Hello mes petits chatons. J'espère que vous allez bien. Merci pour toutes vos adorables reviews, je m'excuse de n'avoir pas pu répondre à toutes. Sachez tout de même que je les ai lues attentivement et que je vous en suis très reconnaissante : vous faites progresser cette histoire, vous participez de sa création. Voilà le nouveau chapitre, qui j'espère vous plaira. Désolée pour l'attente, disons que les temps étaient peu propices à l'inspiration – et que je suis une incorrigible feignante qui n'aime pas se forcer. Heureusement que vous êtes là pour me motiver… En attendant la suite, joyeux fêtes à toutes et à tous, et plein de magnifiques aventures.

Disclaimer: tout appartient à la géniale J.K. Rowling.


"Notre vie est un voyage
Dans l'hiver et dans la Nuit,
Nous cherchons notre passage
Dans le Ciel où rien ne luit."

Chanson des Gardes suisses, 1793.
Céline en tête de Voyage au bout de la nuit.


Chapitre 31. Sensation

« -Nous n'avons que trop attendu. Ne laissons plus des gamins se battre pour nous et tenter de rattraper nos erreurs.

-Tu crois qu'ils viendront ?

-Oui.

-Comment peux-tu en être aussi sur ?

-Ils l'ont juré. C'est maintenant que dois s'accomplir notre serment. Enfin...

Le brun rit doucement et compléta sa phrase.

-Oui. Enfin, nous allons nous libérer. La vérité va éclater. »

Lieu incartable, Angleterre.

Severus Rogue contempla la dizaine d'hommes qui se tenaient devant lui. Le dernier Bataillon, créé et entraîné pour réparer les erreurs qu'ils avaient commises, des années auparavant. Il sourit doucement. Leur réunion tenait du miracle. Ils ne s'étaient pour ainsi dire plus rencontrés depuis plus de dix années. Mais le temps était venu pour eux de réparer leurs tords, ceux de leurs familles, et de rappeler au monde qui ils étaient, longtemps auparavant. Severus fixa son regard dans celui de son meilleur ami de toujours et hocha lentement la tête. Oui, Regulus Black serait des leurs. Ils se l'étaient juré, des années plus tôt, lorsque le professeur de potions lui avait sauvé la vie, après qu'il ait trahi le Seigneur des Ténèbres. Il se souvenait parfaitement de la scène.

Severus regarda du coin de l'œil les deux mangemorts désignés pour l'accompagner. Aujourd'hui, il devait tuer son meilleur ami. Il secoua la tête. Regulus avait été si stupide de trahir leur maître ! Il avait brisé leur rêve d'intégrer ensemble les rangs du Seigneur des Ténèbres et de régner sur le monde sorcier. Severus aurait pris sa revanche sur les moldus, sur son père et sur tous ceux qui l'avaient insulté durant sa jeunesse, il aurait été puissant, aurait fait oublier le sang impur qui courait dans ses veines… Regulus aurait pu rendre fier ses parents, dévastés par la trahison de leur aîné, Sirius. Il aurait pu accéder à la gloire. Mais il était parti, et seul Severus pouvait désormais réaliser ce rêve. Mais il passait par le meurtre du seul être qui ne l'avait jamais méprisé, qui l'avait adoré, aimé tel un frère. Il secoua la tête et rehaussa sa cape. Le froid de l'hiver était mordant. Il avait forcément fallut que cet idiot aille se réfugier en plein cœur du Tyrol, au fin fond de l'Autriche. Typique. Voldemort lui avait confié la mission avec un grand sourire sur les lèvres. Il adorait briser ce genre de liens, adorait briser ses fidèles. Severus avait vu le rictus satisfait de Lucius Malefoy, qui voyait le seul héritier sorcier pouvant lui faire de l'ombre disparaitre. Il avait parlé de leurs liens au maître, Severus en était sûr. Merlin qu'il les haïssait, tous, ces arrivistes sans pouvoirs, stupides, qui ne justifiaient leur prétendue supériorité que par la prétendue pureté de leurs sangs. Foutaises. Sa Lily était mille fois plus puissante qu'eux. Mais elle était aux côtés de Potter, et dans l'Ordre, et lui était dans ses montagnes en train de noircir son âme encore plus, si c'était possible. Il mesura tout ce qui les séparait, encore une fois. Les milliers de kilomètres n'étaient rien face à cette impression de lui être parfaitement inférieur, d'être si loin de sa pureté, de sa perfection. Il soupira, et un petit nuage de buée se forma. Il attendait, caché dans la forêt, que leur stupide complice, un pauvre type qu'il n'avait d'ailleurs jamais vu, revienne de son expédition. Il était parti placer des sort d'anti-transplanage autour de la zone dans laquelle Regulus s'était retranché. Un peu stupidement d'ailleurs. Il n'avait rien trouvé de mieux qu'une propriété familiale pour se planquer, alors que sa cousine était la favorite du Lord Noir. Rogue secoua la tête. Tant de stupidité. Comme si Regulus avait envie de mourir.

