Bonjour, bonsoir !

Ayant passé mes partiels et étant en vacances, me voici de retour avec cette fois une traduction autorisée de la merveilleuse histoire de LauGS, A Break in The Clouds (disponible ici en VO : s/8566629/1/A-Break-in-the-Clouds), et vous pouvez trouver l'auteur sur son Tumblr : heartsmadeofbooks. La couverture a été réalisée par une ami(e) de l'auteur, Brandi (Tumblr : thatdarntrain).

La fiction sera mise à jour tous les jeudis. (Pour compenser le manque de Glee le jeudi pendant le hiatus, allez :D)

Disclaimer : Rien ne m'appartient, même pas les mots. Un grand merci à LauGS pour m'avoir laissée traduire.


Chapitre 1

La nuit où il se fit battre après avoir quitté le travail, fut la nuit où Chris décida qu'il ne pouvait plus rester à Clovis.

Il était épuisé et la seule chose à laquelle il pouvait penser était de se glisser dans son lit confortable et chaud après deux très long, très tourmenteux postes au supermarché où il travaillait depuis qu'il avait fini le lycée. Il était presque minuit et il n'était pas sûr de pouvoir rester éveiller dans le bus qui le ramènerait à la maison. Il traversait le parking sombre quand trois types qu'il connaissait, malheureusement, très bien, l'encerclèrent.

« Hey, tapette, » dit celui du milieu. Il avait un an de plus que Chris. Il se souvenait encore de lui du lycée, de toutes les fois où Brandon Michaels le bousculait, l'enfermait dans les vestiaires, crachait des mots de haine à son visage.

Chris ne répondit pas. Il baissa les yeux, comme il l'avait appris à l'école, et continua de marcher.

« Qu'est-ce qu'il y a, fillette ? Où sont passées tes manières ? » Le deuxième, Ian Lowell, commença à marcher à côté de lui. Il posa un bras autour des épaules de Chris, qui eut un mouvement de recul.

Quelques années auparavant, Chris aurait sorti des remarques intelligentes et aurait abasourdi les trois idiots avec ses sarcasmes subtils. Mais il avait appris à ses dépens que ce n'était pas la meilleure chose à faire. Ça avait bien marché pour les cinquante premières fois, mais après cela, ça avait juste rendu ses tyrans encore plus furieux.

« Allez, soit pas rabat-joie, » dit Brandon avec un sourire en coin. « Pourquoi se précipiter ? Reste un petit peu. On pourrait s'amuser. »

La poigne d'Ian se resserra. Chris essaya de s'éloigner, sans succès, et Ian prit l'opportunité pour lui arracher son sac des mains. Chris pâlit.

« Non, s'il-vous-plaît, » dit-il, et il détestait avoir à supplier. Il détestait tellement ça. « Les médicaments de ma sœur sont là-dedans. Rendez-le moi, s'il-vous-plaît. »

Il se fichait de tout ce qu'il y avait dedans, hormis les pilules d'Hannah. Il avait reçu son salaire le jour précédent et s'était arrêté au magasin pour prendre ses prescriptions avant d'aller au travail plus tôt dans la journée. Ils pouvaient garder le maudit sac s'ils le voulaient, mais pas les médicaments d'Hannah.

« Et si on ne te croyait pas ? » demanda Brandon, souriant d'un air satisfait. « Qu'est-ce qu'il y a vraiment là-dedans ? »

« Fouillez-le si vous voulez, mais donnez-moi juste les médicaments, » répondit Chris, et il pouvait sentir la colère grandir à l'intérieur de lui. Il le pouvait toujours, mais il n'avait rien fait pour ça depuis un long moment… « Maintenant. »

« Est-ce que t'es en train de me donner des ordres, homo ? » cracha Ian, fronçant les sourcils.

« Non ! Je vous demande juste de me donner les affaires de ma sœur ! » Il serra les poings le long de son corps.

