Béta: Ma soeur.

Note: Voilà, c'est le dernier chapitre. Un épilogue est en cour d'écriture et une version parallèle aussi, pour l'anniversaire de ma soeur. J'ai encore envie de parler de cette fiction, de Sakura. Mais pour faire vite, ce que je veux dire en priorité c'est que j'ai cette idée dans la tête depuis très très longtemps. En effet, on peut retrouver des éléments précurseurs dans La Maladie (sic), dans En Temps de Paix puis dans La Prophétesse. Sur ces trois fictions, qui sont les premières que j'ai écrites, seule une est véritablement terminée. Comme si ces trois fictions avaient été des travaux avant-coureurs pour arriver jusque là. La deuxième chose que je veux dire c'est que Naruto est un manga formidable et très riche, qui m'a aider à grandir, entre autre via la communauté de que je remercie. Enfin, je voudrais vous dire que le combat pour la place des femmes dans la société n'est pas terminé, restons vigilantes sur nos droits, mais aussi sur des tendances moins évidentes. Il faut aller chercher les racines de la misogynie très profondément pour les comprendre et les changer. Je rajouterai aussi une chose. Ce chapitre est posté le jour où la loi sur le mariage pour tous est passé en France, une date historique à laquelle j'ajoute mon petit cailloux. Aujourd'hui on peut dire Vive la France :)


Chapitre 7: Je n'ai plus de question.


Chers Naruto et Sasuke,

Les femmes ont tout voulu, ont tout pris. On se croyait auto-suffisante, capable de défendre notre progéniture avec nos poings, capables mieux que vous de la faire grandir, capable de la protéger de vous et de vos guerres. Capable aussi de vous protéger de vous même, de vos passions, de vos ardeurs et de vos erreurs. J'ai cru qu'un monde de femmes était un monde de paix, j'ai cru que la guerre était masculine. Pendant un moment, dans la fièvre de mon déclin, je me suis dis que vous ne serviez à rien. J'ai maudit vos corps, j'ai maudit les hommes de toute cette maudite planète pour avoir répandu sur nos vies le vice et la violence. Mais maintenant qu'il va venir au monde, soudain je me sens violente, je me sens vicieuse et je crois que rien ne m'arrêterait si quelque chose le menaçait. J'aurai répandu la guerre et la mort si sa vie était en danger et j'aurai voulu le venger si le mal lui avait été fait.

Peut-être sommes-nous plus douces au fond, d'un naturel plus placide dans notre vie de tous les jours, mais je crois que la violence d'une mère est plus dévastatrice que celle de tous les hommes combinés. Parce que j'ai porté cet enfant, je l'ai senti grandir en moi, bouger, se tourner. Je l'ai imaginé, je l'ai rêvé et il ne peut être que parfait car il incarne mon amour pour vous. Et je ne supporterais pas qu'une telle perfection soit blessée, je reviendrais d'entre les morts s'il le faut, je le jure, j'arracherais la vie de ceux qui l'ont fait souffrir. Cet enfant que j'ai rêvé a nourri mes fantasmes, j'ai imaginé ma vie avec lui, ce que je lui dirais, les enseignements que je voudrais lui transmettre, ce que je voudrais qu'il découvre à mes côtés, en sachant bien au fond que jamais ça n'aurait lieu. Mais c'était tout ce qui me restait, mon imagination...

Jalousement, égoïstement, j'ai gardé pour moi ce trésor aussi longtemps que possible. J'ai vécu ma maternité seule en refusant de vous la faire partager, j'ai voulu faire cela seule pour me prouver que vous ne serviez à rien. Mais c'est faut, je le sais maintenant, je le sais alors que j'arrive à peine à tenir mon crayon et que j'ai si peur, je sais que j'ai eu tort. Après tout, cet enfant est aussi le vôtre et vous aviez le droit de le connaître, de l'imaginer avec moi, de le rêver, de vous préparer à la vie avec lui comme moi j'ai pu le faire pendant ces huit mois. Dans ces derniers moments, alors que tout dort ici, dans cette vallée figée et morte mais où règne la paix, je sais que j'ai eu tort. Je n'y arriverais pas toute seule, j'ai peur, je voudrais que vous soyiez là pour que je puisse vous confier tout ce que j'ai envie de lui dire et que je ne pourrais jamais lui dire.

J'ai envie de voir vos visage s'illuminer en le voyant, de voir vos airs ébahis devant tant de perfection, de voir vos mains trembler devant tant d'humilité... J'ai envie que vous soyez là pour me tenir quand j'exploserai, pour me rassembler quand je m'éparpillerais. J'ai peur, j'ai peur, j'ai peur...

Et j'ai honte d'avoir tout retenu pour moi seule, parce que si j'ai tout pris, je ne vous ai rien donné en retour. Je suis devenue guerrière pour pouvoir vous suivre, j'ai poussé mon corps jusqu'au bout pour avoir votre respect, j'ai voulu devenir votre égale mais je n'ai pas compris que cela signifiait aussi vous donner quelque chose en retour.

Mais au final, vous allez l'avoir toute une vie, alors que moi je ne l'ai eu que huit mois, c'est trop peu, je ne l'ai pas connu et pourtant je sens que je suis celle qui sait le mieux ce dont il a besoin. J'enrage de cette situation, ce n'est pas juste et j'ai envie de vous détester pour avoir ce privilège que je n'ai pas. Mais comme je rêve de vous avoir près de moi dans cette épreuve, de vous sentir une dernière fois contre moi, me sentir en sécurité dans vos bras...

Je n'ai pas pu vous dire vraiment au revoir... Je n'ai pas pu vous enlacer une dernière fois, je n'ai pas pu vous dire la vérité et, si parfois j'en ai éprouvé un certain plaisir sadique, à présent je sais que je me suis punie. J'ai besoin de vous, je n'y arriverais pas toute seule... Mais où êtes vous bon-sang, ne m'abandonnez pas maintenant!

Je vous en supplie ne me laiss...


Naruto passa une main sur son visage las et tâcha de respirer normalement pendant une minute, sans succès. Les larmes revinrent, plus fraîches et plus violentes que lors de la première lecture. Sasuke était parti après qu'ils l'aient lu ensemble une première fois, il avait pâli sur les dernières lignes, puis s'était mis a trembler. A genoux sur le sol il avait pris sa tête entre ses mains sans rien dire et Naruto était resté figé sans comprendre.

« Ce n'est pas fini, où est la suite? Pourquoi ce n'est pas signé? Avait-il demandé, un peu hystérique tout en passant son pouce sur les tâches de sang qui éclaboussaient la lettre comme pour les effacer. Sans y parvenir.

- Elle n'a jamais fini la lettre, l'accouchement a commencé à ce moment là, avait répondu Kinran d'une voix blanche qui cachait bien ses émotions.