Hitchens, un mangemort aussi vaniteux que stupide, lui fit signe d'approcher.

-Nous pouvons y aller. Pollux nous rejoindra en passant par derrière. Il est piégé. Je crois qu'il est blessé, il ne peut plus se déplacer. Il est fini.

Ses traits était tordus dans une haine presque palpable. Ses grands yeux verts pâles lui donnaient un air presque vide, alors que ses traits étaient pourtant fins et réguliers. La haine le rendait laid. Ses cheveux d'un noir d'encre coupés en brosse reflétaient vaguement la couleur de son âme. Severus se demanda ce qui pouvait pousser ce genre de jeune homme, éduqué dans une famille bien sous tous rapports, à sombrer dans la violence. Non, il n'y avait pas été forcé. Peut-être certains hommes aimaient-ils voir le sang couler. Peut-être voulaient-ils connaître son goût. Contrairement à eux, à ceux qui n'avaient pas eu le choix, ils faisaient figure de mystères. Severus les haïssait. S'il avait su s'extirper de la haine, s'il avait eu une famille aimante, alors il serait sans doute assis au coin d'un feu avec Lily sans ses bras. Mais non. Il avait hérité des gènes violents de son père et du goût de la soumission de sa mère. D'eux deux était né un homme au cœur sombre, au besoin maladif de reconnaissance. Mais devait-il, pouvait-il pour cette raison tuer l'homme qui l'avait toujours soutenu ? Regulus était à peine sorti de l'adolescence…

Ils entrèrent avec fracas, arrachant la splendide porte du Manoir de ses gonds. La magnificence passée des Black incitait à l'admiration. Si les meubles de bois précieux étaient couverts de poussière et rongés par les mites, ils n'en restaient pas moins la preuve d'une formidable richesse. Les portraits d'hommes célèbres et ô combien consanguins les toisaient avec désintérêt. Les carreaux salis laissaient à peine passer une pâle lumière, et donnait à la scène un aspect irréel. Ils traversèrent les pièces, les unes après les autres, suivant les traces de sang laissées sur les parquets brillants, jusqu'à arriver au grand salon. Il fit signe aux deux autres mangemorts de baisser leurs baguettes et poussa les lourdes portes. Regulus Black, un petit sourire aux lèvres, était avachi sur un fauteuil empire, ses yeux bruns si expressifs pointés sur eux.

-Je vous attendais.

La scène était magnifique, parfaite. Le jeune Black, dans toute l'arrogante beauté de sa jeunesse, les toisait, du sang coulant de son abdomen, son sourire étincelant laissant entrevoir ses dents parfaitement blanches. Vêtu comme le petit prince qu'il était, au milieu de ce salon gigantesque, il tournait le dos aux immenses fenêtres qui laissaient voir l'immensité des montagnes et la neige tomber. Il était beau, beau comme le prince de ces contes moldus, beau comme un homme qui sait que son existence n'a pas été vaine.

Regulus fixa son regard dans le sien et il sentit sa conscience effleurer la sienne. Sans hésiter une seconde, il lui ouvrit son esprit et entendit sa voix, toujours teintée d'humour. Les gens avaient eu tellement tort de lui préférer son frère !

« Severus. Nous avons peu de temps. Je suis désolé que tu doives te charger de ça, mais je suppose que c'est un coup de Lucius. De toute façon, je connaissais le prix. Mais écoute moi bien. Tu dois arrêter Voldemort. Je sais ce qu'il a fait, Sev. C'est… C'est monstrueux. Trouve les Horcruxes, Sev, trouve les et détruit les. J'ai caché le médaillon, demande… Kreattur… Square… »

Leur connexion fut interrompue. Regulus n'avait plus assez de forces.

-Qu'est-ce qu'on attend ?!

Severus lança un regard réfrigérant au jeune Mangemort. Il était perdu. Mais il n'avait pas le choix. Il leva sa baguette en évitant consciencieusement de regarder son vieil ami dans les yeux. Mais il sentait tout le poids de son regard.

