Le caïd se lissa les moustaches, visiblement ravi. Il avait réussi son coup, m'attirer dans son piège.

J'étais coincé au fin fond d'un cul-de-sac, à droite après la ruelle étroite jouxtant l'avenue du Plaguen. Je serrai les dents de colère. Le gang m'avait encerclé, sûr de vaincre. Je ne m'étais pas suffisamment méfié quand j'avais suivi le caïd. S'ils étaient venus un par un, je les aurais battus avec facilité, mais à huit contre un, je n'avais aucune chance. Comment avais-je donc pu me faire avoir aussi facilement ?

Trois miaouss à gauche, sur les poubelles, un chaglam à ma droite, l'air hautain, et trois autres chaglams me bloquant la sortie derrière moi, prêts à bondir. Deux devant, et un qui restait un peu en retrait, sûrement un nouveau. Et enfin le chacripan, le caïd, qui s'était assis sur le couvercle d'une poubelle. Je le connaissais bien, ça faisait quelques années qu'on s'était rencontrés, et depuis je l'humiliais à chaque fois que je le voyais.

Le gang était constitué d'habitués du coin, peu incommodés par l'odeur épouvantable qui régnait et m'étouffait presque. Je respirais à fond, gonflant mes poumons de relents de nourriture avariée. Je ne pouvais plus reculer.

Puis j'attaquai.

A la vitesse de l'éclair, je bondis sur le chacripan. Je loupai mon saut et mes jambes heurtèrent le haut de la poubelle qui bascula sous le choc. Le félin couina piteusement en tombant, et se prit un pistolet à eau vengeur en pleine tête, le faisant valdinguer plus loin. Je me retournai aussi sec, prêt à affronter le groupe entier.

La moitié des chaglams et les miaouss avaient déguerpi, les lâches. Incapables de se battre sans leur chef. Les deux chaglams restants se jetèrent sur moi, voulant en découdre. Le premier reçut un coup de boule et s'affaissa, sonné, pendant que son confrère ployait sous une grêle de coups de poings et de griffes. Il s'effondra sur le sol, KO.

Un miaulement rageur retentit derrière moi.

Le chacripan s'était relevé péniblement, la fourrure mouillée et pleine de morceaux de salade ou de pâtes. ça colle bien, ces machins. Il me jeta un regard méprisant et cracha :

"On se reverra, Kronen."

Je ne répliquai pas. Lui faire croire que ses paroles m'indifféraient était bien plus significatif que lui lancer une insulte. Maintenant que la voie était dégagée, je me ruai vers la sortie, débouchant deux cent mètres plus loin sur l'avenue du Plaguen. Elle n'était pour l'instant fréquentée que par des femmes venant faire leurs courses. Normal, l'épicerie du coin était peu chère et délicieuse. Je le savais, j'y avais déjà chipé un saucisson par-ci, un pain par-là.

A l'est, un rond-point faisait la liaison entre l'autoroute, au sud, la zone industrielle très loin devant moi, et le centre-ville au me dirigeais d'un bon pas vers le centre, puis m'arrêtai vingt minutes plus tard près du pont qui enjambait le fleuve.

Je vérifiai une énième fois que personne ne me suivait, un gang adverse qui me coincerait dans un coin pour se venger. Tout comme les félins plus tôt. Seuls des humains allaient et venaient, des gamins qui séchaient l'école (et qui me regardaient avec des yeux ronds, d'ailleurs. Ils n'avaient jamais vu de pokemon avant ? ), des vieux en promenade, quelques rares touristes. On était à la mi-avril, ils n'étaient pas nombreux.

Je traversais la route sans me soucier de la présence d'une voiture ou non, prenant à gauche du pont, vers le parc qui longeait le fleuve. Ils devaient être par là, le rendez-vous était donné sous le vieux chêne. Il se trouvait au sommet d'une pente, donnant trois mètres plus bas sur le parking d'une supérette fermée la plupart du temps.

Une fois la pente grimpée, on avait un point de vue privilégié sur la ville, de forme ovoïde, ses immeubles de taille moyenne, son dynamisme serein. Partout des gens, et pourtant peu de bruit. De là où j'étais, on distinguait bien les collines à droite, et la forêt à gauche. Elle s'étendait sur des kilomètres à la ronde, à ce qu'il paraissait. J'aimerais tellement l'explorer, mais ça prendrait des jours et des jours. Elle était tellement attirante ...

Je sifflais. C'était le signal. Si l'un des nôtres se trouvait ici, il savait que la voie était libre. Je patientais quelques secondes, scrutant les environs à la recherche d'un membre de mon gang.

Rien.

Incroyable, j'étais arrivé avant tout le monde ! Ce fut à ce moment que quelque chose me tomba dessus, et se mit instantanément à me chatouiller. Je ravalais un éclat de rire irrépressible et répliquai en chatouillant Capi, la Capumain du groupe. Etait-elle seu... Ils atterrirent tous en choeur. Evolisse avec son oreille tombante et sa frange (comment était-il grimpé à l'arbre ?), les jumeaux miaouss, leur grande soeur Mays, Mime Junior et Goinfrex.

Mon gang. Ma famille.


J'avais publié ce prologue en tant que chapitre 1 sur le forum de Pokemon Gemme, et en le publiant ici, j'ai réalisé qu'il s'agissait plus d'un prologue.

Merci d'avoir lu ce prologue donc, et lisez la suite si vous voulez découvrir quel Pokemon est Kronen ^^

Et faisons dans la diplomatie : je ne possède pas la licence pokémon, cette fanfiction n'est pas, pour autant, illégale. Je l'écris en tant que fan, pour enrichir le monde Pokémon. Si Nintendo me lit, j'en serais honoré (inquiété aussi ^^).