- Non mais il devait bien y avoir une suite! S'était exclamé Naruto mais Sasuke l'avait attiré au sol, contre lui et l'avait pris dans ses bras.

- Y'a pas de suite Naruto, elle n'a jamais pu l'écrire... Y'a pas de suite, c'est fini...

Le guerrier blond l'avait serré fort dans ses bras et Sasuke avait encore resserré son étreinte.

- C'est fini Naruto, avait-il répété.

Mais en réalité, ce n'était pas fini, il y avait un petit être, une petite fille, Kohane, laissée aux bons soins de sa grande-tante Kinran.

La vieille femme était restée dans la vallée, dans le village pour protéger l'héritage des sœurs Ebochi même lorsque tous avaient déserté leur philosophie. La guerre dix ans auparavant ne les avait pas épargnés, contrairement à ce que tous avaient espéré. Mais face à la détresse du reste des nations, les habitants du village étaient tous sortis pour prêter main forte... Et n'étaient jamais revenus. Mais Kinran étaient restée, l'Orchidée vieillissant seule dans la fertile vallée. Jusqu'au jour où sa nièce était arrivée, enceinte jusqu'au cou et mourante.

La rencontre avec Sakura avait été très dure pour Kinran, qui devait voir la fille de sa sœur mourir juste après l'avoir rencontrée, et se voyait confier un enfant qu'elle ne pourrait connaitre bien longtemps. Sakura lui avait expliqué son projet, lui avait parlé des deux hommes à qui elle confiait l'éducation de sa fille. Et Kinran, fidèle à la sagesse des Soeurs Fondatrices, avait accepté, elle avait attendu ces deux hommes patiemment en voyant grandir l'enfant.

Et ils étaient là, jeunes et fiers, virils et forts à l'orée de leur plus grand voyage: celui d'être parents.

Et faibles portants, face à la mort de la femme qui les avait accompagnés des années durant, fragiles devant l'importance de la mission, mais assurés de réussir malgré les difficultés. Arrogants peut-être mais pleins de bonnes intentions. La fin était douce-amer.


Le bébé était tout petit, Sasuke avait du mal à respirer pendant qu'il le tenait, de peur de l'écraser ou bien qu'un souffle un peu trop fort ne le fasse s'envoler. Kohane le regardait, elle était plutôt silencieuse mais bougeait beaucoup, elle donnait des coups de pieds de temps en temps et bougeait les bras pour attraper les doigts du ninja. Il lui souriait, il ne pouvait pas arrêter de sourire en fait, elle était parfaite, merveilleuse et sienne. Pleine de promesses.

« Eh, Konahe, murmura Sasuke doucement. Il se sentait à la fois sûr de lui et complètement désarçonné. L'espace d'une seconde il doutait de sa capacité à la protéger et la suivante, il savait qu'il mourrait pour elle. Elle répondit à son sourire et le visage du jeune père s'illumina, il gazouilla bêtement tandis qu'elle serrait fort son index dans ses doigts minuscules.

Elle ressemblait à sa mère, elle avait une touffe de cheveux châtain sur le crâne qui couvrait légèrement son front et de larges yeux sombres qui laissaient le doute sur leur couleur définitive. Autrement, elle avait des yeux plutôt ronds mais qui s'étiraient légèrement. Sasuke contempla son nez et sentit une vague d'excitation idiote l'envahir lorsqu'il se dit qu'il le croquerait bien. Il passa une main sur sa joue et son index vint caresser son oreille délicate.

- Oui tu es magnifique, affirma t-il avec un grand sourire et elle continua de le fixer de ses grands yeux sombres. Sa petit langue apparue quand elle ouvrit la bouche pour engloutir le doigt du jeune ninja. Elle le recracha après quelques essais et gigota, probablement déçue.

- Oui, non ça ne se mange pas, expliqua t-il. Mais peut-être que tu as faim?

Une ride se creusa sur son front alors que Kohane continuait de s'agiter en poussant de petits geignements. Sasuke sentit un diffus sentiment de panique l'envahir et au moment où il allait appeler à l'aide, la main de Naruto se posa sur son épaule et de l'autre main, le chef du village lui tendait un biberon.

- Kinran à pensé qu'elle aurait peut-être faim, déclara t-il en s'asseyant.

Sasuke allait prendre le biberon mais se ravisa et tendit doucement Kohane à son autre papa. Naruto eut un air paniqué et secoua vivement la tête en regardant Sasuke comme s'il avait perdu la tête.

- Prends-la Naruto, exigea ce dernier et le guerrier blond réitéra son refus.

- Elle a l'air très bien chez toi! »

D'autorité, Sasuke plaça l'enfant dans les bras de son amant qui lâcha le biberon dans un mouvement de panique. Pendant quelques secondes, père et fille s'observèrent puis Kohane produisit un gazouillement et Naruto fondit comme la neige au soleil. Il sourit au bébé et attrapa sa petite main dans la sienne, incroyablement large en comparaison. Sasuke sourit, récupéra la bouteille et la tendit à l'autre homme qui la prit sans cesser de regarder l'enfant.

Naruto observait la petite fille avec attention, il notait tous ses changements d'expression, cette façon qu'elle avait de froncer les sourcils puis de les lever très haut. Ses petits pieds poussaient contre son bras, en rythme avec les succions, ses petites mains se posaient contre le biberon puis contre la main de l'homme qui le tenait. Le jeune ninja avait l'impression de la connaître depuis longtemps déjà, comme si elle faisait partie de lui.

Sasuke se rapprocha du couple et posa son menton sur l'épaule de Naruto pour observer sa fille dont les yeux sombres papillonnaient d'un visage à l'autre. Elle s'agita brièvement et Sasuke lui tendit la main, elle attrapa son index puis le lâcha, le reprit.

« Elle ne sait pas ce qu'elle veut, commenta Naruto, la voix un peu tremblante.

- C'est une fille, répondit son partenaire d'un air absent, trop occupé à regarder l'enfant.

- Ah nan, on va pas commencer dès maintenant ce genre de remarques misogynes. Kohane-chérie, papa est un sale misogyne, ne l'écoute pas, tu as parfaitement le droit d'hésiter.

Sasuke resta silencieux un moment, le sourire aux lèvres puis murmura:

- Je sens que ça va être marrant, éduquer un enfant avec toi... »


Kinran les observait de loin, il faudrait bientôt qu'ils rentrent, le voyage de retour serait long et ils seraient obligés de s'arrêter bien plus souvent. Mais avant, elle voulait s'assurer qu'ils sauraient s'en occuper, elle voulait les aider, les conseiller, comme un dernier cadeau. Un unique cadeau, car elle allait rester ici pour veiller sur la vallée encore des années durant, c'était sa mission, c'était toute sa vie. Et puis un jour, elle partirait, mais pas à pieds.