Il n'était pas sûr de ce qui arriva après ça. Il sut uniquement qu'il essaya d'attraper son sac à nouveau, mais quand Ian bougea pour le protéger derrière son dos, il dut frôler sa main contre lui. Il ne se souvenait pas vraiment d'avoir touché une partie du corps du garçon, mais le regard horrifié et dégoûté sur le visage d'Ian et sa réaction furieuse lui fit comprendre qu'il l'avait peut-être fait.

« Ne me touche pas, pédé ! » s'écria Ian et Brandon le poussa, le prenant de court. Il trébucha sur une fissure dans la chaussée et tomba au sol.

Il ne comprit pas qu'il était frappé jusqu'à qu'il sentît la chaussée froide et dure contre son visage tandis qu'il essayait de protéger sa tête dans ses bras. Il ne sentit pas la douleur, pas vraiment, tandis qu'il essayait de protéger sa tête dans ses bras. Il était trop occupé à se soucier de son sac. Les médicaments d'Hannah, j'ai besoin des médicaments d'Hannah.

Finalement, ils semblèrent finir par s'ennuyer. Ils donnèrent un coup de pied dans son ventre une dernière fois avant de s'éloigner, lui criant dessus alors qu'ils quittaient les lieux, mais Chris ne comprit rien de ce qu'ils disaient. Il resta immobile jusqu'à ce que le silence l'entoure et, à ce moment-là, seulement à ce moment-là, il écarta ses bras de sa tête et scruta la rue sombre. Son sac était abandonné à quelques mètres.

Il y avait du sang sur l'asphalte, sur sa chemise, coulant sur son visage, mais il n'y prêta pas attention. Apparemment, ils avaient trouvé que frapper Chris était beaucoup plus marrant que fouiller ses affaires.

Il s'en foutait. Il s'en foutait de tout, désormais.

Le chemin du retour était flou à ses yeux. Il n'était pas sûr s'il avait marché tout le long du trajet ou s'il avait pris le bus. Il réalisa qu'il était arrivé seulement quand il entendit le hoquet de sa mère et qu'une paire de mains le saisissait par les épaules.

« Christopher ! Que t'est-il arrivé ? Oh mon Dieu, » Karyn Colfer semblait complètement terrifiée, mais Chris l'envoya balader et déposa le flacon de pilules dans ses mains.

« Je vais me coucher, » marmonna-t-il avec le peu de force qui lui restait.

Il entendit sa mère l'appeler, lui demandant de lui dire ce qui c'était passé, mais Chris l'ignora et claqua la porte de sa chambre derrière lui.

C'était sa vie.

Quand il était petit, il rêvait principalement de quitter le plus vite possible Clovis. Mais Hannah vint au monde et ces rêves n'étaient plus importants parce que sa petite sœur avait besoin de lui. Ses parents ne pouvaient pas payer tous ses frais médicaux par eux-mêmes, alors l'université n'était plus envisageable pour Chris. Il finit le lycée et commença immédiatement à travailler, et ses rêves de faire sa vie dans une plus grande ville disparurent dans le néant.

Il était coincé, mais ne l'étaient-ils pas tous ?

A un moment, il dut finir par s'endormir dans sa chemise tachée de sang et avec la peau de son visage tendue et irritée à cause des larmes qu'il ne savait pas avoir autorisé à couler. Mais il n'était pas le seul qui pleurait. Il se réveilla et découvrit sa mère, assise sur le bord du lit, caressant ses cheveux doucement et pleurant silencieusement.

« Tu dois partir d'ici… »

« Non. Je vais bien, » la rassura-t-il, mais sa voix était sans émotion. « C'était une mauvaise nuit, c'est tout. »

« Christopher…, » dit Karyn d'un ton implorant.

« Hannah a besoin de moi, » marmonna Chris et il enfonça ses doigts dans son oreiller.

