Partie 5/5


L'esprit encore embrumé, Blaise maudit le piaf qui tapait contre ses carreaux. Malgré le fait qu'il eût enfoui sa tête sous son oreiller, il continuait d'entendre les grattements de l'oiseau, ce qui le fit bougonner des injures au volatil.

D'un geste las, il s'extirpa de son lit et chancela jusqu'à sa fenêtre.

Les rayons du soleil qui percèrent lorsqu'il ouvrit les volets manquèrent de le rendre aveugle ! Il fallait dire, il ne s'attendait pas à ce que le jour soit levé. Depuis trois jours qu'il était enfermé chez lui, seul, et dans le noir, à ruminer, il en avait perdu la notion du temps.

Les yeux à moitié clos, il s'empara de la missive attachée à la patte du hibou et claqua les fenêtres sans plus de cérémonie.

Tâtonnant jusqu'à son lit, il s'y laissa tomber avant de décacheter le rouleau de parchemin.

« Blaise,

Cela fait maintenant trois jours que tu ne donnes plus de signe de vie J'espère que c'est parce que tu roucoules avec Amanda

Je n'ai pas voulu passer chez toi au cas où, pour ne pas déranger, mais je commence à me faire du souci, et Hermione aussi.

Alors dis-moi que tout va bien, où alors je viendrais te voir cet après-midi chez toi.

Drago. »

Blaise soupira et reposa la lettre. Bien sûr, il se doutait que Drago et Hermione finiraient par s'inquiéter, mais il n'avait pas envie de leur parler. Leurs conseils n'avaient servi qu'à le torturer un peu plus en lui faisant espérer quelque chose qu'il s'était refusé jusque là.

Et puis, ils étaient tellement heureux ensemble, que quelque part, ça lui faisait mal. Lui aussi voulait connaître ça. Mais il semblait que l'amour persiste à lui tourner le dos. D'abord avec Ginny, puis avec Amanda…

Il finit par regarder l'heure, il était déjà 14h00, et il n'avait aucune envie que Drago le trouve ici, et dans cet état.

Blaise enfila donc rapidement ses habits et sortit de chez lui avec un but précis : se soûler.

À cette heure, le jeune homme avait peu de chances de trouver un endroit désert. Il se décida néanmoins pour le bar de la Mandragore. C'était un endroit mal famé à une certaine époque, et depuis la fin de la guerre, il n'y avait guère plus de clients pour oser se montrer dans ce trou paumé. Les gens avaient trop peur d'être associés à la clientèle précédente…

Mais malgré ça, le gérant l'avait gardé ouvert. C'était un vieil excentrique qui conversait tout seul la plupart du temps. Alors même si Blaise devait entendre un vieux cinglé parler seul et renifler la vieille odeur de chou farci qui flottait toujours dans l'air, pour avoir une chance d'être seul et pas retrouvé par Drago, c'est-ce qu'il ferait.

La porte grinça effroyablement lorsque le métis entra dans le bar. Comme il s'y était attendu, la salle plongée dans l'obscurité était vide, et l'odeur de chou était bien présente. Même s'il avait tenté de si préparer, il eut un mouvement de recul. Seuls les gens désespérés pouvaient vraiment venir ici…

Il héla le vieux barman et commanda une Vodka au venin de Basilic. Contrairement à ce qu'il avait pensé de prime abord, il n'était pas le seul client. Il apercevait dans l'ombre quelqu'un lever régulièrement le coude. Le type devait avoir une sacré descente, et vu les verres vides qui encombraient la table devant lui, il devait être ici depuis des heures…

— Tous ! Ils ont tous oublié ce qu'ils nous on fait !

Blaise leva les yeux au ciel. Non seulement il devrait entendre le vieux barman parler seul, mais aussi l'autre client. Est-ce que c'était le bar qui faisait cet effet ? Peut-être qu'un vieux sortilège avait été lancé par une épouse mécontente de retrouver son mari tous les soirs à la taverne…

— Et l'autre là ! Il faudrait encore qu'ils passent tous pour des héros !

Zabini fronça les sourcils. Il lui semblait reconnaître cette voix. Et vu le niveau d'ébriété du client, il était quasiment sûr qu'il s'agissait de Neville Londubat.