Ils étaient beaux, virils et en bonne santé. Leur amour était discret et ne rayonnait pas sur leurs visages mais dans leurs gestes semblables, leurs expressions identiques qui témoignaient de longs moments passés ensemble. Ils étaient à la fois jeunes et vieux, violents et sages et elle sentait le potentiel destructeur qu'ils portaient chacun, mais ensemble, cette puissance prenait une autre direction.

Elle déroula le parchemin qui contenait tout le savoir de sa famille, traçant du bout des doigts les lignes d'encre familière. Ils avaient eu raison de le ramener, la place d'un tel savoir se trouvait ici, où personne ne pourrait l'utiliser pour faire le mal. Sakura elle même s'était trouvée sur une pente glissante en utilisant ces sceaux. Elle avait lu la veille de l'accouchement une lueur de désespoir briller dans les yeux de sa nièce tandis qu'elle avait frénétiquement cherché un moyen de survivre, quitte à y laisser son âme. Finalement, parce que Sakura était sage et parce que le sacrifice faisait partie de sa vie, elle avait renoncé et accepté de ne jamais voir sa fille grandir.

Kinran devait faire le même renoncement, car le sacrifice faisait partie de sa vie. L'enfant devait repartir dans un monde où elle pourrait avoir des amis, grandir entourée du reste de sa famille, car Kohane n'était pas orpheline, loin de là. Elle avait plus de pères et de mères qu'elle ne pouvait l'espérer.


Une semaine plus tard, Naruto aidait Sasuke à attacher Kohane dans son dos à l'aide d'un long draps. Elle bougeait et gazouillait gaiement, racontant des choses passionnantes à ses deux pères.

Durant une semaine, ils avaient suivi un stage intensif de maternité: comment prendre soin d'un bébé en sept leçons par Kinran Ebochi. La leçon « comment changer bébé » avait été particulièrement... éclairante. Ni Naruto, ni Sasuke ne s'étaient laissés démonter, même quand elle avait fait pipi sur le dernier Uchiha avec un éclat de rire. Le jeune Hokage avait laissé éclater son hilarité, jusqu'au lendemain où elle lui avait vomi dessus, Sasuke avait eu la grâce de ne pas rire.

Les relais la nuit pour la nourrir avaient aussi été une aventure, mais ils étaient prêt à tout et leur formation de ninjas les avait habitués à ne pas beaucoup dormir. La paix qui régnait sur les cinq nations leur avait fait perdre l'habitude, cependant.

Kinran les observait faire, vérifiant que la petite était bien attachée. Sasuke la regardait d'un air calme. Elle sentait qu'il cherchait en lui les traits de Sakura, qu'il imprimait au fond de ses pupilles chaque courbe qu'il avait pu un jour observer chez sa meilleure amie.

« Vous ne sortirez jamais de cette vallée? Demanda t-il et Naruto cessa de bouger.

- Jamais, répondit-elle simplement, c'était la règle, c'était ma mission, garder cette vallée et son savoir jusqu'à ce que les hommes soient prêts pour la paix.

- Et maintenant? Reprit Naruto, on est prêt!

Elle le regarda et sourit chaleureusement, une expression rare chez elle.

- Le simple fait que vous ayez ramené le rouleau me prouve que vous savez autant que moi que ce n'est pas le cas.

Ils ne dirent rien, échangèrent simplement un regard et acquiescèrent.

- La paix, l'éthique et le bien sont des combats que l'humanité n'a pas encore gagné, mais j'ai bon espoir, ajouta t-elle. Je crois en vous.

Les deux ninjas fixèrent Kinran d'un regard pénétrant, comme si sa parole était prophétique puis Naruto serra un dernier nœud.

- Voilà, ponctua t-il.

Sasuke passa machinalement la main dans son dos pour sentir le bébé et Kohane répondit par un petit cri de contentement.

- Merci de vous être occupée d'elle, finit par dire le jeune Hokage pour couper le silence qui se prolongeait.

- C'était le vœu de Sakura.

- Vous... On pourra peut-être revenir, pour que vous puissiez la voir? Proposa Naruto mais Kinran secoua la tête.

- Non, vous ne devez plus revenir ici, vous ne devez plus troubler le sommeil du gardien.

Les deux ninjas se regardèrent avec un air interrogatif.

- Vous l'avez rencontré dans la caverne, il dort depuis le commencement.

- Qu'est-ce que c'est? Chuchota Naruto, se rappelant la terrible puissance ressentie dans la grotte.

- Un des premiers êtres du monde, né en même temps que les premières consciences animales. Il est la nature même et c'est de lui que provient notre savoir.

- Je ne comprends pas...

Kinran le toisa.

- C'est peut-être mieux ainsi, ces créatures là doivent rester endormies.

- Mais vous lui avez parlé, interjecta Sasuke et la vieille femme posa son regard sur lui.

- J'ai écouté ce qu'il fredonnait, mais il ne s'est adressé à personne en particulier. Votre passage l'a éveillé parce que vous portez en vous une puissance bien trop grande pour juste deux hommes, déclara t-elle, toujours énigmatique.

- C'est plus vieux que les bijuus, n'est-ce pas, déclara Naruto.

- C'est aussi vieux que la vie sur cette terre. Allez maintenant, il est temps.

Ils restèrent silencieux et contemplatifs une minute puis Sasuke hocha la tête et avança, la dépassant sans un regard supplémentaire, les yeux rivés vers l'entrée du passage.

Naruto fronça brièvement les sourcils et murmura:

-Merci pour tout...

Elle inclina brièvement la tête et alors qu'il passait près d'elle, Kinran lui attrapa le poignet:

- Prenez soin d'elle ».


Hinata hurla une nouvelle fois. A ses côté, sa tante prononça quelques mots et posa sa main fraîche contre son front, la douleur diminua. Une nouvelle vague de contraction venait de frapper, elle sentait le bébé qui descendait doucement. Elle était accroupie sur la chaise accoucheuse, et, agenouillée à ses pieds, la sage-femme était prête à tirer l'enfant à elle dès qu'il sortirait le bout de sa tête. Kiba était debout à ses côtés, le visage anxieux tourné vers elle alors qu'elle lui broyait les os de la main. Il murmurait des mots qui ne voulaient rien dire, d'une voix douce qui contenait bien son angoisse. Elle lui en fut reconnaissante. Cela faisait douze heures que le travail avait commencé et la sage-femme avait décidé de l'accroupir depuis une heure, signe que c'était pour bientôt.

« Allez, allez, tu vas y arriver, fit Kiba en lui tapotant la main et elle eut un éclat de rire.

- Bien sûr que je vais y arriver!

Et soudain, une nouvelle vague de contraction la saisit, mais cette fois-ci elle sentit clairement son bébé glisser et elle eut un hoquet.

- Quoi, quoi?! Mais QUOI! S'inquiéta le futur papa, il tenta de se pencher pour voir mais la sage-femme lui jeta un regard noir et il se ravisa.

