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A l'attention des plus jeunes ou des plus pudiques, YAOÏ, lemon et rating M :
Impliquent une relation entre deux hommes avec scènes érotiques suggestives implicites ou explicites selon les sensibilités qui ne conviennent pas à tous les lecteurs et peuvent les choquer.
Vous êtes responsables des choix de lecture que vous faites.
N'allez pas au risque de vous générez du malaise, au-delà de ce que vous êtes capable d'aborder ou d'accepter.
Disclaimer : propriété intellectuelle : M. Kishimoto que je remercie pour l'emprunt
Résumé : Perdu au milieu de nulle part, Sasuke ne peut compter que sur un homme marqué, élu et paria à la fois, pour sauver son frère et pour sauver son âme.
Infos :
Le monde dans lequel les persos vont vivre leur aventure est OCC mais inspiré de la carte des pays de Naruto.
Le distille est le vêtement que j'ai emprunté à Herbert et sa saga de Dune (meilleur vêtement pour le désert) ainsi qu'Iba que j'ai remixé à ma sauce pour en faire juste une graine.
Je me suis permise de détourner les mythes japonais, je ne pense pas qu'Amaterasu et Suzano m'en voudront vraiment. Cette fois je triture les dieux en plus des persos ^^.
Je vous souhaite une bonne lecture.
Le paria
Il était une fois…
Lente marche sur le sable incandescent, les rayons durs frappent le sol qui se couvre d'un voile réfléchissant, mélange d'or et d'argent. Son regard se perd un instant sur ce paysage sans finitude, les ocres mêlés de rouges flirtent avec des ombres tremblantes. Enfin les voila, les terranes du berceau d'Amaterasu ! Il y sera en fin d'après-midi.
Il tire un peu plus sur sa capuche, protégeant ainsi ses yeux d'un bleu pur. Il remonte l'écharpe de toile sur ses lèvres et son nez. Il ajuste le tube de son distille et reprend sa marche.
Un serpi gris le fixe avant de le fuir en de longues circonvolutions arithmétiques. Sa tête triangulaire aux yeux rouges s'enfonce dans le sable. Il ondule une dernière fois et disparait, laissant les grains fins à nouveau vierge de toute écriture.
L'homme aspire une gorgée d'eau tiède et continue son chemin. Son pas lent le rapproche inexorablement de son but. Il trouvera le corps au berceau, il espère juste arriver à temps. Il est celui qui voit, il est la voix de « Kyuubi », il est l'enfant démon.
Sasuke tente de se tourner mais la douleur et la soif refoulent ses efforts. Ses paupières tuméfiées se soulèvent puis se referment aussitôt, il a mal. Ses yeux le brûlent, ses lèvres craquelées appellent comme une terre sèche appelle sa délivrance. Le sang a séché sur les nombreuses plaies qui courent sur sa peau, il sent la chaleur et les rayons cogner, ils l'écrasent et l'étouffent. Est-ce ainsi que tout va finir ? Où est-il, où est son frère ? Il fait si chaud, si chaud…
Le vent hurle à présent, s'engouffrant dans les anfractuosités façonnées par les mains invisibles de la déesse sur la roche séculaire. Le soleil est bas, les ombres viennent ramper, elles qui ont attendu toute la sainte journée pour prendre possession de la terre. Elles se glissent lentement, doigts effilés recouvrant la pierre, ombres plus obscures venant se nicher aux creux encore chaleureux, noyant le berceau dans un voile de mystère.
La vie s'agite, de petits animaux sortent de leurs repaires et dans son exile onirique, ils deviennent source et musique. Sasuke rêve qu'il est à nouveau sous les grappes de fleurs douces des haies de son jardin privé. La douleur qui le réveille par instant le ramène à la réalité. Il est seul et va mourir…
Un murmure… Il sent une présence, une pression douce posée sur ses lèvres abimées et puis l'eau tiède qui s'infiltre doucement. Il avale si vite qu'il s'en étrangle, crachotant douloureusement. Une main effleure son visage et l'apaise. Elle coiffe d'un geste doux ses mèches collées par le sang avant de le maintenir à nouveau.
Un murmure…
— Attendez avant d'avaler.
Puis la pression, le souffle chaud et cette eau tiède qui se déverse. Il laisse le liquide béni l'abreuver. Son sauveur le lui offre en un fin écoulement régulier puis se recule un peu.