« Tu as raison, » dit-elle d'un hochement de tête avant que son corps ne commence à trembler de sanglots étouffés. « Elle a besoin de son frère, mais tu ne seras plus là pour elle si quelque chose de pire t'arrive… »

« Maman… »

« Et s'ils te tuaient, un jour ? » Elle couvrit son visage de ses mains. « Et je n'ai rien fait pour l'éviter… »

Chris s'assit et enveloppa sa mère dans ses bras, même si ça lui faisait mal. Ses muscles commençaient à sentir la douleur des coups. « Il n'y rien qu'on puisse faire. Tu le sais. »

C'était vrai. Ses tyrans avaient toujours su comment éviter de se faire attraper en s'assurant qu'il n'y avait personne aux alentours quand ils faisaient de la vie de Chris un enfer sur terre, mais le père de Brandon était aussi en charge de la police de Clovis et il s'était assuré d'avoir couvert les erreurs de son fils.

« Tu peux quitter cette ville, Christopher, » Karyn regarda dans les yeux bleus de Chris. « Tu as toujours été trop brillant pour Clovis de toute façon… »

« Ce n'est pas si facile, » déglutit Chris. Il n'avait nulle part où aller. Et ce n'était pas comme s'il n'avait jamais rêvé de partir et de ne jamais regarder en arrière… c'était juste qu'il avait commencé à croire que ça ne devait pas arriver.

« Rien n'est facile, » elle se pencha un peu pour embrasser son front. « Nous avons passé tellement d'années inquiets de ce qui pourrait arriver à Hannah que nous n'avons pas suffisamment payé attention à ce que tu traversais. Tu es notre enfant, notre petit garçon… ce n'est pas la vie que je voulais pour toi. »

Chris ne répondit pas. Dire que ce n'était pas la vie qu'il aurait voulu pour lui non plus n'aiderait en rien.

Karyn l'attira dans une étreinte et il ferma les yeux, inhalant le doux parfum du shampooing de sa mère. Il s'imagina pendant une minute ce que la vie pourrait être s'il vivait autre part, les lieux où il pourrait aller, les choses qu'il pourrait faire, les peurs qu'il pourrait perdre. Peut-être que, sorti de Clovis, il pourrait même être capable d'obtenir un meilleur travail, d'obtenir assez d'argent pour aider ses parents avec les soins d'Hannah. Même avec la douleur qu'il ressentait juste alors et juste là, Chris ne pouvait pas s'empêcher de sentir une petite chatouille dans son estomac, cette chatouille qu'il ressentait quand les personnages de ses livres ou films préférés étaient sur le point de partir à l'aventure. Il s'était rongé toute sa vie par le désir que quelque chose hors du commun lui arrive, mais peut-être qu'il avait juste besoin de partir et de le chercher.

Il hocha la tête contre l'épaule de sa mère et elle le comprit sans avoir besoin de mots.

Il avait besoin d'essayer avant qu'il ne soit trop tard.


Chris rangea sa vie dans une valise et un sac à dos, et c'était bon. Il essaya de ne pas trop penser à ce qu'il faisait, parce qu'il y avait une petite voix dans sa tête lui disant qu'il était fou, mais il devait l'ignorer.

Il essaya de donner de l'argent à ses parents pour les soins d'Hannah, mais ils ne le prirent pas. Quand ils tournèrent le dos, il glissa une enveloppe avec la moitié de ses économies dans une étagère. Partir était déjà assez dur. Partir avec le sentiment qu'il ne faisait pas assez pour sa sœur était clairement impossible.

Le pire fut d'expliqué à Hannah ce qui se passait, pourquoi il ne pouvait pas rester avec elle, pourquoi il devait partir ailleurs, pour être en sécurité. Hannah le regarda fixement pendant une longue minute, comme si elle analysait ses mots, avant de se jeter dans ses bras. Chris n'était pas sûr à cent pourcent qu'elle ait compris ce qu'il avait dit, mais cela importait peu. Tout ce qui lui importait était le corps de sa sœur pressé contre le sien, le tenant comme si elle n'allait pas le laisser partir.

