Des fois, je me demande s'il se souvient de notre première rencontre. Des premières paroles que nous avons échangées. De notre premier frôlement. Sûrement que oui.

D'autres fois, je me demande ce que j'aurais fait si j'avais su ce qui allait se passer.
En fait, si j'avais su ce qui allait suivre, j'aurais fait demi-tour et me serais enfui loin, loin de cette ville, loin de cette salle de cours. Loin de ce lycée. Loin de ce trottoir où il m'a parlé pour la première fois.
Ou peut-être pas en fait.
Ouais, sûrement pas. J'aurais refait les mêmes gestes, j'aurais encore prononcé les mêmes paroles, juste pour voir son sourire.
Ou pour le serrer dans mes bras.

Mots retrouvés gribouillés sur un emballage sur le trottoir en face du lycée d'Oto, écrits par la main de Naruto Uzumaki, trois jours après « La » conversation avec Sasuke.


Iruka leva le nez des copies qu'il était censé corriger et observa ses élèves. Peu d'entre eux réfléchissaient réellement à leurs exercices de mathématiques, les autres préférant discuter à voix basse dans un léger brouhaha. Il soupira et jeta un coup d'œil dehors. Le temps était lourd pour un après-midi de quatre octobre. Il faisait chaud mais gris et il ne put s'empêcher de trouver ce temps étouffant.

« Iruka-sensei ? Appela l'une de ses élèves au premier rang. Vous pouvez venir s'il vous plait ? »

Il se leva doucement, mais cela n'empêcha pas les adolescents de continuer à parler. Ce n'était que la première heure de cours et déjà, ils étaient dissipés. Il eut un petit sourire en reconnaissant bien là les élèves de la terminale B. C'était l'unique classe dont la composition n'avait jamais changée au cours des années lycée et Iruka les avait pour la deuxième année consécutive. Il savait quels élèves il pouvait laisser parler parce qu'ils auraient quand même une note convenable, quels élèves il devait pousser ou soutenir, quels élèves copiaient, quels élèves se laissaient copier. Il reconnaitrait leur frange, leurs mèches, leur sac même dans une folle bondée.

Oui, Iruka connaissait bien ses élèves et c'était justement pour cette raison qu'il était un si bon professeur principal.

Alors, quand il eut finit d'aider son élève, il retourna s'asseoir à son bureau et se remit à corriger ses copies. Cependant, un rire mal étouffé attira son attention et il leva les yeux. Au cinquième rang, un adolescent brun aux étranges triangles rouges tatoués sur les joues riait avec son voisin de devant. Mais quand les élèvent remarquèrent le regard de leur professeur, ils firent semblant de s'intéresser à leurs cahiers, pouffant encore de temps à autre.

Kiba Inuzuka, avec ses deux triangles rouges tatoués sur les joues, était l'un des élèves les plus sociaux qu'Iruka n'ait jamais vu. Il aimait le sport, rire et s'amuser. Il aimait ses camarades de classe et ceux-ci lui rendaient bien.

Iruka leva les yeux au ciel devant leur comportement mais bien vite, son regard se porta sur le rang derrière celui de Kiba. Il était vide. Quatre chaises vides.

Ils étaient encore absents. Sûrement ne viendraient-ils pas en première heure.

Il soupira, les imaginant quelque part en train de traîner et fumer. Ce n'était pas parce que l'un d'entre eux avait la mauvaise manie de toujours arriver en retard que les autres devaient suivre. Il regarda sa montre. Neuf heures moins vingt.

Deux coups secs donnés à la porte attirèrent son attention et il lâcha un « Entrez » plat, passant avoir affaire aux fameux retardataires. Ce fut cependant la directrice, la belle mais non moins effrayante Tsunade Koishi.

« Iruka, appela-t-elle de sa voix sévère.