Un murmure…
— Buvez maintenant… je recommencerais deux fois, je vous déplacerais ensuite.
Sasuke fait confiance, bercé par cette douceur le libérant de sa douleur.
Naruto observe. Il est arrivé juste à temps, le bel homme inconscient n'aurait pas vu le nouveau jour. Très précautionneusement, il le prend dans ses bras avant de le soulever. Il connait le chemin de pierre et de poussière qui mène au sanctuaire. Le renard lui a montré.
Avec délicatesse, il l'installe sur son dos. Ses pas tracent une ligne invisible, son chakra se déploie et les recouvre. Kyuubi soigne alors qu'il marche se dirigeant vers la falaise. Il en atteint le flanc, un chicot d'arbre épineux cache l'entrée secrète aux yeux des profanes. Il s'y faufile. L'espace y est étroit et sombre, les faces verticales se resserrent par endroit. De goulots en goulots, la sensation d'étouffement enserre comme une amante le voyageur avant de le libérer quand le chemin s'ouvre sur un cercle lumineux enchâssé dans cet écrin minéral. Son regard explore…
Sur sa gauche, le roc si lisse, tâché de gris et de noirs brillants, se creuse en une alcôve au plafond bas, un tapis de mousse jonche le sol. Dans ce renfoncement, des fougères sèches sont posées en une couche accueillante pour le voyageur épuisé. Il s'y dirige, déposant l'homme au sol. Il sort de son sac la grande couverture qu'il étend sur ce matelas naturel. Il allonge son blessé confortablement et le recouvre de la laine tissée. Il retire sa longue cape qu'il pose sous sa tête et se relève pour explorer l'endroit.
Au centre du cercle, un Sangre de Drago étend ses majestueuses branches. Naruto sourit quand il voit à son pied la liane de la mort enserrant de ses tiges l'écorce. Il a de quoi préparer une décoction cicatrisante et un breuvage pour sa transe. Sur la droite, il découvre un tapis de feuilles de Camote, il pourra creuser le sol et en récolter quelques unes pour le repas. Puis il se déplace jusqu'au petit cratère dans lequel s'écoule l'eau bienfaisante. Elle jaillit bien plus haut d'un escarpement et saute dans un tintement de clochette de pierre en pierre jusqu'à cette vasque naturelle dans laquelle elle ruissèle, avant de disparaître à nouveau par une petit faille dans les profondeurs du berceau.
Le sanctuaire : c'est ainsi que les vieux du village nomment cet endroit préservé. Seuls les marqués comme lui ont pu le trouver. Il est objet de nombreuses légendes et histoires. On dit que la déesse Amaterasu aurait soigné son frère Suzano après la bataille contre le dragon à huit têtes. Ils se seraient unis ici et auraient donné de nouveaux Dieux à l'univers.
Naruto se dirige vers son sac, le fouille et sort son outre de peau qu'il va remplir. Il lève la tête vers ce ciel qui peut tuer, le rouge fusionne avec le rose et le bleu, la nuit s'annonce doucement, elle sera froide.
Dans le désert le jour brûle et la nuit glace, la vie nait et meurt et son cycle est infini. Il voit déjà le maître des songes verser ses rêves dans l'espace, les petites étoiles qui dessinent son amphore commencent à luire faiblement. Il faut récolter les feuilles et l'écorce puis ramasser le bois mort maintenant et le préparer dans le foyer creusé dans une pierre plate près de l'alcôve.
Il remplit son pot en fer et prépare la décoction pour l'homme. Il sort une nouvelle peau qu'il déroule, il l'installe par ses lanières sur une forte branche comme on en ferait d'une marmite et vide l'outre en son centre. Il l'a dispose bien au dessus du feu, la chaleur constante réchauffera l'eau qu'il utilisera pour nettoyer son blessé. Il dépose dans le bois ronronnant les 6 patates douces. Il en écrasera deux ce soir dans de la pâte de Kaki.
