Auteur : TheProblematique

Titre : Veritas

Disclaimer : L'univers appartient à Gene Roddenberry et à J.J Abrams, et l'histoire à TheProblematique.

Avertissements : Traduction & fic slash assez graphique (traitant de relations amoureuses et sexuelles entre garçons).

Mon Dieu. Cinq mois. Vous ne pouvez pas savoir à quel point je suis contente de pouvoir vous livrer ce dernier chapitre, et désolée pour l'attente. Je vous remercie pour votre patience. Je remercie tous-tes ceux-celles qui ont suivi cette traduction, et en particulier qui ont laissé des reviews. A bientôt pour d'autres trads. LLAP.


Chapitre 24 : Veritas Omnia Vincet

Ils avaient tous les deux le souffle court, et Spock semblait apparemment incapable pour l'instant de lâcher la chemise ensanglantée et déchirée de Jim, mais au moins leurs bouches étaient séparées quand les portes du quai d'embarquement s'ouvrirent.

Une équipe de sécurité entra immédiatement, tout en efficacité habillée de rouge, et se dispersa pour fouiller le hangar, certains officiers ne leur adressant même pas un regard.

« Capitaine Kirk ! Commandant ! »

Le Lieutenant D'Ko-Han les atteignit la première, les parcourut des yeux pour confirmer qu'ils étaient en vie, puis ordonna à l'homme le plus proche de s'occuper de la silhouette inconsciente de Stavok, étalé sur le ventre quelques mètres plus loin.

« Vous allez bien ? » leur demanda-t-elle, son regard sautant du genou brisé de Jim à la main écorchée de Spock puis à la blessure rouverte sur la poitrine de Jim.

« On est vivants, » dit Jim, la voix cassée. « Écoutez, je présume que vous avez attrapé le type qui était dans la cabine de contrôle… ? »

Elle acquiesça. « C'était nous. »

« Mais le – il a piraté un programme dans le réseau de contrôle des turboascenseurs, il est peut-être à deux doigts de – »

« On s'en occupe. C'est bon, tout va bien, la base est sauvée. Vous avez une équipe de commandement hors pair, monsieur. » Elle lui adressa un petit sourire et se leva pour partir, probablement pour aller coordonner ses hommes, quand un grésillement fut émis par le communicateur à sa ceinture. D'Ko l'ouvrit immédiatement.

« Ici D'Ko – »

« Pouvons-nous confirmer que la zone est sécurisée, Lieutenant ? » coupa immédiatement la voix d'Emerett.

« Oui, monsieur, je crois – »

Les portes du quai d'embarquement s'ouvrirent alors qu'elle était au milieu de sa phrase et Jim essaya de se redresser et de s'asseoir avec un peu plus de dignité, mais c'était une tentative vouée à l'échec.

Il y eut un léger silence quand tout le monde les vit ; blessés, ensanglantés, sales et en ruines, enlacés au milieu du quai.

Puis les voix de leurs amis se mélangèrent toutes pour former un cri collectif de soulagement tandis qu'une très, très grosse foule entrait dans le hangar. Le Commodore Emerett était étonnamment près de sa tête, tout comme McCoy, Uhura, Sulu, Chekov, Scotty et Giotto, le chef de la sécurité de Jim, et derrière eux se trouvaient Mara et Lucas Dalle, M. Moss, ce qui semblait être beaucoup (la plupart !) des membres d'équipage de l'Enterprise, une équipe médicale qui comprenait le docteur M'Benga de la base, au moins la moitié du département d'ingénierie.

C'était une cacophonie de cris et la tête de Jim était sur le point de se fendre en deux sous l'effet de la douleur ; le fait qu'il ne puisse pas respirer de manière régulière ne faisant qu'empirer les choses. Mais il n'aurait pas changé ça, songea-t-il sombrement ; n'aurait pas voulu qu'ils s'en aillent, même si la moitié de ses amis les fixaient tous les deux comme s'ils venaient de revenir à la vie.

« Que tout le monde s'écarte, j'ai besoin d'espace, » annonça fortement McCoy, et seule l'équipe médicale de M'Benga fut autorisée à les entourer. Uhura, Sulu et Chekov furent les premiers à réagir à l'ordre, comprenant rapidement et disant aux autres de reculer, de laisser de la place au personnel médical, mais Jim surprit les regards furtifs qu'ils lançaient par-dessus leurs épaules toutes les deux secondes, comme pour vérifier que personne n'était mort entretemps.

« Jim. »

Jim croisa le regard de son meilleur ami et réussit à lui faire un clin d'œil.

« Salut. »

McCoy avait l'air renfrogné, mais son regard était tout sauf réprobateur lorsqu'il dit ; « Tu m'as fait une de ces peurs. »

« Oui, d'accord, mais on dirait bien que je… » Une quinte de toux terrible le fit bafouiller et cracher rouge. « Euh, pourrais survivre, donc peut-être que tu auras… auras la bonté de… ? »

« Jim, ne parle pas – » La main de Spock le touchait toujours, les bouts de deux de ses doigts accrochés à sa chemise déchirée de manière à être directement sur sa peau. Jim le remarqua vaguement, un détail important à retenir pour plus tard parce que ça ne ressemblait pas à Spock, non, même pas après une crise aussi grave que celle-là.

« Je… » Sa vision se troublait. « Je crois que je vais juste m'évanouir maintenant, d'accord ? »

« Bien sûr, Jim. Fais donc ça, » dit McCoy, d'une voix gentille pour une fois, et Jim s'enfonça avec plaisir dans l'inconscience.

Il se réveilla à l'infirmerie un nombre indéterminé d'heures plus tard, ayant brièvement retrouvé ses esprits au son des voix de McCoy et de M'Benga qui étaient en pleine discussion.

Spock ne le touchait plus.

Pour une raison inconnue cela fit se redresser Jim dans un sursaut, et il regarda autour de lui. Ça le frappa comme un électrochoc, et un mauvais. Pas juste parce que le fait que Spock le touche était toujours une bonne chose, mais parce que quelque chose avait sérieusement cloché chez son Vulcain là-bas.

Jim décida de trouver Spock dès qu'il le pourrait, et évalua son environnement ; il était de nouveau dans une chambre privée, seul, et ses signes vitaux étaient affichés sur un écran au-dessus du lit. Il les regarda en premier avant de faire quoi que ce soit d'autre, et fut soulagé (si ce n'était tout à fait surpris) de découvrir que les dégâts n'étaient pas si terribles que ça. Son genou était sacrément douloureux, mais la chirurgie reconstructive rapidement engagée avait dû aider la guérison et il espérait qu'il finirait par redevenir entièrement opérationnel. Il y avait le problème de son poumon et de la peau récemment guérie à ce niveau-là à considérer mais, là encore, les greffes reconstructives étaient peut-être intervenues à temps pour éviter des dommages permanents.

Jim remarqua l'unique tube qui entrait dans son bras et fut content de ne pas avoir besoin d'assistance respiratoire, bien que le goût au fond de sa gorge et la sensation étrange dans son nez lui indiquent que ça avait été le cas.

Il appuya sur le bouton pour appeler une infirmière et pria pour que McCoy soit celui qui répondrait, content pour une fois que son ami soit un bourreau de travail.

Heureusement, il eut raison d'avoir soupçonné que le médecin n'aurait pas quitté l'infirmerie.

« Jim ! »

« Salut. »

« Comment tu te sens ? »

Jim essaya de sourire. « Plutôt bien, vu la situation. »

McCoy sortit immédiatement son tricordeur et le scanna, plissant des yeux pour lire les résultats.

« Pas mal. Il vaut mieux que tu évites de courir dans un futur proche, par contre, à la fois pour ton genou et pour ce poumon. »

« Oui monsieur. »

Le médecin leva les yeux au ciel. « Hé, je te signale que tu as passé deux heures en chirurgie pour le poumon et trois autres pour ce fichu genou – »

« Bones, je suis désolé mais il y a une tonne de trucs qui se sont passés pendant que j'étais inconscient, et j'ai besoin de parler à Emerett le plus vite possible, » interrompit Jim. « Je n'ai aucune idée de ce qui se passe maintenant, je ne sais pas si on est encore en danger ou pas – »

« Non, non, on m'a assuré que toutes les menaces sont passées, » lui assura rapidement McCoy. Puis son expression devint… hésitante. « Je vais contacter Emerett pour toi si tu veux, mais… si tu, euh… »

Ils échangèrent un long regard et Jim réalisa que McCoy avait su ce qu'il demanderait en premier.

Il le dit quand même. « Spock ? » Une sensation de malaise s'était installée dans son ventre, depuis qu'il s'était réveillé, en fait, et avait vu que Spock n'était pas là. Spock avait – Stavok lui avait fait quelque chose. Spock n'avait pas été lui-même à la fin, là-bas. « Comment… où est-il ? »

« Spock ne… va pas très bien, Jim, » admit le médecin avec réticence. Jim ignora le pic de panique qui le traversa et prit de profondes inspirations à la place.

« Je crois que je sais ce qu'il pourrait avoir. »

« Vraiment ? » McCoy fronça les sourcils. « Aucun traumatisme physique ne permet d'expliquer son état. Sur un humain je suggérerais un syndrome de stress post-traumatique mais les symptômes ne correspondent pas tout à fait de toute façon, et c'est Spock. J'ai déjà vu Spock passer outre ses blessures, tu te souviens de cette fois où il s'est cassé le poignet et ça nous a pris, quoi, toute la matinée pour le remarquer ? »

« Non, c'est pas ça. Il faut que je le voie. »

« Toi ? »

« Ouais. Seulement moi. »

« Jim, tu sais que… euh, nous avons toute une équipe de professionnels – »

« C'est pas quelque chose qu'ils connaîtront beaucoup. » La certitude de Jim ne faisait que grandir à chaque mot qu'il prononçait. « Peut-être M'Benga, je ne… mais même pas lui, sûrement. Tu sais à quel point les Vulcains sont secrets à propos de leur… de tout. Surtout la façon dont leurs esprits fonctionnent, toute logique mise à part. » Quand McCoy parut encore peu convaincu, Jim lâcha un soupir. « Écoute, je n'en suis même pas sûr, d'accord, mais je pense que Stavok l'a blessé, l'a blessé télépathiquement, et je pense que je suis le seul à pouvoir l'aider. »

McCoy parut choqué. « Télépathiquement… comme une attaque mentale ? »

« Quelque chose comme ça. »

« Oh. » Il se frotta la bouche, clairement plongé dans ses pensées. « Et tu peux aider ? Comment ? Pourquoi toi ? »

Jim grimaça. « Il y a… pas mal de choses que je dois te faire rattraper, pour être honnête. »

Son ami haussa un sourcil plutôt amusé. « Vraiment ? Tu veux dire depuis que tu as impliqué que quelque chose était arrivé pour ensuite me laisser dans le noir le reste du temps ? »

« Hé, c'était pour te protéger et nous protéger de – » Ça le frappa. « Merde, le procès, qu'est-ce qui va se passer pour ça – »

« Un problème à la fois, Kirk, » interrompit McCoy, levant la main. « Concentrons-nous sur un problème à la fois. Spock est dans une chambre privée adjacente à celle-ci, donc si tu veux le voir ça peut s'arranger. Je ne vais pas t'insulter en suggérant que ça pourrait être assez mal interprété par les autorités si ça s'apprenait – »

« En fait ça serait interprété exactement comme il le faut. » Jim haussa les épaules, puis eut un léger sourire suffisant. « Mais merci pour ta compassion, Bones. »

« Bien. Enfin, si tu penses sincèrement être le seul qui puisse l'aider… » McCoy marqua une pause et Jim acquiesça. « Très bien alors. Nous appellerons Emerett après que tu aies vu Spock et toute cette histoire de procès pourra être gérée après ça. Maintenant attends une seconde et laisse-moi te trouver des vêtements… »

Cinq minutes plus tard Jim était débarrassé de toute aiguille ou tube et portait une blouse médicale bleue et propre. Il se tenait stable sur ses deux pieds, se sentant remarquablement bien, et était sur le point de quitter la pièce quand McCoy lui effleura le bras.

