Un petit OS pour vous faire patienter avant le chapitre suivant de ma fic « Un très long chemin ».

Merci à tous mes reviewers. Bonne lecture

La grand-mère qui avait mangé le loup

John lisait les rapports d'autopsie qu'il avait récupérés de Lestrade alors qu'il se trouvait dans le métro. Les trois premiers n'étaient guère surprenants : tous morts d'une balle en pleine tête, tirée à longue distance. John avait été plus ou moins témoin pour deux d'entre eux et le troisième avait été tué en plein Scotland Yard. Les vérifications avaient montré qu'il s'agissait de l'un des tueurs à gages de Moriarty, celui chargé de surveiller Lestrade et de l'abattre si Sherlock ne sautait pas. Cette dernière pensée horrifia une nouvelle fois John. Quand Sherlock, suite à tous ces cadavres inattendus, avait été contraint de lui expliquer le jeu mortel de Moriarty et ce que Sherlock et Mycroft avaient prévu, John avait été horrifié et furieux à tel point qu'il avait commencé par secouer le détective comme un prunier avant de le serrer dans les bras presqu'à l'étouffer, hésitant de manière un peu extrême entre coller lui-même une balle dans la tête de Sherlock pour ne plus avoir à craindre que quelqu'un – voire Sherlock lui-même – ne le fît avant lui et enlever Sherlock et le détenir à jamais dans son lit – sans commentaire merci. Oui, John était au courant que ses réactions étaient quelque peu excessives mais il avait des excuses et puis, il n'avait jamais affirmé être sain d'esprit. Certains diraient même qu'il était probablement bon à enfermer rien que parce qu'il aimait vivre avec Sherlock. En tout cas, Sherlock avait été un peu perturbé par les réactions de John – Sherlock avait du mal avec les émotions – mais pour être honnête, le tour qu'avaient pris les évènements l'avait déjà bien chamboulé.

John était arrivé devant Saint Barts pour apercevoir Sherlock sur le toit, une silhouette à peine discernable derrière lui. Il apprit plus tard qu'il s'agissait de Moriarty. Sherlock avait été surpris de le voir, apparemment il ne l'attendait pas si tôt, pensant que John aurait besoin de voir de ses yeux que madame Hudson allait bien avant de comprendre qu'il s'était fait avoir et revenir, ce qui avait perturbé le plan de Sherlock. Mais John, bien qu'inquiet pour leur chère logeuse et perturbé par les derniers évènements, avait réfléchi alors que le taxi l'emmenait vers Baker Street et il s'était rappelé comment Sherlock avait réagi lorsque les types de la CIA avaient agressé madame Hudson. Il n'y avait aucune possibilité pour que Sherlock pût ne pas se préoccuper de la santé de la vieille dame. Il y avait donc un problème, Sherlock avait cherché à l'éloigner et John avait ordonné au taxi de faire demi-tour et de rejoindre Saint Barts au plus vite.

Tout cela n'avait pas changé grand-chose en réalité et John s'était retrouvé à devoir écouter un Sherlock en larmes au téléphone qui lui disait que c'était sa lettre, qu'il lui avait toujours menti, qu'il était un manipulateur, ne laissant pas un John désespéré placer un mot pour le détourner de son tragique projet. Mais tous deux furent brutalement interrompus par deux coups de feu à quelques secondes à peine d'intervalle l'un de l'autre. Le premier entraîna la chute à travers une vitre du quinzième étage d'un immeuble voisin d'un homme qui s'écrasa à quelques mètres à peine de John avec un fusil à lunette encore à la main. Le deuxième mit fin définitivement au règne de Moriarty en lui explosant la boite crânienne. Sherlock, penché au bord du toit, criait au téléphone à John de lui dire ce qui venait de se passer. Des hommes et des femmes s'étaient rués sur la place à l'entente des coups de feu, certains vêtus de blouses d'infirmiers et de médecins mais John connaissait tout le personnel de Saint Barts où il faisait parfois des remplacements et qu'il visitait assez souvent quand Sherlock allait piquer des morceaux de cadavres à Molly or aucun de ces hommes et femmes ne lui était connu.