Il prépare les linges qu'il laisse flotter dans les feuilles et les écorces, il attend… Quand tout est prêt, il s'approche de l'homme qui n'est toujours pas revenu à lui. A l'aide d'un de ses tubes, il laisse la décoction s'infiltrer entre les lèvres, Kyuubi les recouvre à nouveau de son chakra, il masse la gorge de l'homme, le liquide suit la route. Il prend une graine d'Iba qu'il porte à sa bouche, la mâchant jusqu'à en faire une pâte fluide, la mêlant de salive. Quand elle est prête, il se penche à nouveau sur les lèvres de l'homme. Entre deux tubes, il la laisse être lentement avalée. Ce puissant remède fera tomber les fièvres et combattra les infections.
Avec des gestes doux emprunts de révérence, il ôte le obi qui retient les pans du kimono lacéré. Il peut sentir la richesse et l'épaisseur du brocart sous ses doigts. Les éclairs et la lune tissés dévoilent la chevauchée d'un samouraï aux yeux rouge sang, des éventails signe de leur maison ont été rapportés dans le col et les manches mais le tissu est tâché et déchiré. Les pans écartés, il glisse le vêtement lentement pour ne pas réveiller les chairs en souffrance, il fait de même avec la culotte bouffante.
Naruto s'arrête quelques instants, l'homme est nu, des marques violacées marbrent sa peau si blanche qu'elle fait penser à un nuage de poudre de riz qui traverse les landes bleues du ciel quand le jour est plein sur les rizières. Les coupures et le sang dessinent d'obscènes violences sur ce corps si parfait. Il a été battu et fouetté. Délicatement Naruto pose les linges chauds et humides sur les plaies, il nettoie et désinfecte, retire les fibres de tissu qui s'y sont mêlées avec une légèreté du geste acquise lors de la préparation des corps avant leur dernier voyage. Il est troublé, la peau est chaude et douce sous ses doigts, elle réagit, tremblant parfois sous son soin, l'homme s'agite laissant quelques murmures douloureux s'échapper des lèvres qu'il a huilé. Il n'a pas cette habitude, les corps qu'il prépare, sont sans vie, froids et tout est silencieux.
Il mâche l'iba qu'il étale par la suite méticuleusement sur les chairs, le dos ressemble à une terre labourée, le ventre et le torse n'étant plus que palette de mauve, de jaune maladif et noir strié. Dans quelques jours, il ne restera rien de ces blessures, juste peut être encore la trace rosée de leurs places et puis tout redeviendra vierge, de ce blanc nacré marbré de bleu clair, là où les veines racontent le voyage de la sève sous l'écorce.
Un souffle soulagé s'enfuit des lèvres. Naruto voit les paupières papillonner quelques secondes avant de se soulever très légèrement. Des pupilles si sombres où le temps se suspend dans des profondeurs inconnues le regardent avec cette fragilité habitée de reconnaissance avant de disparaître à nouveaux. Naruto s'est reculé sous le choc. Est-ce un fils de Suzano ou le dieu lui-même venu prendre corps dans ces terres arides et délaissées des hommes ?
L'homme tente de s'exprimer, un chuchotement rouillé incompréhensible s'élève difficilement avant qu'un nouveau tube ne vienne se poser légèrement sur ses lèvres. Une respiration profonde fait vibrer la fine tige de bambou. Naruto se rapproche à nouveau pour murmurer
— Ne dites rien, dormez maintenant… je vous réveillerais pour le repas.
Les quelques gorgées avalées, Sasuke repart dans les songes. Naruto finit son travail. Il replace la couverture sur le voile de chanvre qui couvre le corps de l'homme et qui le protégera. C'est un voile saint qu'il utilise pour éviter la putréfaction pendant les jours de prières avant la cérémonie. Le renard lui a montré dans sa transe ce qu'il devait emmener pour ce voyage. Sa connaissance des rites aux morts lui permet de soigner mieux encore qu'un médecin des grandes villes, il possède des onguents et des baumes rares et précieux. Quand son protégé assoupi semble enfin se détendre. Il se lève, il faut qu'il s'occupe des patates et du camp, de sa propre couche et de la boisson qu'il doit brasser. Il faut qu'il nettoie les distilles et qu'il les prépare sinon la mort leur sera assurée plus tard. Et puis il ira se laver et réveillera l'endormi pour manger un peu.