« Attends, je vais m'assurer que personne ne te verra dehors. » Le médecin se déplaça pour le faire mais Jim l'arrêta.

« Je… n'ai vraiment aucune idée de ce que je ferais sans toi, vieux. »

McCoy émit un reniflement dédaigneux. « Appelle-moi encore vieux et tu le découvriras, crois-moi. »

Jim sourit. « Je suis sérieux, Bones. Tu as été super pendant toute cette histoire. Et je suis désolé que dernièrement ça ait été la folie et que je n'aie pas eu l'occasion de te tenir au courant… mais en vérité je sais à peine ce qui se passe moi-même. Spock est – on a à peine eu l'occasion de parler aussi et je soupçonne qu'il y ait, euh, des nouvelles pas mal importantes bientôt. Mais je te dirai dès que j'en serai sûr. Tu es… un peu mon meilleur ami, et je voulais juste te dire merci. »

À sa surprise, bien que McCoy ait eu l'air plutôt solennel au début, la dernière partie du petit discours de Jim fit rire le médecin.

« …Quoi ? »

« C'est drôle parce que je dois admettre avoir eu des moments de doute là-dessus. »

« Quoi ? Sur le fait d'être mon meilleur ami ? » McCoy acquiesça, souriant encore. Jim était très confus. « Pourquoi ? Non, comment tu pourrais – »

« Spock, Jim, » répondit simplement McCoy. Jim eut envie de rougir, mais résista virilement, et leva les yeux au ciel à la place. « Vous deveniez tellement absorbés l'un par l'autre tous les deux, surtout quelques mois après le début de la mission, quand la tension du début a disparu, et ça m'a pris un moment pour comprendre qu'il n'y avait pas que de l'amitié, si tu vois ce que je veux dire. »

Jim renâcla. « Donc en gros tout le monde l'a soupçonné avant nous, y compris le commandement de Starfleet, et maintenant toi. »

La bouche de McCoy forma un sourire en coin.

« C'est juste génial. Non, vraiment, c'est super pratique qu'on n'ait apparemment pas besoin de le dire à qui que ce soit. » Il n'enregistra ce qu'il disait qu'une seconde plus tard. « Merde, attends, est-ce qu'Uhura… ? » Mais ce n'était pas le moment de se soucier de ça. Avant que le médecin puisse répondre Jim agita une main impatiente et secoua la tête. « Laisse tomber, pas le temps. Donc maintenant que tout le monde sait qui est qui dans ma vie, je vais aller réveiller mon autre moitié, et ne t'avise pas de faire de commentaire là-dessus – » anticipa-t-il. « - enfin. Ne dis rien. »

McCoy fit un geste de fermeture éclair sur ses lèvres et fit sortir Jim dans le couloir vide (vide même si Jim pouvait entendre les bruits légers qui provenaient de la salle principale juste à l'angle) puis l'introduisit rapidement dans la chambre juste à côté de la sienne, la porte s'ouvrant et se refermant immédiatement.

C'était une copie de la chambre de Jim, une copie de toutes les chambres blanches de l'infirmerie parce qu'elles se ressemblaient toutes, mais la première chose que Jim vit une fois entré était que Spock était réveillé.

« Hé. »

Jim se précipita à son chevet, McCoy restant près de la porte. Les yeux de Spock étaient ouverts et ils s'accrochèrent avidement à Jim dès qu'il fut visible, mais il fut immédiatement clair d'après la façon dont Spock était allongé qu'il ne pouvait pas bouger. Ses bras semblaient pendre mollement sur ses flancs, une main et un avant-bras étant bandés jusqu'au coude. Son souffle était court, irrégulier, mais contrairement à la dernière fois que Jim avait été forcé de faire l'expérience de voir Spock dans un lit d'hôpital comme ça, il y avait de la substance dans le regard du Vulcain. Pas de l'épuisement ou de la douleur, comme quand il était empoisonné. Spock était parfaitement alerte, même si manifestement affaibli.

« Wow. Tu as une sale tête, » murmura Jim, d'une voix légère.

C'était vrai à cent pourcent. Il n'avait peut-être pas l'air somnolant ou drogué mais le visage de Spock était fiévreux et couvert d'un léger lustre de sueur, ses joues et les bouts pointus de ses oreilles étaient verdis, mais malgré tout il paraissait émacié d'une certaine manière, éreinté. Jim mourait d'envie de le toucher, mais savait qu'il fallait qu'ils parlent d'abord.

« Je vais vous laisser, alors, » dit McCoy d'une voix forte.

« Merci, Bones. Vraiment. »

« Ouais ouais, tu l'as déjà dit. »

Et la porte se referma à nouveau.

« Hé. Comment tu vas ? »

Spock leva les yeux vers lui et quelque chose… clochait. La verdeur de sa peau s'étendait de ses pommettes au reste de son visage et à son nez, et l'intensité concentrée de ses yeux était presque déstabilisante.

« Spock ? »

Les lèvres de Spock s'entrouvrirent mais aucun son ne sortit, seulement une respiration saccadée, et il sembla à Jim que la poitrine de Spock se soulevait d'une façon de plus en plus erratique.

« Hé. » Jim se pencha, fronçant les sourcils avec inquiétude. « Hé, qu'est-ce qu'il y a ? »

« T-tu… » dit Spock, et c'était à peine une exhalation, un son soufflé. « Tu, Jim, t-t'hy'la, ashaya, slor-veh, ashalik, t'hy'la, t'hy'la… » Il semblait implorer, supplier, mais de quoi Jim ne le savait pas.

« Hé, hé, » murmura Jim, essayant de l'apaiser, et se demandant s'il devrait rappeler McCoy ou non s'il faisait empirer l'état de Spock. Le seul mot qu'il comprenait en dehors de son nom était 'tu', qui voulait [ndt : aussi] dire 'tu' en Vulcain mais il n'avait aucune idée de ce que Spock essayait de lui dire d'autre, de ce que Spock demandait. « Spock, qu'est-ce que – tu veux que je m'en aille… ? »

La réaction de Spock fut immédiate ; il se déchaîna, avec une rapidité violente, et agrippa le cou de Jim, son pouce se pressant à l'endroit délicat au-dessus de la pomme d'Adam de Jim.

« Non. S'il te plaît. »

Il relâcha son emprise une seconde plus tard et Jim toussa et postillonna, choqué.

« Qu – qu'est-ce que… ? Qu'est-ce que Stavok t'a fait ? »

Jim s'était attendu – à beaucoup de choses ; avait imaginé un nombre impressionnant de réponses et de scénarios après cette question pendant le peu de temps qui s'était écoulé depuis son réveil. Aucun d'eux n'incluait ce qui se passa réellement.

À savoir Spock sautant du lit si vite que c'était flou, jetant sa robe blanche au sol de manière à être nu, puis déchirant la chemise bleu pâle de Jim avec impatience jusqu'à ce que sa peau et celle de Spock se touchent le plus possible.

« Qu – euh – »

L'arrière de ses cuisses heurta le bord du lit et il tituba, puis se retrouva à moitié assis dessus et à moitié tombé alors que Spock fourrait son nez dans son cou et pressait ses mains partout où il le pouvait, passant des hanches de Jim à son dos puis à son visage, et oh, quand elles tinrent ses joues il le sentit comme une pulsation, quelque chose de chaud et d'électrique et de presque mourant qui pressa puis s'introduisit à l'intérieur, une longue poussée de pouvoir mental à l'intérieur de lui –

« Merde, merde, Spock c'est bon, je suis là – »

Il ne comprenait pas ce qui se passait, ne savait pas ce que Spock faisait, pourquoi il avait besoin de ça, mais le goût et la sensation des pensées de Spock étaient plus que désespérés, au-delà de la famine, Spock était carrément dans les vapes, sa main blessée fourrant les bouts sans bandage de ses doigts si fort dans la chair de Jim qu'il pouvait sentir les ongles s'enfoncer.

« T – tu peux prendre, c'est bon, d'accord ? Tu peux prendre ce dont tu as besoin, je suis là, tout va bien – »

Jim connaissait Spock, pouvait déjà anticiper les conséquences que cette fusion mentale allait avoir, mais ils y feraient aussi face, plus tard, à l'heure actuelle Spock léchait et mordillait le dessous de la mâchoire de Jim apparemment pour s'accrocher à lui, parce que sa main non blessée s'était cramponnée au visage de Jim, puis le monde s'éteignit.

L'esprit de Jim est son corps maintenant et il est sans attache, il n'est que conscience, que vaste espace et pensées rapides

Il y a quelque chose de simultanément sombre, abîmé et blessé qui tente de s'enfoncer dans l'esprit de Jim et qui essaie de tout goûter, une sensation qui serait mieux décrite par le mot "lécher", une sorte de chaleur qui lape chaque brin doré de pensée que cette présence qu'est Spock peut trouver

Jim le ressent comme de la chaleur léchant son être, et ne saurait pas vraiment comment le décrire autrement

T'hy'la, ashaya, slor-veh, ashalik –

Je… je ne comprends pas, Spock

Toi, Jim, j'ai besoin – de toi

Qu'est-ce que je peux faire ? Spock, qu'est-ce que je peux faire pour t'aider ?

Il y a un silence (il est absolument impossible pour Jim de dire combien de temps il dure, même le temps semble passer différemment ici, ou peut-être que c'est juste ses sens qui sont complètement déréglés) et les pensées de Spock commencent à se fondre en quelque chose qui ressemble à cette structure complexe qu'elles avaient avant

Il a tenté de couper – il a charcuté et – il souhaitait me détruire et ainsi… il m'a exclu, m'a coupé, mentalement, de… tout. Il m'a enfermé, afin que je sois plus seul que je ne l'ai jamais – mais cela n'importe plus maintenant. Il a cherché le lien dont la perte me blesserait le plus puis il a tenté de le détruire aussi

Un jour, peut-être, dans un futur lointain, des révélations comme celles-ci, des mots comme ceux-là n'apporteront pas à Jim la joie incrédule qu'il ressent maintenant, mais il semble improbable qu'il s'y habitue un jour, qu'il s'y adapte et qu'il le considère comme acquis, ça semble impossible

Alors… alors nous sommes liés

Cela a commencé. Je n'ai pas pu… je n'ai jamais eu le temps d'expliquer, et il n'y avait aucun moyen d'arrêter

Non… Je ne voudrais jamais arrêter ça. Idiot

L'obscurité frissonne, Jim ne sait pas comment formuler ça autrement. Ils sont entrelacés de manière tellement totale, presque comme s'ils se dirigent vers cet état atteint seulement pendant quelques secondes éternelles où Jim ne savait pas qui il était et qui était Spock parce que leurs corps ne faisaient qu'un et, plus important, leurs esprits ne faisaient littéralement qu'un

Il a essayé de briser le lien… mais il n'a pas pu ?

