Allez, je profite d'avoir un petit peu de temps libre pour vous poster enfin ce dernier chapitre. Malheureusement, je n'en possède pas assez pour répondre à chaque personne, mais je vous remercie grandement pour vos commentaires!

Sur ce, bonne lecture!


25

« L'espoir est le pire des maux, car il prolonge le tourment de l'Homme »
Nietzshe

L'avant-bras sur la toiture de la voiture, Gadot regardait la silhouette qui reposait sur la banquette arrière, celle du fond. Son regard semblait se perdre dans un rêve illogique dont il ne pouvait se défaire. Lebreau reposait sur les sièges, paupières closes. Son ami lui avait nettoyé le visage à présent propre avant de l'enrouler dans un drap. Ainsi, on croirait vraiment que la jeune femme ne faisait qu'un somme. On pourrait oublier les multitudes de balles qui criblaient son corps. On pourra oublier que désormais, son corps était effroyablement froid.
Soudain, des explosions extirpèrent la montagne de muscles de sa contemplation. Faisant brutalement volte-face, il découvrit avec horreur que la base militaire était en train de se réduire en cendre. Pour la première fois depuis la mort de Lebreau, Gadot pensa à autre chose qu'à elle : où étaient ses amis ?
Le souffle court à cause de la panique brutale qui l'étrangla, le Nora allait s'élancer à la rescousse de ses camarades. Mais une forme humaine se dessina dans la lourde fumée de cendre. Une carrure imposante. Gadot sembla respirer à nouveau lorsqu'il reconnut Snow et se surprit même à esquisser un sourire de soulagement. Mais sa joie s'évapora immédiatement lorsqu'il vit que ce dernier tenait Fang dans ses bras, inerte.

- Ne me dis pas qu'elle est... déclara Gadot qui ressentit une boule dans la gorge.
- Ne t'inquiète pas, le rassura le blond d'un ton calme, voire distant. Elle a juste perdu connaissance.

L'homme à la crête rouge posa la main contre sa poitrine, lâchant un souffle apaisé. Puis, il rouvrit brutalement les yeux avant de demander :

- Et Lightning ?

Son interlocuteur baissa le regard comme cherchant à fuir son regard. Celui-ci paraissait culpabiliser, secouant lentement la tête avant de se tourner en direction de la base militaire. Il resta muet quelques secondes comme si sa réponse le faisait souffrir.

- Elle était encore à l'intérieur quand tout a explosé, expliqua-t-il faiblement. Je ne crois pas que...

Dans un élan de frustration, Gadot frappa de son poing le capot du véhicule. Puis, il s'y assit dessus avant de masquer son visage de ses mains. Il prit une grande inspiration rageuse qui lui parut douloureuse à ses poumons et à son cœur. Il n'avait même plus le courage de tourner le regard vers le corps de Lebreau désormais. Et on lui annonçait que Lightning était également morte ? Mais quel genre d'homme étaient-ils ? Quel genre de pathétiques héros laissait des femmes mourir sans rien pouvoir faire ?
Snow comprenait parfaitement la réaction de son ami. Ils se connaissaient depuis si longtemps et avaient toujours partagé les mêmes idéaux. Ils avaient toujours songé que par leur grande corpulence, ils étaient le genre d'homme qui devaient vouer protection aux femmes. Mais plus que des femmes, c'était des amies qu'ils avaient perdues. Quel lamentable échec...

Doucement, Snow se pencha vers la banquette centrale de la voiture afin d'y déposer Fang. Elle était la seule qu'ils leur restaient. Ils ne pouvaient pas échouer. Ils allaient tout faire pour protéger l'unique survivante de cette catastrophe due à leur arrogance. Et le blond avait fait une promesse à la soldate, il s'y tiendra coûte que coûte quoi qu'il arrive.
Gadot regarda son camarade prendre soin de la noiraude comme si celle-ci était quelque chose de fragile et précieux. Elle était comme le dernier trésor qui leur restait de cette mission. Les yeux du roux se tournèrent vers la base militaire en flamme et en cendre. Les explosions avaient cessé, mais à présent, les braises se chargeaient de consumer les restes. Il n'allait plus rien rester. Destruction et désolation.

- Lightning ?

Les deux hommes ouvrirent grand les yeux en entendant la délicate voix de Fang. Celle-ci clignant plusieurs fois des paupières, semblait s'éveiller petit à petit. Perdue, elle scrutait tout autour d'elle, ne sachant pas où elle se trouvait. Sa respiration alors calme, se mit soudainement à accélérer tandis que les événements lui revenaient à l'esprit. Son cœur frappa tellement violemment contre sa poitrine que la jeune femme bondit hors des bras de Snow.

- Fang, non ! cria-t-il en l'attrapant de justesse par le bras.

À peine remise de son réveil, Fang chancela et faillit perdre l'équilibre. Ses orbes de la forêt n'arrivaient pas à se décrocher de l'abominable spectacle de cendre. Elle n'avait même pas la force de tirer sur l'entrave qui l'empêchait d'avancer.

- Je dois y aller, déclara la mécanicienne d'une voix rauque. Je dois la retrouver.
- Fang... gémit Snow avec peine. Lightning est... morte.
- Non !

Les paroles du blond furent comme un coup de fouet pour la maîtresse de Bahamut qui sentit un élan de rage la prendre. Sa colère lui donna assez de force pour chercher à se défaire de la prise de son camarade. Retirant brutalement son bras, elle dévisagea son ami avant de reculer de quelques pas. Mais tout d'un coup, elle bûcha contre quelque chose et de puissantes mains l'empoignèrent par les épaules.

