et Kyoya, levant ses lunettes sur son front, se massa l'arête du nez. Puis il observa quelques instants le téléphone dans la paume de sa main et hésita à réécouter le message. L'autre message.
Sentimentalisme puéril et totalement improductif. Il rangea le portable dans sa poche de veste.
Paradoxalement, il dormit pendant la majorité du vol, son fauteuil de Business Class incliné à l'horizontale. Un sommeil de plomb, sans rêve. A son réveil, il mit quelques secondes à se souvenir qu'il se trouvait à quelques milliers de pieds au-dessus du sol et non dans son appartement sur le campus. Il mit une seconde de plus à se souvenir pourquoi.
Refusant de se laisser aller à des cogitations stériles et sources de stress supplémentaire, il ouvrit son portable et se replongea dans ses dossiers. L'extraordinaire faculté de concentration qui était la sienne lui permit de ne pas passer le reste du vol à regarder sa montre.
- Monsieur Ootori ?
Il leva les yeux vers l'hôtesse qui, penchée vers lui, le dévisageait avec un intérêt certain. Il sourit :
- C'est moi-même.
- Nous avons reçu un message vous concernant : une voiture vous attendra à notre arrivée à Narita. Si vous voulez bien me confier votre passeport, je vais me charger des formalités administratives afin que votre passage à la douane soit réduit au minimum. Vous n'avez pas de bagages ?
- Non, aucun. Merci beaucoup.
Elle s'éloigna vers le cockpit avec ledit passeport alors qu'une voix annonçait dans les haut-parleurs le début de la descente vers Tokyo. Dehors, il faisait nuit noire. Il restait environ une demi-heure avant l'atterrissage mais Kyoya n'avait plus l'intention de travailler. Il venait de boucler un rapport, et se sentait incapable d'en entamer un autre dans un tel état de stress. Il s'y remettrait après être passé à l'hôpital.
Glissant les écouteurs dans ses oreilles, il alluma l'écran encastré dans le siège devant lui et passa en revue les diverses chaînes disponibles sans vraiment y prêter attention. Au bout d'un petit moment, en désespoir de cause, il revint comme par habitude sur l'une des chaînes financières et, calant son bras sur l'accoudoir, posa son menton dans sa paume. Il regardait d'un œil distrait les valeurs qui défilaient à l'écran et baissa les yeux pour remettre sa montre à l'heure japonaise.
- … chute spectaculaire et attendue des valeurs du groupe Suoh, suite au décès hier après-midi du jeune héritier annoncé de l'entreprise, Tamaki Suoh, dans un accident de voiture à Tokyo. La bourse japonaise devrait se ressentir de...
Le souffle coupé, Kyoya releva brutalement la tête et fut cueilli de plein fouet par le montage sur l'écran.
Sur la partie gauche, le visage de Tamaki, son éternel sourire aux lèvres, souriant à la caméra, ou à l'appareil photo, ses magnifiques yeux bleus pétillant de vie. Sur la partie droite, une rue encombrées de pompiers, des policiers chassant les badauds et, en arrière plan, la carcasse d'une somptueuse Porsche noire encastrée dans le pilier d'un pont.
- … les valeurs américaines ont connu ces jours derniers une nette...
L'écran s'éteignit et une voix annonça dans les oreillettes que les communications étaient coupées, l'avion entamant la dernière phase de la procédure d'atterrissage.
« Ravi de te rencontrer, Ootori.
- Moi-de même. Apprécierais-tu que je te fasse visiter l'établissement ?
- Absolument ! »
Tamaki... Tamaki était mort.
C'était absurde. L'idée en elle-même était absurde. Si absurde qu'il n'y avait même pas songé auparavant, que son intelligence si brillante n'avait même pas pris en compte cette possibilité.
Yuuichi l'avait appelé en personne. Yuuichi lui avait demandé de rentrer. Yuuichi lui avait dit qu'il était désolé.
Mais pas un instant Kyoya n'avait pensé que peut-être...
- Votre passeport, Monsieur Oot... Monsieur ? Monsieur, vous allez bien ?
Kyoya dut faire un effort physique surhumain pour relever la tête vers le visage inquiet de l'hôtesse qui lui tendait son passeport. Il sourit, c'était si facile, une habitude acquise depuis des années, quelles que soient les circonstances.
- Oui, juste un peu de fatigue. Je vous remercie de votre sollicitude.
- Un steward vous conduira à votre voiture.
- Merci.