-Tu es faible, Rogue. Je vais m'en occuper, mais le maître sera mis au courant de cela !

Il vit Hitchens saisir sa propre baguette et la lever vers un Regulus qui fermait déjà les yeux avec un sourire léger, et la suite se passa comme dans un rêve. Un rayon vert jaillit de sa propre baguette et alla frapper le jeune Mangemort aux yeux verts qui s'écrasa contre un mur, sans vie. Aussitôt, Rogue se tourna vers son compère hébété et le stupéfixia, avant de se précipiter vers son ami. Il ne mesurait pas encore les conséquences de son acte. Mais il n'avait pas pu le laisser mourir, pas son petit frère de cœur, pas celui qui l'avait soigné quand son père l'avait battu jusqu'à l'inconscience, pas celui qui avait toujours été là pour lui.

-Severus…

Regelus le regarda, amusé, malgré le voile de douleur qui couvrait ses yeux.

-Merci.

Severus secoua la tête et réfléchit rapidement.

-Attends une minute. Je vais te transporter jusqu'à chez moi.

Regulus ricana.

-Et puis quoi ? Comment justifieras-tu ta trahison auprès de ton maître? Il ne te croira jamais si tu reviens sans les deux idiots. Ou au moins un. Et tu ne les convaincras pas de se taire.

Severus hocha rapidement la tête.

-Ne bouge pas.

Motivé par un sentiment qu'il n'avait jamais connu ou compris, il soigna Regulus et transplana avec lui jusqu'à l'impasse du Tisseur, puis il revint en Autriche, se débarrassa du corps et implanta dans la mémoire du second Mangemort un souvenir partiellement modifié de l'action. Il se souvint du rayon vert qu'il imputa à Regulus, et imagina une réaction mortelle de Severus. Le Seigneur des Ténèbres, occupé à d'autres tâches, ne prit pas la peine de vérifier.

Quelques jours plus tard, Severus était de retour chez lui, ou il fit face à Regulus pour la première fois depuis longtemps. Et Regulus lui parla du dernier Bataillon, auquel Severus n'adhéra pas. Jusqu'à la mort de sa chère Lily.

Severus regarda les hommes qui lui faisaient face. Des fils et filles de grandes familles perverties par des idéaux ridicules, qui donnaient leur vie pour retrouver leur honneur. Un Rosier, une Shafiq, quelques Black reniés, deux Gamp, un Longdubat et Marie Bullstrode. Les autres n'avaient pas pu se libérer : Rose Parkinson, Alexandre Flint, Belvina Yaxley et Isla Nott. Beaucoup de représentants des Ving-huit Sacrées, du moins selon Teignous Nott. Ils étaient pour la plupart Cracmols, mais loin d'être stupides, et très loin d'ignorer les subtilités de la magie. Et ils métrisaient toutes les formes de combat moldues. Ils étaient de la génération de Severus, parfois plus vieux. Ils avaient attendu toutes leurs vies de pouvoir rendre à leurs familles le mépris qu'elles leur avaient offert. Certains avaient été chassés, d'autres torturés : Abrahel Beurk avait été mordu par Greyback lui-même avant d'être chassé de chez lui à l'âge de onze ans, et Asmodée Fawley avait été violée et torturée pendant des années par son propre père. Toutes les grandes familles avaient, du fait de leur consanguinité, un ou plusieurs Cracmols. Et leur façon de les traiter était généralement assez similaire. Severus avait entendu parler d'une fille Greengrass qui avait été parfaitement adorée par sa famille malgré son manque de pouvoirs. Mais la vérité était généralement toute autre. Il n'y avait pas que des Cracmols ou des parias, même s'ils étaient nombreux. Quelques sorciers issus de ses familles et en désaccord avec elles les avaient rejoint, souvent pour rester près de leurs frères et sœurs bannis. Ils avaient été tous recueillis et entraîné par Alphard Black lui-même. A sa mort, en 1976, il avait élevé une vingtaine d'enfants perdus et leur avait tout donné. Mais il les avait aussi préparés, préparés pour guerre qu'il savait sans merci. Ils ne s'étaient jamais mêlés à l'Ordre, non. Ils tenaient à accomplir personnellement leur revanche. Et Merlin savait qu'il l'avait attendue.