Chris pensait encore à cette étreinte quand son père le conduisit jusqu'à l'abris-bus. Il savait qu'il parlait, lui donnait des instructions, lui disant quoi faire s'il avait besoin de quelque chose, mais Chris ne pouvait démêler les mots sortant de la bouche de son père. Il était perdu dans ses propres pensées, sachant que sa vie était sur le point de changer (elle avait déjà changé, même s'il était encore trop étourdi pour le remarquer) et que tout était incertain, désormais. Il ne savait pas où il allait, où il allait vivre, s'il serait capable d'avoir un travail… qu'est-ce qu'il faisait ?

Chris regarda désespérément son père alors qu'ils faisaient la queue pour acheter son ticket de bus et il se sentit en train de paniquer. Tim dut s'en apercevoir, car il attira soudainement Chris sur le côté, l'amenant près d'un banc de bois et le forçant à s'asseoir.

« Tout va bien se passer, Chris, » dit-il d'une voix calme. « Tu n'as pas ta place ici. Tu peux avoir une vie si incroyable… »

Chris n'était pas sûr qu'il puisse, mais il hocha la tête, parce qu'il semblait qu'il n'y avait plus de retour en arrière désormais.

Le vrombissement du moteur se remettant en marche était étrangement apaisant, bien qu'il avait pensé que ç'aurait été plutôt le contraire. Il avait une place près de la fenêtre et pouvait encore voir son père se tenant sur le trottoir, attendant que le bus parte, attendant de voir son fils quitter la ville qui n'avait fait que le faire souffrir.

Chris prit une profonde inspiration, resserrant sa poigne sur le ticket qui lui montrait une partie de sa destinée. Los Angeles. Il allait à Los Angeles.

Ça n'avait pas été un choix mûrement réfléchi. C'était le premier bus qui partait pour une ville où rien ne serait comme ici. Ses autres options avait été l'Idaho et l'Ohio, et il n'allait pas se mettre lui-même dans un autre enfer. Los Angeles était la seule option qu'il pouvait choisir en ce moment et, d'une certaine façon, c'était compréhensible.

Il pressa son front contre la vitre froide de la fenêtre et regarda son père lui dire au revoir d'un signe de main, forçant un sourire sur ses lèvres. Le visage de Chris était complètement neutre, il y avait une boule dans sa gorge et la seule chose qu'il se trouva capable de faire fut d'hocher la tête. Peut-être était-ce un merci silencieux, ou une promesse silencieuse, ou un aveu silencieux que c'était la bonne décision.

Et puis son père devint une silhouette devenant de plus en plus petite avec la distance et Chris fut rapidement plus loin de sa maison qu'il ne l'avait jamais été.

Les quelques heures qu'il lui prit pour arriver à Los Angeles étaient les heures les plus tendues de la vie de Chris. Il était agité et nerveux, sa tête remplie de toutes les choses qui pourraient mal se passer et toutes celles qui pourraient bien aller, et ses rêves devenaient confus avec ses peurs dans un désordre qui lui envoyait des frissons le long de son corps.

Il essaya de lire un livre, il attrapa son ordinateur portable et essaya de taper quelques mots dans un document sur lequel il travaillait, il écouta de la musique, il mangea l'un des sandwichs que sa mère avait emballé pour lui. Rien ne marcha pour garder son esprit vide et au plus profond de lui-même, il n'était pas sûr que c'était ce qu'il devait faire : il avait en fait besoin de faire des projets. Qu'allait-il faire une fois qu'il aurait posé un pied dans la ville ?

La première chose à faire était de trouver un endroit où dormir. Un hôtel pas cher ferait l'affaire pour l'instant présent. Il compta dans sa tête l'argent qu'il savait être dans son portefeuille. Il n'y avait pas plus de deux cents ou trois cents dollars, après ce qu'il avait laissé pour Hannah. Il allait devoir trouver un travail le lendemain ou il allait mourir de faim quand le weekend arriverait.