- Il arrive, fit cette dernière en passant ses mains dans le trou de la chaise. Poussez Maîtresse.

- Vas-y, pousse Hinata, pousse! Cria Kiba avec enthousiasme.

Dans la mesure où elle pouvait rire, Hinata eut un nouvel éclat de rire et elle sentit tout son corps se détendre. Elle avait eu peur, terriblement peur. Les images du propre accouchement de Sakura lui revenant sans cesse en tête. Elle avait peur de mourir, de laisser son bébé et son mari seuls, elle voulait vivre pour le voir grandir, pour voir aussi Kohane grandir, devenir amie avec son propre enfant.

Une vague d'émotion la submergea et elle se sentit partir. La main de Kiba était chaude dans le bas de son dos, réconfortante. Il traçait des huit et la soutenait à présent physiquement pour ne pas qu'elle s'écroule. La jeune héritière tremblait de tout son corps, agrippée au bras de son mari. Elle leva la tête vers lui, il la regardait, les yeux brillants, terrifié mais émerveillé par son courage. Elle hurla alors que la dernière vague de contraction la saisit.

- Le voilà! S'écria la sage femme et Hinata se sentit étrangement vide au delà de la douleur apparente. Elle s'affala sur la chaise en bois inconfortable et sa tante l'enroula de suite dans une couverture propre. Kiba la tenait du bout de la main, tout son corps était tendu vers la sage femme qui tenait dans ses bras leur premier enfant.

- Il va très bien, annonça t-elle.

- Évidement, il va très bien! Répliqua sèchement Kiba, comme pour défendre l'honneur de sa femme.

- C'est un garçon, continua la vielle femme en ignorant le père. Elle apporta l'enfant enveloppé lâchement dans plusieurs serviettes et le tendit à sa mère.

Suante et éreintée, Hinata sourit devant ce petit miracle. Des larmes de joie lui échappèrent et Kiba s'agenouilla à sa hauteur, les mains crispées sur ses cuisses. Il n'osait pas toucher.

Hinata se tourna vers lui et se pencha pour lui embrasser la tempe, ce qui détendit le ninja. Il passa sa main sous les bras de la chaise et caressa la joue de son fils.

- Hiro alors? Questionna Kiba. C'était le prénom qu'ils avaient choisi si l'enfant était mâle.

- Oui, oui... La lumière sur le chemin, prononça t-elle.

Le jeune père lui sourit.

- Hiro, répéta t-il, bienvenue... »


Deux jours plus tard, la jeune maman fut réveillée en trombe par Kiba, vers sept heures du matin. Il s'était levé vers cinq heures avec elle pour la voir donner le sein, une expérience qu'ils aimaient partager en famille pour le moment, mais Kiba ne s'était pas recouché, il était resté penché au dessus du berceau jusqu'à maintenant.

« Sasuke et Naruto son rentrés, murmura t-il avec excitation, et ils ont un bébé avec eux!

Hinata eu un petit sourire mais ses yeux étaient tristes.

- Je sais oui, c'est la fille de Sakura.

Le ninja maître-chien fronça les sourcils.

- Je ne comprends pas.

- Sakura avait un secret, commença Hinata, un secret qu'elle souhaitait porter seule, rien que pour elle pendant huit mois... C'était un cadeau, un cadeau pour les personnes qui lui étaient le plus chères au monde...Ce cadeau c'était... »


Pour le moment, Kohane avait élu domicile chez sa mère. Sasuke et Naruto n'avaient pas réussi à se mettre d'accord sur quel appartement serait celui dans lequel ils habiteraient dorénavant. En chemin et face à leur impossibilité à faire ce compromis, ils avaient décidé d'acheter un autre endroit, peut-être une maison un peu à l'écart, comme un nouveau départ. Mais en attendant, le seul terrain neutre était l'appartement de Sakura, encore plein de la vie de la défunte.

Ce serait d'ailleurs probablement à eux de faire le tri avant de vendre l'appartement...Naruto contemplait l'étagère dans la chambre à coucher, celle sur laquelle était posé le cadre avec cette photo mythique de l'équipe sept lorsqu'ils avaient douze ans. Naruto avait encore la sienne, bien précieusement dans sa chambre. Quant à Sasuke... Il se tourna et sursauta en se retrouvant nez-à-nez avec ledit ninja.

« Pour répondre à la question qui, j'en suis sûr, t'occupe la tête en ce moment, oui, je l'ai gardée.

Naruto plissa les yeux.

- Et elle est où?

Les yeux du ninja se posèrent sur le cadre l'espace d'un instant avant de revenir sur le visage de l'autre homme.

- Kakashi l'a gardée pour moi. Il a réussi à la sauver des décombres après l'attaque de Nagato... »

Sasuke se souvenait encore du jour où son ancien mentor était arrivé à l'improviste dans le taudis qui lui avait été assigné comme résidence juste après que le Sharingan ait été scellé. Il n'y avait rien à part les murs gris et humide, suintant de moisissures. Encore choqué par l'absence de son héritage familial, le ninja était resté prostré, les yeux fermés tandis que la douleur éprouvée au moment du sceau se ravivait par vagues.

Kakashi lui avait apporté une couverture et un bol de ramen. Sasuke aurait pleuré en sentant le fumet familier du restaurant de Teuchi.

« J'ai gardé ça pour toi, avait dit le mentor en lui tendant la photo. Le coin supérieur droit était brûlé mais à part ça, elle était étrangement intacte.

- Je me suis dit que c'était un bon début. »

Sasuke avait levé les yeux vers lui, incapable de sourire ou de pleurer, incapable de quoi que ce soit en réalité.

Naruto observa l'expression lointaine de son partenaire, il comprenait sans avoir besoin d'explications à quel point Kakashi pouvait encore les déstabiliser...

« J'ai pensé qu'il lui faudrait un parrain, fit doucement le jeune chef du village pour ramener Sasuke à lui. Ce dernier le regarda avec un sourcil arqué.

- C'est important, ajouta Naruto. Il eut un regard pour le petit lit dans le coin de la chambre où l'enfant dormait. Elle avait plutôt bien supporté le voyage de retour, elle était curieuse de tout et il fallait être très vigilant à ne pas laisser d'objets coupant à sa portée. Sasuke et Naruto avaient commencé à se rendre compte de la réorganisation qu'allait nécessiter l'accueil de la petite fille dans leurs vies.

- J'ai pensé à Kakashi, reprit le ninja blond. Après tout, il fait aussi partie de sa famille et... Je pense que ça lui ferait du bien.

Sasuke resta silencieux un moment puis sourit tendrement.

- Si avec ça, elle ne devient pas une ninja de renom, on aura vraiment raté quelque chose.

- Qui te dit qu'elle deviendra ninja? Répliqua Naruto d'un ton piqué mais son compagnon le regarda d'un air dubitatif.