La nuit qui s'est invitée, est pleine et les langues de feu illuminent d'une lumière douce le sanctuaire. Les branches du Sangre jouent des scènes fantomatiques de batailles anciennes sur la pierre qui étincelle. Ses veines de silex et d'obsidienne la tapissent d'un lierre minéral alors que le chant mélodieux de la petite cascade tinte doucement. Sasuke sent une chaleur purificatrice là où la douleur s'était abritée. Il ouvre doucement les yeux, observant le plafond de sa couche. Il remue ses doigts de pied et ses mains. Il est vivant…
Il s'interroge, laisse passer sa langue sur le bombé tendre qui devrait être brûlé et sec, elle glisse sur la matière épaisse et lisse qui le recouvre. Un léger goût d'amande envahit sa bouche. Naruto a relevé la tête alors qu'il nettoie l'intérieur du distille, il a senti que l'homme revenait à lui. Il observe...
— Vous vous réveillez, c'est bien…
Ce n'est plus un murmure mais un doux timbre grave et velouté que Sasuke entend. Surpris par cette interruption, il voile son regard de son éternelle impassibilité, ces prunelles ne laissent plus qu'une lumière lointaine et dénuée d'émotions. Paré de sa défense habituelle, il tourne la tête difficilement vers la voix. Il tente de parler mais le crissement étouffé qui s'échappe d'entre ses dents ne laisse passer que des sons mats et morts.
— Ne faites pas d'efforts, j'ai vu le gonflement de votre gorge. Il vous faudra cette nuit et de l'iba pour que vous puissiez vous exprimer… demain peut-être en fin de journée, je pense !
Le regard sombre court sur l'homme. Des cheveux libres et sauvages en mèches épaisses couleur de bronze fondu sous la lumière du feu et ce regard qui le perd, ce bleu pur comme un ciel ou une mer qui l'observe gentiment, il est fasciné et dérangé à la fois. Il descend sur les avants bras découverts. Le feu joue sur la peau dorée, ses flammes portent des symboles d'une langue ancienne qu'il ne reconnait pas. Il cligne des yeux, est-ce une hallucination ? Non, le tatouage est inscrit dans le cou de la même façon, le tracé noir et rouge suit les lames orangées mêlées d'ocres brûlées.
L'homme pose l'étrange vêtement qui occupe ses mains sur le sol. Il se déplace alors prêt du feu, Sasuke suit attentivement tous ses gestes. Il se tourne vers lui et sourit.
— Vous allez manger un peu ce soir… C'est une purée de patates et de fruits, j'y ai mêlé de l'iba pour votre gorge… enfin voilà….
L'homme s'approche et s'agenouille, il pose le pot et l'assiette.
— Quel est votre prénom… moi c'est Naruto… dites le votre, je vais essayer de lire sur vos lèvres.
Son regard fixe se pose. Avant même que Sasuke ne tente d'articuler quelque chose, il voit les sourcils se froncer et sent un effleurement. Surpris, ses yeux cherchent l'homme qui s'est déjà relevé fouillant dans son sac, il revient avec un pot qu'il ouvre. L'odeur de l'amande s'en dégage. Le visage de Naruto est sérieux et grave alors qu'il masse légèrement du bout du doigt les lèvres permettant au baume d'être absorbé. L'impression est étrange pour Sasuke qui laisse sa bouche se détendre sous le touché. Encore une fois, son regard tente de capturer celui de l'homme qui reste concentré sur sa tâche.
Il se décide donc à dire son prénom en séparant chaque syllabe, le geste doux devient presque caresse alors qu'il entend le rire du blond. Il faut quelques minutes et d'autres rires pour que Naruto puisse enfin prononcer son prénom. Un léger sourire flotte aux lèvres de Sasuke qui aurait aimé parfois le frapper pour certains jeux de mots et enfantillages.
Pendant les vingt minutes qui suivent, Naruto lui explique un peu les soins qu'il lui a donné, l'effet de l'iba, l'état dans lequel se trouve son corps, le temps qu'il aura besoin pour s'en remettre. Tout cela rythmé par l'alternance des cuillères de purée tiède et du tube de bambou.
Fatigué et somnolant, Sasuke part doucement sous le flot de paroles, l'homme blond semble si volubile et joyeux de communiquer. Il ressent la chaleur et la force des mains qui le déplacent et vérifient quelques unes de ses plaies avant de sombrer dans un sommeil réparateur. Il est en sécurité.