-Ma classe est à vous Tsunade-sama, répondit-il automatiquement. »

Elle avança et monta sur l'estrade, ses deux couettes blondes et sa forte poitrine se balançant au rythme de ses bras. Les élèves la regardèrent en silence. Elle posa ses mains sur ses haches, dans une attitude autoritaire et imposante, puis elle commença son discours :

« Un nouvel élève arrive dans votre classe aujourd'hui. Il vient refaire sa dernière année de lycée ici et je compte sur vous pour l'accueillir convenablement. Il a connu quelques problèmes d'intégration dans le passé mais je compte sur lui pour se rattraper. »

Elle regarda les élèves un par un, les sonda de ses yeux noisettes et reporta son attention vers la porte :

« Entre je te pris, tonna-t-elle. »

La porte coulissa, une main hâlée posée sur sa tranche. Le nouvel élève entra, d'un pas qui paraissait assuré et quelques élèves écarquillèrent les yeux devant son apparence peu commune. Une peau hâlée, des cheveux blonds en bataille et des yeux bleus leur faisaient face, le tout monté sur un bon mètre quatre-vingt.

Un brouhaha s'éleva. Le nouveau ne laissa aucune émotion s'afficher sur son visage mais devina bien ce qui attirait leur attention. Dans un geste lent et calculé, il porta une main à sa joue droite. Il caressa du bout des doigts ses trois cicatrices.

Trois longs traits parallèles s'étendaient sur chacune de ses joues, à la manière des moustaches des félins. Elles lui piquaient encore un peu et il eut la pensée qu'elles devaient être encore rouges.

Il ne portait pas encore l'uniforme du lycée. Un jean noir, une veste en cuir ouverte sur un pull bleu foncé avec col en V, il ne semblait pas être venu pour étudier.

« Voici Naruto Uzumaki, introduisit Tsunade, les sortant tous de leurs pensées par la même occasion. »

Sur ce, elle quitta la salle, ses talons résonnant sur le parquet qui recouvrait le sol. Naruto la suivit de ses yeux magnétisants. Il les darda ensuite sur le mur en face de lui, loin derrière les adolescents assis.

Iruka se demanda ce qui était arrivé à ce gamin. Il ne semblait pas vraiment à l'aise dans cette classe. « Des problèmes d'intégration » avait dit Tsunade. Quels genres de problèmes ? En avait-il été la cause ou la victime ? Il sentit son ventre se tordre sous le désir qui avait fait de lui un professeur : le désir d'aider ces gamins.

Il s'approcha de lui et posa une main sur son épaule. Naruto tourna la tête vers lui. Il n'avait pas les yeux d'une victime, mais pas ceux d'un causeur de troubles non plus. Il avait des yeux normaux. Et ça étonna Iruka.

« Je suis Iruka, introduisit l'enseignant. Je serai ton professeur de mathématiques et principal pour cette année. Tu peux aller t'assoir aux côtés de Kiba. Tu ne peux pas le louper, c'est celui avec les tatouages sur les joues. »

Naruto hocha la tête et partit s'asseoir. Kiba observa son profil quelques secondes, sa mâchoire carrée, son nez plat, ses cicatrices. Elles devaient le faire souffrir.

Il avait envie de lui demander comment il se les était faites. Le regard fixe de Naruto sur le professeur, sa posture droite, tout indiquait qu'il était tendu, alors Kiba se pencha vers son pupitre et entama la conversation :

« Salut, chuchota-t-il, comme tu es nouveau ici, je vais être sympa et devenir ton meilleur pote. Non, plus sérieusement, je te dirai tout ce qu'i savoir sur les gens de ce lycée, parce que bien sûr, je suis omniscient. Donc tu peux m'appeler Dieu. »

Naruto cligna des yeux plusieurs fois, son regard dardé sur son voisin, qui avait lâché sa tirade d'un air tout à fait sérieux. Puis il pouffa doucement et Kiba eut un sourire. Le rire de son nouveau voisin était rauque et il sut déjà que celui-ci fumait. Il chercha un peu et trouva la confirmation dans une des poches que la veste en cuir qui reposait sur le dossier de la chaise : un paquet de cigarettes en ressortait.