Ils se faisaient passer des armes – moldues, évidemment. On pouvait dévier un avada, mais pas une balle de Glock 17 de 9 millimètres ou de 9 millimètres Parabellum. Un bouclier ne pouvait absolument rien contre un Browning 1910, et encore moins contre le fameux FAMAS Félin des armées américaines. Robert Gamp, un sorcier d'une cinquantaine d'années, leur préférait les fusils d'assaut SIG ou les vieilles Kalachnikov russes, mais il avait servi en Europe, ce qui expliquait ses goûts éclectiques. Le Bataillon s'était rendu compte que les sorciers étaient parfaitement démunis contre les armes moldues, et qu'ils ne pouvaient pas s'en protéger. Et c'était une excellente chose. Les règles n'étaient plus les mêmes. Et le Bataillon était réuni. Severus s'avança au milieu de la pièce et regarda ceux qu'il avait rejoints, bien des années plus tôt, après la mort de la femme de sa vie.

-Je vous remercie d'être venus aussi nombreux. Les choses changent. La guerre fait rage mais touche à son terme. Un nouvel Horcruxe a été détruit il y a quelques jours à Poudlard. Nous devons nous occuper des autres avant que le Lord ne rentre de sa campagne Française. Selon nos informateurs, il sera de retour dans un mois. Dans un mois, il sera donc temps pour lui de mourir. Je veux que tout soit finit d'ici là. Que leurs repaires soient assiégés. Tuez en le plus possible, n'ayez aucune pitié, ils n'en auront pas pour vous.

Il se tut et s'approcha de Regulus.

-Tu es prêt ?

Le brun hocha la tête.

-Évidemment.

Regulus lui offrit un sourire chaleureux en passant une main sur son ventre.

-Tu as toujours mal ?

Le jeune Black hocha la tête. Severus soupira. Il avait tout tenté. Mais son ami était déchiqueté de l'intérieur et rien n'avait pu le soulager. Il souffrait en permanence, mais survivait. Uniquement pour sa vengeance.

-Et toi, es-tu prêt à venger ta Lily ?

Severus hocha la tête.

-Je tuerai le Lord Noir. J'ai attendu ça toute ma vie.

Il n'y avait ni bons ni mauvais. En fait, c'était beaucoup plus complexe que cela. Il y avait les hommes, et leurs pulsions, et leurs faiblesses, leurs rêves et leurs peurs. Il y avait l'amour. Et cela les transformait sans qu'ils le désirent, faisait d'eux des chimères, déchirés entre leur bestialité et ce sentiment plus fort que tout qui au fond faisait bien plus mal que toutes les tortures. Severus songea au plus beau moment de sa vie et le laissa l'envahir, puis il murmura : « Expecto patronum » et une biche splendide apparut à ses côtés. Il la caressa lentement et lui chuchota à l'oreille :

-Va voir ton fils, dis-lui que nous sommes prêts. Nous n'attendons plus que lui.

Ils étaient dans la salle sur Demande, au milieu de leur cinquième année. Il la regardait dessiner et se mordre la lèvre tant elle était concentrée. Ses cheveux roux flamboyaient autour d'elle tels les rayons du soleil. Il sentit son cœur battre plus vite. Merlin qu'il l'aimait. Elle leva les yeux vers lui et le regarda, perplexe.

-Tout va bien, Sev ?

Il hocha la tête, la gorge nouée, et elle se rapprocha de lui, un petit sourire aux lèvres.

-Est-ce que tu m'observais ?

Il ne chercha pas à nier.

Elle s'assit en face de lui, son visage à quelques centimètres du sien. Il respira sa délicieuse odeur et un sourire fleurit sur ses lèvres.

-En fait, je lisais.

Elle jeta un coup d'œil dédaigneux au manuel de potions et l'envoya valser à l'autre bout de la pièce.

-Terriblement ennuyeux.

Il haussa un sourcil.

-Que veux-tu faire ?

Elle entortilla l'une de ses mèches rebelles autour de son doigt et lui sourit, ses pommettes rougies par la chaleur ambiante – ou par la gêne ?

-En fait… Je pensais t'empêcher de travailler jusqu'à ce que tu me proposes de t'accompagner au bal de Noël. C'est dans quelques jours et…

Severus ouvrit la bouche et la fixa, hébétée.

Elle éclata de ce rire si sonore qui faisait accélérer les battements de son cœur.

-Ferme la bouche, Sev, tu vas gober un Joncheruine !

Il se renfrogna.

-Ces choses n'existent pas.

Lily passa un doigt fin sur sa joue, alors que son regard se faisait infiniment doux.