- C'est une blague? Fit ce dernier. Bien sûr qu'elle va devenir ninja.

Naruto se détourna et sortit de la pièce d'un pas vif, Sasuke lui emboita le pas et murmura furieusement.

- Tu ne vas pas me dire que tu crois sérieusement à ce que tu viens de me dire?! Avec nous deux comme parents, Kakashi comme parrain, sans parler de sa propre mère, je ne vois pas comment tu peux imaginer une seule seconde qu'elle ne veuille pas devenir ninja.

- Mais justement Sasuke, répliqua Naruto en levant les bras au ciel, peut-être que c'est mieux si elle ne devient pas comme nous! Franchement, vu tout le mal qu'on s'est fait, toutes les souffrances qui sont le lot d'une vie de ninja, la guerre, la mort... Sa voix baissa d'un ton et il détourna le regard, soudain abattu. Je ne veux pas de ça pour ma fille.

Le visage de l'autre ninja s'attendrit et il approcha de son amant pour le prendre dans ses bras.

- Oui j'ai souffert, oui je t'ai fait du mal, mais c'est aussi avec toi que j'ai été le plus heureux, avec toi, Kakashi et Sakura, avec ma famille... Il caressa le dos de Naruto doucement et continua de souffler dans son cou: tu nous as apporté la paix à tous, à moi plus qu'aux autres... Promets moi que si tu ne la pousses pas à devenir ninja, tu ne l'en empêcheras pas non plus.

Les bras du ninja blond enserrèrent Sasuke à leur tour et il se pressa fort contre le corps solide de l'homme qui partageait sa vie.

- C'est un compromis que je peux faire, » décida t-il.

Sasuke s'en contenta.


La nuit était sombre et froide, Sasuke avançait d'un pas lent, la respiration douloureuse. Il s'arrêta soudain, fronça les sourcils et regarda ses mains pleines de sang.

« Naruto? » Murmura t-il sans comprendre. D'où venait ce sang? Il fit brusquement demi-tour et revint dans le couloir, le cœur battant. Il connaissait cet endroit mais il n'arrivait pas à remettre un nom dessus, il savait où il était sans pouvoir le dire.

« Naruto, » répéta t-il, un grand sentiment de peur l'envahissait alors que le nom ricochait sur les murs.

Soudain, une porte apparut et Sasuke l'ouvrit, le panneau de papier de riz claqua contre le chambranle et il était dehors. Le vent était chaud et l'air puait la transpiration. Cet endroit là, il pouvait le nommer. Il ne restait que quelques pierres autour du trône et l'éventail des Uchiha était en morceau, la peinture écaillée et le rouge indissociable du sang.

Itachi était là aussi, immobile et éclairé par un rayon de lune, il paraissait serein. Sasuke s'approcha, le cœur battant et le bruit de ses pas lui semblait assourdissant. Il se rendit compte qu'il portait encore l'habit de ses seize ans, mais il était beaucoup plus vieux.

« Sasuke, murmura Itachi, tu crois que tu es prêt pour ça?

Le jeune frère ne répondit rien, il continua d'approcher. Il ne savait plus s'il avait peur ou si au contraire, il allait mieux, s'il était rassuré en présence de son frère.

- Tu crois que tu sauras la protéger? Tu crois que tu sauras lui éviter ton propre destin? »

Au loin il entendit des cris, des hurlements de rage et de peur. Deux voix masculines qu'il connaissait bien, celles de ses élèves. La voix de Momiji était claire, inquiète, celle de Zuko paraissait sûre, mais le tremblement de sa gorge ne laissait aucun doute sur son anxiété.

« Reviens Koya! », « Ne fais pas ça! », « Koya je t'en supplie, ne pars pas ». Sasuke entendit sa propre voix, grave et assurée alors qu'il ne l'était pas du tout: « Ne fais pas la même erreur que moi... », « Ta place est ici, avec nous, avec moi, ta famille, c'est nous... », « Tu ne vengeras pas les tiens de cette façon », « Il y a d'autres chemins que le mien ».

« J'ai réussi une fois, répondit Sasuke, elle n'est pas partie.

Itachi se tourna vers la droite.

- Ce n'est pas passé loin. Crois-tu que tu pourras lui éviter tout ça? Comment crois-tu qu'elle réagira si tu meurs, ou si Naruto meurt... Si Naruto meurt, qu'est-ce que tu feras? Tu crois que tu pourras rester là pour elle?

Itachi tendit le bras et Sasuke se tourna vers l'endroit indiqué.

Il était assi, recroquevillé sur lui même, les cheveux longs et gras, une barbe naissante sur sa mâchoire et il y avait une petite fille dans son dos qui pleurait en hurlant, mais il ne l'entendait pas.

- Qu'est-ce que tu feras? Répéta Itachi et la scène changea, il était debout, entouré de cadavres, et tout le village était détruit, Konoha enfin partie en fumée. A ses pieds, reposait le corps de sa propre fille qu'il venait de tuer.

Sasuke pâlit et se détourna de son frère, courant vers la maison. Il avait du sang sur les mains.

- Cours Sasuke, cours, sauve les vite avant la fin », cria Itachi alors que la porte se refermait d'un bruit mat.

Le corridor était sans fin, il tourna et retournait dans la maison de ses parents, parce qu'il savait à présent. Il y avait des cris d'enfant sur la gauche et il s'y précipita, mis c'était un cul de sac.

« Sasuke », hurla Naruto, quelque part derrière lui et il fit volte-face. La porte était là, il savait où elle menait. C'était un des souvenirs les plus poignants, jamais il ne pourrait oublier.

Il ferma les yeux et respira longuement, tâchant de contrôler ses tremblements. Il fit glisser le pan droit de la porte et entra. Naruto était là, allongé sur le sol, une main sur son ventre ensanglanté. Ses yeux bleus brillaient d'une lumière vive, ils étaient naïfs. Sasuke s'avança, ses mains étaient blanches, il tenait son fidèle sabre à la main et Naruto se releva légèrement.

« Sasuke? » Fit-il, mais ce dernier continua d'avancer. Le katana était léger dans sa main, souple, il se souvenait de sa perfection. Il le fit tournoyer lentement puis le mit en position verticale au dessus de son partenaire. Celui-ci le regarda, sa mâchoire se contracta durement puis finalement, il ferma les yeux et s'allongea sur le dos. Ils ne se quittèrent pas du regard tandis que lentement, Sasuke abaissait son katana. Il n'y eut aucun bruit à part un étrange sifflement aux oreille du ninja. La bouche de Naruto s'ouvrit pour laisser passer un dernier souffle puis ses yeux se fermèrent.

« Naruto? » Appela Sasuke, soudain pris de panique. Il s'agenouilla à ses côtés et posa une main tremblante sur son ventre transpercé. Le katana vibra puis explosa et le sang jaillit du corps de Naruto, éclaboussant le meurtrier au passage. C'était comme si le sang, au lieu de couler vers le sol, grimpait de long des mains du guerrier et Sasuke s'écarta d'un geste brusque avec un petit cri.