Naruto haussa un sourcil, un sourire aux lèvres et lui intima :

« Et bien, ce n'est pas la modestie qui t'étouffe. »

Kiba haussa les épaules et en continuant de chuchoter, répondit :

« Bah, je n'ai pas tort sur un seul point : je connais pratiquement tout le monde dans cette classe comme ma poche, sauf toi bien entendu. Tiens, le prof par exemple. Iruka est le seul prof que je connaisse qui autorise les élèves à l'appeler par son prénom. Si un jour tu as le malheur de l'appeler Monsieur il pète un câble. C'est le meilleur prof principal au monde, il est super proche de ses élèves. Tu t'en rendras vite compte. »

Naruto hocha la tête, un sourire en coin toujours au coin des lèvres. Ce Kiba parlait beaucoup. Beaucoup et gentiment. Une ombre passa dans ses yeux cobalt : ça le changeait de ses anciens camarades de classe.

Kiba lui tapota gentiment l'épaule et Naruto se retourna une fois de plus vers lui, craignant un peu que Kiba ait perçu son malaise. Cependant, son voisin eut le tact de ne pas demander et annonça :

« Si tu as une question mec, n'hésite pas. »

Naruto observa un instant la classe, passant ses yeux magnétisants sur les quelques regards curieux qu'on lui lançait, sur les queues de cheval, les cheveux coupés courts et ceux relâchés. Puis il jeta un coup d'œil rapide, presque craintif sur la rangée vide derrière lui et questionna Kiba :

« Il n'y a personne derrière nous ? »

Kiba perdu d'un coup son éternel sourire et Naruto haussa un sourcil. L'adolescent tatoué détourna le regard pour regarder le tableau d'un air sérieux. Il semblait troublé.

Naruto crut alors qu'il ne lui répondrait pas et fixa les carreaux de son bloc-notes avec insistance. Il sortit ensuite son agenda, chercha la date du jour même et griffonna quelques mots. Quand il le rangea de nouveau dans son sac, la voix de Kiba s'éleva :

« En vérité, il y a quelqu'un derrière nous. Quatre personnes. Mais ils sont toujours en retard au premier cours, je ne sais pas pourquoi. Ils fument dans l'enceinte du lycée, sous les yeux des surveillants, sèchent des cours pour aller sur le toit, tutoient et répondent à tous les professeurs…Plus personne ne leur fait de remarques à force mais personne n'ose agir comme eux. Ce sont un peu les rebelles du lycée tu vois ? Ils sont toujours, tout le temps, en colère contre tout. »

Naruto le regarda, mais ne pipa aucun mot. Sans réellement savoir pourquoi, un malaise s'insinua en lui et ses cicatrices le démangèrent.

Kiba observa la cour par la fenêtre et continua :

« Derrière moi, c'est la place de Gaara Sabaku. On ne l'a jamais entendu élever la voix mais ses mots sont aussi tranchants qu'une lame. Il ne parle pas beaucoup cependant. Il y a Ino Yamanaka, derrière toi, à droite, c'est sans doute la plus sociale. C'est une furie cependant, ne te la mets pas à dos et ne sors pas avec elle non plus. Trop de mecs l'ont fait selon moi. A côté d'Ino, c'est Lee Rock, le petit ami de Gaara. Beaucoup de gens le trouvent trop bizarre, je pense qu'il est juste impliqué dans ce qu'il fait. Tu ne peux pas le louper crois-moi, il parle bien trop fort pour ça.

-Son petit ami ? Comment l'homosexualité est prise dans votre lycée ? Le coupa Naruto et pour le coup, ses cicatrices le démangèrent beaucoup plus.