Non

Tu l'as sauvé ?

Non. Il a survécu de lui-même. Il n'avait pas besoin d'être sauvé, il était trop fort. Briser un lien requière le niveau de contrôle télépathique d'un guérisseur, niveau que Stavok n'avait pas

Alors l'attaque elle-même t'a blessé ? Je n'ai rien senti

Et parce qu'ils sont à cet endroit et que la conscience de Spock déborde de partout – saignante, meurtrie, si faible et si affamée – Jim le sent, le saisit, l'espace d'un instant qui suffit à lui faire comprendre

Tu as pris toute la douleur pour toi

Sa colère flamboie dans une langue de feu indignée et même si elle est dirigée vers Spock parce qu'il est stupide et parfait et irresponsable et inconscient, même si la colère est envers Spock et pas pour lui, l'esprit de Spock la désire ardemment aussi, s'y baigne, s'y prélasse

Alors comment te soigner ? Qu'est-ce qu'on doit faire ?

Il te suffit de permettre cette intrusion –

Toi ? Une intrusion ?

- pour que mon état s'améliore. Je peux penser maintenant. Je ne pouvais pas penser tout à l'heure, quand tu t'es évanoui et que j'ai enfin succombé à mes blessures

Alors… tu vas t'en remettre ?

Oui

Je peux faire quelque chose pour aider à accélérer le processus ?

Il se souvient encore de ce moment, juste à l'apogée du plaisir, où tout était un flou indistinct, et Spock prend soin de ne pas répondre

Est-ce que tu penses à ce que je pense ?

Une vague de rire

C'est la connexion la plus puissante

Je… ne sens pas mon corps par contre. Ça pourrait être embarrassant

Encore de l'amusement

La petite vague de joie que ressent Jim en causant cette réaction chez Spock est également instantanément léchée

Il est possible qu'un équivalent mental soit atteint ici… mais cette exploration est pour plus tard

D'accord. Même si je dois dire que ça a l'air d'être un moyen génial d'exercer son cerveau. Mieux que les maths, même

Encore du rire, ou du moins l'équivalent sensoriel…

Et c'est avec l'écho de cette sensation que Jim revint doucement à lui-même, à sentir ses membres et à voir avec ses yeux, à entendre, sentir et toucher les choses.

Des choses comme Spock.

Qui était nu.

« Tu te sens mieux ? » haleta-t-il dans l'oreille pointue de Spock, remarquant que ouais, son corps était sacrément prêt à refaire ce truc de liaison.

« Mieux, » répondit Spock, d'une voix basse et veloutée. Puis il recula pour regarder Jim dans les yeux, mais son regard glissa plus bas apparemment sans qu'il le contrôle consciemment, jusqu'à fixer ouvertement la bouche de Jim. « Mais pas tout à fait remis. »

Jim pouffa un peu et effleura l'érection de Spock des doigts, faisant tressauter en avant les hanches de Spock. « Je peux arranger ça, » dit-il d'un ton suffisant.

« S'il te plaît. »

Et d'accord, ces trois syllabes vulnérables étaient le truc le plus sexy que Jim avait jamais entendu.

« Aucun de nous deux n'est en position de faire quoi que ce soit de très athlétique – » commença-t-il, et il remarqua la façon dont Spock se soutenait, en empoignant le bras de Jim avec sa bonne main et en reposant la main blessée sur le lit derrière Jim. « Surtout toi. »

Spock grogna, secouant la tête. « S'il te plaît. Peu m'importe comment, mais s'il te plaît. »

Jim gémit. « D'accord, merde, d'accord mets-toi sur le lit et contente-toi de – ne – essaye de ne pas me tuer avant que ce soit fini. »

Spock s'exécuta immédiatement et Jim se mordit l'intérieur de la joue. Spock était tout en surfaces de peau blanche qui luisaient de cet éclat de sueur avec un verdissement qui lui donnait l'air plus en forme sur les joues et le nez oh et il était aussi tout ce que Jim avait toujours voulu.

« Bordel, un jour je me régalerai à prendre des heures pour te disséquer, » déclara-t-il d'une voix rauque.

Spock enroula ses doigts autour du drap et courba un peu le dos, comme si les mots eux-mêmes agissaient comme un contact. « S'il te plaît, » souffla-t-il encore.

Jim ne perdit pas plus de temps à parler.

ooo

« Je vais pas demander, » fut la première chose que McCoy annonça une fois que Jim l'eut rappelé, au bout d'un laps de temps considérable. « Donc n'hésitez pas à prendre ça comme ma façon de dire qu'il n'est absolument pas nécessaire que vous m'offriez la moindre information. »

C'était une déclaration totalement injustifiée parce que Spock était sur le lit avec sa robe blanche, et que Jim ne faisait que se tenir à côté de lui, parfaitement innocemment (peut-être si on ne comptait pas son expression de chat-qui-a-mangé-le-canari-et-aussi-peut-être-tous-les-autres-oiseaux-dans-un-rayon-de-cent-mètres).

« Je peux vous assurer que cela n'arrivera jamais, docteur. »

« Je… ne peux pas. »

Spock lança un regard désapprobateur à Jim et ce dernier haussa les épaules. « J'aime torturer Bones. Ça me rend heureux. Ne me dis pas que tu ne connais pas ce sentiment. »

Cela sembla radoucir Spock. « Je ne le connais pas personnellement, cependant je suppose que l'irritabilité et la haute susceptibilité du docteur sont à leur manière une source amusante de – »

« Hé ! »

« Ouais bien sûr, parce que c'est pas comme si tu ne passais pas ton temps à l'embêter – »

« Si mes remarques sur sa conduite émotionnelle sont d'une quelconque manière perçues comme – »

« D'accord, d'accord, donc Spock est revenu à la normale, merveilleux, » dit McCoy d'une voix forte, démentant ses paroles avec sa mine boudeuse. « Est-ce qu'on est sûrs qu'il est hors de danger ? »

« Ouais. » Jim sourit. « Il aura encore besoin de se remettre un moment, mais il est hors de danger. Il s'en sortira. »

« Jim a accepté de m'assister dans le processus de guérison, » dit Spock, avec un sérieux parfait. Jim émit un reniflement moqueur et McCoy eut l'air un peu perdu.

« D'a…ccord. Eh bien, c'est super, si vous êtes sûrs, je vais avoir besoin de le scanner moi-même bien sûr et j'aimerais quand même le garder en observation – »

« Ça ne sera pas nécessaire – »

« - mais j'imagine que vous allez tous les deux être stupides et ne pas vous embarrasser avec ça. »

« Tout juste, Bones, » complimenta Jim.

C'est à ce moment-là que McCoy remarqua quelque chose de plutôt notable. « Attends, pourquoi ta chemise est déchirée… ? Non. » Il secoua fermement la tête, et se marmonna à lui-même : « Non. Je ne veux pas savoir. »

Jim croisa les bras sur sa poitrine et continua à sourire, ayant l'impression qu'il n'allait jamais arrêter. Il prit une inspiration et essaya d'être désinvolte. « Donc j'ai besoin de vêtements – »

« Oui, oui, j'ai demandé à une assistante de te les apporter, de vous les apporter à tous les deux. »

« Wow. Tu as vraiment fait confiance à mes capacités de guérison là, Bones. »

« C'était juste au cas où. Tu ne vas pas en faire un procès. »

« Je suis déjà occupé par le mien, désolé. »

Ils échangèrent un sourire puis Spock demanda à McCoy de leur apporter leurs uniformes.

« On peut utiliser la douche sonique ? » demanda Jim. Une expression de pure terreur traversa les traits du médecin avant que Jim ne puisse plus retenir un éclat de rire. « Séparément, Bones, enfin ! »

« Oh. »

« Il n'y a pas assez d'espace dans les cabines de l'infirmerie pour les activités que vous vous imaginez certainement, » fit remarquer Spock.

Charmant.

McCoy le scanna à une vitesse éclair, déclara que l'état de Spock s'était miraculeusement amélioré, et fuit quelques minutes plus tard.

« C'était plutôt méchant, » dit Jim avec affection.

Spock le regarda avec un air parfaitement innocent. « Le sens de vos paroles m'échappe, Capitaine. »

« Bien sûr, Commandant. »

Le Vulcain leva les yeux au ciel.

Jim émit un halètement et le pointa du doigt. « Je t'ai eu ! »

« Tu m'as eu ? »

« Ha ! Ça fait une éternité que j'attendais que tu fasses ça. »

Un sourcil fut arqué avec curiosité, et Spock sembla réévaluer la santé mentale de Jim. « Faire quoi ? »

« Cette… cette chose que tu viens de faire. Lever les yeux au ciel. » Jim sourit. « Enfin. C'était génial, t'inquiète. »

Spock le fixa d'un air ahuri. « …Très bien. J'attendrai ton retour de la douche ici, et je partirai une fois que tu auras terminé. »

« Génial. »

Jim cligna des yeux et quitta la pièce, sachant que s'il regardait en arrière il plaquerait sûrement encore Spock sur le lit et ensuite rien ne serait fait.

Oh.

Sans mauvais jeu de mots (1).

ooo

Le trajet jusqu'au bureau d'Emerett commença à ressembler à un exploit impossible à accomplir vers la cinquième fois qu'ils furent arrêtés en chemin par quelqu'un qui les reconnaissait.

Heureusement, la sixième personne ne fut autre que la responsable des communications de Jim elle-même.

« Kirk ! Spock ! » Uhura sourit joyeusement et prit Jim dans ses bras, souriant encore plus quand Spock inclina sa tête vers elle. « J'ai reçu un message de Leonard disant que vous avez encore échappé à ses griffes. »

« Leonard ? » dit Jim en haussant un sourcil.

Uhura arqua un sourcil en le regardant. « Vous êtes le seul à l'appeler Bones. » Son expression s'éclaira à nouveau immédiatement cela dit. « J'avais entendu que tu n'allais pas très bien, » dit-elle à Spock. « Contente de voir que ces rumeurs étaient fausses, au moins. »

« Merci, Nyota. »

« Comment va ton bras ? »

« Il y a eu des dommages nerveux, et une perte de sensation extrêmement mineure qui n'entravera en rien mon travail à l'avenir. Autant dire qu'il guérit avec succès. »

Jim fixa Spock, choqué parce qu'il ne le savait pas.

« Tu as perdu des sensations dans tes doigts ? »

« C'est extrêmement mineur, » répéta Spock, ses yeux se réchauffant à l'inquiétude de Jim.

« Je suis désolée de l'entendre, » dit gentiment Uhura, et elle tendit timidement la main pour poser sa paume sur la manche de la chemise bleue de Spock. Spock tourna le même regard chaleureux vers elle et ne commenta pas le contact.

Jim se sentait suffisamment magnanime avec l'affection de Spock à ce moment-là pour ne pas être dérangé par la perte de l'attention de Spock. Pas trop.