- Fang, ne fais pas de bêtise, intima doucement Gadot alors que la femme se retournait pour lui jeter un regard noir. C'est fini...
- Elle n'est pas morte ! hurla outrageusement la noiraude comme une hystérique. Tant que je n'aurais pas retrouvé son corps, je n'accepterais jamais cette éventualité !
- Fang... soupira Snow en secouant la tête, peiné par l'état de son amie. Lightning était encore à l'intérieur et... Tu l'as vu comme moi, l'ampleur de l'explosion. Il est impossible qu'elle...

Sans crier gare, Fang donna un furieux coup de coude dans l'estomac de Gadot. Celui-ci se plia en deux, stupéfait. Devant la réaction irraisonnée de la mécanicienne, Snow fit un pas en avant afin de l'arrêter. Mais brutalement, cette dernière dégaina une arme à feu avant de le pointer dangereusement sur ses interlocuteurs. Grimaçant de douleur, l'homme à la crête se rendit compte que son opposante lui avait dérobé son pistolet qui était accroché à sa taille.
Reculant lentement, Fang visa tour à tour les deux individus. Ceux-ci, les mains levées, n'émirent aucun geste brusque. Ils la savaient perdue et complètement abattue par la mort de Lightning. Jamais ils n'avaient réellement saisi l'étrange relation que les deux femmes entretenaient entre elles. La noiraude semblait être la seule capable d'approcher la soldate sans attirer ses foudres. Et cette dernière se montrait farouchement protectrice envers son amie. C'était sans surprise que les Nora faisaient face au désemparement de la mécanicienne.

- Fang, tu ne sais plus où tu en es et c'est normal, la rassura Snow en baissant la main pour que son interlocutrice l'imite. Garde la tête froide, je t'en prie. Tu ne veux pas faire ça. Tu ne veux pas nous faire de mal et nous non plus. On va gentiment monter dans la voiture et rentrer au campement. Tout le monde nous attend, Fang.
- Va te faire foutre, Snow ! grogna Fang en visant le blond. Je ne partirais pas sans Lightning !
- Sois raisonnable... Si tu retournais dans cette braise, jamais tu ne reviendras en vie. Tu ne peux plus rien faire.

Un coup de feu retentit, déchirant le chant de flammes grandissantes. La balle alla se loger dans la terre, à quelques centimètres des pieds de Snow. Celui-ci se recula brutalement en dévisageant sa camarade non avec colère, mais tristesse. La maîtresse de Bahamut paraissait hors d'elle. Contrairement à son état de panique, ses bras ne tremblaient pas et ses mains tenaient fermement l'arme. Son regard était déterminé et prêt à tout.

- Je suis prête à abattre des montagnes pour la retrouver, déclara-t-elle avec conviction. Et personne ne m'arrêtera.
- Fang, non !

Gardant les deux hommes en joue, la femme se recula lentement sans les quitter des yeux. Puis, une fois qu'elle fut à bonne distance, elle fit volte-face avant de partir à toute vitesse vers la base. Snow allait s'élancer à la suite de son amie, mais Gadot posa sa main sur son épaule. Ils se dévisagèrent un instant, ne sachant pas réellement que faire.
Finalement, bien trop fatigué par tous ces événements, Gadot contourna la voiture avant de monter sur le siège conducteur. Il claqua la portière avec force avant de toiser son camarade. Snow jeta un dernier coup d'œil dans la direction qu'avait prise Fang. Cette dernière avait déjà disparu de son champ de vision.
Lentement, le blond ferma la porte arrière avant d'ouvrir celui du côté passager. Il avait failli à sa dernière promesse...

.

La chaleur lui léchait la peau, brûlant son épiderme en de petits baisers ardents. Elle emplissait ses poumons de son haleine chaude, rendant sa respiration difficile. Les cendres et la fumée lui piquaient les yeux, l'obligeant à plisser des paupières. Mais à aucun moment, Fang ne ralentit la cadence et ne restait focalisée que sur un seul objectif : atteindre le laboratoire. Elle passait outre la douleur et les protestations de son corps souffrant.
Les flammes finirent par contaminer le métal de son arme. Sentant les morsures de la brûlure, la jeune femme dut l'abandonner sans vraiment s'en soucier. Tout se mélangeait dans son esprit où la cohérence et la raison avaient été bannies. Alors que les braises hurlaient victorieusement, la noiraude était sourde à ses menaces. Ses oreilles n'entendaient que le rythme puissant de son cœur. Un métronome qui lui imposait la cadence à prendre. Rapide, effrénée et folle.


- À quoi penses-tu ? lui demandai-je avec curiosité.

Couchées à l'arrière du pick-up, nous regardions les étoiles depuis une bonne trentaine de minutes déjà. Pour ma part, j'étais mitigée entre le spectacle céleste et la belle femme à mes côtés. Comme toujours, Lightning semblait regarder les choses sans vraiment les regarder. Ses yeux d'un bleu magnifique paraissaient voir autre chose, loin, très loin d'ici. Loin de Néo-Bodhum. Loin du présent. Je m'étais toujours demandé à quoi elle pouvait bien penser à chaque fois. Ce qui pouvait bien la déconnecter de notre monde.
Lightning tourna son regard dans ma direction. Encore et toujours, mon souffle devint inexistant tant que j'étais subjuguée par sa beauté. Malgré le temps qui passait, je restais toujours bouche-bée devant la finesse de son visage. La sévérité ne m'avait jamais paru aussi sensuelle. Une froideur bien plus attirante que la chaleur même. Un mélange d'étrangeté et de magnificence. J'aimais me laisser noyer dans l'azur de ses yeux indescriptibles et impénétrables. Cherchant à me délecter de chaque instant où j'arrivais à percer une émotion.