Ses yeux se posèrent dans un coin de la pièce, là se trouvait un petit tas de chiffons et il s'approcha. Le tas ne remuait pas et Sasuke s'aperçut de la flaque de sang qui grandissait lentement tout autour du petit corps.

Le ninja sentit un haut-le-cœur le parcourir et il se releva précipitamment, tout son corps était pris de spasmes, il s'effondra à nouveau et se releva aussitôt, heurtant un mur. Toute la pièce chavirait mais il fallait absolument qu'il sorte d'ici. Il s'accrocha au chambranle de la porte et se laissa tomber dans le couloir. Il referma le pan de papier de riz d'un coup sec.

Il n'entendait plus que le bruit de sa respiration. Doucement, son cœur se calmait et il tenta de se relever. Par deux fois il retomba mais finalement, il parvint à avancer lentement en se tenant aux murs. Il marcha.

La nuit était sombre et froide, Sasuke avançait d'un pas lent, la respiration douloureuse. Il s'arrêta soudain, fronça les sourcils et regarda ses mains pleines de sang.

« Naruto? » Murmura t-il sans comprendre.


Il se réveilla avec un hurlement avorté, la gorge serrée et les larmes aux yeux. Sasuke se tourna vers l'autre côté du lit pour y découvrir l'absence de Naruto et sa panique redoubla. Le ninja se leva mais son pied resta enroulé dans les couverture et il faillit heurter la table de nuit. Haletant, il réussit à se dégager et rampa à quatre pattes sur quelques mètres avant de pouvoir se relever. Il se précipita dans le salon dans lequel ils avaient placé le couffin.

« Naruto?

Ce dernier se retourna avec un air interrogateur tout en continuant de bercer la petite.

Sasuke se laissa aller contre le cadre de la porte et passa une main tremblante dans ses cheveux. Inquiet, son compagnon s'approcha jusqu'à n'être qu'à quelques centimètres.

- Ça va?

Sasuke secoua négativement la tête.

- J'ai fait un cauchemar horrible, prononça t-il derrière sa main. Il n'arrivait pas à se calmer.

Kohane gémit, mécontente que le bercement ait cessé et Naruto reprit aussitôt tout en continuant d'observer son amant d'un air préoccupé.

Ce dernier avait légèrement relevé la tête et observait sa fille avec l'air de ne pas croire qu'elle puisse exister vraiment.

- J'ai rêvé que je t'avais tué... Et que je l'avais probablement tuée aussi. J'ai rêvé de mon frère qui me montrait des choses horribles et j'ai rêvé de Koya, quand elle a failli...

Un silence s'installa entre eux puis Naruto commenta:

- Ça fait beaucoup pour un seul rêve.

Sasuke hocha la tête et se laissa aller contre l'épaule de l'autre homme. D'un doigt, il caressa le visage de Kohane. Elle soupira et se lova davantage contre le torse de son père.

Sasuke sentit un baiser contre sa tempe et ferma les yeux, encore saisi par quelques tremblements.

- Itachi... C'était là-bas... Là où... Il s'arrêta, incapable de continuer plus loin. Naruto lui embrassa une nouvelle fois le front avant de s'éloigner pour se diriger vers le canapé, invitant l'autre ninja à s'assoir avec lui.

Ce dernier obtempéra et s'effondra sur la couche. Naruto le regarda fixer le vague, complètement immobile. Dans ses bras, Kohane respirait à présent calmement, endormie depuis que Sasuke lui avait caressé la joue.

Le jeune guerrier blond hésita, il ouvrit la bouche puis se ravisa, tâchant de respecter le silence de son compagnon. Une nouvelle fois, il commença une phrase dans sa tête mais elle se perdit quand Sasuke tourna la tête vers lui.

- J'ai tellement peur que tu meurs, déclara t-il d'un coup et Naruto sentit une vague de chaleur l'envahir. Les déclarations de ce type étaient rares dans la bouche de son amant.

- Je voudrais que tout ça ne soit qu'un cauchemar, mais je sais que j'ai déjà eu envie de te tuer auparavant.

Naruto n'avait rien à répondre, il appréhendait ce qui allait suivre. S'il affirmait que cette envie avait changé et que ce n'était pas tout à fait le cas, il ne savait pas ce qu'il ferait...

- J'ai peur qu'un jour, j'ai à nouveau cette envie, j'ai peur qu'on ne s'aime plus, j'ai peur qu'il nous arrive quelque chose de terrible... Et...

- Moi aussi j'ai peur, Sasuke, interrompit Naruto, mais j'ai aussi confiance en toi... On... On est plus les mêmes... Tenta t-il en serrant Kohane plus fort contre lui.

Les yeux de son amant tombèrent sur leur fille et il la contempla longuement.

- J'ai la trouille Naruto, j'suis terrifié, déclara t-il d'un souffle en le regardant droit dans les yeux. Des fois j'ai envie de courir et de ne jamais m'arrêter, d'oublier tout ça, toi, Kohane, Sakura... Tout.

Le jeune Hokage baissa les yeux pour tenter de cacher son trouble et de trouver les bons mots. Généralement c'était son fort mais à cet instant précis, il avait la tête vide et le cœur battant.

- Mais moi j'peux pas faire ça sans toi Sasuke, finit-il par chuchoter, la gorge serrée. Je ne veux pas revivre ça... Encore une fois.

Il releva les yeux vers l'autre ninja et ils se regardèrent longuement sans rien dire. Le regard de Sasuke papillonnait sur le visage arrondi de Naruto, traçant la courbe lumineuse de ses yeux et celle charnue de ses lèvres. Un sourire doux se dessina sur sa propre bouche.

- C'est fou, murmura t-il et son interlocuteur fronça les sourcils sans comprendre. C'est fou, répéta t-il, il suffit que je te regarde et j'ai déjà moins peur. Parce que je sais que tu as peur, que tu comptes sur moi et ça, ça me rend fort.

Naruto le regarda puis baissa le regard sur le petit être dans ses bras avec un demi-sourire. Ils n'étaient pas très doués pour les mots, ils n'avaient pas l'habitude de se dire des choses comme ça. Et pourtant, c'était fou le bien que ça faisait d'entendre Sasuke lui parler de ses états-d'âme.

- Tu m'as vraiment fait peur, couillon! Jura t-il tout bas et le sourire de l'autre homme s'agrandit.

- Désolé, c'est la nuit comme ça, ça me rend... J'ai envie de te dire des choses. C'est comme si on était tous seuls sur terre, là. Juste nous trois. J'ai le sentiment qu'on est en sécurité.

Naruto le regarda longuement, son visage prit un air dubitatif et il émit un petit rire.

- Mais tu dis de ces trucs des fois, c'est touchant! Regarde je pleure!