-Au début, mal. Tout le monde se moquait d'eux, les dénigrait ou les évitait. Certains ont même essayé de les frapper, mais je ne sais par quel moyen, ça s'est arrêté. Comme ça, du jour au lendemain. »

Naruto avala sa salive et serra fermement les poings, pour s'empêcher de toucher ses balafres. Devait-il le lui dire maintenant ?

Kiba se retourna et posa sa main à plat sur le bureau derrière lui, il semblait voir quelque chose que Naruto ignorait.

« Kiba, ça se passe de ce côté jeune homme, l'apostropha le professeur.

-Pardon Iruka, répondit aussitôt l'appelé en se rasseyant correctement. »

Iruka le regardant en fronçant les sourcils quelques secondes et quand il se détourna Kiba jeta un coup d'œil à Naruto qui le regardait toujours et annonça :

« Quant à celui qui est derrière toi… »

Il ne put jamais achever sa phrase puisque la porte coulissa brutalement, faisant résonner un claquement sec dans toute la classe. Naruto darda ses yeux céruléens vers les nouveaux arrivants. Une jeune fille entra en premier, sa longue queue de cheval se soulevant derrière elle sous ses pas fluides et légers. Son uniforme la moulait parfaitement et Naruto se demanda un instant si sa jupe n'était pas trop courte, son nœud et ses boutons pas trop défaits. Son teint de pêche, encore bronzé par l'été luisait sous les lumières artificielles de la classe. Une grande mèche lui cachait la moitié du visage et comme elle était de profil, il ne put pas voir la couleur de ses pupilles.

Un garçon à la coupe au bol noire la suivit. Ses sourcils étaient plus épais que la moyenne, pas assez pour lui manger la moitié du front mais suffisamment pour que Naruto ne trouve cela étrange. Sa cravate avait été abandonnée et la chemise à manches courtes de son uniforme était ouverte sur un tee-shirt vert. Ses yeux noirs scrutaient la salle et se plissèrent légèrement lorsqu'ils tombèrent sur Naruto. Ce dernier remarqua alors qu'ils n'étaient pas bridés, mais pratiquement ronds. Il se demanda de quel pays il venait.

Il fut suivi par un autre garçon qui avait teint ses cheveux en rouge. Son uniforme était correct mais ses sourcils rasés et ses yeux maquillés de noir. La couleur de son regard était claire, d'un bleu-vert que Naruto n'avait alors jusque là jamais vu.

La jeune blonde lui jeta un regard de son œil visible et il put découvrir le turquoise de ses prunelles.

Le dernier arrivant fit son apparition quelques secondes après eux, fermant doucement la porte et levant son regard vers le professeur furieux. Ses yeux aussi étaient noirs, sa peau pâle et ses cheveux indisciplinés à l'arrière étaient aussi ébènes. L'éclairage leur donnait de drôle de reflets. Sa chemise était ouverte sur les trois premiers boutons, dévoilant une peau au grain parfait.

Iruka posa ses mains sur sa hanche et leur intima :

« Pourriez-vous au moins avoir la décence de toquer la prochaine fois jeunes gens ? »

Tandis que la blonde et le jeune homme aux sourcils épais hochaient vaguement la tête, les deux autres lui envoyèrent un regard blasé.

« Allez-vous asseoir, reprit Iruka.

-On n'a pas besoin que tu nous le dises, trancha l'adolescent aux cheveux rouges. »

Il traversa les rangées et passa à la droite de Naruto qui croisa son regard. Des yeux rouges, fatigués et humides. Insomnies remarqua-t-il de suite. Puis il prit place derrière Kiba et Naruto l'identifia comme Gaara Sabaku.

La jeune fille passa peu de temps après et Naruto sut déjà qu'il s'agissait d'Ino Yamanaka. Elle lui envoya un sourire aguicheur qu'il ignora royalement. Si seulement elle savait… Le garçon à la coupe au bol était allé s'asseoir à côté d'elle. C'était donc Rock Lee.