Il n'avait jamais apprécié ce Gryffondor gauche et bêta, mais il avait fini par être impressionné par la force de caractère dont il avait fait preuve lorsqu'il était en captivité, puis après. Jusqu'à ce qu'il essaye de le tuer et décide de se venger sur tous les Mangemorts qu'il croisait…

Bien sûr, Blaise comprenait pourquoi Neville agissait ainsi, et d'un côté, il avait de la peine pour lui de voir à quel point il avait été détruit par les Mangemorts, mais de l'autre, la haine qu'il continuait à vouer à Drago, lui ou même ses plus proches amis, même s'il le montrait moins, l'agaçait. Il était temps qu'il fasse la part des choses.

Zabini fixa son verre d'où une épaisse fumée noire émergeait et le but cul-sec. Il fit une grimace en sentant le liquide lui brûler la gorge et se leva afin d'en commander un double et un café serré.

Pour ce qu'il avait décidé de faire, il allait avoir besoin de courage. Neville le haïssait, et lui n'appréciait pas spécialement l'ancien héros de guerre, cependant, Blaise se dit qu'essayer de résoudre les problèmes d'autrui lui permettrait de ne plus penser aux siens.

— Londubat, je pensais bien t'avoir reconnu.

Neville leva les yeux avec difficulté et scruta le visage de l'homme qui lui faisait face en plissant les paupières.

— Qu'est-ce que tu fous là Mangemort ! Fous le camp ! Je veux pas te voir !

Neville fit de grands gestes maladroits avec les bras pour chasser l'intrus, mais il ne réussi qu'à renverser le verre à moitié plein qui se trouvait devant lui.

— Regarde ce que j'ai fait par ta faute ! éructa Neville en tentant de se lever.

— Tiens, bois-ça, ça te fera du bien, répondit simplement Zabini en prenant place en face de Neville, comme s'il y avait été invité.

— Dégage j'te dis ! cracha Neville en poussant le café que Zabini venait de déposer devant lui.

— Tu pourrais reconnaître que je fais de mon mieux pour garder mon calme Londubat, surtout avec la scène que tu m'as fait l'autre jour au bal.

— Ha ha ! Et alors, elle a fuit j'espère ! Au moins une que j'aurais réussi à sauver de vos griffes…

Blaise poussa de nouveau le café fort devant Neville. S'il restait dans cet état presque délirant, il n'arriverait à rien.

— Pourquoi tu dis ça ? Tu as sauvé énormément de gens pendant la guerre.

La colère que ressentait Neville se calma soudain. Il restait les yeux dans le vague, sa tête tanguant comme si elle était trop lourde.

— Pas assez. Elle, je l'ai pas sauvée. J'aurais dû, mais c'était trop tard. Il s'était déjà emparé d'elle.

— De qui tu parles, demanda Blaise qui était maintenant plus attentifs aux délires alcoolisés de Neville.

Comme si Neville se rappela d'une présence gênante, il releva soudain la tête vers Zabini et son expression se durcit de nouveau :

— Ça te regarde pas ! Fous-moi la paix je t'ai dit ! Barman, un autre !

— Tu sais pourquoi tu te mets dans cet état, repris Blaise qui ne comptait pas se laisser jeter comme un malotru, c'est que tu es jaloux !

— Jaloux ?! Et de quoi ?!

Neville avait l'air tellement surpris par les paroles du Serpentard qu'il en oublia de le fusiller du regard.

— Jaloux de tes amis, parce qu'eux ont réussi à se reconstruire, qu'ils sont en couple et heureux, et qu'ils ont évolués.

— Jaloux ! Jaloux de quoi ! Ils l'ont abandonné, tous les deux ! Ils ont tourné le dos aux vraies victimes ! Hermione, pourtant si intelligente, elle s'est laissée séduire par ce foutu Malefoy alors qu'il a tué Ron ! Et Harry, il vous fréquente tous ! Comme si tout ça n'avait pas d'importance, comme si la mort de Ron et de tous les autres n'avait aucune importance. Ils ont tourné le dos à leur meilleur ami pour fréquenter des Mangemorts ! Ça me fait gerber ! Avec tout le mal que vous nous avez fait à tous, je pensais que les deux seules personnes qui ne se rallieraient jamais à vous ce seraient elles. Ils m'ont abandonné !