« Et vous, Kirk, » Son ton était redevenu léger et joyeux mais quelque chose dans les yeux d'Uhura fit tressaillir un peu Jim. « Vous allez mieux, aussi ? »

« Euh… oui ? »

« Peau guérie, poumon réparé, genou remis en place ? »

« …Oui. »

« Pas de douleur ? »

« Nope. »

« Bien. » Puis elle le gifla.

C'était une claque spectaculaire faite pour être bruyante et pas pour blesser, mais Jim glapit quand même.

« Aïe ! »

« Est-ce que vous avez la moindre idée de ce qui s'est passé quand les comms ont été éteints ? »

« C'est quoi ce délire, Uhura… ? »

Les yeux d'Uhura lançaient des éclairs. « Je comprends que vous ayez votre complexe du héros, Capitaine, vraiment. Je comprends que vous aimiez Spock et que l'idée qu'il soit en danger vous transforme en idiot surprotecteur, ça nous arrive à tous. Mais si jamais, et je parle pour tous les membres de votre équipe de commandement quand je dis ça, si jamais vous refaites un truc aussi crétin, insouciant et stupide que ce que vous avez fait hier je vous botterai le cul si fort que vous sentirez ma botte dans votre gorge, c'est clair ? »

Sa voix avait monté en volume jusqu'à résonner dans le couloir vide.

« …Désolé. » Il ne savait pas quoi dire d'autre. « J'ai vu une fenêtre d'opportunité, je devais – »

« Y sauter les yeux fermés en espérant que ce ne serait pas une chute de cinquante étages ? »

« …Quelque chose comme ça. » Jim lui sourit timidement et Uhura haussa le menton avec défiance.

« Je ne regrette pas de vous avoir giflé, » dit-elle. « Vous le méritiez. Nous avons envoyé quelqu'un vous chercher à la seconde où les comms sont morts et vous aviez juste disparu. Tout le monde était malade d'inquiétude. Vous auriez dû voir la tête du Dr. McCoy, nous n'avions aucune idée de ce qui s'était passé. »

Jim tressaillit avec culpabilité et fit de son mieux pour changer de sujet.

« Euh, comment vous avez compris, alors ? Que Stavok avait le contrôle des ascenseurs ? »

D'un accord tacite, ils commencèrent tous les trois à marcher jusqu'à l'ascenseur le plus proche, qui était juste après le tournant.

« Eh bien, c'était un travail d'équipe, » admit Uhura, le regardant encore en plissant les yeux. « Chekov, Scotty et leurs hommes sont arrivés au bureau à peu près cinq minutes avant le chaos avec le système de comm et ils nous ont dit qu'ils vous avaient parlé. »

Jim acquiesça, se souvenant de cet appel frénétique.

« Tout le monde lançait des théories en l'air, vous aviez disparu donc soit ils vous avaient enlevé aussi soit vous vous étiez mis en danger d'une manière ou d'une autre en trouvant avant nous – » Elle lui lança un autre regard accusateur, « - et, je crois que c'était Sulu, quelqu'un a parlé de l'alerte jaune, du fait que ça voulait dire que les turboascenseurs passaient en manuel donc si vous en utilisiez un on serait dans le noir pour vous trouver. »

Elle appuya sur le bouton d'appel de l'ascenseur en parlant.

« Et tout a fait sens en quelque sorte. Pourquoi ils avaient pris Spock à la base, pourquoi ils avaient besoin de l'alerte jaune pour ne pas se faire remarquer. Il y avait une liste très courte d'endroits d'où Stavok aurait pu contrôler toute l'opération, et la salle d'embarquement était simplement le choix le plus, hum, logique. »

« Ont-ils réussi à désactiver les charges explosives ? » demanda Spock.

« Des mini-réacteurs d'antimatière, en fait. Et oui. »

Le turboascenseur arriva et ils entrèrent.

« Donc… quoi de neuf ? »

« Eh bien, surtout un retour à la normale, je dirais. Scotty est devenu un dieu pour les ingénieurs à ce stade ; je traînais avec lui hier soir et… » Elle sourit, un petit sourire pour elle-même, repensant peut-être à un bon souvenir. Jim en prit note et garda ce geste en tête pour potentiellement la taquiner plus tard. « Ouais, nous allons laisser quelques cœurs brisés derrière nous, c'est tout ce que je dirai. »

« Quand est-ce qu'on part ? Vous savez ? »

« Dans deux jours. Le verdict a été repoussé à demain, donc. »

Jim se figea. « Donc on est sûrs que le procès est toujours sur les rails ? »

Uhura leva tristement les yeux vers lui. « Oui. On espérait tous un pardon ou quelque chose, je… je suis désolée. »

Spock croisa le regard de Jim avec un petit hochement de tête résigné. Ils avaient été tellement heureux depuis qu'ils s'étaient réveillés. Tout avait semblé trop beau.

Voilà ce qui manquait alors.

« Je dois dire que cette fille, Mara Dalle, s'est très bien occupée des officiers scientifiques qui ont pleurniché parce que leur serre a été saccagée, » avança Uhura pour briser le silence, une seconde avant que les portes ne s'ouvrent.

Jim grimaça et sortit dans le couloir. « Oups ? »

« Ouais, oups est le bon mot. Vous croyez que je plaisante ? Il y avait un homme adulte là-bas ce matin qui avait littéralement des larmes sur les joues. »

À ces mots, Jim ne put retenir un petit sourire. « Vous n'êtes pas sérieuse. »

« Oh mais si. » Uhura lui rendit son sourire, mais Spock se tendit.

« Ils ont clairement des réactions émotionnelles très fortes à la perte de leurs recherches. Il serait poli de les laisser faire leur deuil. »

« Oh, toi aussi tu es triste pour les plantes ? » taquina Uhura.

« Bien sûr que non. Cependant cela représente un contretemps potentiellement significatif. »

Ils avaient atteint les bureaux d'Emerett.

« Alors… merci pour le rattrapage, Uhura. »

« Pas de problème. Je vais voir les gars, leur dire que vous allez bien. »

« Ça nous ferait plaisir. »

Elle partit avec un petit signe de la main.

« On y va ? » demanda Jim, sur le point d'entrer le code d'entrée. Mais Spock l'arrêta avant qu'il le puisse. Son expression était totalement indéchiffrable, et Jim en fut confus, puis inquiet.

« Qu'est-ce qu'il y a ? »

Puis Spock soupira, et il paraissait… en souffrance ?

« De l'autre côté de cette porte se trouve quelqu'un que nous connaissons. »

« Hum… le Commodore ? »

« Il a de la compagnie. »

« …D'accord, tu as attisé ma curiosité. »

« Ce n'est pas – tu verras bien. Je souhaitais seulement t'informer d'autre chose, d'abord. »

« D'a-d'accord. » Jim était très confus à ce stade. « Et qu'est-ce que tu veux me dire avant qu'on voie cette personne mystère ? »

« Il s'agit… » Spock leva les yeux vers Jim par-dessous ses cils, et le souffle de Jim pourrait bien s'être bloqué dans sa gorge. Peut-être. « Il s'agit du sens du mot t'hy'la. »

Oh.

« Oh. »

« Pour être plus précis ; le mot lui-même a trois sens possibles, qui peuvent également tous être complémentaires, et je souhaite te les expliquer parce que j'estime que tu mérites de savoir. »

Jim acquiesça. Il savait qu'il y avait souvent ce genre de confusion linguistique en Vulcain, surtout pour les mots qui avaient un sens émotionnel, ces choses-là étant déjà ambigües à la base.

« Il représente ce que tu… si tu n'y vois pas d'objection, c'est comme cela que j'aimerais t'appeler. »

Jim sentit son visage se réchauffer et espéra qu'il ne rougissait pas. « Uhm. Continue. »

« Il peut vouloir dire ami… » Spock inclina un peu la tête vers Jim. « Il peut vouloir dire frère… » Jim haussa les sourcils. « Et il peut aussi vouloir dire amant. »

Spock détourna les yeux de lui, son regard glissant vers un point au-dessus de l'épaule de Jim.

« Je ne… Je ne trouverais pas suffisant de t'attribuer seulement l'un des sens, de ce fait j'aimerais – si tu ne t'y opposes pas – j'aimerais utiliser les trois. »

Jim se rendit compte que sa bouche était ouverte en forme de "o" béant et la ferma.

« Je… ouais. Je veux dire, j'aimerais bien. C'est… c'est un super mot. Merci. Je veux dire, je – »

Les joues de Spock étaient aussi d'un vert douteux.

« Très bien. Dans ce cas c'est… c'est tout. »

« Oh. Bien. Très bien alors. »

« Oui. »

« Bien. »

Ils restèrent tous deux silencieux pendant un long moment.

« Alors on devrait sûrement entrer. »

« En effet. »

Rougissant toujours furieusement, Jim entra le code.

Les portes s'ouvrirent, et il sembla que cette journée était loin d'avoir fini de surprendre Jim.

« Bon Dieu de – Spock ! »

Il émit un cri de joie et courut à travers la pièce, ignorant les trois autres occupants pour regarder bouche bée l'Ambassadeur Spock plus âgé en personne.

« J'y crois pas ! »

« Jim. » L'Ambassadeur ne sourit pas tout à fait, mais le geste était implicite d'une certaine manière. Il semblait bien plus à l'aise que la dernière fois qu'ils avaient parlé, lorsqu'il avait appelé Jim sur le comm il y avait apparemment une éternité. Spock portait une robe sombre élégante dans la tradition vulcaine, et tenait un datapad dans une main, clairement là pour une raison officielle, non pas que Jim puisse faire l'effort de s'en soucier. « C'est toujours merveilleux d'être en votre présence. »

Jim baissa la tête, brusquement embarrassé. « Je – euh, merci. »

« Je vous en prie. »

Le visage ridé de Spock se réchauffa d'affection, et son regard papillonna entre Jim et Spock un instant, attentif et aiguisé, impliquant clairement que rien ne lui échappait. Merde alors, il avait dû voir… il devait avoir un moyen de sentir le lien.

Et soudain une évidence frappa Jim comme une massue ; à quel point il avait été totalement aveuglé par son propre bordel de problèmes incroyables pour ne jamais se demander si ce Spock et son Jim avaient jamais formé un lien, ou avaient jamais, euh, fait d'autres trucs ensemble.

« Ambassadeur, » dit une voix tendue et sèche derrière Jim.

Jim se tourna pour regarder Spock, son Spock, qui regardait son homologue plus âgé avec une expression réservée, presque froide, et qui semblait incapable de penser autre chose que : il y a deux Spocks dans une seule pièce. Bon sang, c'était comme recevoir le commandement de l'Enterprise et son diplôme en même temps ; son cerveau pourrait bien exploser à cause de cette overdose de génialitude.

« Commandant, » répondit le Spock plus âgé, les yeux brillants d'amusement. La différence entre les deux était frappante, et n'avait rien à voir avec les rides sur le visage de l'autre Spock.

« Capitaine, commodore, avocat, avocat, » dit une voix narquoise sur la gauche, et Jim se tourna pour fixer M. Moss, dont il ne réalisait la présence que maintenant, tout comme celle du Commodore Emerett et d'Areel Shaw. « Ça vous dérangerait de repousser les retrouvailles à plus tard ? Nous étions juste en train de parler de quelque chose de très important. »

« Une seconde. Comment êtes-vous arrivé ici aussi rapidement ? » demanda Jim au Spock plus âgé, ignorant Moss.