-Et nous deux, ça existe ?

Il ne prit pas la peine de lui répondre. Il l'embrassa.

Manoir Malefoy, Wiltshire.

Hermione ouvrit les yeux. Elle observa la chambre luxueuse et sombre dans laquelle elle se trouvait. Tout lui semblait froid et impersonnel. Elle était perdue. Elle s'était endormie dans un lit de l'infirmerie de Poudlard après que… que sa fille… Les larmes coulèrent sur ses joues alors qu'elle passait une main sur son ventre pourtant parfaitement remis en état. Elle souffrait. Alors qu'elle s'était juré de ne plus ressentir ces émotions négatives. Elle voulait être forte, elle voulait être la prochaine grande médicomage de l'Ordre. Elle sécha ses larmes et se leva. Le soleil était couché mais la nuit n'était pas encore tout à fait tombée, projetant dans la vaste chambre des ombres effrayantes. Elle examina les murs, où s'étalaient quelques photos. Elle comprit immédiatement où elle se trouvait en mettant la main sur une photographie animée représentant un blond qu'elle connaissait par cœur.

-Drago…

Il souriait, aux côtés de sa meilleure amie de toujours, Pansy Parkinson, et il lui sembla qu'elle n'avait jamais vu le blond aussi heureux. Jamais. Elle ne savait néanmoins pas ce qu'elle faisait dans la chambre de son ancien amant, ce celui qu'elle avait cru être l'amour de sa vie. Elle savait qu'il était parti, qu'il avait quitté l'Ordre, qu'il était retourné aux côtés de son maître, mais elle savait aussi qu'il n'avait jamais cessé de lui écrire, de penser à elle… Mais il l'avait quittée, comme un lâche, alors qu'ils auraient enfin pu être heureux. Et elle ne savait pas si elle serait capable de lui pardonner. Elle ne l'avait jamais compris, et c'était ce qui le rendait à la fois si attirant et si mystérieux. Il l'effrayait. Elle ne voulait pas retomber amoureuse de lui, elle ne voulait pas trahir son Adrian. Mais… Les sentiments qui les liaient étaient si puissants, bien plus que quelques rancœurs passagères. Elle soupira. Peu importait. Jamais elle ne retournerait auprès de Drago Malefoy. Jamais plus elle ne souffrirait ses égarements, ses doutes, ses trahisons. Et Adrian… Elle n'oubliait pas ce qu'il lui avait caché, elle n'oubliait pas que les deux hommes lui avaient coûté son enfant. Jamais elle ne pourrait vraiment leur pardonner. Elle n'en avait pas la force. Elle était emportée par un destin plus grand qu'elle, les voyait se disputer, se battre, se détruire, sans lui laisser le choix. Elle n'avait jamais eu le choix. Et elle ne savait pas si elle l'aurait un jour. Pouvait-on parler d'amour, quand Drago l'enlevait de l'infirmerie après qu'elle ait tout perdu par sa faute et l'enfermait dans son manoir lugubre ? C'était ridicule. Elle n'était que la victime de tous ces sorciers à l'égo surdimensionné. Pourrait-elle y survivre longtemps ? Elle avait toujours eu l'impression de tout maîtriser, de prendre ses propres décisions… En réalité, elle n'avait fait que suivre sa profonde loyauté, son courage, sans jamais penser à elle. Et voilà où elle en était.

La porte de la chambre s'entrouvrit, et une silhouette qu'elle connaissait par cœur s'avança. Elle ne dit rien, ne bougea pas. Jamais plus elle ne ferait le premier pas, pas après toutes ces trahisons.

-Hermione…

Drago la regardait, tentait de s'approprier chacun de ses traits en la scrutant avec intensité. Elle lui avait tellement manqué. Elle était toujours aussi belle. Mais ses traits étaient tirés par la fatigue et par la douleur, et ses yeux autrefois étincelants semblaient éteints, morts. Elle le regardait comme un étranger. Il sentit son cœur se serrer. Pourquoi fallait-il que leur histoire soit si complexe ? En lui ôtant une partie d'elle-même, Adrian et lui s'étaient assurés qu'elle ne puisse jamais vraiment les aimer, pas sans arrière-pensée, pas sans une haine sous-jacente. Ils ne pourraient jamais vraiment l'avoir, ni l'un ni l'autre. Ils seraient condamnés à sa haine et à son indifférence. Hermione prit la parole, et sa voix lui sembla vide, absente.