Et effectivement, il pleurait, de joie, de soulagement ou peut être d'une émotion encore plus profonde. Naruto n'avait jamais eu peur de pleurer, il considérait que ça le rendait aussi plus fort, mais pouvoir pleurer librement devant Sasuke était encore autre chose, le synonyme, peut être, qu'ils étaient vraiment bien ensemble.

Il sentit les bras de son amant l'entourer lui et Kohane et il se laissa aller contre le corps chaud du ninja, la tête contre son épaule. Ils restèrent ainsi en silence de longues minutes. Une des mains de Sasuke caressait les cheveux de Naruto, glissant entre les mèches blondes au hasard dans un geste répétitif et relaxant.

- Tu veux encore parler de ton rêve?

- Non, ça n'a plus d'importance. J'ai fait des erreurs et je devrais toujours vivre avec, mais j'ai aussi réussi deux-trois trucs... Koya n'est pas partie, je suis en paix avec moi-même, je t'aime et j'ai une fille magnifique.

- Que demande le peuple, ajouta Naruto en riant. Dans ses bras, Kohane justement, gigota et émit un soupir de contentement.

- On devrait peut-être la remettre dans son lit, maintenant, proposa Sasuke et Naruto hocha la tête.

Ils se levèrent et placèrent religieusement leur bébé dans son tout petit lit.

- Elle est quand même parfaite, décida le jeune Hokage et l'autre père acquiesça.

- Je suis sûr qu'on va avoir des tas de problèmes avec elle quand elle aura seize ans et que tous les mecs lui tourneront autour.

- Avec nous comme pères, je pense qu'ils y réfléchiront à deux fois!

- Je les attends de pied-ferme.

- On devrait leur faire passer un test, proposa Naruto en revenant vers la chambre.

- Je pense que nous battre en deux contre un suffira, répondit Sasuke en lui emboitant le pas.

- Non c'est déloyal, ils n'ont aucune chance.

- Justement!

- De toute façon, si elle a le caractère de sa mère... commença le ninja blond en se rallongeant sur le lit.

- Oui nan mais tout le monde ne s'y prend pas comme toi pour draguer, aussi, souligna son compagnon en rabattant les couvertures.

- Parce que toi, tu t'y prenais mieux peut-être?

- J'avais pas vraiment besoin de faire quoi que ce soit, il suffisait que je reste là avec un air mystérieux et mon passé tragique, en général ça suffisait.

Naruto pouffa et pinça les côtes de son partenaire.

- Ça me rendait tellement jaloux!

Sasuke se tourna vers lui avec un sourire et embrassa l'épaule nue de son amant.

- Ne t'inquiète pas, mon cœur n'a jamais battu que pour toi! Déclara t-il avec un ton tragique et l'autre homme le pinça à nouveau.

- Arrête, je sais très bien que c'est faux, on se détestait!

- C'était ma manière à moi de te dire que je t'aimais! » Insista Sasuke avec un grand sourire moqueur. Il roula sur le ventre en passa une jambe entre celles du guerrier blond. Il vint ensuite entourer celui-ci de ses bras jusqu'à se retrouver en partie sur lui.

Le regard de Naruto s'attendrit et il caressa le visage du ninja qui partageait sa vie depuis si longtemps. Il sentait la cuisse ferme de ce dernier entre les sienne et contre sa hanche, il savait que le désir de Sasuke s'éveillait.

Sa main glissa dans la nuque de son partenaire et caressa son épaule puis son dos tandis qu'il écartait ses jambes pour laisser l'autre homme s'installer entre elles.

Lentement, leurs visages se touchèrent, leurs souffles se mêlèrent puis leurs bouches et enfin, leurs langues tandis que leurs hanches roulaient l'une contre l'autre. La deuxième main de Naruto coula le long du dos de Sasuke jusqu'à une fesse qu'il empoigna de sa large main. Il plia les genoux pour coincer le bassin de son amant entre eux et se déhancher plus pleinement contre lui, ce qui lui arracha un soupir de contentement.

Sasuke l'embrassa à pleine bouche tout en continuant d'onduler. Une de ses larges mains vint se poser sur le genou replié de Naruto avant de descendre en caressant la cuisse, elle passa sur la hanche et s'y arrêta, chaude et puissante. Sasuke se décala légèrement pour laisser sa main redescendre vers l'intérieur de la cuisse et venir attraper leurs deux sexes. Naruto ferma les yeux et laissa sa tête retomber en arrière, brisant la suite de baisers répétés. Son partenaire en profita pour embrasser son cou: il mordilla la pomme d'Adam et descendit jusqu'à la jonction avec l'épaule où il mordit la peau. Sous lui, le jeune homme blond grogna de douleur et de plaisir, ses deux jambes se resserrèrent pour enfermer l'autre ninja dans une étreinte possessive.

La position devint difficile à tenir pour Sasuke qui se redressa légèrement, ses yeux noirs parcoururent le visage de son amant, de ses lèvres entrouvertes à ses yeux mi-clos. Le bleu de ses iris avait presque entièrement disparu tant les pupilles étaient dilatées. Dans la pénombre de leur chambre, ses longs cils blonds projetaient des ombres sur ses pommettes humides et par la fenêtre ouverte, une brise vint les chatouiller, soulevant mollement quelques mèches blondes.

Lentement, Sasuke se pencha pour embrasser à nouveau Naruto, son bras s'était immobilisé sur leur deux membres pour laisser la tension retomber légèrement. Puis il se mit à genoux et tendit la main vers leur table de nuit pour en sortir le lubrifiant qu'il versa dans la creux de sa main. Sans un mot, Naruto se tourna sur le ventre et fit glisser un coussin sous son bassin. La tête sur le côté, posée sur un bras, il écouta la respiration de Sasuke, rauque mais lente, puissante. Il sentit une main sur le haut de sa cuisse, puis elle glissa vers l'intérieur et d'une pression, lui demanda d'ouvrir la jambe. Contre son intimité, il sentit alors un doigt humide et frais et sans un mot, Sasuke le pénétra.

Naruto avait remarqué que souvent son compagnon était silencieux quand il lui faisait l'amour, il était concentré et attentif. Ses mouvements avaient quelque chose de religieux, de retenu. Comme en ce moment où son doigt allait et venait avec une lenteur révérencieuse.

« Sasuke, murmura Naruto dont les hanches suivaient le mouvement sans qu'il puisse les en empêcher, Sasuke tu peux y aller, tu sais. J'suis pas en sucre.

Pour toute réponse, l'autre homme se pencha sur son dos et quelques mèches chatouillèrent la colonne vertébrale du guerrier allongé. Les lèvres de Sasuke vinrent effleurer sa peau alors qu'un autre doigt venait accompagner le premier. Naruto frissonna et fourra sa tête dans ses bras avec un grognement. Ses cuisses se contractèrent et il se déhancha au même rythme que les doigts de son amant qui déglutit bruyamment.