« Je suis capable de concevoir un vaisseau plus rapide que tout autre dans cet univers, Jim, » répondit Spock. « Je suis arrivé il y a environ une heure. »

Jim sourit. « C'est vrai. Eh bien, vous avez un jour d'avance sur les renforts de Starfleet, on dirait. »

« Il semblerait, en effet. »

Moss eut l'air tellement outragé d'être ignoré qu'il en resta sans voix.

« Hum, réunion très importante en cours ? » intervint Areel, un peu perdue. « Qui vous concerne ? »

« Comment avez-vous su qu'il fallait que vous veniez ici, Capitaine Kirk ? » demanda Emerett.

« Oh, je n'avais aucune idée que ça se passait. J'ai juste naturellement un timing génial. »

« Eh bien, vous et votre timing génial devez – »

« Il est en réalité très commode que vous soyez ici, » dit Spock âgé avec un autre regard chaleureux pour Jim. « Je suis venu au nom du Conseil Vulcain afin d'obtenir une explication satisfaisante auprès du Commandement Starfleet, représenté sur cette base par le Commodore Emerett, à propos de l'affaire qui vous concerne, vous et le Commandant Spock. Je dois dire qu'aucune ne s'est présentée pour l'instant. »

« Monsieur, » tenta le Commodore. « Si vous voulez bien – »

« Je parle aussi au nom de l'Ambassadeur Sarek en demandant pourquoi Spock, son fils et un membre exemplaire de l'équipe de l'Enterprise, est apparemment encore accusé de compromission émotionnelle même après qu'il ait été établi que la source de toute cette aventure est un Vulcain sévèrement endommagé qui a arrangé les accusations et orchestré ce procès pour servir ses propres fins. S'il souhaite ou non s'engager dans une relation amoureuse avec le Capitaine à l'avenir, je ne saurais le dire, mais si la relation est révélée il n'y a aucune raison de ne pas lui permettre de continuer, en les laissant garder leurs postes respectifs. »

Jim savait que son Spock ne le prendrait pas très bien s'il s'avançait jusqu'à l'autre homme (même si c'était une version plus âgée de lui-même) et l'embrassait sur la bouche, donc il s'en empêcha.

« Et je répète, Ambassadeur, qu'aussi convainquant que puisse être cet argument, cela n'empêche pas que les accusations contre le Capitaine Kirk et le Commandant Spock sont parfaitement authentiques et auraient fini par être portées de toute manière – »

« J'ai aussi été informé, Jim, » continua Spock comme si Emerett n'avait rien dit. « Que votre Premier Officier a été soumis à l'appareil Veritas pour tester la validité de ses réponses sans qu'une véritable étude ne soit menée, sans informer le Conseil Vulcain et même sans son consentement – »

« Ce n'est arrivé qu'une fois – » dit Areel faiblement. « Nous l'avons testé après, ça fonctionnait – »

« Ils n'ont pas produit de résultats adéquats montrant une étude neurologique détaillée, » ajouta le Spock âgé, presque comme s'il confiait un secret. Le sourire de Jim était si éclatant qu'il craignait que quelqu'un attrape bientôt un coup de soleil. « Ils n'ont pas non plus montré la moindre preuve qu'une enquête poussée a été conduite pour examiner pourquoi l'appareil originellement utilisé par la cour s'est allumé seul la première fois, et a scanné M. Spock sans son consentement. »

« Nous n'avions pas le temps, nous étions en pleine crise – »

« Incorrect, la crise a commencé lorsque M. Spock a été enlevé pendant l'énonciation du verdict, un jour plus tard. »

« Je suis de tout cœur en accord avec l'Ambassadeur, » commenta M. Moss. « Au cas où quelqu'un se le demandait. »

« Nous ne nous le demandions pas, » l'informa utilement le Spock de Jim.

« Oh, dans ce cas. »

« Il semble probable que le Vulcain Stavok ait aussi été derrière cet acte de sabotage, donc j'estime qu'il pourrait être utile de simplement délivrer des excuses officielles et d'annuler le procès dans sa totalité – »

« En vérité, après plus amble considération, il semble que non, » interrompit Spock.

« Hein ? » dit Jim.

« Il ne semble pas probable que Stavok soit responsable de l'activation de l'appareil Veritas. »

« Non ? » dit le Spock âgé. « Fascinant. »

Jim regarda l'un et l'autre avidement et fit un pas en arrière. Le Spock âgé avait toujours un air amusé, mais Spock Spock, le plus jeune, était assez crispé ; il se tendait de toute sa hauteur, les muscles figés et la mâchoire juste un tout petit peu en avant, comme s'il luttait contre l'envie de grincer des dents ou quelque chose d'approchant. Jim ne savait pas pourquoi, mais il soupçonnait fortement qu'il comprenait maintenant pourquoi Spock lui avait dit que Jim était son t'hy'la quelques minutes plus tôt, quand il avait senti la présence de l'autre Spock.

« C'est instinctif, ça remonte aux sociétés pré-Surakiennes où les liés étaient choisis par le sang et le sacrifice, » avait dit Uhura.

Bon…

« Cela semble plutôt en contradiction avec le plan de Stavok, » expliquait Spock. « Bien sûr, s'assurer de mon humiliation était un plus durant tout le procès, mais ne valait pas la peine d'être activement recherché en prenant le risque de pirater un appareil Veritas aussi bien protégé et aussi souvent entretenu que celui du tribunal de la base. »

« Un raisonnement valide, » concéda l'autre Spock.

« Mais… » Jim fronça les sourcils. « Si ce n'est pas lui, qui ? Je veux dire, je ne comprends pas. »

« Il y a un phénomène que j'ai détecté qui a commencé avant que Stavok soit arrivé sur la base, Capitaine. »

« Attends, quoi ? Quel phénomène ? » demanda Jim, se sentant trompé. C'était lui qui trouvait les phénomènes. C'était lui qui était malin.

« Il y a eu un nombre croissant d'incidents… de rumeurs, si vous voulez, nous concernant depuis que nous sommes arrivés. »

« Ben, ouais, je veux dire, il fallait s'y attendre, non ? »

« Pas à cette échelle. Les témoignages ont tous été rapportés par des sources fiables, ils ont atteint le Commodore, M. Moss, la presse, et à travers eux la plus grande partie de la Fédération. Il semblerait que ce soit une tentative délibérée, même si insignifiante, de nous discréditer davantage. Stavok avait des objectifs clairs qu'il a failli atteindre par la ruse et la manipulation. Ceci semble plutôt caractériser une personne qui voudrait infliger des dommages personnels et émotionnels, puisqu'elle a programmé l'appareil Veritas en espérant que je n'y serais pas immunisé, sans moyen de le tester avant. Je pense que Stavok n'aurait pas fait cela. Il semblait considérer les effets secondaires produits par le procès comme un plus inattendu, rien de plus. »

Jim essaya de se souvenir… et il semblait effectivement que le nombre de fois où lui et Spock avaient été soi-disant repérés en train de faire des choses indécentes dans des turboascenseurs était anormalement élevé. Peut-être qu'il n'avait pas prêté attention au nombre d'occasions où quelqu'un leur avait dit qu'ils auraient été vus.

« Il me semble plus concordant que quelqu'un qui travaille à la base ait manipulé l'appareil Veritas, puisqu'il ou elle y aurait plus facilement accès qu'un journaliste, et serait aussi responsable des rumeurs qui ont commencé avant l'arrivée de Stavok. »

« Avez-vous un suspect en tête, alors ? » demanda le Spock plus âgé avec curiosité.

« Oui, » dit Spock.

« Vraiment ? » interrompit Emerett. « C'est l'un de mes hommes ? »

« Oui, bien sûr. » Spock jeta un bref coup d'œil à Jim puis se tourna vers Emerett en carrant légèrement les épaules. « Ben Finney. »

Jim… n'était pas surpris.

« Cet homme a-t-il un mobile ? » dit le Spock plus âgé.

Spock regarda Jim. « Oui. »

Jim souffla. « Il travaille au département scientifique. Et il ne peut pas me saquer. »

« Ah oui ? » dit pensivement le Spock plus âgé. « J'ai rencontré un Ben Finney qui avait autrefois beaucoup aimé Jim. »

La façon dont il prononça ces mots créa un poids désagréable dans le ventre de Jim, parce qu'à cet instant lui et 'Jim' étaient des concepts totalement séparés, et les mots de l'Ambassadeur résonnaient lourdement.

« Attendez une seconde. Ben Finney ? Mais il – » Emerett sembla être sur le point de dire quelque chose avec agacement, puis son visage devint pensif. « Je… hm. Je vois. Laissez-moi quelques heures pour me renseigner. »

« Est-ce qu'il vous a dit quelque chose ? » demanda Jim.

Le Commodore soupira, et ne répondit pas. « Laissez-moi quelques heures. Je vais bel et bien enquêter là-dessus, je peux vous l'assurer, mais c'est une affaire interne, et elle ne vous concerne plus, Capitaine Kirk. S'il est découvert qu'il est responsable, M. Finney en verra les graves conséquences. Maintenant, concernant le procès, je suis désolé, mais vous ne pouvez pas être ici pendant cette discussion. »

« Nous allons parler de la loi, vous ne comprendriez pas, » commenta Moss depuis son siège. Areel étouffa un ricanement.

Les blagues d'avocat. Franchement.

Jim leva les yeux au ciel. « Très bien, on s'en va. » Il sourit au Spock âgé une dernière fois. « À plus tard ? »

« C'est certain. »

« Au revoir, » dit le Spock jeune avec insistance. Jim se retint de lever encore les yeux au ciel dans un laps de temps si court et conduit son Premier Officier à l'extérieur.

« Tu as de la chance que ton toi plus âgé soit aussi fair-play avec ton comportement, » commenta-t-il à la seconde où il fut certain qu'ils étaient hors de portée d'oreille vulcaine.

Spock n'essaya même pas de faire semblant de ne pas savoir ce dont Jim parlait.

« Lorsqu'il te regarde il aimerait voir quelqu'un d'autre. »

Le commentaire faisait mal, mais ce n'était rien de nouveau pour Jim. Et il n'en avait jamais voulu au Vulcain. « Ouais, mais… il est tout seul, Spock. Je crois que l'autre lui manque. L'autre moi. Son moi, en tout cas. »

« Oui, il te l'a bien fait comprendre, et sa peine est réellement… profonde. Je ne le lui reproche pas. » Spock n'exprima pas à voix haute le fait qu'il serait un jour forcé de vivre une situation similaire ; que leurs espérances de vie différentes, si ce n'était pas autre chose, s'en assureraient.

« Alors pourquoi ça te gêne autant ? »

« Tu as vécu toute ta vie dans une ombre similaire, » dit Spock sans ménagement. « Tu m'en as parlé en rapport avec tes pairs, avec Christopher Pike ; même, parfois, avec ta mère. Et maintenant il s'ajoute aux nombreuses personnes qui… Je ne peux pas comprendre pourquoi quiconque souhaiterait que tu sois autre chose que ce que tu es. »

Les pas de Jim se firent hésitants, et il fixa l'arrière de la tête de Spock.