Le bus arriva à un arrêt avant même que Chris ait le temps de s'y préparer. Il sentit immédiatement l'ambiance de Los Angeles courir sous sa peau. C'était tellement différent de Clovis. Les petites villes étaient tranquilles et ne changeaient pas, mais Los Angeles semblait se transformer devant ses yeux et il eut du mal à saisir l'ensemble depuis la fenêtre. Les bâtiments, le trafic, les gens allant et venant…

S'il ne pouvait trouver sa place dans une ville comme celle-ci, alors où la trouverait-il ?


Même si le soleil de LA était lumineux, certaines choses ne l'étaient pas, pas pour Chris.

Il marcha pendant des heures, il se perdit complètement et il visita trois différents hôtels pour finalement se retrouver complètement sans abri. Le premier était trop cher, il pouvait s'offrir le deuxième, mais il était complet, et le dernier n'était pas cher et avait des chambres de libre, mais Chris était sûr qu'il aurait à partager son lit avec des rats et des cafards. Il était désespéré et épuisé et, quand le jour disparut et la nuit commença à se glisser autour de lui, il considéra même l'idée de revenir au dernier hôtel.

Il finit dans une sorte de café qui portait un panneau disant qu'il était ouvert vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Il se glissa dans l'un des compartiments et laissa sa tête tomber sur la table, gémissant pour lui-même. Il ne pouvait pas croire en sa malchance.

Devrait-il avoir à admettre sa défaite et retourner à Clovis ? Devrait-il avoir à ramper à quatre pattes jusqu'au supermarché et supplier pour ravoir son travail ? Devrait-il avoir à continuer d'attendre pour voir si aujourd'hui était le jour où l'homophobie et l'intolérance disparaitrait à jamais ?

« Que désirez-vous ? » dit une voix et Chris leva les yeux pour trouver une fille avec un tablier rouge et des cheveux noirs, énormes et volumineux qui le regardait, bloc-notes à la main et faisant des bulles avec son chewing-gum, tandis qu'elle courbait un sourcil, en attente.

« Hm, » Chris pensa rapidement. Il n'avait rien mangé de plus que le sandwich de sa mère de toute la journée. « Un Coca Cola Light et une omelette au jambon-fromage, s'il-vous-plaît ? »

La serveuse hocha la tête et s'éloigna sans un autre mot. Chris soupira et regarda autour de lui : c'était un endroit relativement petit avec des canapés le long des murs et quelques tables placées aléatoirement au milieu de la salle. Il y avait une petite scène dans un coin, avec un clavier dessus. Ce n'était pas très bondé et il y avait un air simple et accueillant que Chris appréciait après la journée qu'il venait de passer. Ses sacs étaient posés sur le canapé à côté de lui et il n'avait jamais eu autant envie de prendre une douche qu'en ce moment. Son téléphone vibra dans sa poche et il le sortit pour trouver un message de sa mère qui ne le fit que se sentir encore plus mal.

De : Maman.

Tu nous manques déjà mais nous sommes si heureux que tu commences une nouvelle vie. Appelle-nous dès que tu es installé !

Chris ferma les yeux et tint son téléphone un peu plus serré que nécessaire, le sentant s'enfoncer dans la paume de sa main. Ça avait été une mauvaise idée, mais ses parents étaient tellement plein d'espoir, si convaincus que c'était ce dont il avait besoin…

« Salut, tout le monde ! Je vais jouer un peu de musique, maintenant. J'espère que vous aimerez. »

La voix surprit Chris, lui faisant ouvrir les yeux lorsque les premières notes d'un clavier commencèrent à être jouées. Il jeta un coup d'œil à la scène dans le coin, qui n'était plus vide et sombre à présent. Il y avait un type assis au clavier, désormais, avec les cheveux les plus en pagaille que Chris avait jamais vu. Ses boucles longues et sombres encadraient son visage et Chris vit un éclair d'yeux étincelants avant que sa vue ne soit bloquée par la serveuse amenant son plat.

Le gars commença à chanter doucement dans le micro. Il avait une jolie voix, rauque et douce à la fois et Chris se retrouva incapable de regarder ailleurs.