- À quoi te servirait la réponse ? rétorqua la soldate d'un naturel désinvolte.
- À nourrir ma curiosité, répondis-je en souriant malicieusement.
- La curiosité est un vilain défaut.

Sur ces mots qu'elle avait déclarés avec son habituelle impassibilité, Lightning retourna vers les étoiles. Je fis la moue, frustrée, mais peu étonnée de ne pas avoir eu ma réponse. Cette femme allait-elle un jour s'ouvrir entièrement à moi ?


Un mur s'écroula juste à côté de Fang, la frôlant de peu. Elle eut juste le temps de se protéger avec ses bras alors que les flammes griffaient sa chair. Son œil gauche devint subitement douloureux, empêchant la paupière de s'ouvrir. Une poussière de cendre ? Ou était-ce autre chose ? Furieusement, la jeune femme se frotta les yeux avant de reprendre sa route en contournant l'obstacle qui était tombé à ses pieds.
Alors qu'elle courrait à en perdre haleine, elle avait l'impression d'être poursuivie. À ses trousses, le désespoir la suivait mesquinement, cherchant à la faire trébucher. Sous ses pieds, l'abîme de la folie la guettait, attendant le bon moment pour pouvoir l'engouffrer goulûment. Et tapie dans l'ombre, la désillusion patientait pour lui bondir dessus et la plaquer contre la dure réalité. Mais Fang les ignora, elle ne pouvait que les ignorer si elle voulait continuer sa course folle.
Pas besoin de code d'accès, les portes blindées avaient sauté. Sans hésitation, la noiraude plongea dans la bouche de l'enfer. Au fur et à mesure qu'elle s'aventurait dans les profondeurs de la base, la température grimpait péniblement. En sueur, la mécanicienne sentit ses forces s'évaporer à cause de la chaleur. Elle l'étouffait, elle l'attirait vers l'épuisement.


Du bout des doigts, je caressai délicatement la peau laiteuse de la soldate. D'un geste tendre et gracieux, j'éloignai une mèche de cheveux de son visage endormi. Je ne pouvais m'empêcher de m'interroger sur sa chevelure à la couleur inédite. Était-ce une teinte naturelle ? Cela m'en avait tout l'air.
Dans la chaleur du lit, dans la quiétude de notre chambre, je savourai la présence de Lightning. Depuis notre arrivée à Néo-Bodhum, elle s'était faite plus distante et absente. Durant toute la journée, j'avais une horrible impression de manque. Elle me manquait tant. Alors le soir, je profitais de ces retrouvailles pour l'observer durant son sommeil, de m'abreuver de sa personne jusqu'à plus soif.
Il y avait bien évidemment deux lits dans notre chambre. Mais après un long débat et avec beaucoup de persévérance, j'avais réussi à la convaincre de me laisser dormir avec elle chaque nuit. Cela n'avait pas été facile, mais je réussis toutefois à avoir le dernier mot. Cela pouvait peut-être sembler stupide, mais... parfois, j'avais l'impression que Lightning ne pouvait me refuser certaines choses. Surtout pas sa chaleur et son contact.

Je faillis sursauter lorsque les iris cobalt se dévoilèrent à moi. Souriant doucement, je m'excusai de l'avoir réveillée. Comme encore à moitié endormie, mon amie m'observait vaguement de son regard mi-clos. Tout comme lorsqu'elle se trouvait sous sédatif, je m'émerveillais de ce second visage. Celui où elle paraissait si fragile. Celui où je désirais hardiment la protéger contre vent et marée. Celui où j'avais l'impression qu'on échangeait nos rôles.
Bizarrement, je ressentis le terrible besoin de l'appeler afin de capter toute son attention. Un besoin égoïste. Doucement, je murmurai :

Lightning !

Fang avait hurlé le nom de son amie comme un déchirement. Elle tomba à genoux, ne sentant plus la force de continuer. Les prédateurs de la réalité l'avaient rattrapée. Tout n'était plus que flamme et cendre autour d'elle. La blonde ne se trouvait nulle part. Son absence était en train de creuser une tombe dans le cœur de la mécanicienne. Sa gorge était tellement sèche et la boule qui la nouait ne rendait pas sa respiration plus facile ou agréable.
Les bras autour de sa poitrine, Fang avait l'impression qu'on la poignardait à plusieurs reprises. Elle avait si mal. Mais cela n'avait rien à voir avec les brûlures dont souffrait son corps. Cela allait bien au-delà. Elle avait l'impression d'être rongée de l'intérieur. Que son âme se faisait consumer à petit feu dans la plus lente des agonies. Ses yeux lui piquaient atrocement, mais aucune larme ne vint les soulager. La noiraude était incapable de sangloter alors que son cœur se noyait de chagrin.

- Lightning... gémit péniblement la mécanicienne comme si ce mot lui écorchait la gorge.