Naruto sourit, il a dû le souler de paroles comme à son habitude. Avec délicatesse, il repousse une longue mèche de cheveux derrière son oreille avant de déployer une seconde couverture qu'il remonte sur le corps endormi. Il se lève sans précipitation, range le matériel qu'il utilise pour entretenir les distilles. Il couvre le reste de purée et va laver l'assiette et la cuillère. Il prépare son breuvage qu'il pose sur les braises.
L'odeur forte de la liane de mort envahit le sanctuaire, la boisson est prête. Il défait donc sa chemise de lin qu'il dépose près du sac. Il en ressort une petite boîte qu'il ouvre délicatement par la même occasion. Elle renferme un onguent à base de myrrhe et de graines de Datura. Il étale cette crème sur ses lèvres avant d'oindre son front et le symbole de la roue de vie qu'il porte autour de son nombril. Le tatouage noir luit à la lueur des flammes.
Il s'assoit en tailleur et boit doucement le breuvage. Il ferme les yeux en regardant une dernière fois Sasuke. Sa paume posée dans la main gauche forme la coupe de la réception, ses bras détendus reposent sur ses genoux. Il entonne un très vieux chant dans une langue qu'on ne parle plus. La mélodie sacrée s'élève et redescend dans des murmures graves, la nuit écoute la mélopée qui raconte les origines et les esprits. Dans un souffle profond, sa voix s'éteint. Il a quitté son corps voyageant dans les mondes interdits.
L'herbe verte et lumineuse danse sous une brise légère, sa douceur caresse ses pieds nus. Le soleil est haut alors… Devant lui, Kyuubi assis, le regarde. Les neuf queues dessinent un éventail rouge et or… Les yeux de profonde sagesse qui le fixent, l'appellent à le suivre. Il plonge son regard bleu dans l'abysse sombre qui l'observe...
Les images défilent : une clairière entourée d'érables rouges, des pétales d'or qui tombent doucement au sol qu'ils recouvrent : une grotte, Sasuke le regardant fièrement une épée à la main et la voix sans âge qui résonne : kusanagi. Un chemin escarpé sur la montagne, il marche à côté de Sasuke. Les pétales d'or dansent et retombent : une ville, un cachot sombre et froid, un homme aux cheveux argentés retenu par des chaînes. Les pétales d'or dansent et retombent : un bel homme aux cheveux longs dans les bras de Sasuke, un sourire entre les larmes et la voix sans âge : les fils de Suzano.
Le vent se lève, faisant tourner les pétales d'or, les neuf queues se referment sur la clairière, la sphère ardente disparait dans les ténèbres.
Naruto ressent la fraîcheur de l'air mordre sa peau, le chant de la cascade flotte autour de lui. Il prend une longue inspiration. Il est revenu. Son regard intense parcourt la forme endormie sur le sol. Il finit par fixer le visage paisible. Il reste ainsi quelques minutes puis s'étire et se lève, il réalimente le feu qui devra tenir jusqu'au matin.
Il remet sa chemise et se dirige vers l'homme. Doucement, il retire sa cape et l'étend sur le sol près du corps. Il s'allonge partageant la seconde couverture. De sa main, il déplace la tête de Sasuke dans le creux de son coude. L'homme murmure mais ne bouge pas. Il se colle alors contre lui, laissant sa main peser sur le haut de sa cuisse. L'homme repose dans ce cocon de pierre et de chair. La fatigue prend Naruto et le sommeil l'étreint. Avant d'avoir pu décrypter son voyage, il s'endort.
Il fait bon ce matin dans le sanctuaire, cet endroit préservé n'est ni trop froid la nuit, ni trop chaud dans la journée. Sasuke se doute qu'au dehors, l'impression de four doit déjà se ressentir. Il somnole encore alors que Naruto chantonne doucement sous l'eau fraîche qui déborde joyeusement de son ingénieuse marmite qu'il a installée sous la cascade. Il frotte ses cheveux avec vivacité alors qu'une mousse onctueuse les recouvre. Les rayons de l'astre viennent caresser les gouttelettes, allumant de minuscules éclats étincelants.
Sasuke bouge légèrement son corps qu'il sent revivre. Tournant la tête vers la vasque, il ouvre ses paupières et laisse son regard s'habituer à la luminosité qui éclate dans le sanctuaire. Il retient sa respiration sous le spectacle qui s'offre à lui.