-Tout sera bientôt fini, Drago. Vous allez perdre. Ton pathétique petit maître sera vaincu.

Drago hocha la tête et se laissa tomber dans un fauteuil attenant. Hermione posa sur lui son regard désintéressé. Il avait vieilli, semblait las. Des cernes venaient creuser son visage fin, et une balafre sur son cou venait confirmer son impression : Drago Malefoy avait perdu dans cette guerre toute sa prétendue maitrise, il s'était perdu lui-même. Ses cheveux blonds désormais courts avaient perdu de leur splendeur d'antan. Tout semblait s'effondrer.

-Peut-être. Je m'en moque.

Hermione rit doucement en passant une main sur son ventre désormais vide.

-à quoi t'intéresses-tu alors ? Pourquoi être parti si tu ne te soucies même pas de ta cause ? POURQUOI T'ETRE BATTU CONTRE NOUS ?! POURQUOI…

Sa voix faiblit.

-Pourquoi m'avoir abandonnée ?

Drago baissa les yeux.

-Je ne sais pas. Je suis faible et lâche. Je n'avais plus la force, je ne savais plus quoi faire, je te mettais en danger… Je n'ai pas d'excuse valable. Mais je n'ai jamais cessé de te protéger, même quand tu me haïssais. Je ne cesserai jamais.

Hermione détourna le regard et alla s'asseoir sur le bord de son lit. Elle rit doucement.

-Belle protection.

Il y avait entre eux une distance palpable, irréductible. Comme un mur de mensonges, de trahison, de colère, qu'ils ne pouvaient pas effacer. Hermione soupira et reprit.

-Pourquoi suis-je ici, Drago ? Pourquoi ne m'as-tu pas laissée avec mes amis ? N'ai-je pas le droit au bonheur ? Pourquoi encore me torturer ?

Il baissa la tête.

-La dernière Bataille approche. Je refuse que tu fasses partie des cadavres. Si nous gagnons, tout ton camp sera décimé, tes amis torturés et tués. Tu n'en seras pas. Tu seras protégée.

-Et si nous gagnons ?

Drago lui sourit doucement et il lui sembla que son cœur se brisait à nouveau.

-Alors je serai tué, tu seras libre.

Hermione détourna le regard et observa la nuit tombante à travers les hautes fenêtres. Le crépuscule leur convenait bien. Toujours au bord de l'abime, de la fin, ils luttaient pour ne pas sombrer. Mais cette fois-ci, il était trop tard. Ils étaient allés trop loin, trop loin dans la haine, dans la séparation, dans la souffrance. Il n'y avait pas de retour possible, ils ne pouvaient plus combler ce vide. Ils étaient condamnés à l'obscurité. Un voyage sans retour au bout de la nuit, au bout de leurs rêves, de leurs passions. Jusqu'à la mort.

Drago baissa la tête.

-Je suis désolée.

Hermione ne le regarda pas.

-Je suppose que je suis ta prisonnière.

Drago soupira.

-Personne n'a le droit de monter dans cette aile. Tu peux t'y promener mais je te déconseille d'essayer d'aller au-delà du jardin d'hiver. Il y a des monstres dans cette propriété que tu ne veux pas croiser. Si tu essayes de t'enfuir, je le saurais. Tu ne peux pas transplaner et il n'y a rien à des dizaines de kilomètres à la ronde. Je n'ai aucune envie de te courir après dans la forêt. Ne fais rien de stupide Hermione, s'il te plait.

La brune hocha la tête, lasse. Elle n'avait plus envie de se battre.

-Evidemment, les autres mangemorts ne sont pas au courant de ta présence ici, et tu n'as pas envie qu'ils le soient.

Nouveau hochement de tête.

Le blond se leva, voyant qu'il n'obtiendrait rien de plus, et se dirigea vers la porte. Il allait l'ouvrir quand il se ravisa et se tourna vers sa nouvelle prisonnière.

-Je ne faisais pas semblant, Hermione. Ça n'a jamais été faux.

Une larme roula sur la joue de la brune.

-Je ne sais pas. Je ne me souviens pas… d'avant.

Drago soupira.

-Je sais. Je suis tellement désolé. Mais moi je me souviens, et c'était magnifique. Pur. Il n'y avait rien, il n'y a jamais rien eu de plus beau.

Hermione se leva doucement et se dirigea vers lui.

-C'est terminé. Cette époque… Nous… il n'y a plus rien. Je t'ai attendu longtemps. Tu n'es jamais venu.

Drago haussa un sourcil.