Un grand cafouillage régnait au pied de l'hôpital et John dut user de sa voix de capitaine de l'armée britannique pour ramener un semblant d'ordre, ordonner les actions du véritable personnel de l'hôpital qui avait fini par arriver sur les lieux et faire descendre Sherlock. Celui-ci était dans un état de tension extrême ce qui ne s'arrangea pas lorsqu'il eut son frère au téléphone qui demandait des explications. La police finit par intervenir et les choses se compliquèrent encore puisque Sherlock – et John – était sous plusieurs accusations. Il fallut l'intervention de Mycroft – qui fut obligé de se déplacer en personne, John n'allait pas pleurer pour lui, il était plus que temps que l'aîné des Holmes fît un peu de terrain – pour trouver une solution à la situation, celle de Lestrade qui raconta la mort d'un deuxième tueur à gage dans les propres locaux de Scotland Yard et d'une équipe d'intervention qui trouva le cadavre d'un autre homme dans les poubelles de Baker Street pour que Sherlock retrouvât un semblant de calme et finît par expliquer toute l'histoire.

Apparemment quelqu'un avait éliminé toutes les menaces que Moriarty avait fait peser sur les proches de Sherlock et avait éliminé le psychopathe lui-même. Quelqu'un avait évité à John de voir son meilleur ami se jeter d'un immeuble devant ses yeux et de devoir croire pendant une durée indéterminée que John imaginait interminable et insupportable que son meilleur ami était mort, et même pire s'était suicidé sans qu'il eût pu l'en empêcher. Et personne ne savait qui était ce quelqu'un car Mycroft avait assuré n'y être pour rien et pour quelle raison aurait-il menti à ce sujet ?

Le reste de la journée s'était passé dans un brouillard et une confusion peu habituels pour les frères Holmes ce qui voulait dire que les deux hommes étaient plus insupportables que jamais et que John s'en sortait un peu mieux – après tout il avait l'habitude de ne pas tout comprendre – et ce d'autant plus que madame Hudson les avait régulièrement abreuvés de son excellent thé, thé qui, de l'avis de John, pouvait faire passer presque n'importe quelle situation catastrophique pour un simple désagrément.

Le lendemain après-midi, John s'était proposé pour aller chercher les rapports d'autopsie – oui il était parfaitement au courant que Molly aurait pu les leur envoyer par mail mais John cherchait depuis plusieurs heures la moindre excuse pour s'éloigner quelque temps de Baker Street et de son atmosphère étouffante. Vingt-quatre heures dans un petit appartement avec Sherlock ET Mycroft rendrait fou n'importe qui…

Les trois premiers rapports d'autopsie n'avaient donc apporté aucun élément nouveau et l'identité des quatre cadavres avaient été confirmées : Moriarty et les trois tueurs à gage qu'il avait engagés pour menacer Sherlock en ciblant ses proches. La quasi simultanéité des trois premiers meurtres et leur mode indiquait qu'il y avait plusieurs meurtriers et qu'il s'agissait de professionnels. John lisait donc avec attention le rapport d'autopsie du dernier homme, celui qu'on avait retrouvé en dernier dans les poubelles de Baker Street, celui qui était censé tuer madame Hudson si Sherlock ne sautait pas.

L'homme avait lui-aussi reçu une balle dans la tête mais contrairement aux trois autres, il ne s'agissait pas d'un tir à longue distance mais d'un coup à bout portant. L'homme portait aussi des marques de liens, Molly avait découvert que l'homme avait été menotté avec un modèle de menottes qui correspondait à celui utilisé par les policiers de Scotland Yard et dont Sherlock avait une caisse pleine – enfin façon de parler car elles étaient répandues un peu partout dans l'appartement et parfois dans des endroits vraiment incongrus ce qui entraînait quelques questions embarrassantes, du moins pour John car Sherlock ne semblait pas comprendre, ou faisait exprès de ne pas comprendre en quoi des menottes pouvaient être un objet suggestif.