Des pas se firent entendre au loin. Fang ne bondit pas de surprise ni ne se tourna vers la personne qui venait vers elle. La fatalité l'avait frappée de sa foudre dévastatrice. La vérité ne pouvait plus être niée. Lightning était morte... Elle n'avait pas survécu aux explosions. Elle l'avait abandonnée dans ce monde infâme. Loin... Loin d'elle...
Devant ses yeux, de grosses bottes entrèrent dans son champ de vision. Doucement, sans la moindre conviction, Fang leva la tête afin de dévisager l'arrivant. Caius la toisait d'un air mauvais et terriblement meurtrier. La noiraude se demanda évasivement comment ce dernier avait-il bien pu survivre à une balle dans la tête. Mais très vite, elle découvrit que le beau visage du soldat était intact. Seule son oreille gauche était meurtrie et ensanglantée. Il n'y avait littéralement plus de globe. Et elle comprit... La proximité et la puissance du coup avaient assommé son opposant. Et le voici qui venait certainement quémander des dédommagements.
De ses puissantes mains, Caius attrapa son adversaire par le col. Il ne fut même pas surpris, lorsque la casquette tomba, de découvrir une jeune femme. Resserrant sa poigne, il finit par étouffer sa victime. Son regard assassin ne quittait pas une seule seconde celui de la noiraude.


Après avoir durement resserré un écrou, je redressai mon dos qui se plaignit de courbature. Épuisée, mais satisfaite de mon travail, je passai mon avant-bras contre mon front afin de l'essuyer. Mais je me rendis compte que j'étais pleine de cambouis et de ce fait, que j'avais certainement dû m'en mettre sur le visage. Sans pouvoir m'en empêcher, je souris face à mon étourderie.
Je croisai les bras avant de toiser fièrement le moteur que je venais de remettre sur pied. Encore une ou deux retouches et il sera prêt à ronronner comme un chat. J'avais hâte de montrer le résultat de mon labeur aux Nora qui n'arrivaient pas à ramener ce petit bijou à la vie. Snow et Gadot avaient quelques notions mécaniques, mais ils n'avaient malheureusement pas mon expérience en la matière.

Instinctivement, sans vraiment savoir pourquoi, je levai mon regard au-delà du capot redressé. En hauteur, assis sur le bord de l'étage supérieur de la grange, Lightning m'observait. Nos yeux se rencontrèrent et semblèrent s'enlacer comme deux vieux amis qui se retrouvaient. La soldate disparaissait toujours sans dire un mot, vaquant à nulle ne savait quelle occupation. Mais intérieurement, je la savais toujours dans un rayon proche du mien. Là, à veiller encore et encore sur moi.
Lorsque je lui souris, la blonde ne me rendit bien évidemment pas l'affection. Le visage toujours de marbre, elle continuait de me scruter avec intensité. D'une certaine manière, j'aimais la façon dont son regard me caressait. Cela avait quelque chose de rassurant et, il fallait l'avouer, de flattant. Plusieurs fois dans la journée, je ne pouvais m'empêcher de rechercher ses yeux inquisiteurs. Et mon cœur s'extasiait à chaque fois que je les trouvais.


Mais Lightning n'était plus... Inconsciemment, Fang chercha du coin de l'œil son amie, comme s'attendant à croiser ces orbes azur. Le seul regard qu'elle rencontrait était celui de Caius, froid et meurtrier. Ce n'était pas de la panique qui l'avalait comme du sable mouvant, mais une impression de vide profond. Comme si une lumière s'était éteinte, la noiraude était désormais aveugle et était une proie facile pour les ténèbres. Elle n'avait pas peur, elle était simplement résignée.
Caius se figea sur place lorsqu'il découvrit le rictus de son opposante. Interloqué, il jeta brutalement cette dernière à terre. Tombant sur le sol brûlant, Fang toussa furieusement. Mais chaque goulée d'air empirait sa respiration, tant de suies et de poussières.

- Pourquoi souris-tu ? demanda le soldat avec perplexité.
- Parce que... Parce que tu es mon sauveur, répondit Fang qui essaya en vain de se relever. Tu vas me libérer de cet enfer, n'est-ce pas ?

Désabusé, l'homme émit un petit rire rauque avant de secouer la tête. Cette femme avait perdu la raison, c'était une évidence. Ce constat ne faisait qu'attiser encore plus sa colère. Malgré la fin du monde, il s'était trouvé un refuge dans lequel il pouvait couler des jours tranquilles. Certes, il n'appréciait nullement ses collègues, mais ceux-ci lui fichaient la paix, ce qui était amplement suffisant. Mais à présent, voilà ce qui restait du peu de sérénité qu'il s'était évertué à conserver. Plus rien...
D'une certaine manière, Caius aurait été tenté d'abandonner la noiraude ici, à son triste sort. Après tout, elle méritait une lente et douloureuse fin. Mais il ne pouvait s'y résoudre, non. Pas après tout ce qu'il venait de perdre. Le seul avenir prometteur qu'il possédait s'était évaporé entre ses doigts à la rencontre de ces intrus. Sa fierté l'intimait de sentir les os de cette femme se briser entre ses mains. Il désirait fixer les yeux de sa victime à l'instant même où elle quitterait le monde.

- Je vais t'accorder la délivrance, annonça le soldat qui s'avança vers son interlocutrice.

D'un coup de talon, il renversa cette dernière sur le dos avant de s'installer au-dessus d'elle. Les mains fermement accrochées autour de la gorge de sa proie, il resserra l'étau mortel avec délectation. Fang ne semblait ni avoir peur ni s'en réjouir. Elle se résignait... Elle attendait...

- Ne crois pas partir aussi facilement, reprit Caius avec mesquinerie. Je vais te tuer, te ramener à la vie et te tuer à nouveau. Encore et encore jusqu'à ce que la mort te paraisse être le plus doux des avenirs.