-Je suis venu, tu étais… occupée.

Hermione le regarda, une lueur sombre dans ses yeux.

-Ne critique pas Adrian. Il est resté, quand tu es parti. Il est tout ce que tu aurais pu être, si tu n'étais pas si lâche ! C'est un homme bon.

-Tu ne le connais pas.

Hermione rit tout bas.

-Je ne te connais pas.

Drago sembla avoir reçu un coup de poignard en plein cœur, mais Hermione continua.

-Et tu ne me connais pas, tu ne connais que la première Hermione, qu'un souvenir, et tu n'as jamais cherché à connaître celle que je suis devenue.

Le blond hocha la tête, et passa un doigt sur sa joue de velours.

-Jamais tu n'as autant ressemblé à celle que tu as été.

Hermione était pétrifiée. Et elle ne savait pas si c'était de désir ou de rage. Elle se recula, comme s'il l'avait brûlée.

-Je te hais.

Elle le haïssait, pour tout ce qu'il avait gâché, pour tous les rêves qu'il avait brisés, méthodiquement. Elle le haïssait pour ne pas être capable de le haïr. Pour ne pas être capable d'étouffer ces sentiments répugnants qui la faisaient se détester pour sa faiblesse. Drago planta son regard dans le sien, et elle put y lire tout un profond désespoir, et une toute aussi grande résignation.

-Je sais. Mais si c'est le prix de ta survie, alors je le porterai avec plaisir. Tu n'auras plus à me supporter. Si le Lord parvient à vaincre, je t'offrirai une nouvelle vie. Tu partiras, tu ne me verras plus jamais. Tu vivras.

-Et si je n'ai plus envie de vivre ?

Drago secoua la tête.

-Je ne peux pas exister dans un monde où tu n'es pas.

Hermione se détourna.

-Au revoir, Drago.

Le blond hésita un instant, puis posa sur un guéridon un flacon qui brillait doucement sous la lumière de la lune.

-Prends ça comme un présent. Le dernier. Le plus important. Je suis désolé de ne pas t'avoir dit la vérité plus tôt. C'était… symbolique. Mais c'était vrai.

Il sortit, la porte claqua, et Hermione se sentit plus seule que jamais. Elle se laissa tomba au sol et pleura, longtemps, tout ce qu'ils avaient perdu, toute une vie gâchée, sans possibilité de retour. Son poing serré autour du petit flacon de cristal, elle pleura – pour la dernière fois, elle se le promettait.

Drago se laissa tomber dans son fauteuil préféré, un verre de whisky pur feu à la main. Il lui semblait qu'il venait de perdre une partie de lui-même. La meilleure, sans aucun doute. Il ne lui restait que des regrets, des remords, et des perspectives peu réjouissantes. Mais il l'aurait sauvée. Elle vivrait. Et c'était le plus important.

Il soupira en voyant sa promise passer le seuil de la porte. Rosalie lui lança un regard amer et s'assit en face de lui.

-Pourquoi l'avoir amenée ici ? Je devrais te dénoncer au maître.

Drago lui lança un petit sourire ironique.

-ça ne te concerne en rien. Si tu ne veux pas que je te tue, je te conseille de tenir ta langue. Et si tu le dis au maître ou à mes parents… Tu seras seule, ancienne fiancée d'un traître. Tu perdras tout.

-Pourquoi devrais-je supporter la présence de ta catin sous mon toit ?

Drago observa sa fiancée. Ses longs cheveux bouclés invitaient à la sensualité et au touché, ses doigts fins et délicats criaient la noblesse de son lignage, tout comme sa posture aristocratique et ses traits fins, tout comme son collier de perles de la mer de Chine, tout comme le diamant à sa main gauche, tout comme sa robe de soie d'Arachnée, tout comme ses yeux cruels. Il la détestait. Il aurait donné sa vie pour la voir disparaitre. Mais il avait besoin d'elle pour assurer sa couverture s'il voulait sauver Hermione.

-Insulte-la encore une fois, et tu regretteras d'être née. Fais en sorte que les elfes la nourrissent et qu'elle ait tout ce qu'elle demande.

Rosalie contempla ses ongles parfaitement taillés et hocha sèchement la tête.

-Bien. Ta mère m'a envoyé un hibou. Le mariage aura lieu dans un mois.

Drago soupira.

-En quoi cela me concerne-t-il ?

-Fais en sorte de cacher ta petite Sang de Bourbe, le Manoir sera envahi par tes…amis, et je doute qu'ils apprécient sa présence.