Somewhere over the rainbow
Way up high,
There's a land that I heard of
Once in a lullaby.

Somewhere over the rainbow
Skies are blue,
And the dreams that you dare to dream
Really do come true.

Someday I'll wish upon a star
And wake up where the clouds are far
Behind me.

A ce moment-là, il s'arrêta, fronça les sourcils et ses doigts hésitèrent un peu sur le clavier. « Euh, comment c'est, après ? Hm. Ah, oui. »

Where troubles melt like lemon drops
Away above the chimney tops
That's where you'll find me.

Somewhere over the rainbow
Bluebirds fly.
Birds fly over the rainbow.
Why then, oh why can't I?

If happy little bluebirds fly
Beyond the rainbow
Why, oh why can't I?

Le bruit des gens autour de lui ne s'arrêta jamais. Des bruits de fourchettes claquant contre les assiettes, de verres posés sur les tables, de conversations, de rire et de gens allant et venant… comment pouvaient-ils continuer comme ça ? Chris regarda autour de lui, confus. Comment pouvaient-ils continuer à bouger quand de la si belle musique était jouée en même temps ? Pourquoi ne s'arrêtaient-ils pas et n'écoutaient-ils pas pendant une minute ?

Pour lui, c'était comme une oasis au milieu du désert qu'était sa vie. C'était apaisant et beau et pendant quelques secondes, il s'autorisa à oublier ce qui le traversait en ce moment. Il oublia qu'il n'avait nulle part où aller. Il écouta simplement.

Si quelqu'un avait demandé à Chris combien de temps il était resté assis à écouter la musique, il n'aurait pas été capable de répondre. Cela avait semblé être juste une faction de seconde, mais le nombre de chansons que le garçon joua l'informa que c'était au moins une heure, si ce n'est plus. Chris était surpris de la diversité des musiques que le garçon pouvait jouer. Il changeait aisément du rock classique à Disney en passant par Etta James, et même Britney Spears.

Tout le monde autour de lui s'occupait encore de leurs affaires, comme si la musique n'était pas jouée. Juste deux ou trois personnes s'arrêtaient pour applaudir après chaque chanson, mais le son était enterré sous le claquement bruyant des assiettes.

Puis, le garçon se leva et sourit à l'audience indifférente et salua adorablement d'un signe de main, ses boucles bondissant sur sa tête. « Merci de m'avoir reçu, tout le monde ! A la prochaine fois ! »

Et il partit. Chris soupira et s'allongea contre le dos de sa chaise, réalisant soudainement à quel point il était fatigué. Il avait besoin de sommeil et il n'avait aucune idée d'où aller. Il avait deux options, trois s'il considérait l'hôtel pourri qu'il pouvait se permettre : rester ici et voir ce que le lendemain apporterait, ou aller dehors et trouver un banc dans une rue tranquille ou un parc où il pourrait s'allonger et dormir.

Il ferma les yeux à nouveau et se demanda s'ils le jetteraient dehors s'il faisait une petite sieste sur la table. La meilleure chose à faire à laquelle il pouvait penser était de rester ici et d'essayer de trouver un travail dans la matinée.

« Salut ! »

Les yeux de Chris s'ouvrirent brusquement et il sursauta légèrement, effrayé. Le garçon qui chantait tout à l'heure se tenait à côté de sa table et lui souriait. Son sourire était incroyablement grand et joyeux, ses dents apparaissant et ses yeux se plissant un petit peu.

« Je… salut ? » marmonna Chris sans mot dire, pas sûr de ce qu'il devait faire.