Neville s'était levé d'un bond et avait balayé les verres entassés sur la table d'un revers brusque du bras. Son visage était de plus en plus proche de celui de Blaise et ce dernier commençait à avoir plutôt peur de la réaction violente de Neville. Il n'avait jamais imaginé que la haine de Neville concernait presque plus ses amis que les Mangemorts…

Alors que Blaise allait tenter de le forcer à se rasseoir, il vit que Neville avait plongé sa main sous sa veste pour en sortir sa baguette.

Mais Blaise était bien plus alerte que Neville, qui s'était empêtré dans ses vêtements. Aussi, avec des gestes rapides et efficaces, il désarma Neville et sortit sa propre baguette avec laquelle il lui jeta un sort de pétrification.

Neville, raide comme un piquet, se mit à léviter à un mètre du sol, sous les yeux amusés du gérant qui ne semblait pas prendre conscience du drame qui s'était joué devant lui.

Blaise voyait que les yeux de Neville bougeaient vivement dans tous les sens, avec une expression à la fois de pur haine et de peur profonde. D'un mouvement de baguette, il le fit voler à sa suite.

L'air frais les transit de froid lorsqu'ils sortirent de la taverne, et Blaise en profita pour prendre une grande goulée d'air pour essayer de retirer la puanteur du bar de ses poumons.

Avisant un baquet d'eau qui devait être glaciale, Blaise s'en approcha et d'un geste leste, il fit pivoter Neville tête la première dedans.

Naturellement, Neville ne pouvait pas bouger, mais Blaise vit aux bulles d'oxygène qui s'échappaient dans l'eau qu'il devait se débattre intérieurement comme un diable.

Après quelques secondes, il le sortit et attendit qu'il reprenne sa respiration pour réitérer.

Lorsqu'à la troisième fois, Blaise croisa le regard de Neville qui semblait paniqué, il décida d'arrêter. Il voulait seulement le dégriser un peu, pas le tuer.

— Londubat…, dit Blaise qui l'avait remis debout devant lui. On n'est pas amis, mais on n'est plus ennemis. Je sais que tu me hais, et qu'apparemment tu hais quasiment tout le monde, mais crois-moi, je ne te veux aucun mal. J'imagine que tu ne veux rien entendre de ce que je vais te dire, mais je crois que tu en as besoin.

Écoute… Je connaissais Flint depuis l'enfance, et je sais de quoi il était capable, quel monstre cruel et violent il pouvait être, et je sais que je ne peux pas imaginer le calvaire que tu as dû endurer, mais ce que sais surtout, c'est que Flint n'a pas attendu d'être un Mangemort pour être un sadique.

Blaise voyait que Neville faisait tout pour se libérer du sort d'immobilité, mais il n'y parviendrait pas, aussi il continua. Il fallait que Neville ouvre les yeux une bonne fois pour toute. Et s'il devait passer deux heures dans le froid à faire la morale à quelqu'un qui ne pouvait pas répondre, il le ferait.

— Je n'essaie pas de te convaincre qu'aucun Mangemort n'était méchant, mais les pires des monstres l'étaient parce que c'était dans leur nature. Ils ont juste profité de leur place dans l'armée de Voldemort pour assouvir leurs plus bas instincts. Mais si tu es honnête, tu admettras que des cinglés, on peut en trouver partout. Que ce soit depuis la nuit des temps ou dans le futur. Il y en a toujours eu, et il y en aura toujours.

Mais tous les Mangemorts n'étaient pas pareils. Que ce soit Drago, moi, ou beaucoup d'autres, nous avons fait l'erreur de nous allier à la mauvaise personne, et je sais que ça n'a pas été sans conséquences, mais je peux t'assurer que la plupart d'entre nous s'en veulent déjà suffisamment eux-mêmes, ils n'ont pas besoin de ta haine pour savoir qu'ils ont fait un terrible choix.