-Ne t'approche pas d'elle. Je m'en occupe.

Ils s'observèrent avec méfiance. Ils ne s'aimaient pas. Il obéissait à ses parents et se protégeait, elle accédait aux plus hautes sphères de la société sorcière et au pouvoir qu'elle désirait tant. Ils devaient composer l'un avec l'autre, bon gré mal gré. Rosalie caressa la légère bosse que laissait entrevoir sa robe de soie noire, un petit sourire aux lèvres.

-Règle cette histoire. Mais je ne veux pas que mon fils vive sous le même toit que cette… vermine.

Elle se leva. Elle savait que Drago ne lui ferait rien. Elle portait son héritier.

Comme s'il avait lu ses pensées, le blond éclata d'un rire sans joie.

-Si tu crois que je ne te tuerais pas pour ce petit bâtard, tu te trompes lourdement.

Rosalie baissa la tête.

-C'est ton fils, que tu le veuilles ou non.

Drago la toisa avec mépris.

-Il n'est rien pour moi. RIEN ! Tu n'aurais jamais dû être la mère de mon fils.

Rosalie lui sourit tristement.

-Mais celle que tu voulais pour femme est une Sang de Bourbe qui te déteste, et je suis ta fiancée. Tu ferais bien de t'y résigner si tu ne veux pas tout perdre. Scorpius est ton fils, accorde lui l'amour que tu ne peux pas me donner.

Drago ne répondit pas, les yeux fermés, tant la douleur qui lui secouait le cœur était forte. Scorpius. L'enfant qu'il aurait eu avec Hermione se serait nommé Scorpius. Pas celui de cette arriviste, de cette femme fade et sans intérêt qui serait bientôt la sienne. Rosalie, consciente de sa douleur, continua sans une hésitation.

-Finissons-en. Nous serons bientôt mariés, Scorpius sera bientôt né, et nous vivrons notre vie, chacun de notre côté.

Drago sourit. Elle était digne de ce que sa mère appelait une dame Malefoy. Mais elle représentait tout ce qu'il exécrait. Il ne pourrait jamais vivre avec pareille femme. Il jeta son verre au feu et transplana, en se rappelant de l'un des plus beaux jours de sa vie.

Elle était assise sur leur grand lit, nue, et si belle. Elle observait le port illuminé, la mer calme et huileuse, les feux d'artifice, la vieille ville. Où étaient-ils ? Il l'avait enlevée, pour leur anniversaire, et emmenée dans un petit village d'Amérique du Sud, où ils avaient oublié, quelques jours, les ravages de la guerre. Et en cet instant, rien n'était plus beau que son visage éclairé d'un sourire étincelant, que son corps pâle et faiblement éclairé par la lumière du soir. Elle se tourna vers lui et lui murmura quelques mots, leurs mots. Il la rejoint, la serra délicatement contre lui, comme s'il avait peur de la briser. Le contact de sa peau douce contre la sienne était électrisant. Elle posa ses lèvres sur sa joue, puis embrassa doucement son front, son nez, les contours de sa mâchoire, effleurant d'une caresse son torse offert. Il l'admirait, émerveillé. Ses doigts courraient sur son corps, et il ne fut bientôt plus qu'un corps brûlant de désir. Il souleva la jeune femme, qui entoura sa taille de ses jambes en riant aux éclats, avant de l'embrasser avec passion. Il l'embrassa en retour, un sourire aux lèvres.

-Je t'aime, je t'aime, je t'aime…

Sa litanie ne s'arrêtait pas. Il ne parvenait pas à exprimer ce trop plein de bonheur qu'il ressentait, et qu'il n'avait jamais connu. Il attrapait sa baguette pour lui lancer leur habituel de contraception, quand Hermione stoppa son mouvement d'une caresse. Elle secoua la tête. Et, d'un regard, il comprit qu'elle lui offrait le plus beau des cadeaux. Qu'elle voulait fonder une famille, avec lui. C'était plus qu'un rêve. Il ne pensa pas à la guerre qui les rattraperait le lendemain, ni au monde torturé dans lequel il vivait, et quand ils s'endormirent, c'est avec espoir qu'il songea au futur.


Voilà voilà pour ce nouveau chapitre riche en révélations. Nous nous approchons peu à peu de la fin... Soyez prêts. J'attends vos reviews pour publier la suite ! à très bientôt j'espère, Joyeux Noël et une magnifique Nouvelle année.

XXX.