La noiraude serra les dents quand sa respiration se fit manquante. Sa gorge était douloureuse. Son corps avait envie de se rebeller, mais elle se fit violence pour ne pas bouger. Mourir encore et encore... Si là était l'épreuve à passer pour rejoindre Lightning, dans ce cas, elle était prête. Mais est-ce qu'elle la retrouvera vraiment ? Que l'attendait-il au-delà de la frontière des vivants ?
Alors que sa vision se brouillait, Fang eut la folie d'imaginer ce qui pouvait se trouver après la mort. Elle allait pouvoir à nouveau entendre les réprimandes de Benji et rire devant son air bourru. Elle allait pouvoir à nouveau discuter à n'en plus finir avec Vanille, lui conter toutes ses aventures depuis son départ. Elle allait pouvoir à nouveau serrer Lightning dans ses bras, rendant celle-ci mal à l'aise comme à chaque fois. Et comme toujours, la soldate la traitera d'idiote.
Guidée par un désir irraisonné, la mécanicienne leva la main comme pour atteindre quelque chose, une lumière, un espoir. Puis, brutalement, sa main tomba sur le sol, coupée du souffle de la vie.

- Ne crois pas pourquoi partir aussi vite, murmura Caius en desserrant sa prise afin de faire revenir sa victime.

Il se figea soudainement au-dessus de la noiraude, pétrifié. Son souffle venait à lui manquait et il se sentait incapable d'y remédier. La bouche ouverte, il n'arrivait pas à inspirer ou à expirer de l'air. Son cœur aurait dû se mettre à battre plus fort pour combler ce manque d'oxygène, mais quelque chose de froid venait de le percer. La lame pivota brutalement, provoquant un hoquet qui aurait dû être un cri de la part du soldat.
Caius tomba avec raideur sur le côté, un couteau planté dans son dos, au niveau des omoplates. Fang toussa douloureusement, rageant de ne pas encore pouvoir atteindre sa destination. Avec peine, elle ouvrit les yeux. Sa vision était trouble et elle ressentit la terrible envie de se laisser emporter par l'épuisement. Elle n'arrivait qu'à identifier un magnifique bleu océan. Du bleu...

Ouvrant brutalement les paupières, la noiraude crut que son cœur allait cesser de battre. Juste au-dessus d'elle, accroupie à ses côtés, Lightning la fixait intensément. Les sourcils froncés, elle semblait la toiser avec inquiétude et réprobation. Cette dernière était légèrement échevelée. Du sang séché se dessinait sur le haut de son front, ayant certainement dû couler d'une plaie à la tête. Son visage était taché de suie. Fang devait être en train d'halluciner, ce qui la fit sourire. C'était même la soldate qui venait la chercher pour quitter cet endroit.
Mais lorsqu'une main chaude se posa délicatement contre sa joue, la mécanicienne faillit sursauter. Le contact paraissait si réel. Elle pouvait presque se fourvoyer sur la véracité de la situation.

- Pourquoi souris-tu aussi bêtement ? questionna Lightning d'un air interloqué. Et d'abord, qu'est-ce que tu fais ici ? Tu n'as rien à faire là !
- Light... Lightning ?!

Avec un élan de force dont elle ne se serait pas crue capable, Fang se redressa pour serrer désespérément son amie contre elle. Le corps tendre et chaud de la soldate contre le sien la chamboula. Des larmes se mirent à affluer sur ses joues, la déroutant encore plus. Elle était encore humaine... Elle arrivait encore à pleurer. Mais la noiraude se détourna rapidement de cette histoire, bien trop focalisée sur la revenante.
Doucement, Lightning rendit l'étreinte en sentant les pleurs de sa camarade contre son épaule. Sans vraiment savoir pourquoi, elle s'expliqua :

- J'ai mal calculé mon coup.

Sa seule réponse fut des sanglots, mais la blonde ne s'en offusqua point. Lorsqu'elle avait déclenché la minuterie de l'auto-destruction de la base, elle avait songé avoir assez de temps pour s'extirper de ces entrailles militaires. Malheureusement, elle s'était fait rattraper par le temps et la puissance de l'explosion l'avait projetée contre un mur avec violence. Ayant reçu un coup à la tête, la soldate avait été sonnée durant quelques minutes.
Fronçant les sourcils avec sévérité, elle reprit :

- Qu'est-ce que tu fais ici, Fang ? Si je n'étais pas arrivée à temps, cet homme t'aurait tuée ! Comment peux-tu être aussi inconsciente ?

La bâtisse dans laquelle elles se trouvaient commençait à s'effondrer. Lightning releva la tête et chercha instinctivement à protéger son amie des débris. Tout n'était qu'une question de temps avant que tout ne soit réduit en miettes.

- On en reparlera plus tard de tes idioties, grogna la soldate qui tira Fang pour relever. On doit partir d'ici !

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Une fois que les deux rescapées quittèrent la base militaire, loin de la fournaise, elles se permirent de reprendre leur souffle. À présent en lieu sûr, Lightning se tourna sévèrement vers son amie, lui demandant des explications et la réprimandant pour sa témérité. Fang, qui n'arrivait plus à calmer ses larmes de soulagement, raconta les derniers événements à son amie. Comment elle s'était retournée contre les Nora afin de pouvoir partir la rejoindre. Puis, sa rencontre avec Caius.
Lightning était plus qu'en colère après cette révélation. Elle était furieuse contre Gadot et Snow de ne pas avoir su empêcher Fang de mettre sa folie en action. Elle en voulait à la noiraude de s'être mise ainsi en danger. Et finalement, elle était déchaînée contre son manque de précaution et de s'être laissée avoir par le temps.