Il tendit la main vers son passeport et écarquilla les yeux en voyant ses doigts trembler. Serrant un instant le poing, Kyoya inspira profondément, avant de sourire à nouveau et de prendre la pièce d'identité d'une main redevenue assurée et ferme. L'hôtesse acquiesça et s'éloigna, non sans jeter par-dessus son épaule un dernier regard à cet homme sublime mais soudain pâle comme la mort.
Tout semblait irréel, les secondes s'étiraient, interminables et pourtant continuaient de s'égrainer. Deux hommes discutaient avec animation, de l'autre côté de l'allée. Les hôtesses prenaient leurs postes et attachaient à leur tour leur ceinture de sécurité. La décélération de l'avion faisait vrombir plus intensément les moteurs et Kyoya avala machinalement sa salive pour lutter contre la dépressurisation. L'avion s'inclina sur la gauche pour gagner l'axe de la piste et les lunettes de Kyoya scintillèrent des rayons du soleil levant et des milliers de points lumineux qui s'allumaient un à un dans la vaste banlieue de la capitale japonaise.
Le choc des roues sur la piste et le bruit assourdissant de l'inversion des moteurs tirèrent Kyoya de son hébétude. Machinalement, comme tous les autres hommes d'affaires présents dans les luxueux fauteuils autour, il sortit son téléphone portable et le ralluma.
Vingt-huit appels.
Douze messages.
Il referma le portable, défit sa ceinture à l'arrêt de l'appareil et se leva, détendant ses longues jambes engourdies par le vol et passant la main sur sa nuque fatiguée.
« Kyooooyaaaa ! Ce que tu es tendu ! Ne bouge pas, je vais te masser les épaules ! »
- Monsieur Ootori, si vous voulez bien me suivre.
Il acquiesça, mit son ordinateur en bandoulière et suivit l'homme vers l'issue de l'appareil.
- Au revoir, Monsieur, bonne journée. Nous espérons que vous avez fait bon voyage et vous revoir très bientôt sur nos lignes.
Il sourit aux deux hôtesses et s'engouffra dans la passerelle mobile. Il passa le long des salons VIP, ses pas étouffés dans l'épaisseur de la moquette bleu nuit. L'homme le guida vers le point de contrôle et lui indiqua brièvement la direction à suivre ensuite. Kyoya remercia, déposa son ordinateur, son téléphone, son portefeuille et ses lunettes sur le tapis roulant et passa le portique avant de tout récupérer. Un autre homme lui fit signe et lui tint ouverte une porte vitrée. Kyoya s'y engouffra, giflé par la fraicheur de l'aube, et son regard fut attiré par un éclat de lumière : en bas luisait la carrosserie noire d'une somptueuse limousine. Tachibana se tenait à côté de la portière, bras croisés et tête baissée. Le bruit des pas de Kyoya sur l'escalier de métal fit lever la tête au chauffeur et, immédiatement, celui-ci ouvrit la portière arrière.
Kyoya ralentit un instant son pas en voyant une silhouette jaillir de la voiture.
Fuyumi. Fuyumi qui parcourut en courant les quelques mètres qui la séparaient de son jeune frère et s'effondra littéralement dans ses bras, son corps mince secoué par des sanglots.
- Kyoya... Oh mon dieu Kyoya... Tamaki... Tamaki est...
- Je sais, coupa doucement son frère.
Le premier réflexe de Kyoya avait été de se raidir et de vérifier que personne d'autre ne sortait de la voiture – son père, par exemple. Son second réflexe fut de jeter un coup d'œil autour de lui pour s'assurer que personne d'autre n'était présent.
Personne d'autre que Tachibana et Fuyumi.
Alors, seulement, il laissa tomber sur le sol la mallette de son ordinateur et, enlaçant sa sœur, blottit son visage dans son cou.
Note de l'auteur : oui, il est vraiment mort. Non, même les meilleurs médecins du meilleur hôpital des Ootori ne pourront le ressusciter. Non, ce n'est pas une fausse mort pour le cacher des yakuzas ou je ne sais quoi. Non, il ne reviendra pas sous forme de fantôme, de vampire, de rien du tout. Si, sous forme de flash-back, surement, oui. C'est tout.
Oui, je l'ai tué. Et je vous jure que cela fut fort difficile, parce que c'est un personnage que j'adore, et que j'ignore comment je vais réussir à m'en passer pendant le reste de ma fic.
Haïssez-moi.
ps : quelqu'un sait-il comment faire des doubles interlignes dans les chapitres ? Pour mieux séparer mon texte et mes commentaires par exemple.