And i remember who you love

Quinn POV

Première journée de retour à l'école. Première séance de torture. Mon esprit vagabondait plutôt autour de Rachel. De sa personnalité. De son corps parfait. Des sentiments que j'avais pour elle. Que j'ai pour elle. Qu'arrivera-t-il maintenant ? Et demain ? Et dans trois ans ? Je souhaiterai pouvoir me souvenir de tout. Pourtant quelque chose me soufflait désespérément que je n'avais pas encore toutes les données.

J'avais beaucoup appris sur moi-même et sur Rachel pendant ces quelques jours. Ensemble ou séparées, je me suis rendue compte de la place qu'elle prenait dans ma vie. C'était frustrant, effrayant. Et si les gens parlaient de nous ? Voyaient-ils les regards que je lui lançais parfois ? C'était pire qu'une drogue. Je ne pouvais arrêter de chercher sa présence, son essence, elle. J'avais besoin d'elle pour respirer et passer à travers ma journée.

Ne pas se souvenir était plus que terrifiant. Beaucoup vous regardait et attendait que vous réagissiez d'une certaine manière et seul le vide vous indiquait laquelle. J'ai commis pas mal d'erreurs, eu des comportements que l'ancienne Quinn n'aurait pas eus. Et pourtant ? Je n'ai toujours pas trouvé le courage de lui avouer que je l'aimais, que j'avais des sentiments profonds pour elle. Dormir à côté d'elle fut l'expérience la plus marquante de ma vie. La paix, le calme apaisait mes désirs inassouvis et je me sentais en accord avec moi-même. Elle révélait une autre partie de moi, un meilleur moi.

Des gens, des chuchotements, des regards et des gestes éloquents, voilà ce qui m'avait accompagnée ce matin-là. J'aurai dû me douter. Avoir une sorte d'avertissement. Comprendre que tout ceci était trop parfait. La peur était l'émotion que je voyais le plus souvent dans les yeux de ceux qui m'entourent. C'était perturbant. J'essayais de ne pas y prêter attention. Comportements mielleux des professeurs, dispenses, appréciations et compliments me glissaient dessus comme une goutte d'eau sur une vitre. Je tentai de ne pas montrer l'impact, la trace que ces actions laissaient sur moi. C'était une métamorphose à nouveau.

D'ouverte d'esprit, je suis redevenue la Quinn cachant derrière une armure imparable ses plus sombres secrets. Un sourire de loin, un pouce levé et sa silhouette qui s'éloignait au bout du couloir furent tout ce que je perçus d'elle au matin. Son corps coincé entre celui de Puck et l'immensité de Finn était trop masqué pour que je le remarque facilement à midi. J'avais manqué sa présence toute la journée et maintenant, un certain rebond dans ma démarche, je me dirigeai vers l'endroit où je savais que je pourrais la retrouver. Le seul endroit où j'étais certaine de pouvoir la croiser à coup sûr. La seule chose qui avait illuminé ma journée et m'avait permis de passer à travers : Glee.

J'avais bien ce curieux pressentiment au fond de mon estomac mais je l'attribuais plutôt au stress de ma future performance. Si je ne pouvais le dire avec mes mots, j'allais simplement les lui chanter. Mes propres paroles, écrites avec un soin particulier, résonnaient dans mon esprit : échos des battements de mon cœur qui rythmait avec perfection leur cadence. Mais il y avait toujours Finn, il rôdait autour de Rachel prenant n'importe quel prétexte pour proposer son aide, marcher avec elle ou s'asseoir à son côté. La jalousie brûlait de son venin mes veines mais je ne pouvais rien dire, rien faire.

De grands et profonds yeux chocolat se fixèrent sur moi à la minute où je passai la porte. Je lui souris, légèrement crispée. Intérieurement, j'étais à la fois soulagée et terrorisée de la voir assise là dans cette petite jupe à carreaux. Elle me sourit à son tour et se détourna pour reprendre sa conversation chuchotée avec Kurt. Lui aussi me regardait mais ses yeux n'étaient pas bienveillants. J'eus l'impression d'avoir échoué à un test dont j'ignorais l'existence.

Je m'assis derrière. De là je pouvais observer sans être observée, un vieux truc que je ressortais à l'occasion, sans doute un vestige de mon esprit paranoïaque. J'attendis, repassant mentalement à travers ma chanson plusieurs fois. La salle se remplit rapidement, bien trop vite à mon goût. Je laissai l'heure s'écouler sans trouver le courage de lever la main pour demander la parole. C'était trop … trop à mettre en jeu. Je ne voulais pas perdre et quelque chose me disait que ça serait le cas.

Il ne restait qu'une ou deux minutes et le silence se fit soudain dans la salle. Tout le monde semblait réfléchir ou attendre que quelqu'un propose quelque chose. Je n'en pouvais plus. Le regard fixé sur son dos, je demandai à pouvoir montrer ce que j'avais préparé expliquant qu'il s'agissait d'une sorte de cadeau pour m'avoir soutenue ses derniers jours. Je fis bien attention à la fixer dans les yeux en le disant. Il fallait qu'elle comprenne l'importance de cette chanson pour moi, elle devait le lire là où ça comptait : aux portes même de mon âme.

Un sourire, une inspiration et je fermai les yeux, souhaitant chanter pour moi mais aussi pour elle. Toute mon émotion ne devait être dirigée que vers un seul endroit : son cœur. Il s'agissait de lui envoyer mes sentiments, de créer ce lien qui ne demandait qu'à s'épanouir à l'extérieur de moi et à nous unir pour ne faire plus qu'une.

Je chantai la perte d'un amour oublié, l'attente d'une reconnaissance, l'envie de continuer à essayer. Je murmurai sur les larmes que j'avais versées, sur ce sourire qui me réchauffait mais surtout sur le rire que j'avais étouffé. Je ressentis ce désir enfoui, l'exposai aux yeux de tous et le dirigeai vers son origine. Je transmis mes craintes, mes peurs, mes envies. Je me découvris, nue de sentiments, capable d'exprimer l'amour que je portais à mon âme-sœur et ma crainte de la voir me rejeter.

Je gérai alors d'ouvrir les yeux et de fixer mon regard sur le seul qui comptait. Je laissai l'émotion couler à l'intérieur de moi, nourrir mon désir d'elle et alimenter ma chanson. Je frappai la dernière note, vide et en même temps si remplie. Vide de toute crainte, de toute peur, remplie de son essence, de sa présence. Et il ne lui avait suffi que d'un regard pour sceller mon destin, notre futur.

Silence. L'écho persistant de ma performance toujours dans l'air. La tension qui remplaça l'attente. Un corps chaud contre le mien. L'embrasement de chaque terminaison nerveuse. Et un objectif, le seul qui compte : Son regard dans le mien, ses lèvres sur les miennes. Fondu au noir, enchainer. Couper, c'est enregistré. Nous voilà de retour au départ. Là où tout ne fait que brûler et où nous sommes consumées par l'intensité du temps.

Un côté chaud, l'autre mordu par le froid de la nuit. Un silence fictif, brisé par le ronronnement de machines et le bip régulier d'un cœur en état de marche. Deux corps cassés qui partagent le même lit : l'un en parfaite santé et l'autre légèrement plus abîmé. Parfois les fractures importantes ne sont pas celles que dissimulent les plâtres. L'inconscient s'occupera de panser les blessures qu'égoïste on choisit de garder pour soi jusqu'à l'instant qui nous rappellera celui ou celle aimé en silence.

FIN