Fasciné, il lit l'histoire inscrite sur le beau corps qu'il observe. Le renard mythique trône au creux des reins de son sauveur semblant l'observer attentivement. Les neufs queues voyagent sur la peau dorée, elles redessinent les muscles fermes du dos, viennent s'enrouler le long des jambes et des bras, couvrent les fesses bombées, repartent sur les hanches étroites, jouent sur la nuque pour disparaître dans le cou. Sur chacune d'elles, des kanji noirs et rouges glissent sur les courbes, racontant des secrets envoutants.
Quand Naruto se tourne, sentant qu'il est observé. Sasuke est pris d'un hoquet. Les queues de Kyuubi parcourent la peau, remontent sur une épaule, s'enroulent autour d'un téton et finissent par cibler de leurs pointes sombres et acérées la roue de vie qui cercle le nombril en neuf rayons. Sasuke ne peut détacher son regard, le laissant suivre les arabesques qui jouent sur ce corps d'homme. Songe et magie, chaque mouvement fait vivre la fresque. Il voudrait laisser ses doigts lire cette peau…
— Ne me regarde pas comme ça… Je sais… Je suis un marqué… Je suis laid.
Ses yeux alors papillonnent, il grommèle une réponse qui semble venir de ses entrailles. Est-ce que Naruto est un idiot ? Laid, il est œuvre d'art vivante, livre sacré pour l'initié, éphèbe que l'on garde jalousement dans ses appartements au palais. Alors que son sauveur termine ses ablutions, Sasuke force sa voix, il veut lui dire. C'est une étrange sonorité de pierres concassées qui s'élève dans le sanctuaire.
— Idiot !
Naruto s'ébroue comme un animal libre et sauvage. Son regard fier croise les pupilles ennemies, cherchant les traces du sarcasme et du dégoût. Surpris, il l'est. Ce qu'il voit est chaleureux, presque dévorant… presque intime… Il sent ses pommettes rougir et se retourne gauchement pour s'habiller.
Ce regard, il l'a déjà rencontré une fois au temple quand la prêtresse et le scribe ont dessiné sur sa peau l'esprit renard qui l'habite. Il se rappelle des mains douces glissant lentement, des baisers humides et de ces endroits éveillés sous les doigts de l'artiste.
Il se souvient du désir et puis du plaisir. Il se souvient de la tension et de l'urgence, des mouvements fluides et de la brûlure. Il se souvient de cette vie née sous sa peau et qui appelle, de cette puissance dans ses reins, de ces souffles ardents.
Il se souvient de sa mort, son esprit flottant jusqu'à cette sphère de feu. Il se souvient de Kyuubi l'entourant de ses queues, léchant son corps encore tremblant et puis… Ce monde que l'on ne voit pas… Le monde où tout se fait et se défait sous la danse des pétales d'or.
Alors il se sent vulnérable et fragile, là, dans ce sanctuaire, devant ce regard intense qui rappelle ses souvenirs. Ces jours sacrés qui ont fait de lui ce qu'il est : la voix de Kyuubi, le paria aux yeux des hommes. Il gronde d'une voix basse, défiant les dieux, la terre et cet étranger.
— Ne te fous pas de moi…
Sasuke se sent blessé, en colère, il ne sait pourquoi. Ce ton autoritaire et déterminé qui n'a jamais été émis envers lui le frappe plus durement que les coups qu'il a reçus. Cet homme magnifique, élu des divinités, qui semble acculé comme une bête traquée… à Konoha, dans le clan dirigeant, le clan Uchiwa, il aurait été séduit par les hommes et les femmes. Son frère même l'aurait lié au clan, les voyants sont rares. Il préfère se tourner. Il lui dira plus tard à cet idiot.
Naruto regarde la cascade rebondir, des images du passé revenant dans son esprit. Enfant courant sous les rires méchants ou les silences haineux, fouillant les poubelles pour se nourrir, habillé de loques sales, dormant dans les recoins à peine abrité de la pluie et du froid. Et ce nom craché comme une insulte, recraché inlassablement avec une certaine délectation : « enfant démon »… quand les autres voyaient la roue de vie et les marques sur ses joues.
Oui, c'est un marqué et sa vie était laide avant son maître, sa vie était dure avant Jiraya et leur fuite de Konoha. Se trompe-t-il ? Cet homme semble différent. Son regard est différent…
suite au prochain épisode