Tes parents faisaient partie des gentils, et tu as été élevé dans cette optique. Peux-tu me certifier que si tu avais été élevé par un adepte du Mage noir, tu aurais malgré tout lutté contre lui ? C'est possible, mais réfléchis-y vraiment et pose-toi la question. Tu comprendras peut-être pourquoi certains d'entre nous n'ont pas cherché à se soustraire au rôle presque imposé par leur famille.

Tu ressens une telle rancune que tu ne cherches même pas à essayer de comprendre, et ça te ronge. La dernière personne que j'ai vue rongée par une telle haine, c'était Voldemort lui-même.

Regarde ce que tu es devenu, alors que tu avais tellement lutté pour retrouver un monde meilleur ! Pourquoi avoir tout renié ? Parce que tes amis ont avancé sans toi ? Parce qu'ils ont compris que tout le monde n'était pas à mettre dans le même panier, et que les erreurs commises pouvaient être sincèrement regrettées ? Tu ne crois pas qu'il est temps pour toi de te ressaisir ? Je ne te dis même pas de ne plus haïr les anciens Mangemorts, mais juste d'arrêter de te détruire.

Hermione et Harry parlent souvent de toi tu sais, et ils ont vraiment beaucoup de peine de ne pas réussir à t'aider. Tu devrais leur expliquer ce que tu ressens, leur dire à quel point tu te sens trahi par eux. Il faut leur en parler, et peut-être que tu comprendras leur point de vue, ou juste que tu décideras de tourner la page et de ne plus jamais les revoir. Parce que là c'est plus possible, tu te fais du mal ainsi qu'à tous ceux qui t'aiment ou ont admiré ton courage durant la guerre. Et tu ne me croiras sans doute pas, mais je fais partie de ceux-là. J'étais réellement admiratif de voir avec quelle force tu avais échappé à ton destin, et comment tu avais su devenir le leader des autres et gagné cette guerre ! Je t'ai si souvent envié, j'aurais voulu avoir la même force que toi à une certaine époque. Peut-être que quelqu'un que j'aimais plus que tout serait encore en vie…

Blaise se tut un instant. Il revit le visage souriant de Ginny, mais tenta de le chasser. Il n'avait aucune envie de craquer devant quelqu'un, surtout quelqu'un qui le méprisait. Il finit par se frotter les yeux avec amertume, convaincu que son long, voire trop long discours, n'avait servit à rien du tout. Mais lorsqu'il releva les yeux pour libérer Neville de son sortilège, il vit qu'il pleurait.

— Je vais… Je vais retirer le sortilège maintenant, d'accord.

Blaise avait parlé d'une fois douce, comme pour apprivoiser un animal blessé. D'ailleurs, la lueur dans le regard de Neville lui faisait penser à un animal blessé, pris au piège de sa propre conscience, et incapable de s'en échapper. Il se doutait bien que les problèmes de Neville ne seraient pas résolus comme par magie, mais il espérait que quelque part, il avait contribué un peu à le faire se sentir mieux. Après tout, n'était-ce pas là le programme qu'il voulait mettre en place avec Drago ? Aider toutes les victimes de la guerre, quand bien même cette victime en était aussi l'un des héros ?

Une fois libéré, Neville se recula. Il arborait une expression indéchiffrable. À la fois, il éprouvait de la colère, de la rancœur, de la peine, du soulagement, et des doutes.

Sans un mot, il récupéra sa baguette et la glissa dans son fourreau avant de se retourner, et de partir.

Blaise se sentit soudain différant. Le long discours n'avait peut-être apporté aucune aide à Neville, mais à lui, ça avait été tout l'inverse. Il s'était persuadé lui-même que finalement, ses choix n'avaient pas été judicieux, mais qu'il avait le droit à une deuxième chance.

S'il avait réussi à s'en convaincre ainsi que Neville, il pourrait convaincre Amanda de lui laisser l'occasion de lui prouver qu'il était quelqu'un de bien.

Fort de sa résolution, il s'était lancé à corps perdu dans la recherche d'Amanda Thorn, avec l'aide de Drago et Hermione, à qui il avait tout raconté.