Il ne restait plus de vide que le siège derrière lui et le dernier du groupe des retardataires s'était arrêté entre deux rangées, à un mètre de Naruto. Il le regardait en fronçant les sourcils. Or son regard n'était pas porté sur ses cicatrices mais sur ses yeux. Naruto les plongea alors dans les siens.

Et ce qu'il vit le perdit à tout jamais.

Ses yeux n'étaient pas noirs, ils étaient plus que ça. Ce n'était pas un noir commun, c'était un noir dont on ne pouvait pas distinguer la pupille de l'iris. C'était deux lacs d'encre, dont la sensation de profondeur qui s'en dégageait étourdissait Naruto. Tellement d'émotions y tourbillonnaient. Il y décela en premier la colère. Puis la curiosité et un peu de tendresse. C'était un regard de rêveur. Et soudain, ça le frappa. Il eut l'impression de suffoquer intérieurement. Il y avait de la douleur. Tellement de douleur. Mais l'adolescent s'avança et passa entre son bureau et celui de Kiba, coupant ainsi le contact visuel établi entre eux.

Ses mains étaient dans ses poches, son sac à bandoulière tapant régulièrement contre sa cuisse et les yeux de Naruto s'accrochèrent un instant à son poignet. Son souffle s'accéléra un peu. Sa peau. Elle était si blanche.

Le brun le dépassa et s'installa derrière lui. Naruto fronça les sourcils. Ses yeux étaient hypnotisant. Mais qui diable était-il ?

Il lança un regard interrogatif à Kiba mais celui-ci gribouillait déjà quelque chose sur son cahier. Naruto prit alors son mal en patience.

Mais alors qu'il réussissait à peu près à reprendre le fil des explications de leur professeur, une boulette de papier arriva sur sa table. Il tourna la tête à droite et Kiba lui envoya un sourire d'encouragement. Il déplia alors le papier, morceau d'une page arrachée sans soin et déchiffra l'écriture en pattes de mouche de son nouveau voisin :

« Lui, c'est Sasuke Hatake. C'est le fils de notre professeur d'histoire. Il est toujours indifférent à tout. Je ne l'ai vu qu'une fois s'énerver, contre un mec qui avait apparemment blessé Ino. Hiroki qu'il s'appelait. Il s'en est pris plein la gueule. M'enfin. Sasuke, c'est le type de gars que tu n'entendras pas souvent parler. »

Naruto termina sa lecture et froissa à nouveau le papier avant de le glisser dans sa trousse. Il remercia Kiba d'un signe de la tête et reporta son attention sur le cours.

Ou essaya.

Son nouveau lycée était dans une ville éloignée de son ancienne, remplie d'inconnus et il s'était fait un semblant d'ami. Mais son malaise ne disparaissait pas. Ces quatre personnes l'intriguaient. Il secoua la tête, ce n'était pas ses affaires.

Mais comment quelqu'un comme Sasuke Hatake qui avait un regard si rêveur pouvait-il être indifférent ?

La première heure de mathématiques passa rapidement. La deuxième aussi. Et ce fut l'heure de la pause.

Naruto se leva, affila son manteau de cuir et se dirigea vers la sortie. Cependant, Kiba l'interpella :

« Hey Naruto ! Tu vas où ? C'est la pause, vient faire la connaissance des autres !

-Je vais fumer, répondit le concerné en se retournant.

-Tu mangeras avec nous alors ? Demanda un roux à côté de Kiba. »

Naruto hocha la tête, essayant de se convaincre d'être heureux de se faire si vite intégrer à la classe. Il traversa les couloirs, la cour remplie d'élèves et sortit de l'enceinte du lycée. Il s'appuya contre un mur, sortit une cigarette et l'alluma. Il inspira doucement une bouffée et expira la fumée. Il la regarda s'envoler dans le ciel gris et ses yeux s'assombrirent une fois de plus. Il n'aimait pas cette ville. Il n'aimait pas ce lycée. Tout allait se finir comme dans son ancienne école. Il tira une nouvelle fois sur sa cigarette.