« Je voulais juste venir te dire merci, » dit le garçon en haussant les épaules, continuant de sourire. « Je crois que t'es la seule personne qui faisait attention à moi, alors j'apprécie. »

« Oh, » rougit Chris. Il pouvait la sentir, la chaleur montant dans ses joues. « Eh bien, tu étais super, donc… »

« Merci, vieux, » il hocha la tête et fit un geste vers le bout du canapé à l'opposé de celui de Chris. « Ça te dérange si je m'assoie ? »

Chris put à peine cacher sa surprise. « Non, non, assis-toi. »

Miel. Maintenant qu'il était assis de l'autre côté de la table, Chris pouvait voir que les yeux du garçon était de couleur miel et aussi étincelant qu'il l'avait deviné quand il était sur scène. Ses cheveux étaient vraiment hors de contrôle, mais d'une certain façon Chris pensait que ça lui allait, bien qu'il ne sache pas vraiment pourquoi.

« Pourquoi tous ces sacs ? » demanda le garçon.

Chris arracha son regard du sien pour jeter un œil à ses affaires empilées à côté de lui. « Je viens d'arriver à LA aujourd'hui. »

« Tu poursuis le grand rêve Hollywoodien ? »

Chris sourit et baissa les yeux. Il n'avait pas l'habitude de parler inopinément à des étrangers. « Je ne suis pas encore sûr. Peut-être plus comme poursuivre le grand rêve citadin. »

La serveuse passa près d'eux et le garçon l'arrêta, attrapant son poignet gentiment.

« Hey, Annie, tu peux nous avoir deux tasses de café ? » demanda-t-il, lui adressant un autre grand sourire. Il se tourna vers Chris pendant une seconde. « Tu en veux un, n'est-ce pas ? »

« Oui, ok, » dit Chris en haussant les épaules. Pourquoi pas ? Il n'avait rien à faire à part tuer le temps.

« Tu veux ton déca, Darren ? C'est pas comme si t'avais besoin d'être encore plus excité que tu ne l'es déjà, » dit-elle d'un ton taquin.

« Oh, allez, je ne suis pas si excité… » Le garçon, Darren, roula des yeux.

« Comme tu veux, chéri, » et avec ça, Annie s'éloigna avec son plateau vide sous le bras.

Un moment de silence passa entre eux. Darren pianota des doigts sur le bord de la table tandis que Chris tripotait ses ongles, nerveusement. Cette situation semblait tellement hors de propos, tellement inhabituelle…

« Ok, je dois être honnête, » dit brusquement Darren, éclatant de nulle part. « Je ne suis pas venu simplement pour te remercier d'avoir écouté. »

« Ah… bon ? » Chris inclina sa tête sur le côté de confusion.

« Non. Mec, t'avais l'air tellement misérable et il m'a semblé que t'avais besoin de quelqu'un à qui parler, donc… » Darren fit un grand geste avec ses mains, comme s'il invitait Chris à s'ouvrir tout simplement à lui et à tout lui raconter. Quand Chris sembla seulement être encore plus nerveux et inconfortable, Darren soupira et se pencha sur la table vers lui. « Ecoute, tu n'es pas vraiment obligé de me parler si tu ne veux pas. Tu ne me connais pas, je le comprends. Mais quelqu'un qui poursuit un rêve, peu importe le rêve que c'est, ne ressemble pas à quelqu'un qui est sur le point de pleurer quand il écoute l'une des chansons les plus géniales de la bande originale de Mulan, et c'est exactement ce à quoi tu ressemblais. »

Chris fronça les sourcils. « Est-ce que je dois me sentir insulté, maintenant ? »

« Bien sûr que non, » Darren s'arrêta un moment pour sourire à Annie quand elle revint avec leurs cafés. Il reprit la parole quand elle partit. « Je peux te laisser seul si tu veux. Je croyais juste que je pourrais essayer, au moins. »

Avec un soupir, Chris prit le café entre ses mains. La journée avait déjà été complètement irréelle. Il avait laissé sa famille, la seule chose qui comptait le plus pour lui, derrière lui. Il s'était enfui d'une ville qui n'avait fait que l'écraser. Il s'était aventuré dans un monde dont il ne connaissait absolument rien. Y ajouter un étranger charmant ne pouvait pas faire de mal, n'est-ce pas ?