- Que fait-on désormais ? demanda Fang qui s'était finalement calmée, tournant le regard sur les restes de la base militaire.
- Cela me paraît évident, nous devons retourner à Néo-Bodhum, répondit Lightning en croisant les bras.
- Je ne suis pas certaine qu'ils nous accueillent à bras ouverts.
- Je me fiche complètement de leur état d'âme. Nos affaires sont là-bas, sans parler de Bahamut. Nos récupérons ce qui nous appartient et ne reprendrons la route comme on l'a fait jusque-là.

Fang se tourna vers son interlocutrice avec un grand sourire railleur sur les lèvres. Cela fit froncer les sourcils à la blonde qui devint méfiante.

- Je savais que tu finirais par t'y attacher, ricana la mécanicienne avec amusement. En même temps, personne ne peut résister au charme de Bahamut. Tel chien, tel maître.
- Je n'ai jamais dit que je l'appréciais, mais je sais que tu ne peux pas te passer de lui, grommela la blonde en détournant la tête. Et puis, ton chien s'avère parfois très utile. Voilà tout.
- Il y a quelqu'un d'autre dont je ne peux me passer...

Malicieusement, la noiraude glissa la main dans celle de son amie avant de l'attirer vers elle. Elle prit une grande inspiration tout en se délectant de la chaleur et la présence de la soldate. Cette dernière lui avait manqué comme jamais. Il était hors de question qu'elle la lâche désormais. Plus jamais...
De sa main libre, Fang caressa les mèches de sa partenaire d'une douceur qui ne trompait personne. Sans bouger, Lightning la scrutait droit dans les yeux, loin de vouloir s'éloigner du contact. Leur visage se rapprocha tandis que leurs souffles s'emmêlèrent gracieusement. Leur nez se frôla délicatement alors que leurs lèvres n'étaient plus qu'à quelques centimètres les unes des autres.
Soudain, un klaxon retentit à trois reprises, attirant l'attention des deux femmes. Fang n'arrivait pas à en croire ses yeux. Au loin, Snow leur faisait de grands signes et leur souriait avec ravissement. Ils... Ils les avaient attendues ? Secouant lentement la tête, la noiraude rit légèrement devant cette découverte. Elle croisa le regard de la soldate qui parut d'accord. Puis, elles s'élancèrent à la rencontre des Nora.

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- Tu ne croyais tout de même pas qu'on allait partir sans vous, annonça Snow qui tapota fièrement l'épaule de Gadot. Nous sommes une famille à présent. Pour le bien et pour le pire.
- C'est pour les mariages, ça, Snow, intervint Gadot en soupirant avant de scruter ses deux interlocutrices dans le rétroviseur. Vous êtes de sacrées nanas en tout cas, y a pas à dire.

Fang sourit. Tous les trois, ils désiraient s'excuser les uns envers les autres. Mais toute cette politesse paraissait totalement futile. Ils étaient amis désormais, des camarades sur qui ils pouvaient compter en ces temps difficiles. Car malgré la noirceur du monde, il restait encore des mains secourables.
Alors que Snow se rassit correctement sur le siège passager afin de regarder la route, Fang dirigea son attention vers Lightning. Toutes deux assises sur la banquette centrale, chacune était près d'une fenêtre. À l'arrière, la noiraude tentait d'oublier le corps de sa défunte camarade. Et comme toujours, la soldate s'était envolée dans le paysage, se coupant de tout.
Après avoir entendu du mouvement, Lightning fut surprise de sentir la tête de Fang se poser sur son épaule. Son corps se serra chaleureusement contre le sien et leurs mains se mêlèrent l'une dans l'autre. La mécanicienne ne se délogera de cette place pour rien au monde. Elle avait l'impression d'être dans un cocon de bien-être, là où elle pouvait se déconnecter de tout. Seule la soldate comptait dans cet instant de répit. Un repos qui sera de courte durée, car une fois à Néo-Bodhum, la réalité les rattraperait.

Le lendemain, les funérailles avaient été préparées et la défunte avait été honorée comme il se devait. L'annonce de la mort de Lebreau avait été difficile pour certains, surtout pour Yuj et Maqui. Ils avaient fallu une intervention de force pour maîtriser la crise du jeune blond. Gadot s'était retiré et avait disparu de la circulation durant quelques temps. Snow, malgré sa peine, avait réussi à maintenir l'ordre dans le groupe, il n'avait pas réellement le choix de toute manière. Le père de famille, de son côté, s'était senti terriblement coupable et égoïste pour la demande qu'il avait fait aux Nora. Le seul réconfort avait été que ce sacrifice n'avait pas été vain, car la petite Marie se rétablissait petit à petit.
Malgré cette perte, la vie devait malheureusement reprendre son cours. Lentement, les activités du campement reprirent. En cette période difficile, personne ne pouvait se reposer sur ses lauriers. Il était temps de commencer à préparer les futures semailles. Snow et Gadot s'étaient dégotés quelques tracteurs et autres voiturages de fermiers dans le voisinage. Fang s'était rapidement attelée à la tâche de les remettre sur pieds pour la saison à venir. Chacun avait une tâche à accomplir, un rôle à tenir.
Contre toute attente, Lightning s'était proposé de former les survivants afin d'améliorer la sécurité. Elle avait exigé que les barricades soient rapidement construites autour du campement. Elle avait veillé elle-même à ce que les tours de gardes soient correctement respectés. Parfois, elle participait même à la surveillance et au bien-être de tous. Bahamut l'accompagnait la plupart du temps afin de lui offrir du renfort et un peu de compagnie.