Il lui avait fallu deux semaines pour retrouver sa trace. Il aurait pu, à l'aide de la magie, la retrouver de mille façons en moins d'une journée, mais il souhaitait prouver qu'il ne comptait pas sur la magie pour tout résoudre, et qu'il s'était donné du mal pour la trouver. Peut-être serait-elle plus sensible à ses efforts.

Amanda était bénévole en chef depuis quelques mois à l'hôpital des anges. Cet endroit était réservé spécialement, et en toute discrétion, aux Moldus victimes de sortilèges magiques. Des Médicomages avaient été envoyés pour aider au rétablissement des patients les plus sévèrement touchés. La plupart étaient là depuis de nombreuses années, et la guerre avait fait tellement de victimes des deux côtés que St Mangouste ne pouvait pas accueillir tout le monde.

Lorsque Blaise entra dans l'hôpital, il fut étonné de voir tant de souffrance presque sept ans après la fin de la guerre… La majorité des gens malades ne sortiraient certainement jamais d'ici…

Il se força à penser à autre chose, il n'avait pas imaginé que de voir le malheur d'aussi près lui donnerait tant de frissons.

— Bonjour, je suis un bénévole d'origine sorcière, j'aurais voulu parler à Amanda Thorn s'il vous plaît.

L'infirmière qui se trouvait à l'accueil fronça les sourcils et détailla Blaise des pieds à la tête.

— Votre nom je vous prie.

— Blaise Zabini.

La femme au visage acariâtre scruta son registre, puis elle finit par secouer la tête.

— Il doit y avoir un problème, votre nom n'apparait pas. Mais de toute façon, je ne crois pas que votre… « aide » soit souhaitée ici.

Blaise serra les mâchoires et se força au calme. Il n'allait pas massacrer la réceptionniste après seulement deux minutes de présence, ça ne ferait pas très sérieux…

— Il me semble que c'est une demande express d'Amanda Thorn. Peut-être devriez-vous voir avec elle ?

L'infirmière jeta un regard suspicieux à Blaise et décrocha son téléphone :

— Miss Thorn, quelqu'un demande à vous voir… Il s'agit d'un… enfin, de quelqu'un qui prétend être ici pour aider, vous voyez…

Blaise lui sourit aimablement tout en maudissant cette vieille bique antipathique.

— Elle arrive, vous avez qu'à patienter dans le coin là-bas.

La femme indiqua négligemment un fauteuil qui se trouvait à quelques mètres et se replongea dans son roman à l'eau de rose. Cependant, Blaise pouvait sentir son regard peser sur lui régulièrement.

— Alors, où est-il ? demanda une jeune femme brune que Blaise reconnut immédiatement.

L'infirmière lui indiqua alors du menton Blaise qui patientait, obnubilé par la vision de cette femme qu'il trouvait si jolie.

— Ah heu… Blaise, Monsieur Zabini, je veux dire, que faites-vous ici ?

Amanda avait l'air tout aussi surprise que si elle avait vu un chien à trois têtes (Blaise se dit qu'il tenterait l'expérience pour voir s'il avait vu juste). Mais en même temps, les rougeurs apparues sur les joues de la jeune femme l'encouragèrent.

— Je voulais vous voir, vous parler.

— Eh bien… Suivez-moi, nous pouvons aller dans ce couloir là.

Blaise fut content de s'éloigner de la harpie de l'accueil qui ne ratait pas une miette de leur échange.

— Alors, je vous écoute, dit Amanda en prenant un ton ferme et en croisant ses bras sous sa poitrine.

— Je… Eh bien voilà… C'est que…

Blaise se maudit de ne pas réussir à trouver les mots, et surtout de passer pour un troll attardé !

— Je suis désolée de vous le dire, mais nous refusons l'aide des Mangemorts, finit-elle par dire d'un ton un peu brusque. Il me semblait pourtant l'avoir précisé dans le formulaire.

— Je sais mais…

— Ceci dit, j'avoue que vous tombez assez bien en fait… Plusieurs de nos volontaires sont absents pour raisons personnelles. Nous manquons donc de personnes qui pourraient nous aider à laver et transporter les patients, ainsi qu'à faire l'entretien des locaux.