- Naruto, » murmura t-il comme si ça lui avait échappé et l'homme en question sourit.

La lenteur de Sasuke le brûlait, comme si chaque nerf de sa peau était à vif, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur. Il sentait la moindre brise, chaque centimètre de peau qui glissait sur les draps et surtout, il y avait un point brûlant dans son dos là où Sasuke déposait des baisers.

Enfin, probablement à bout de patience, le ninja retira ses doigts. Naruto se détendit et souffla, tremblant légèrement d'anticipation. Il entendit la bouteille de lubrifiant être ouverte puis refermée et jetée négligemment.

Sasuke se mit à quatre pattes au dessus de son partenaire et vint poser une main sur celle de Naruto pour les entremêler. Il s'allongea quasiment de tout son long sur son amant, son nez contre sa nuque. Cambré jusqu'à la limite de l'inconfort, Naruto écarta davantage les jambes pour laisser toute la place à Sasuke. Il sentit le sexe de ce dernier contre lui et ferma les yeux, expirant doucement alors que l'autre homme le pénétrait. Il soupira d'aise en retrouvant la sensation à présent bien connue de leur union. Contre lui, il sentit Sasuke cesser de respirer, mais un gémissement lui échappa, presque un sanglot alors que l'avant de son bassin venait heurter les fesses fermes de Naruto. Celui-ci serra la main et Sasuke fit de même en réponse avant de reculer lentement pour s'enfoncer à nouveau. Il grognèrent de concert et Sasuke mordit l'épaule de son partenaire, sa langue collée contre la peau salée de transpiration, les yeux fermés.

Sous lui, Naruto se déhanchait doucement, synchrone et lascif. Il aimait bien cette position, il aimait sentir tous les muscles du ninja à la peau pâle contre son dos, éprouver son poids qui le collait au matelas et le rendait vulnérable. Il aurait pu faire ce qu'il voulait de lui.

Ils continuèrent sur ce rythme lent un moment avant que, d'un mouvement sec, Sasuke n'accélère, arrachant une longue plainte de plaisir à son partenaire. Ce dernier creusa encore son dos pour permettre une pénétration plus facile. L'autre homme se redressa légèrement pour augmenter l'amplitude de ses coups de bassin, agrippant une hanche dorée. Naruto se sentit fondre de l'intérieur et se laissa aller à la force brutale qui s'emparait d'eux dans leur union. La main de Sasuke glissa le long de son dos jusque dans sa nuque où il agrippa quelques mèches blondes, forçant Naruto à se tordre jusqu'à ce qu'il puisse voir son visage. Avec un grognement animal, il accéléra encore et sous lui, son partenaire ferma les yeux, complètement submergé par les vagues de chaleur qui se succédaient. Il n'allait pas pouvoir tenir très longtemps et, alors qu'il allait en faire part à Sasuke, celui-ci s'effondra contre lui, embrassant et mordant sa mâchoire. Leurs deux mains jointes se serrèrent encore et, à la suite d'un à-coup puissant, Sasuke s'immobilisa et vint dans un râle de plaisir. Il reprit ses déhanchés juste après tout en laissant sa main aller jusqu'au sexe de Naruto pour l'emmener avec lui dans la jouissance. Deux aller-retours suffirent pour que le guerrier blond lui aussi, finisse dans un long soupir d'aise.


Une minute, ou peut-être dix passèrent avant que Naruto ne repousse doucement son compagnon, la position dans laquelle ils se trouvaient était devenue franchement inconfortable. Il roula sur un bord du lit pour éviter les draps souillés et observa le plafond un instant. Tout son corps vibrait encore de l'orgasme, il sentait de petites décharges électriques parcourir sa peau et il ne put s'empêcher de rire.

Sasuke sortit sa tête d'entre ses bras pour dévisager son amant. Il fronça les sourcils:

« Pourquoi tu ris?

- Parce que je suis bien, là, répondit Naruto avant d'être assailli par un véritable fou-rire.

Son partenaire le regarda rire avec un air dubitatif mais bientôt, les éclats de Naruto se propagèrent jusqu'à lui et il se surprit à laisser échapper un petit gloussement ridicule. A nouveau, il fourra sa tête entre ses bras pour se cacher alors que l'autre homme repartait de plus belle. Les épaules de Sasuke tremblaient en rythme avec ses éclat de rire silencieux, ce qui n'aidait en rien Naruto qui ne semblait pas pouvoir s'arrêter. Au bout d'un moment pourtant, les crises s'espacèrent et laissèrent une expression attendrie s'installer sur le visage du jeune Hokage.

- Sasuke?

- Hum? Répondit-il, toujours face contre le matelas.

- Je t'aime.

L'intéressé tourna la tête et ses yeux noirs brillèrent dans le noir.

- Moi aussi je t'aime, murmura t-il en retour.

Un minute de silence passa avant que Sasuke ne se remette à rire.

- Quoi? Demanda l'autre, curieux.

- Rien, c'est ton expression. Elle est idiote. On dirait que tu vas te mettre à baver d'une minute à l'autre.

Naruto sourit et se tourna sur le ventre pour se relever.

- Mais tu me fait baver d'envie! Répliqua t-il avant de se pencher sur l'épaule de son partenaire et de la lécher avec enthousiasme.

- Ahhrr! Fit Sasuke en se retournant.

Naruto se laissa alors tomber sur lui sans aucune grâce, l'étouffant à moitié.

- Humpf! Se plaignit l'autre homme tout en le repoussant sans grande conviction. Son amant ricana quelques secondes avant de se relever et de descendre du lit.

- Bouge! Ordonna t-il d'un ton amusé mais le second ninja ne fit que rouler jusqu'à se laisser tomber au bas du lit.

Naruto l'ignora et entreprit de retirer le draps pour en changer. D'humeur taquine, il le balança sur Sasuke, toujours étalé là où il s'était gracieusement laissé choir. Il ne fut pas surpris en sentant le linge lui tomber sur la tête lorsque son compagnon le lui renvoya.

Avec un soupir, il l'emporta dans la salle de bain pour le mettre au sale et revint avec un drap propre. Sasuke était toujours au même endroit.

- Tu vas dormir là?

- Peut être, tu m'as épuisé.

- Et après, c'est moi la feignasse... grommela Naruto pour la forme. Une fois le drap en place, il s'allongea et ramassa la couverture qu'ils avaient repoussée jusqu'au pied du lit. Le silence s'étendit sur leur chambre. Au bout de quelques minutes pourtant, il sentit Sasuke ramper du sol jusque sur le matelas. Ce dernier se lova contre Naruto, si proche que le ninja sentait les cils de son compagnon contre sa joue lorsqu'il ferma les yeux. A son tour, le jeune Hokage ferma les yeux, le sourire aux lèvres.