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Ouvrant doucement les yeux, Fang émit un petit gémissement ensommeillé. Tournant la tête sur le côté, elle se rendit compte qu'elle se trouvait seule dans le lit. La nuit était plutôt fraîche, alors elle tira les couvertures contre son corps nu. Se redressant légèrement, elle scruta à travers l'obscurité de la pièce à la recherche de la soldate et découvrit celle-ci devant la fenêtre.
Portant qu'une simple chemise blanche, Lightning paraissait perdue dans sa contemplation. Sa respiration formait de la buée contre la vitre glaciale. À présent que l'hiver s'était installé, la température avait rudement chuté.

- Qu'est-ce que tu fais ? demanda Fang en s'abstenant de bâiller. Tu vas attraper froid comme ça.

Doucement, Lightning fit volte-face afin de toiser son interlocutrice. Sans dire un mot, elle la rejoignit dans le lit d'un pas lent. Lorsqu'elle se faufila dans la couche, la mécanicienne frissonna au contact de sa peau froide. Rapidement, cette dernière s'empressa de réchauffer son amie. Sans lui laisser le choix, elle l'emprisonna dans ses bras. La prisonnière ne chercha nullement à se débattre, posant l'oreille contre la poitrine de la noiraude afin d'entendre ses battements de vie. Un son apaisant et réconfortant.
Fang posa son menton sur la tête de sa partenaire et murmura :

- À quoi penses-tu, Lightning ?
- À notre situation, chuchota la blonde d'une voix calme et songeuse. Je pense toujours à notre situation, à notre sécurité.
- Et si tu relâchais la pression pour ce soir ? Rien qu'un peu ?

La soldate ne répondit rien. Tendrement, la mécanicienne embrassa la chevelure blonde. Une fois. Deux fois. Puis, elle soupira longuement avant de reprendre :

- Et si c'était moi qui te protégeais pour une fois ?
- Tu ne sais même pas te protéger toi-même, rétorqua Lightning d'un ton neutre. Comment pourrais-tu veiller sur quelqu'un d'autre ?
- Juste une fois...

Encore un silence. Lightning ferma les yeux en se laissant bercer par le souffle et le rythme cardiaque agréable de sa partenaire. Affectueusement, Fang lui caressait les cheveux, la cajolant de tout son amour. À cet instant précis, oui, la blonde avait ressenti le désir de se laisser aller, de relâcher ses efforts et d'accepter la protection de son amie. Elle soupira doucement.
Sentant le souffle chaud contre sa poitrine, Fang sourit. Elle venait de gagner la partie. Resserrant son étreinte, elle se délecta des muscles détendus de sa partenaire. Sans pouvoir s'en empêcher, elle se rappela de leur première rencontre assez mouvementée. De la manière qu'elles s'étaient rapprochées l'une de l'autre, comme si le destin mettait un point d'honneur à les lier. Aux périples qu'elles avaient traversés ensemble. La noiraude s'était toujours demandé où cela allait les mener. Leur binôme était plutôt insolite et imprévisible. Jusqu'où les choses pourraient-elles aller entre elles ?

Et maintenant, les voici à Néo-Bodhum, un campement prometteur où chacune jouait un rôle important pour la communauté. Pour la première fois depuis un an, Fang pouvait lever les yeux sur l'avenir sans crainte. Au fond d'elle, elle se permettait enfin de croire à un futur possible. Il suffisait simplement de le bâtir à présent, car les bases étaient solidement ancrées désormais.

- Bonne nuit, Lightning, souffla tendrement la noiraude en embrassant le front de son interlocutrice.

Petit à petit, Fang se laissa attirer par le sommeil, apaisée par l'atmosphère chaleureuse de la pièce. C'était sans crainte qu'elle refermait ses paupières, laissant ses autres sens lui rappeler la présence de la soldate. Si réconfortante. Si sécurisante.

- Bonne nuit, Fang.

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- Tâchez de ne pas vous endormir, intima Gadot avec autorité avant de disparaître sous la trappe.
- Ouais, ouais, répondit Yuj en fouettant l'air de sa main.

Sur le toit de la grange, sous les indications de Lightning, les Nora avaient fait construire une petite tour de garde. En réalité, cela s'avérait plutôt être un plateau en forme carrée qui était posé sur la toiture. Depuis ici, les surveillants avait une vue sur tout le campement et au-delà. Ils avaient même installé un immense projecteur pour illuminer la zone en cas de problème. Si quelque chose de suspect se produisait, les gardiens n'avaient qu'à faire sonner les cloches qui, par le passé, appartenaient à des vaches. Le seul défaut de la construction était qu'il ne soit pas fermé.
Emmitouflé dans une grosse veste et une écharpe, Yuj se frotta ses mains gantées. Le froid le mordait vicieusement, lui faisant regretter son lit chaud. Heureusement, cela n'allait durer que deux heures avant la relève et il n'était pas seul.
Maqui, tout aussi enrobé de vêtements, s'assit sur le sol avant de sortir un jeu de cartes. Un grand sourire sur les lèvres, il déclara :

- Ça te dit une petite partie ?
- Oh que oui ! s'exclama Yuj qui partit s'installer près de son camarade. Il ne se passe jamais rien durant la garde nocturne. Qui se promènerait par un froid pareil !
- Je ne te le fais pas dire ! Alors, poker ou black jack ?

Alors que le petit blond servait les cartes, ni lui ni Yuj ne semblaient remarquer les ombres qui se mouvaient au loin. À mieux y regarder, c'était une silhouette. Non, plusieurs silhouettes. Bien trop occupé par leur divertissement, les deux garçons ne savaient pas que quelque chose se préparait dans les ténèbres les entourant. Peut-être que s'ils avaient su qu'un événement allait changer le cours de leur vie ce soir même, ils auraient levé la tête à ce moment-là. Mais ils ne le savaient pas...
Tapis dans l'ombre des arbres, des individus se mouvaient silencieusement en épousant le silence de la nuit. Leur regard ampli de concupiscence, de sauvagerie et de folie fixait le campement avec impatience. Tels des prédateurs, ils pouvaient sentir les picotements de l'excitation les prendre alors que leurs proies se trouvaient à proximité. Mais toute cette agitation devait être contenue, car tant que leur chef n'avait pas donné le feu vert, ils devaient se museler.