— Le ménage, vous voulez dire ?

— C'est exact. Ça vous pose un problème ?!

— Non mais…

Sentant son courage l'abandonner petit à petit, Blaise n'osa pas donner les vrais raisons de sa présence, c'est-à-dire venir, lui avouer ses sentiments, voir qu'elle était émue aux larmes, et l'enlacer tendrement avant de l'embrasser passionnément…

— Bien, alors, si ça ne vous dérange pas, il faudrait commencer tout de suite. Je vais vous conduire au vestiaire, vous y trouverez une tenue à votre taille. Ensuite, je vous montrerai le placard où sont réunis tous les produits d'entretien. Quelqu'un a vomi dans le couloir numéro quatre.

Blaise sentit la panique l'envahir. Il avait pris comme prétexte d'être bénévole afin de pouvoir être en contact avec Amanda mais jamais il n'avait envisagé de travailler réellement dans l'hôpital (surtout qu'il n'avait jamais fait partie du programme, ayant lui, fait entièrement sa peine de prison). Il était libre de faire ce que bon lui voulait depuis des années. Mais apparemment, Amanda ne devait pas être au courant…

— Sachez que…

Amanda s'était retournée si vivement que Blaise se retrouvait nez à nez avec elle.

Gênée, elle finit par reculer, avant de se racler la gorge.

— Je… Je voulais vous dire qu'ici, j'étais votre supérieure, et que je préfèrerais qu'on oublie ce qui s'est passé de l'autre côté…

Blaise sentit une pierre lui tomber dans l'estomac. Ainsi donc, elle voulait faire comme s'ils ne se connaissaient pas, ou du moins, comme s'il n'y avait jamais eu d'alchimie entre eux !

Sentant la tristesse et la colère monter, il faillit abandonner et partir, mais qu'aurait-elle pensé de lui s'il agissait ainsi ?

— Je suis d'accord. De toute façon, je ne suis ici que pour aider les gens.

Blaise avait dit ça d'un ton assez tranchant, contrairement à ce qu'il avait voulu, et Amanda se contenta de souffler un « bien » avant de reprendre son chemin.

oOo

Après avoir passé la journée à astiquer, réparer, et courir dans tous les coins, Blaise était épuisé. Mais il ne décolérait toujours pas contre lui et son incapacité à s'exprimer clairement en face d'Amanda. S'il avait su le faire, il n'en serait pas là… À sentir le produit chimique et à avoir les ongles aussi crasseux que ceux de son elfe de maison. D'ailleurs, il pourrait lui demander de travailler à sa place ? Non, Amanda risquait de mal le prendre…

En parlant d'elle, il s'était vite rendu compte qu'elle l'évitait clairement. Cependant, il avait senti à plusieurs reprises que quelqu'un l'observait à la dérobée. Finalement, le fait de lui avoir dit qu'il n'était pas là pour elle avait peut-être mis à mal sa fierté, et eu l'effet escompté ? Sa mère lui répétait toujours qu'une femme était attirée seulement par les hommes qui ne voulaient pas d'elles. Il s'était toujours sentit triste pour elle, car elle plaisait à absolument tous les hommes tant elle était magnifique.

oOo

Les jours passèrent, et Blaise commençait à désespérer. Il n'avait pas la fibre maternelle, donc aider les patients dans leur vie quotidienne l'ennuyait profondément. Et le ménage… même son elfe était mieux traité ! Enfin, peut-être pas, mais après ça, il le serait certainement.

Il n'y avait eu aucune amélioration avec Amanda. Elle se contentait de lui donner des ordres d'une voix stricte en osant à peine le regarder dans les yeux. Et lorsqu'il tentait de s'isoler avec elle pour parler, elle trouvait toujours le moyen de lui échapper. C'est fille était une vraie anguille.

Le seul rapprochement notable avait été lorsqu'elle était arrivée en trombe dans le couloir, et avait glissé sur le sol que Blaise venait de nettoyer. Il s'était précipité à son secours, et l'espace d'un instant, alors que leurs visages étaient si proches l'un de l'autre, il crut qu'elle allait lui donner un baiser, mais il avait vite repris ses esprits lorsqu'elle s'était dégagée de son emprise avec des gestes confus. Depuis, elle n'osait plus du tout le regarder dans les yeux.