Bon.

Il ne s'attendait pas à ça.

« D'accord. »

Spock se retourna et haussa un sourcil. « …"D'accord" ? »

« D'accord, je comprends mieux maintenant. Je ne peux pas dire que je suis d'accord, mais je comprends. »

Spock le regarda avec attention. « Merci. »

« Euh. Merci à toi, j'imagine. »

Au bout d'un court silence, Spock dit ; « Devrions-nous contacter le Lieutenant Uhura et retrouver le reste de l'équipe ? » C'était un changement de sujet radical et absolument pas subtil, mais enfin Jim présumait que ce n'était pas voulu.

« Tu te sens d'humeur ? » Jim adressa un sourire lubrique à un débarras qu'ils venaient de dépasser. « Ou tu as besoin d'une autre dose ? »

Les yeux de Spock réagirent en s'éclairant, mais l'éclat était sombre et engageant.

« Je vais bien, pour l'instant. Avez-vous l'intention de faire souvent cette suggestion, Capitaine ? »

« Ça devient une habitude, hein ? »

« Ce serait… peu pratique. Parce que contre-productif. »

Jim s'approcha un peu (pas de manière inappropriée, mais peut-être un peu plus près que nécessaire) et prit note de la petite inspiration de Spock.

Puis il eut pitié de lui. « D'accord, je promets d'être sage quand nous serons en service. » Il sourit. « Mais tu devrais aussi. »

Spock haussa un sourcil. « Il semble à juste titre plus urgent que tu tiennes ta promesse plutôt que je tienne la mienne, étant donné que mon professionnalisme naturel – »

« Oh ne crois pas que je ne le sais pas quand tu fais ton truc aguicheur. Ça ressemble peut-être à du "professionnalisme naturel" pour les autres mais je suis pas dupe. Donc ne te penche plus sur ta console alors que tu pourrais juste t'asseoir et regarder, comme les autres. »

« Je vois. Dans ce cas je te demanderais de… » La voix de Spock s'interrompit un instant, et ils continuèrent à marcher mais l'ambiance de la conversation devenait rapidement sérieuse. « C'est un sujet dont nous devrions discuter sérieusement, » finit-il par dire.

Jim se mordit la lèvre inférieure, la légèreté de cet instant le quittant. « Ouais. » Ils ne savaient toujours pas ce qui arriverait, mais si l'Ambassadeur Spock les aidait d'une manière ou d'une autre, si Moss réussissait à sauver leurs carrières… que se passerait-il ? Se voir en douce pourrait durer un mois, maximum, et ensuite ces choses finissaient toujours par se savoir. C'était suffisant pour leur valoir une mutation forcée, et une Cour Martiale qui durerait une journée tout au plus.

Techniquement, s'ils expliquaient leur situation après avoir été innocentés, ils ne transgresseraient aucune règle, mais Jim ne pensait pas que quiconque à l'Amirauté serait content de découvrir que pendant tout ce temps il y avait eu quelque chose (ignorance des parties concernées mise à part).

« On devrait en parler à Pike, » songea-t-il. « Il aura peut-être de bons conseils. »

« Tu… souhaites lui parler de notre lien. »

« Oui. Je pense… Je veux dire, il a déjà dit qu'il était de notre côté. »

« En effet. »

« Et ton toi plus vieux est déjà au courant, clairement. »

« Oui. »

« On ne peut pas s'en sortir seuls. Je pense qu'on devrait aussi le dire à nos amis. Bones et Uhura savent, mais Sulu, Chekov et Scotty… eh bien, si on est réaliste ils le savent sûrement aussi, mais je veux le faire quand même. »

Spock eut l'air pensif pendant un instant, puis hocha la tête une fois. « Oui. Je suis d'accord. »

« Bien. Alors que le spectacle commence. »

ooo

Ils se réunirent avec la plupart des membres de l'équipage de l'Enterprise et toute l'équipe de commandement, ainsi que la plupart des amis qu'ils s'étaient faits sur la base, dans la cantine du pont 7, là où ils avaient rencontré Moss pour la première fois. C'était bruyant et bondé, et Jim et Spock furent tout de suite séparés, engloutis par l'attention qu'ils suscitaient et essayant de tenir plusieurs conversations à la fois.

McCoy et Sulu s'étaient instantanément placés aux côtés de Jim, et Uhura et Chekov se tenaient près de Spock. Scotty était lui-même entouré d'un groupe de fans, bien qu'il ait traversé la foule pour prendre Jim dans ses bras d'un air bourru dès qu'il l'avait vu. Et c'était super. Chaotique et amusant et merveilleux, et bien qu'une partie de Jim voit ça comme le calme avant le foutoir du lendemain, il l'ignora.

« Donc ils l'ont enfermé dans les cellules du pont 16, un copain à moi travaille à la sécurité là-bas – »

« Mec, je connaissais cette Leila, elle avait l'air tellement normale – »

« Racontez-nous comment vous avez trouvé M. Spock ! »

« Jim, est-ce que c'est vrai que Stavok t'a tiré dessus avec un phaser modifié ? »

« Au genou ? »

« Ah ouais, ils vont vraiment faire venir quelqu'un de Starfleet pour reprogrammer le programme de localisation et retoucher les mesures de sécurité. »

« J'ai entendu des rumeurs – ma copine est technicienne au quai d'embarquement, elle dit que ce vaisseau super bizarre est arrivé il y a quelques heures, avec un Ambassadeur vulcain ! »

« C'est tellement injuste que ce procès soit encore d'actualité. »

Cette dernière phrase, dite calmement à l'oreille de Jim, venait de Mara Dalle.

Elle lui adressa un faible sourire et un haussement d'épaules. « Tout le monde au département scientifique a été énervé de l'entendre. »

« Enfin, au moins tout sera terminé demain. »

« Mais vous ne méritez pas ça. »

McCoy, qui se tenait juste derrière elle, fronça les sourcils. « C'est ce qu'on dit depuis le début, petite, mais la vie est injuste. »

« Oh je le sais bien. » Le sourire de Mara devint plus sincère. « Je suis juste désolée parce que c'est vraiment con. Vous deux, ensemble, c'est juste… c'est juste comme ça que ça devrait être. »

« Euh… » Jim n'avait pas manqué la façon dont ses yeux s'élargirent de manière significative, essayant clairement de faire passer les sous-entendus évidents de la conversation.

« Les gens ne devraient pas s'en préoccuper du moment que vous faites votre boulot comme ça a été le cas jusqu'ici. »

« Merci, Mara. »

« Hé, je parle pour nous tous, ce n'est pas juste – »

« Attends. »

Jim avait juste jeté un œil par-dessus l'épaule de Mara pendant un instant quand il vit une silhouette bleue qui essayait de prendre la sortie.

C'était Ben.

« Hé ! » En criant avec colère, Jim se fraya un chemin à travers la foule et le poursuivit. « Ben ! »

Ben s'arrêta avec réticence dans l'entrebâillement pour se retourner vers la pièce, l'air défensif et prudent. « Quoi ? »

Le silence s'était abattu sur la pièce à une vitesse alarmante.

« J'ai entendu parler de ta petite campagne, » dit Jim, se fichant que tout le monde l'entende. « Tu as été un sacré voyeur ces dernières semaines, hein ? »

Quelque chose passa sur les traits de Finney, le trahissant instantanément, mais il croisa les bras sur sa poitrine. « De quoi tu parles ? »

« C'est juste qu'il y a énormément de gens qui semblent penser que Spock et moi avons un goût assez prononcé pour l'exhibitionnisme. Et, bizarrement, on dirait que tout vient de la même personne. » Quoi ? Il avait le droit de tricher.

« …Quoi ? »

« Ne fais pas l'ignorant. »

Il avait atteint l'espace vital de Ben et l'envahit sans scrupule. « Tu pensais vraiment t'en sortir en truquant l'appareil Veritas ? Être une petite garce geignarde n'a rien d'illégal, Finney, mais allumer cette chose au cas où elle marcherait sur Spock ? C'est plutôt grave comme délit. »

« Tu crois que c'était moi ? » Il n'était pas mauvais acteur, mais il n'était pas assez bon pour avoir l'air innocent non plus. Jim renifla avec mépris.

« Je sais que c'était toi, enfoiré. »

« Et qu'est-ce que tu me fais, là ? Tu me fais face maintenant qu'il y a trente personnes pour te soutenir ? »

« Je suis plutôt certaine qu'il pourrait te botter le cul sans notre aide, » fit la voix d'Uhura derrière Jim. « Mais on serait heureux de participer, ouais. »

« C'est entre moi et Kirk, chérie. »

« En fait, pas du tout. » À la surprise de Jim, c'est Lucas Dalle qui dit ça. « C'est vrai que tu as saboté le procès, Ben ? »

« Bien sûr que non. Capitaine Joli-Cœur ici présent vous fait tous manger dans sa main et vous croyez tout ce qu'il dit. Eh ben, va te faire foutre, Kirk, je n'ai pas à rester là à écouter ces accusations – »

« Tu as essayé d'humilier mon premier officier et tu aurais même pu mettre sérieusement en danger nos deux carrières. » L'acier dans le ton de Jim relevait presque entièrement de sa voix de Capitaine. « Si tu crois que je vais te laisser t'en sortir, tu es vraiment plus stupide que je le croyais, et c'est dire. »

« Qu'est-ce que tu vas faire ? Demander à ton petit ami hybride de me botter le cul ? »

« Je pensais qu'on avait déjà dit que je pouvais faire ça moi-même. »

« Oh pitié, ne me dis pas que tu n'aimes pas qu'il soit plus fort que toi. Tu crois que je ne m'en souviens pas ? » Un souvenir laid de Ben lui tenant les poignets au-dessus de la tête fit grimacer Jim. « Je parie que c'est pour ça qu'il te faisait autant baver. Parce qu'il est censé être trois fois plus fort qu'un humain, pas vrai ? C'est parce qu'il est assez sauvage pour te clouer au lit, pas vrai ? »

Jim serra la mâchoire, dégoûté. « Bonne chance pour trouver un boulot après ça, c'est tout ce que je dis. »

« Oh, donc c'est ça ta grande menace ? Que je vais être viré de Starfleet ? »

« Être viré pour indignité, c'est pas tout à fait pareil, je ne crois pas. »

« Non, mais appelle-moi bien quand cette bite verte te manquera et je te rejoindrai sûrement plus vite que lui. Ouais, tu pourrais même te rendre compte que tu es content de t'en être débarrassé. Tu ne te souviens pas, Jimmy ? À l'Académie, quand tu ne te lassais pas de moi ? D'accord, je devais partager avec la moitié du campus, mais je n'ai pas oublié comme c'était beau quand tu suppliais. »

Jim pouvais pratiquement sentir la furie de Spock comme une brûlure sur sa nuque, mais il était incroyablement reconnaissant que son Vulcain le laisse gérer ça. Ben était le combat de Jim, l'avait été depuis le début.

« Je préférerais baiser un Gorn. »

« Ouais, encore cette obsession pour le vert. Je me souviens de Gaila. » Jim serra les poings. Gaila était morte, et Ben la rejoindrait bientôt s'il n'arrêtait pas de jacasser.