Encore plus intéressant était le fait qu'on avait retrouvé du penthotal (1), le sérum de vérité dans l'organisme de l'homme. Il avait donc été interrogé avant sa mort, mort qui avait précédé celle des trois autres. Le penthotal avait apparemment été ingéré par la victime, mélangé à une boisson dont John lut les composantes d'abord rapidement avant d'y revenir avec plus d'attention. Il écarquilla les yeux. Oh… Bon… Sang ! John pensait connaître l'identité de la bonne fée qui les avait sauvés mais il devait d'abord s'en assurer. Cela paraissait tellement incroyable mais en même temps…

John s'arrêta au 221A avant de retrouver Sherlock et Mycroft qu'il entendait crier à l'étage. Madame Hudson l'invita à entrer et lui servit immédiatement un thé que John ne pouvait refuser – d'abord parce que cela ne se faisait pas et puis, John était anglais ! Les fragrances si particulières du thé préparé par la vieille dame envahirent son nez et ses papilles. John prit une grande inspiration.

« Une des premières choses que Sherlock m'a dite à votre propos, madame H, c'est qu'il s'était assuré que votre mari soit condamné à mort aux Etats-Unis. Il a dit plus tard qu'il s'agissait du chef d'un cartel de drogue très violent. Je comprends que vous ayez voulu vous débarrasser d'un tel homme mais j'ai du mal à croire que vous ignoriez tout de ses activités… »

La vieille femme le regardait d'un air maternel et confiant.

« Je parie que vous avez gardé des contacts et, aujourd'hui, les cartels agissent comme des multinationales et sont implantés dans de nombreux pays… »

La femme hocha la tête et lui resservit une tasse de thé. John hésita une seconde avant de la boire. Il doutait fortement qu'après s'être donné autant de mal pour sauver Sherlock elle décidât de l'éliminer. Madame Hudson ne disait toujours rien.

« Je vous remercie, finit par dire John. Je ne sais pas ce que je serais devenu si j'avais vu Sherlock sauter devant mes yeux et l'avais cru mort.

_ Comment as-tu su ? demanda la vieille dame en ajoutant des scones sur la table. »

John en prit un et se resservit une troisième tasse de thé.

« Le thé.

_ Le thé ?

_ Dans le rapport d'autopsie, il est écrit que l'homme qu'on a retrouvé dans les poubelles derrière chez nous avait été interrogé avec du penthotal mélangé à du thé.

_ Je ne suis pas la seule personne à faire du thé en Angleterre, sourit madame Hudson.

_ Non mais vous êtes la seule que je connaisse à mélanger cannelle, bergamote et citron à du thé noir. Et comme je doute qu'un inconnu cherche à sauver Sherlock… »

La vieille dame hocha la tête.

« Je dois te féliciter, John. Aucun des deux génies là-haut n'a encore compris.

_ A leur décharge, ils n'ont pas encore vu les rapports d'autopsie. Même si je ne suis pas sûr que cela les aide vraiment. Du moins pas tout de suite. Ils n'ont pas la même… affinité avec le thé que moi, je suppose… »

Les deux échangèrent un sourire complice.

« Je vais aller voir où en sont les deux autres, finit par dire John. On verra combien de temps Sherlock met à deviner. Encore merci, madame H, pour le thé et… pour le reste… Et vous avez raison, vous n'êtes pas notre logeuse, mais notre bonne fée. »

(1) Je ne sais pas si le penthotal peut être bu mais bon, c'est une fiction.

D'abord, j'adore mon titre. Oui, petit moment d'autocongratulation mais je suis très rarement ne serait-ce qu'un peu satisfaite de mes titres mais celui-là…

Ensuite, cet OS, outre qu'il est dans ma lignée de tous les personnages de Sherlock sont des psychopathes, est dû à une scène dans le troisième épisode de la saison 2 de Sherlock, lorsqu'on voit madame Hudson apporter une tasse de thé à l'homme chargé de l'éliminer. La première fois que j'ai vu cette scène, j'étais persuadée que madame Hudson savait que l'homme était un tueur à gage et voulait l'empoisonner ou au moins lui faire boire un sédatif. D'où cet OS…