— Ramasser les feuilles mortes ! Il ne manquait plus que ça !

Blaise bougonnait tout seul depuis une demi-heure. Il était persuadé qu'Amanda lui confiait les tâches les plus ingrates. S'il pouvait faire usage de sa baguette, ça aurait été réglé en quelques secondes, mais non, il fallait qu'il trime comme un elfe. La libération des Mangemorts volontaires avait été acceptée à la condition qu'ils n'aient pas le droit de porter une baguette magique. Blaise, Drago et le ministre de la Magie avaient bien insisté sur le fait que les sorciers seraient plus utiles avec leur baguette, le Premier ministre avait refusé tout net. Ne souhaitant pas abandonner le projet, les sorciers avaient dû accepter.

— Aïe ! C'est pas vrai !

Blaise porta son pouce à sa bouche en marmonnant des imprécations contre l'univers entier. Après avoir examiné son doigt, il vit qu'une écharde s'était logée dedans, dans toute sa longueur. Il avait beau tenté de l'aspirer, de se triturer le doigt avec les ongles pour la faire sortir, il n'y parvenait pas. Encore quelque chose qui aurait été réglé s'il avait eu sa baguette sur lui.

Il se décida à rentrer pour demander de l'aide à un Médicomage, quand une toute autre solution se présenta à lui, sous la forme d'une jeune femme brune qu,i malgré son dédain pour lui, faisait battre à son cœur la chamade .

— Amanda… Je viens de me blesser, est-ce que…

— Mon dieu ! C'est grave ?

Avant qu'il ait eu le temps de répondre, la jeune femme s'était précipitée sur son pouce. Elle sembla rassurée en voyant que c'était bénin, mais elle arborait toujours un air inquiet.

— Je vais voir ce que je peux faire.

Blaise sortit son sourire le plus charmeur en remerciement, et la suivit dans une salle d'osculation.

Alors qu'un Médicomage qui avait assisté à la scène s'apprêtait à proposer son aide, le blessé articula sa bouche de façon à ce que l'homme comprenne qu'il devait : « se barrer d'ici avant de le regretter ».

Heureusement, Amanda ne s'était rendu compte de rien, trop occupée à scruter la blessure de Blaise.

— Je vais essayer avec cette pince, j'espère ne pas te faire mal.

Blaise sourit de l'entendre le tutoyer. Lorsqu'elle se concentrait, elle baissait sa garde, c'était toujours bon à savoir.

Il observait ses gestes délicats et précis tout en humant discrètement les effluves de son parfum. Agissant sur lui telle l'Amortensia, Blaise ne se rendit pas tout de suite compte qu'il avait approché son visage près de celui de la jeune femme, toujours concentrée sur sa tâche.

Lorsqu'elle parvint enfin à déloger l'écharde, Amanda poussa un soupire de soulagement et leva la tête en direction de Blaise avec un grand sourire sur les lèvres.

C'est alors qu'elle se retrouva une fois de plus à quelques centimètres du visage de Blaise et de ses beaux yeux en amande.

Le jeune homme n'osa ni bouger ni parler, de peur de la faire fuir une fois de plus. Il pouvait observer à loisir les paillettes dorées qui entouraient ses iris, et sentir la chaleur de son corps tout près du sien. Amanda, quant à elle, voulait parler, dire quelque chose pour se sortir de l'inconfort de la situation, mais est-ce que la situation était vraiment inconfortable ?

Elle avait tout fait pour cesser de penser à lui, et même avant qu'elle le revoie, ça n'avait pas marché. Elle avait alors fait en sorte de le décourager, pour qu'il abandonne de lui-même, mais il fallait reconnaître qu'il était sacrément persévérant.

Et là, tout près de lui, alors qu'elle sentait sa respiration devenir saccadée et lui chatouiller le creux du cou, elle n'eut plus qu'une seule pensée à l'esprit : l'embrasser.