« Ne va pas par là, Finney, » prévint-il.

« Oh, tellement sensible. Tu t'endormiras en pleurant quand M. Spock sera à l'autre bout du Quadrant ? »

« Tu n'as vraiment rien d'autre dans la vie pour me consacrer autant de ton temps libre ? Je ne te hais pas, Ben, je veux juste que tu nous laisses tranquilles. »

Finney fit un pas en avant de manière à ce que son souffle se mêle à celui de Jim, les yeux brûlants. Jim entendit du mouvement et sut que Spock avait dû s'avancer, probablement prêt à intervenir au cas où les choses deviendraient incontrôlables, mais toujours sans essayer de se mettre devant Jim. Jim prit cela comme un vote de confiance qui était merveilleusement différent du début, quand ils s'étaient disputés avec Ben pour la première fois et que Spock était passé en mode protecteur sans réfléchir.

« Écoutes-moi bien, maintenant, » gronda Ben, doucement et trop bas pour que quelqu'un d'autre ne l'entende. « Tu es passé devant tout le monde pour arriver là où tu es, tu t'es probablement prostitué pour avoir ce poste, je m'en fiche à ce stade. Maintenant tu vas brûler, et je vais adorer regarder ta vie s'écrouler autour de toi. Tu crois que je ne sais pas que j'ai raison ? Tu crois que tout le monde ne voit pas ce que vous faites avec cet alien ? Parce que moi oui. On le voit tous, et c'est répugnant. Ouais j'ai allumé le détecteur de mensonges, et alors. Personne ne le sait à part nous et il n'y a aucune preuve, donc tu peux me pointer du doigt autant que tu veux. Ça l'a forcé à le dire, pas vrai ? Il l'a dit putain, qu'il t'aime, devant tout le monde. »

« Écoute – »

« Non. Tu vas finir tout seul, comme ton père quand il s'est tué, ton équipage va perdre confiance en toi, et quand tu perdras enfin la grosse tête, tu supplieras quiconque sera prêt à te baiser de te faire oublier ton chagrin de midinette, et peut-être que je te rendrai service et que je t'aiderai, hein ? » Jim serra les poings, se sentant prêt à exploser, prêt à faire quelque chose qu'il n'avait pas fait depuis longtemps. Mais il ne pouvait pas, bon sang, il devait être au-dessus de ça, il devait juste trouver en trouver la force… « Et le robot sans émotions que tu aimes est cassé, au fait. » Ben avait dû sentir qu'insulter Jim ne suffisait pas, et avait changé de tactique. « Il n'est pas humain, mais il échoue même à être un véritable robot sans émotions ! Qu'est-ce qui pourrait être plus triste que ça ? Vous pensez que vous êtes tellement géniaux tous les deux, mais vous êtes tous les deux pathétiques. Il devrait sûrement juste retourner voir sa mère, ah mais j'oubliais – »

Ben ne fut, malheureusement, pas capable de finir sa phrase, en raison de la dent ensanglantée et du gros bleu qui explosèrent sur sa lèvre quand Jim le frappa.

Il avait parlé à voix basse, mais pas assez basse pour l'ouïe vulcaine.

« Aïe ! Enfoiré ! »

Jim contracta sa main, le souffle court. Spock fut instantanément à ses côtés.

« Ce n'était pas très sage. »

« Ouais, je sais. »

« Je n'ai pas été affecté. »

« C'est pas de chance. Moi oui. »

Finney se releva en titubant et pinça son nez qui coulait, qui au second regard avait l'air cassé. « Tu es un putain de psychopathe. Ça ira sur ton dossier. »

Sans donner une chance à Jim de réfléchir à une réplique, il partit en courant, à noter qu'aucun personnel médical ne lui proposa de l'aide bien qu'ils ne soient qu'à quelques mètres.

La porte se referma et Jim se tourna avec précaution vers les spectateurs.

« Euh… »

Ils explosèrent en l'acclamant.

« Bien joué ! »

« Mec, ça faisait une éternité que j'attendais que quelqu'un fasse ça ! »

« Il le méritait complètement ! »

Jim les regarda bouche bée. Uhura applaudissait, et Sulu avait crié triomphalement. McCoy riait.

À côté de lui, les lèvres de Spock se plissèrent avec désapprobation devant cet étalage de sentiments, mais Jim pouvait voir qu'il n'y avait pas de réelle colère derrière ses reproches. La connexion entre eux lui semblait plus forte que jamais.

« Ce n'était pas digne d'un haut gradé, et ça va aller sur mon dossier ! » dit-il fortement, plutôt déconcerté. « Personne ne devrait applaudir ça ! Arrêtez ! »

Les acclamations augmentèrent significativement en volume, menées par les cris de victoire du département d'ingénierie, comme si une grande bataille venait d'être gagnée.

« Les gars, c'était vraiment inapproprié ! Je ne devrais vraiment pas avoir fait ça ! »

« Fait quoi ? » lança quelqu'un.

« Je n'ai pas bien vu ! » dit Chekov. « Vous avez bien vu, M. Scott ? »

« Non ! J'ai l'impression que ce gars est tombé tout seul ! »

« Ouais, je suis assez certaine que personne n'a frappé personne, ici, » participa Mara, l'air enchanté. « Je crois que Finney ment ! »

« Vrai ! »

« Carrément ! »

Jim pensa ; « … tu vas finir tout seul, comme ton père quand il s'est tué, ton équipage va perdre confiance en toi… », et sourit. C'est dans ce moment-là, plus que jamais, qu'il sut que ça n'allait jamais arriver.

Les doigts blessés de Spock effleurèrent le dos de sa main, et Jim se tourna pour le regarder. Le courant qui se pressa contre sa peau était quelque peu étouffé, comme une caresse chaude mais sans la même électricité qu'il avait avant. Clairement le résultat du couteau de Leila, mais rien dans le regard ferme de Spock ne suggérait que ça l'attristait. Il avait l'air confiant et bien.

« Hé. »

Le Vulcain s'écarta un peu, mais ne parla qu'à lui.

« Cela n'a pas d'importance. Quoi qu'il arrive demain, Jim, cela n'a pas d'importance. »

Les expressions de leurs amis allaient de contentes à triomphantes en passant par satisfaites (avec seulement deux reluquages peu subtils, grâce à Mara et à un ingénieur), mais il n'y avait pas l'ombre d'un doute sur le visage de quiconque.

« Ouais. T'as raison. »

ooo

« Nous avons convoqué cette cour pour régler une fois pour toutes une question de grande importance, qui est bien sûr celle des accusations portées contre James Tiberius Kirk et le Commandant Spock. »

Le jury n'était pas assis sur le banc cette fois. Il n'y avait qu'Emerett sur son estrade, marteau en main et visage légèrement renfrogné. Jim et Spock se tenaient côte à côte à la table de la défense, comme toutes les autres fois.

« Pour représenter l'accusation, Areel Shaw, avec comme adjoints Larissa Sommers et Dale M'meh. Pour représenter la défense, Nathaniel Moss, avec comme adjoint l'ambassadeur Spock de Vulcain, aussi connu comme l'ambassadeur Selek. »

Ils n'avaient pas fait entrer que Chekov cette fois ; la salle était absolument pleine de monde, certains étant même debout au fond. Pas de presse, mais tous les autres semblaient avoir essayé de venir, profitant clairement du fait qu'Emerett n'avait pas déclaré que cela faisait partie du vrai procès et que ça ne pouvait donc pas être limité aux participants et/ou à ceux impliqués dans les témoignages.

L'infirmière Chapel, l'infirmière Noel… en fait, on dirait que toutes les infirmières de l'Enterprise étaient là, et quelques-unes de la base. Le Docteur M'Benga se tenait avec D'Ko Han, l'avenante chef de la sécurité, et était peut-être le seul à ne pas regarder devant lui (non pas que Jim puisse lui en vouloir, et Mlle Han ne semblait pas être dérangée). La plupart des ingénieurs, bien sûr. Lucas et ses amis de l'équipe de pilotage. Le département scientifique, mené par Mara. Jim était certain que le tribunal ne lui avait pas paru pouvoir physiquement contenir autant de gens avant.

« Après mûre réflexion, et beaucoup de délibérations au sein du Commandement Starfleet, une décision a été prise qui concerne les deux parties de ce procès et moi-même, le Commodore Emerett, en tant que représentant du Commandement Starfleet sur cette base.

« Nous avons pris en compte les évènements des derniers jours, ainsi que les agissements du Capitaine Kirk et du Commandant Spock pendant cette période. Nous avons aussi pris en compte les circonstances fâcheuses qui ont mené à ce procès. »

Jim aurait voulu qu'il en vienne au fait, bordel.

« De ce fait, je déclare par la présente le Capitaine James Kirk et le Commandant acquittés, et que cette affaire ne soit pas – »

Ses derniers mots furent noyés alors que la foule se déchaînait assez littéralement.

Jim fut pris par les épaules et tiré de sa chaise par McCoy, Scotty, et d'autres gens qu'il ne pouvait pas voir parce qu'il avait été tiré de sa chaise, et il y eut des acclamations, tellement d'acclamations en si peu de temps, ses oreilles sonnaient déjà et ça avait l'air d'être parti pour un moment, tout le monde s'était précipité et avait totalement envahi les premiers rangs, l'espace autour de leur bureau ; il fut embrassé sur la bouche par Mara Dalle – puis rapidement arraché de ses bras par sa responsable des communications.

« Capitaine ! » Uhura l'embrassa aussi, mais sur la joue, et il y avait une larme qu'elle nierait éternellement au coin de ses longs cils. « Vous avez réussi ! Vous avez gagné ! »

Jim la souleva dans les airs et rit, puis se tourna pour regarder son premier officier.

Personne n'avait attrapé Spock par les épaules, bien sûr, mais il avait l'air de faire quand même partie de la fête, les yeux brillant d'un triomphe évident aux yeux de tous, et une grande partie du département scientifique se bousculait pour se tenir juste à l'extérieur de sa bulle d'espace personnel.

Jim voulait se frayer un chemin jusque là-bas, voulait jeter ses bras autour de Spock, peut-être le bécoter bien comme il faut en public pour une fois, mais… ça pourrait, peut-être, ne pas être la meilleure chose à faire maintenant. Mais ce n'était pas grave. Ça pourrait venir plus tard.

Au lieu de ça il se contenta de faire son sourire le plus éclatant et de lever la main, comme pour la tendre vers le Vulcain. Spock croisa instantanément son regard, comme s'il avait senti que Jim le regardait, et leva aussi la main, et deux de ses doigts étaient tendus, et c'était comme un baiser.

T'hy'la, avait dit la voix dans sa tête.

« Félicitations, à tous les deux ! » cria Moss, et cette fois Jim dut se battre pour le rejoindre, riant quand des mains tirèrent sur sa chemise pour le retenir.

« Bas les pattes, Evans – merci, M. Moss, » dit-il, avec sincérité. « Merci beaucoup pour tout, vous avez vraiment été génial – »

« Nous sommes très reconnaissants, » lança Spock.

« Eh bien, vous m'avez certainement rendu la tâche aussi difficile que vous le pouviez, mais… c'était un plaisir. »

« Hé ! »

Jim se tourna, vit Areel lui faire signe de sa table, qui avait aussi été entourée par ses amis, sûrement pour la soutenir moralement. Jim ne pouvait plus se résoudre à lui en vouloir.