Lentement, un homme arborant le fier costume de l'armée s'approcha d'un camarade à la corpulence robuste et violente. La tête légèrement recourbée, il ne pouvait s'empêcher de se sentir impressionné et craintif devant son chef qui était un être infâme et sans pitié. Mais qui pouvait également lui offrir une protection impitoyable en ce bas monde. Et plus encore, il pouvait lui offrir la vengeance qui brûlait son cœur depuis la destruction de la base militaire où il avait vu ses six camarades perdre la vie. Il était le septième de la bande et désormais le dernier. Ce jour-là, il avait eu la chance d'être parti en exploration et à son retour, alors que tout flambait, il n'eut que le temps d'apercevoir un véhicule s'éloigner. Et il l'avait suivi...

- J'ai accompli ma part du marché, murmura le soldat avec fermeté. À toi d'accomplir la tienne, Carlos.

Un grand sourire fendit le visage de l'ex-taulard qui se tourna vers son interlocuteur. Il tapota virilement l'épaule de son camarade avant de répondre :

- Oui, tu n'as pas menti sur l'existence de ce campement. Mes félicitations, tu es des nôtres désormais.

Le soldat sourit à son tour, soulagé de s'être trouvé des alliés pour survivre dans ce monde en fin de vie. Lentement, il se recula pour laisser la place à son leader qui se tourna vers ses camarades. Allumant un gros cigare, il prit une grosse bouffée arrogante avant de souffler sa lourde fumée. Puis, il reprit d'une voix rauque qui aurait pu faire trembler la nature endormie :

- Faîtes tout ce que bon vous semble, mais je veux que cet endroit soit à feu et à sang.

Silencieusement, les hommes levèrent le poing pour acclamer Carlos, mais également pour exprimer leur excitation. Puis, toujours comme les ombres des ténèbres, ils se faufilèrent vers Néo-Bodhum. Là où des personnes dormaient paisiblement en pensant être en sécurité. Là où des êtres innocents avaient eu l'idée folle de croire à un avenir.

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Le silence de la nuit fut brisé par le soudain grognement de Bahamut. Immédiatement, ses deux amies humaines ouvrirent les paupières comme si elles n'avaient pas réellement dormi. Lightning, en un éclair, se glissa hors du lit. Dans le mouvement, elle attrapa le revolver qui se trouvait sur la table de nuit avant d'aller se plaquer à côté de la fenêtre, scrutant l'obscurité pour trouver un ennemi. Fang, de son côté, s'extirpa des chaudes couvertures pour rapidement récupérer un t-shirt et un pantalon qui se trouvaient sur le sol. Après s'être hâtivement habillée, elle alla chercher son arme à feu sous l'oreiller du second lit et partit rejoindre la blonde près de la fenêtre, de l'autre côté.
Une ombre venait de passer, provoquant un froncement de sourcils de la part de la soldate. La noiraude, se trouvant près de l'armoire, attrapa un pantalon dans la volée avant de le lancer à sa camarade. Celle-ci, avec une rapidité déconcertante, l'avait enfilé et s'était déjà repositionnée contre le mur, aux aguets. Une autre ombre, la silhouette d'un homme...

Alors que les grognements de Bahamut se firent plus intenses, Fang ne ressentit pas une once de peur. Les mains fermement serrées autour de son arme, son regard était dur et déterminé. Elle savait que la blonde la protégerait contre tout, mais elle désirait également offrir cette protection en retour. À présent, elle savait de quoi elle était capable. Pour Lightning, la mécanicienne ne craignait plus de tuer. Elle abattra tous ceux qui tenteront de nuire à la soldate, et ce, sans la moindre hésitation. Dans ce monde, il n'existait plus aucune règle mise à part les siennes. Et sa loi prônait la sécurité de son amie avant tout.

Pour Fang, une évidence brilla dans son esprit : cet enfer ne prendra jamais fin.

Des pas se firent entendre dans le couloir. Bahamut se mit en première ligne, se positionnant entre la porte et la fenêtre qui se faisaient face. Les deux femmes toisèrent tour à tour l'extérieur et l'entrée. Au loin, les cloches de la tour de garde se mirent à teinter avec panique et virulence. Des lumières s'allumaient ci et là dans le campement. Des cris et des coups de feu débutèrent en symphonie en cette nuit froide d'hiver.

Ce soir, des vies allaient se faire arracher par la grande Faucheuse.

Brutalement, la porte de la chambre s'ouvrit avec fracas, dévoilant la silhouette d'un homme sale et malingre. Immédiatement, les deux femmes levèrent leur arme en direction de l'intrus d'un geste vif et précis.

Mais Fang et Lightning n'étaient pas encore prêtes à rencontrer la Mort.

Les balles déchirèrent le calme de la pièce, rugissant de colère et d'égoïsme, anéantissant n'importe quel obstacle qui se dresserait sur leur chemin.


Et voilà, c'est ici que l'aventure prend fin. Enfin, pour nous, pas pour elles apparemment. Merci d'avoir lu cette fiction jusqu'au bout! N'hésitez pas à donner votre dernière impression sur cette histoire.

Sur ce, je vous dis à la prochaine :D