Fermant délicatement les yeux, elle fit le peu de chemin qui séparait leurs visages et effleura de ses lèvres celles de Zabini qui ne se fit pas prier pour l'embrasser. Alors qu'elle avait déposé délicatement une main sur son torse, elle put sentir le sursaut de son cœur. Elle avait lutté avec acharnement, mais maintenant qu'ils s'embrassaient avec passion, elle savait qu'elle n'avait plus à douter. Il avait fait ses preuves, elle savait qu'il était l'homme qu'il lui fallait.

Mettant fin à leur baiser, Blaise sourit à son tour à Amanda avant de la serrer dans ses bras, et de déposer son front contre le sien.

— Merci, pour l'écharde. Et pour le baiser.

Amanda s'écarta un peu de lui pour mieux le regarder et déclara, un sourire mutin sur les lèvres :

— Si tu finis de ramasser les feuille avant la tombée de la nuit, peut-être que tu auras le droit à un deuxième.

Blaise sourit et déclara que ça serait fait dans l'heure, avant de lui voler un baiser et de s'éclipser.

oOo

— Est-ce qu'ils arrivent bientôt ?

— Je l'ignore chérie, je ne suis pas devin.

Hermione leva les yeux au ciel. Drago était si calme que ça la stressait. Ils recevaient à dîner leurs amis les plus proches qui comptaient Harry et Jenny ainsi que Blaise et Amanda, qui avaient insisté pour fêter Noël ensemble, ayant une déclaration à faire.

— Qu'est-ce que tu crois qu'ils vont nous annoncer ?

— Je me demande bien… Voyons voir… Ils vivent le parfait amour depuis un an, alors, je ne sais pas, peut-être un mariage…, dit Drago d'un ton moqueur.

— Ou une grossesse ! De nos jours, ont peut avoir un enfant avant d'être marié, dit Hermione en souriant à Drago.

— Eh bien on le saura bientôt, j'entends Blaise rigoler en bas.

Hermione et Drago descendirent pour saluer leurs invités. Harry et sa femme étaient arrivés en même temps que Blaise et Amanda, et plus surprenant encore, Neville, qui se tenait sur le pas de la porte. Cela faisait des années que malgré leurs invitations, ils n'espéraient plus sa présence, puisqu'il déclinait toujours au dernier moment.

Il semblait aller mieux, même si les cicatrices de son visage lui donnaient l'air toujours hostile.

oOo

— Allez, ne nous faites plus languir ! Dites-nous ce que c'est votre déclaration, qu'on mette fin à ce suspens insoutenable ! lâcha Hermione tandis qu'elle faisait voler la bûche de Noël à travers la pièce.

— Il serait temps en effet, ça fait trois heures que tout le monde se languit, dit Amanda en souriant à Blaise, qui prenait son air malicieux.

— Bien, si cette magnifique jeune femme l'exige, je vais tout vous dire. Il y a une semaine, j'ai demandé sa main, et elle m'a fait l'honneur d'accepter.

— Félicitations ! scandèrent les autres, heureux de voir un couple si uni, et surtout, un Blaise enfin pleinement heureux.

— Et une fois qu'il m'a fait sa demande, j'ai pu lui apprendre que j'attendais des jumeaux.

— Par Merlin !

Hermione avait la bouche grande ouverte et la couvrait avec sa main. Elle n'en revenait pas de tant de bonnes nouvelles et était vraiment émue pour ses amis.

— C'est Loufoqua qui avait raison en fin de compte. Elle m'avait prédit un mariage et des enfants dans très peu de temps, rigola Blaise.

Amanda lui sourit tendrement en enlaçant ses doigts aux siens, tandis qu'elle l'embrassait amoureusement sous les applaudissements de leurs amis.

FIN

6/08/14 à 27/08/2015


Et voilà ! Cette fois-ci c'était bel et bien le dernier chapitre bonus de cette fic. J'espère que vous l'aurez apprécié :) Tous les commentaires sont acceptés, et sachez que même sur mes fics qui sont finies depuis des années ou les plus récentes, je continue de lire vos review et d'y répondre. Si ce n'est pas directement ici, c'est sur le forum dédié aux réponses de review dont l'adresse se trouve dans mon profil :)

Gros bisous,

Labulle.