Une voix résonna à sa droite :

« Excuse-moi, t'as du feu s'il te plait ? »

Naruto sursauta et faillit lâcher sa précieuse cigarette quand il vit à qui elle appartenait. Sasuke Hatake se tenait à côté de lui, cigarette coincée entre les lèvres et une moue de pure indifférence sur le visage. Il était plus petit que lui. Naruto cligna des yeux, ressortit son briquet et l'alluma. Sasuke se pencha, ferma les yeux et alluma sa cigarette. Naruto n'eut aucun mal à reconnaitre la marque, une Marlboro. Lui fumait des Camel. Il observa le visage de son vis-à-vis. Il était tellement proche. Si proche qu'il pouvait observer la peau pâle qui était si lisse, la texture soyeuse de ses cheveux, ses longs cils, ses lèvres fines et légèrement roses et même le grain de beauté au creux de sa clavicule. Pas si parfaite que ça finalement sa peau. Une fois sa cigarette allumée, en quelques secondes à peine –et Naruto sut qu'il fumait comme lui depuis un bon moment-, il le remercia d'un signe de la tête et partir.

Naruto rangea aussitôt son briquet et ses yeux se reperdirent dans le ciel. Il en oublia la cigarette qui se consumait toute seule dans sa main. Quelque chose avait été remuée en lui en entendant la voix de Sasuke Hatake. Quelque chose dont il ignorait tout. Ce n'était pourtant pas une voix exceptionnelle, c'était une voix déjà muée, suave, calme et posée. Une voix neutre. Et ça l'avait ébranlé.

Il chercha Sasuke Hatake du regard et le trouva quelques mètres plus loin, de l'autre côté du portail. Lee Rock était appuyé contre le muret, Gaara Sabaku dans ses bras et semblait parler avec passion de quelque chose que Sasuke Hatake, en face d'eux, écoutait attentivement, fumant. Ino Yamanaka était de l'autre côté de la route, embrassant un élève d'un autre lycée à pleine bouche.

Il fut surpris de voir que l'expression de Sasuke Hatake avait changé. L'émotion dans ses yeux aussi. La tendresse y avait pris place et jaillissait sur tout son visage, détendant ses traits dans une expression douce. Et ça lui brûla les rétines.

Le reste de la journée se passa dans le flou. Il écouta en cours, mangea avec les adolescents de sa classe, son malaise ne se dissipa pas et il se força à rire un peu aux blagues de Kiba. Il retint le visage de leur professeur d'histoire, le professeur Hatake, dont les lèvres étaient cachées par un masque d'infirmier. Ses cheveux ébouriffés étaient décolorés, gris et lui retombaient sur un de ses deux yeux noirs. C'était un beau trentenaire mais il ne ressemblait pas du tout à Sasuke Hatake. Ça l'avait intrigué mais il n'avait pas posé de questions à Kiba.

Il commençait à se faire à l'idée que tout l'intriguait chez Sasuke Hatake.

Quand il sortit de cours le soir même, il erra dans les rues de la ville, espérant réussir à se sentir mieux avant de rentrer chez lui. Il marcha sous les nuages gris qui laissèrent s'échapper quelques gouttes de pluie. Il marcha au milieu des gens qui le dévisageaient, ses cicatrices attirant curiosité et dégoût. Il continua de marcher quand la pluie s'abattit sur le bitume de la ville, vidant les rues. Il marcha, essayant de vider ses pensées des souvenirs encore frais de son ancien lycée, en vain cependant.