Alors avant même qu'il ne réalise ce qu'il faisait, il ouvrit la bouche et raconta spontanément à Darren comment il avait quitté Clovis, comment il était inquiet à propos de la santé de sa sœur, comment ses parents était convaincu qu'il construirait simplement une vie merveilleuse à partir de la terre alors qu'en réalité il n'avait même pas un endroit pour dormir cette nuit. Il raconta tout à Darren, excepté les attaques, la peur et la haine qu'il avait traversé pendant tellement d'années. Il lui raconta tout sauf la seule chose que les gens pensaient qui le définissait. Il garda sa sexualité et ses cauchemars pour lui.

Mais Darren était intelligent et ses yeux pouvaient voir plus loin que ce qui était juste devant lui. Il vit les secrets et même s'il ne pouvait pas dire exactement ce qu'étaient ces secrets, il savait qu'ils étaient profonds et peut-être même sombre. Il ne dit rien, cependant. Ce n'était pas son genre.

« C'est dur, vieux, » dit-il à la place, d'un ton compatissant. « On dirait que t'as eu une journée très mouvementée. »

Chris grogna. Sa tasse de café était d'une certaine manière vide, bien qu'il ne se souvienne pas l'avoir bu. « Ouai, on peut dire ça, je pense, » marmonna-t-il alors qu'il repoussait la tasse.

« Alors… » Darren l'imita et étira ses bras au-dessus de la table, se penchant en avant. « Qu'est-ce que tu vas faire maintenant ? »

Chris secoua la tête et se sentit encore plus épuisé qu'avant. « Je n'en ai honnêtement aucune idée. »

Il se passa quelques secondes de silence avant que Darren n'ouvre sa bouche à nouveau. « Eh bien, tu pourrais aller à la maison avec moi. »

Chris cligna des yeux et fixa Darren, se demandant s'il avait mal entendu. « Quoi ? »

« J'ai une chambre d'amis, » dit Darren en haussant les épaules, et cela semblait être sa signature. « Mon colocataire a déménagé il y a quelques semaines et je ne peux pas payer le loyer tout seul. J'étais supposé mettre une pub sur papier, mais j'oublie toujours et je suis trop flemmard pour voir des tonnes de gens de toute façon. »

« Est-ce que tu es au moins sérieux là ? » Chris n'était toujours pas sûr s'il avait correctement compris.

« Ouai, mec, je suis sérieux, » Darren se redressa. « T'as besoin d'un endroit où dormir et j'ai besoin d'un colocataire. C'est genre une putain de destinée ou un truc du genre qu'on se soit rencontré ce soir. »

Chris se demanda si Darren était shooté ou soûl ou s'il était peut-être le fruit de son imagination. Il était tout sauf réel. C'était impossible.

« Tu ne connais même pas mon nom, » dit Chris.

« Eh bien, tu pourrais me dire ton nom et ça arrêterait d'être un problème, tu sais, » dit Darren d'un sourire suffisant.

Qu'est-ce que je suis en train de faire ? Mais qu'est-ce que je suis en train de faire, mince ? « Je suis Chris. »

« Génial, maintenant nous ne sommes plus des étrangers. »

« Tu n'as pas… je ne sais pas, peur que je puisse voler ton appartement ou quelque chose dans le genre ? » Chris n'avait jamais été aussi confus de sa vie.

« Pas vraiment. T'as l'air d'être un bon type, » Darren l'étudia intensément mais ne sembla pas trouver quelque chose de mauvais chez lui, car il continua de sourire. « Alors, tu viens ou pas ? »

Il pourrait être un psychopathe, il pourrait te tuer dans ton sommeil, il pourrait te kidnapper et vendre tes organes…

« Oui. Oui, je viens. »

Merde.


Voici pour le premier chapitre ! Toutes les reviews que vous laisserez seront traduites et envoyées à l'auteur, donc je vous encourage fortement à en laisser :)

La chanson que chante Darren est Somewhere Over The Rainbow du Magicien d'Oz.

A jeudi prochain :)

Mizu.