« Ouais ! »

« Bien joué, Kirk ! » Son regard était un peu incertain, mais elle semblait sincère.

« Merci ! Toi aussi, j'imagine. »

Elle acquiesça, et un type aux cheveux sombres passa un bras autour de ses épaules.

Jim fut emporté peu après le signe de tête d'au revoir majestueux d'Emerett et la poignée de main de Moss, parce que Scotty avait apparemment décidé qu'il était temps de fêter ça même si personne n'avait encore déjeuné.

Et c'est ainsi qu'ils quittèrent le tribunal pour la dernière fois.

ooo

« Vous semblez incapable de rester droit, Capitaine, » dit innocemment Spock.

« C'est faux, » mentit Jim.

En vérité, il chancelait légèrement sur ses pieds parce que la combinaison des verres de célébration de la fête au club de la base avec les baisers léchés que Spock pressait contre cet endroit sous son oreille lui donnaient l'impression d'avoir des genoux en gelée. Mais. Il ne se sentait pas tout à fait prêt à admettre ça.

« On va – euh – devoir mettre au point not'stratégie. Tu sais, pour le dire aux gens – »

« Tu souhaites en discuter maintenant ? »

« Nan. » Jim eut un sourire éclatant. « Je l'dis juste. Pour s'en rappeler. »

« Un plan des plus admirables. »

« C'est juste que… il faut qu'on le dise à ton père, et ma mère, et, genre, nos boss, même si techniquement je suis toujours ton boss, ce qui, hmm, ce qui est amusant – »

Spock exprima son accord avec un « hmm ».

« Et, bien s- bien sûr, je serai ton boss pendant, genre, l'éternité, maintenant, ce qui est doublement génial, et même si tu n'as absolument plus le droit de mourir – »

« Tout comme toi. »

« Ouais, tout comme moi, tout comme moi, ouais, mais ce que j'essaie de dire c'est que, d'accord, que je t'aime genre beaucoup, et que si tu t'avises de te blesser à nouveau, ou de te faire capturer ou quoi, ben, je vais sûrement un peu péter les plombs, ce qui n'est pas différent d'avant si tu y penses vraiment. Mais aussi, aussi on a ce truc de lien, pas vrai ? Donc si les méchants sont sur le point de t'avoir, tu devrais carrément utiliser nos pouvoirs mentaux pour juste me le dire ! Et je te sauverai, et problème résolu ! »

Enchanté par la brillance de ce plan qu'il venait juste d'improviser sur place, Jim embrassa Spock profondément, pour célébrer son propre génie. « Je suis un génie. »

« Oui, tu l'es. »

Les yeux de Spock étaient super brillants.

« Donc tu m'apprendras la télé- télépathie ? J'ai le sentiment que pratiquer l'orgasme mental peut potentiellement être très fun. » Soudain le lit amortit sa chute. « Whoop ! »

« Tu devrais dormir, Jim, » dit Spock.

Et il se mit à complètement ignorer sa propre suggestion en perfectionnant sa technique de fellation.

Jim ne s'en plaignit pas.

ooo

« Je le savais, » déclara Pike triomphalement.

Ce n'était vraiment pas la réaction que Jim attendait.

« Euh… d'accord. Eh bien, j'appelle pour demander votre aide avec – »

« Nogura me doit cinquante crédits. C'est fantastique. »

« …Amiral, monsieur, je me demandais – »

« Hé, Numéro Un ! Venez ici ! » dit Pike à quelqu'un en dehors de l'écran.

Jim commençait à se sentir… hors sujet. « Qui est Numéro… ? »

« J'avais raison ! » dit Pike à ladite personne (quel genre de nom c'était, "Numéro Un", au juste ?), ignorant complètement Jim maintenant. « Vous l'avez entendu ? J'avais raison. »

À distance, une voix féminine agréable dit : « Je n'ai jamais, en vérité, suggéré que vous aviez tort. »

« Mais maintenant nous avons la preuve ! »

« Amiral – »

« Un instant, Kirk. » Pike ne le regardait même pas. « Ça va être dur, mais je vous obtiendrai le soutien dont vous avez besoin, mais – » Il tordait le cou et agitait le bras vers la femme mystérieuse. « Numéro Un ! Est-ce que ça veut dire que j'ai droit à ce baiser maintenant ? »

« Vous avez fait cet arrangement sans mon consentement. »

« Mais ça compte quand même, non ? »

Jim termina l'appel avant de pouvoir devenir encore plus gêné.

ooo

« Tu devras rendre des comptes à beaucoup de gens si tu lui fais du mal. »

« J'en suis conscient, Nyota. »

« Bien. C'est juste histoire que tu fasses attention. Je sais qu'on a été ensemble un moment mais ça ne veut pas dire que je suis automatiquement de ton côté. Et ne te méprend pas, je lui botterai le cul pour toi s'il le faut, mais ça marche dans les deux sens. »

« En effet. »

« Bon. Bien, c'est réglé alors. »

ooo

« James Tiberius Kirk ! Comment as-tu osé ne pas me le dire ! »

Winona semblait sincèrement contrariée et Jim décida de ne pas mentionner qu'il lui cachait quotidiennement des choses parce que, autrement, il appellerait la maison deux fois par semaine pour raconter une énième expérience de mort imminente.

« Je l'ai vu sur le réseau ! Ils ont essayé de vous tuer tous les deux il y a deux jours ! Encore ! »

« Essayé étant le mot clé ici, je trouve – »

« N'essaye pas de t'en tirer en faisant le malin. » Winona lui lança un regard noir. « Tu vas bien ? »

« Je vais très bien, maman. »

« Et Spock ? Ça va ? »

« Il va bien. Sa main est blessée et il va avoir des séquelles permanentes, mais c'est léger – »

« Oh, non, c'est horrible ! Tu vas t'en sortir ? »

« Il peut quand même travailler – » Puis il réalisa ce qui n'allait pas dans sa question. « Attends, qu'est-ce que tu veux dire, si je vais m'en sortir ? C'est lui qui est blessé, pourquoi je devrais – »

« Winona agita une main avec impatience. « Tu interprètes trop les choses, Jimmy. Je voulais juste savoir si tu étais aussi blessé. Tu ne me dis jamais ces choses-là. »

Elle mentait.

« Tu savais aussi ? »

Il y eut un long silence gênant.

« Eh bien, tu parlais énormément de lui, chéri ! »

Le front de Jim heurta violemment le bureau.

ooo

« – et des façons d'utiliser un spéculum que vous n'imagineriez même pas dans vos pires cauchemars – »

« Oui, Dr McCoy, je crois que votre "message", comme disent les Humains, est passé de manière adéquate. »

« Ha ! C'est ce que vous croyez. »

ooo

« Nous, les membres du département scientifique du vaisseau Enterprise, estimons qu'au nom de notre officier scientifique en chef, le Commandant Spock, il y a plusieurs points que nous devons vous faire comprendre, Capitaine James Tiberius Kirk, car ils concernent le bien-être de l'officier scientifique et bien-aimé directeur de notre département susmentionné… »

ooo

« Nous, les membres de l'équipe de navigation et de pilotage de l'USS Enterprise, estimons que, au nom de notre capitaine James Tiberius Kirk, il y a plusieurs choses que vous devriez savoir, M. Spock, dans le cas où le moindre dommage émotionnel serait infligé intentionnellement ou par inadvertance au capitaine susmentionné… »

ooo

« Nous sommes le département d'ingénierie, et nous ne prendrons pas parti, mais vous êtes tous les deux géniaux et, au cas où vous vous le demandiez, le gagnant du sondage est – »

« Oh mon Dieu, ne leur dis pas ça, Matthew – »

« Hé, je pensais qu'on était d'accord – »

« C'est tellement pas professionnel. »

« Ferme-la, Keenser. »

« Toi, ferme-la – »

« Evans, pourquoi est-ce qu'il y a une gelée noire sur mes documents ? »

« Oh, désolé, c'était moi – »

« On a un peu forcé sur le lubrifiant, hein Peterson ? »

« Hé ! »

ooo

« Oui, j'avais senti le lien qui existait, peut-être même avant qu'il soit créé, mais je suis reconnaissant que vous ayez choisi de me le dire malgré tout. »

« Oh, c'est… de rien ? »

« Aviez-vous des questions à me poser, Jim ? »

« Hah, oui, à peu près un million, en fait. Mais j'imagine qu'elles peuvent venir plus tard. C'est juste… je ne peux pas m'empêcher de – je veux dire, est-ce que vous et lui, l'autre moi, vous… ? »

« …Oui. »

« Wow. Je veux dire, je me le demandais, mais… Je suis vraiment désolé. Mon… euh, Spock ne comprend pas vraiment, je crois. Peut-être pas encore. Il dit que c'est injuste pour moi, que peut-être vous devriez me traiter comme un inconnu, mais je ne veux pas ça et je comprends, franchement je comprends. J'aimerais juste pouvoir faire quelque chose. »

« Vous aimeriez pouvoir faire quelque chose, Jim ? »

« Pour vous aider. Pour… je ne sais pas. Quelque chose. »

« Rien ne pourrait m'aider, Jim. »

« …Je. Je suis désolé. »

« Ne vous sentez pas désolé. Sentez-vous heureux. Chérissez cela. C'est merveilleux. »

« …Ouais. C'est l'idée. Mais. On vous verra toujours à l'occasion, pas vrai ? Je veux dire, on, on se rendra toujours visite et – »

« Une cérémonie d'union vulcaine, si vous choisissez un jour de vous soumettre à la procédure traditionnelle, se tient sur Vulcain. Donc oui, vous devez rendre visite à la colonie. »

« Wow, d'accord. Ouais, c'est… on fera ça. J'ai le sentiment que je vous appellerai souvent, je ne savais même pas que ça existait. Merde, est-ce que ça veut dire que je dois, genre, parler au père de Spock ? Oh mon Dieu, ne me dites pas que vous faites encore ce truc où je dois demander sa main ou quoi – »

« Bien sûr que non, c'est une tradition des plus illogiques. »

« Dieu merci. »

« Cependant il serait considéré courtois de votre part de parler à Sarek dans un futur proche. »

« …Merde. Et hé, pas besoin d'avoir l'air aussi content de mon malheur, merci bien. »

« Mes excuses, Jim. »

« Ouais ouais. C'est bon. »

« …Très bien, je devrais vous laisser quitter cette base, je présume ? »

« On décolle dans deux heures, ouais. »

« Bien. Alors je vous dirai simplement… bonne chance. »

« À vous aussi, Spock. »

Spock ferma l'écran et baissa sa main, qui avait été levée dans le geste de salutation ta'al, comme celle de Jim, bien que la tentative du jeune homme ait paru plutôt amusante dans sa maladresse.

Son premier officier lui apprendrait à le faire correctement, songea Spock, se renfonçant avec lassitude dans son siège. Ils avaient des années pour être ensemble. Des années pour passer du temps au lit et jouer à des jeux de mains. Des années pour s'apprendre.

Des années pour vivre longtemps. Et prospérer.

(1) En anglais comme en français, on dit « (se) faire » quelqu'un.