Il releva la tête seulement quand il arriva au milieu d'un parc. Il poussa un juron en remarquant qu'il ne savait même pas où se trouvait ce parc dans la ville et qu'il s'était perdu. En sortant son portable, il lut l'heure. Il avait marché une bonne trentaine de minutes. Ses parents étaient sûrement en train de s'inquiéter. Il activa son GPS sur son portable. Il était au centre de la ville. En soupirant il traversa le parc, chercha la sortie. Mais il ne trouva qu'un immense cerisier, dont les pétales roses volaient tout autour du tronc. Le vent les décrochait de leurs branches et elles semblaient danser avec les gouttes de pluie dans l'espace.

Naruto resta subjugué par cette vue quelques minutes.

Il se souvint cependant rapidement qu'il devait rentrer chez lui et emprunta le chemin que lui indiqua le GPS. Il était étrange que cet arbre soit en fleurs à cette période de l'année. De plus le cerisier était au centre du parc qui lui-même était au centre de la ville, la ville avait-elle était construite autour de lui ?

Il passa devant un fleuriste et des éclats de rire attirèrent son attention. Au milieu des fleurs il aperçut Lee Rock qui faisait danser tant bien que mal Ino Yamanaka. Sasuke Hatake était assis sur le comptoir de la petite boutique, aux côtés de Gaara Sabaku qui était appuyé dessus. Ils riaient. Tous les quatre. Pour Lee Rock et Ino Yamanaka, c'était de grands éclats de rire bruyants, les bouches ouvertes et les yeux fermés. Pour Sabaku Gaara et Hatake Sasuke, c'était des rires discrets, entièrement recouverts par ceux des deux autres, les bouches closes et les yeux ouverts brillants.

Le cerveau de Naruto se mit en standby. Ils avaient l'air tellement vivant comme ça, tellement heureux, tellement jeunes, bien loin de l'image qu'ils renvoyaient lorsqu'ils étaient au lycée. Cette image emplie de haine. Cette image qui n'était qu'un mensonge réalisa soudain Naruto. Alors, c'était à ça qu'ils ressemblaient en vrai ? A ces quatre amis complètement unis, qui dansaient au milieu d'une boutique, désireux d'oublier le monde extérieur ? Naruto eut un pincement au cœur. Ils étaient capables d'oublier au moins quelques secondes eux, ils n'étaient pas seuls, contrairement à lui.

Son cerveau se remit petit à petit du choc qu'il venait de recevoir et une autre pensée remplaça celle qu'il avait : ils étaient beaux. Ils étaient beaux, tous les quatre, au milieu des fleurs, à rire, à être ensemble, à être heureux quelques secondes. Il se remit à marcher avant qu'ils ne le remarquent et une question se fraya un chemin dans sa tête pour conquérir tout son corps.

Pourquoi revêtaient-ils un masque au lycée ?

Pour se faire remarquer ? Pour se protéger ? Mais de quoi ? Et pourquoi tous les quatre ?

Plongé dans ses réflexions, il remarqua à peine quand il arriva chez lui. Ce fut la voix de sa mère qui le ramena à la réalité à peine eut-il le temps de franchir la porte de la nouvelle demeure familiale:

« Naruto ? »

Elle avait l'air vraiment inquiet. Il lui offrit un pauvre sourire d'excuse et articula :

« Je suis rentré…

-Où étais-tu mon poussin ? Demanda-t-elle aussitôt. »

Des images de son ancien au lycée lui revinrent en mémoire, telles des ombres du passé. Il soupira, ses cicatrices le démangèrent encore. Il répondit sincèrement :

« -Je me suis perdu, Maman.

-Tu es sûr mon poussin ? Tu ne me caches rien ? Parce que-, commença-t-elle.

-Kushina, la coupa le père de Naruto qui venait d'arriver dans l'entrée.

-Salut Papa, déclara piteusement Naruto en le remerciant intérieurement.

-Bonsoir Fiston. Et si nous allons manger ? Tu es rentré tard, annonça tendrement Minato. »

Mère et fils hochèrent la tête dans un bel ensemble et le dîner se déroula dans une bonne ambiance. Ses cicatrices ne le démangèrent pas de tout le repas. Il y eut même plusieurs sourires plein de dents. Il n'y avait que chez lui qu'il se sentait bien désormais.

A la fin, quand son père partit regarder les informations, Kushina le chargea de faire la vaisselle alors qu'elle l'essuyait et la rangeait. Tout en passant le chiffon sur une assiette, sa mère lui demanda :

« Alors ? Cette première journée de cours ? C'était bien ? »

Il pensa aux regards curieux ou dégoutés qu'on lui lança, à son malaise, à tous ces inconnus et au regard de rêveur douloureux de Sasuke Hatake, au visage colérique de Sabaku Gaara, au muscles tendus de Rock Lee, au sourire aguicheur de Ino Yamanaka. A la scène qu'il avait aperçue dans la petite boutique du fleuriste. Ce bout de vérité, cet instant qu'il avait l'impression d'avoir volé, violant leur intimité.

« Pas trop mal, mentit-il.

-Tu t'es fait des amis ? »

Il pensa alors à Kiba, à ses tatouages sur les joues, à ses blagues, à son écriture en pattes de mouche et à la boulette de papier dans sa trousse. Les camarades de classe avec qui il avait mangé ne pouvaient pas être considérés comme ses amis. Il répondit :

« Un. Il s'appelle Kiba Inuzuka. »

Il retira ses mains de l'eau, les essuya et quitta la cuisine en laissant sa mère finir avec une bise sur la joue. Il s'enfuyait avant qu'elle ne pose la fameuse question.

« Tu lui as dit ? »

Non, il ne l'avait pas dit à Kiba. Dans cette ville, seuls ses parents le savaient. Il n'y avait pourtant aucun mal à dire qu'il était gay s'il s'assumait. Et cela aurait sûrement était plus facile de le dire dès le début. Mais il avait trop peur que le passé se répète.

Pour chasser ses idées noires, il décida de prendre une douche. Il entra dans la salle de bain, ferma la porte à clé, se déshabilla en jetant ses vêtements sur le sol et se glissa dans la douche. Il ouvrit l'eau, régla la température pour qu'elle soit brûlante et offrit son visage au jet d'eau. Il ferma les yeux, se concentrant sur la sensation du liquide bouillant qui allait surement laisser des plaques rouges sur sa peau.

Mais son malaise amplifiait avec les secondes, ses pensées restèrent sombres, son estomac se souleva et il dut se retenir de vomir.

Ses cicatrices le démangèrent. Il avait envie de se les gratter.

Cédant, il leva les mains et se les tritura. Elles n'étaient pas cicatrisées car il passait trop de temps à se les tripoter alors il n'eut aucun mal à arracher les croutes fraiches.

Ce soir-là, une fois de plus, le sang qui coulait de ses joues se mêla à l'eau de la douche.


Hello à celles que je retrouve et à celle que je ne connais pas! (et aux mecs si y en a...)

Voilà donc ma nouvelle longue fic (j'ai galéré pour trouver un titre d'ailleurs) qui aura...je sais pas combien de chapitre mais j'en ai déjà deux d'écrits...Pour un résumé plus ou moins (surtout moins) allez sur mon profil...en fait j'ai du mal avec les résumés mais disons qu'il y aura: des clopes (ouuuuuuuuh pas bien), des cours, un Sasuke presque muet au départ, un Naruto pas bien dans sa peau (au départ aussi), un Kiba trop Kiba, un GaaLee tout choupi, une Ino...trop...enfin voilà (mais ce sera au début aussi), un Kakashi père (ouch, chelou...mais j'ai toujours rêvé de faire une fic avec ça!), et puis des rebondissement, des abrutis homophobes, d'autres abrutis pas homophobes mais abrutis quand même et bien sûr du NaruSasu!

Merci à ma Bloody pour avoir corrigé :)

Voila voilà.

Erza.