C'est avec une certaine émotion que je vous livre le chapitre final de cette fic!
Premier chapitre posté en Mai 2012, on peut dire qu'il s'est passé un petit bonhomme de chemin être le début et la fin. Lorsqu'on regarde en arrière, on se dit qu'on est parti de loin, mais au final, je suis bien contente du résultat. Il y a eu des hauts et des bas dans la motivation, mais jamais dans l'inspiration et c'est bien le problème qui nous amène 4 ans plus tard! :p
Pour dire vrai, de l'inspiration, il y en a encore et je ne souhaite pas fermer la porte complètement à une possible suite, mais dans l'immédiat, je préfère me dire que ce chapitre -que dis-je, l'équivalent de ce roman! (plus de 600-700 pages si ma mémoire est bonne)- est ainsi clôt et je peux ainsi librement me pencher sur d'autres projets d'écriture sans avoir le poids invisible, mais bel et bien présent, de ce petit bébé toujours incomplet.

On se retrouve en bas pour les au revoirs!
Encore et une dernière fois : bonne lecture à tous petits et grands lecteurs qui trainent par ici, fidèles au poste, pour la clôture de cette histoire.

Between live and survive
Chapter 39 ;; Dead man walking

Ses pieds marchaient sans que son cerveau ne l'ait commandé. Il suivait les autres. Bêtement. Stupidement. Parce que c'était trop risqué d'y retourner. Daryl avait insisté pourtant. Il fallait aller la chercher quand même. S'occuper de sa dépouille avec le respect qu'on devait aux personnes qu'on aime. Aux personnes comme elle. Trop risqué, c'était ce qu'avait dit Ray. Il s'était assuré que Noah et elle seraient en paix, qu'ils ne reviendraient pas, c'était ce que Rick avait ajouté, toujours sans oser le regarder en face.
Ils parcoururent les cinq kilomètres qui les séparaient du point de ralliement lentement. Non seulement parce que Rick et Ray supportaient Hershel qui peinait à avancer, mais aussi parce que Daryl suivait mécaniquement. Ses pieds n'avançaient pas vite, mais ils avançaient, sans qu'il ne comprenne trop comment.
Il ne voulait pas y aller. Ce qu'il voulait, c'était la rejoindre, elle. Ils ne pouvaient pas laisser son corps là-bas, à ces sauvages!
Ses pieds s'arrêtèrent.

« J'peux pas. »

Deux pas plus loin, les trois autres s'arrêtèrent à leur tour. Le chasseur se permit un regard par-dessus son épaule. Elle était là-bas, il ne pouvait pas partir, juste comme ça, sous prétexte que c'était dangereux.

« Daryl, elle m'a fait promettre de pas te laisser y aller » révéla Rick.

Il avait confié le poids d'Hershel à Ray pour s'approcher de lui. Doucement. Précautionneusement. Comme on le faisait avec les animaux sauvages dont on se méfiait.

« T'crois qu'j'en ai que'que chose à foutre?! »
« Ouais. Parce qu'elle voulait pas que tu fonces inutilement dans le danger! » répondit le shérif, aussi durement que lui. « On a perdu assez de gens pour aujourd'hui. »

Daryl le dévisagea férocement. Il ne comptait pas faire un pas de plus dans la bonne direction.

« Je lui ai promis, Daryl, et je vais tenir ma promesse même si je dois t'assommer et te porter sur mon dos. »

Rick parlait presque avec plus de détermination que lui. Tout autant, du moins. Et le chasseur trouva cela injuste. Injuste que Rick ait pu être là, à la fin, et pas lui. Les malheurs se produisaient toujours quand il n'était pas là. Et celui-ci avait été fatal.

« Et au trot » ajouta Ray au bout d'un moment. « Avant de se faire bouffer. »

Ils ne pouvaient pas rester là à en débattre. Les rôdeurs étaient lents et suffisamment dispersés pour ne pas leur avoir créé de problème jusqu'ici, mais ils se faisaient voir de plus en plus. La fusillade et les explosions les avaient guidés tout droit sur Fort Walton. La zone allait crouler sous les hordes dans les prochaines heures, voire les prochains jours.
Noah, Andrea, T-Dog et Milie étaient morts. Le refuge n'en était plus un. Il n'y avait plus rien pour les retenir ici.

Il leur prit un peu plus d'une heure pour atteindre la maison la plus rapprochée du panneau de bienvenue de la ville. Hershel était à bout de forces et Rick n'en menait pas large non plus niveau fatigue.
Devant la maison, Glenn faisait le pied de grue, guettant non seulement leur arrivée, mais les dangers potentiels. Comme Daryl avant lui, sa première réaction fut l'hébètement en constatant l'absence de Milie et Noah. La question où sont-ils sembla vouloir franchir ses lèvres, mais l'asiatique se garda bien de la poser en ravalant les mots. Qu'ils ne soient pas là ne voulait dire qu'une chose. Peut-être ne voulait-il pas l'entendre. Peut-être ne voulait-il pas les blesser en les forçant à le dire. Dans un cas comme dans l'autre, Glenn conserva le silence. Il relaya Rick au soutien d'Hershel, et le militaire et lui le firent entrer dans la maison abandonnée depuis plusieurs mois.
Libéré du poids du vieil homme, le shérif attendit patiemment que Daryl monte les trois marches du porche le premier.
Il hésita, ramenant une fois de plus son regard par-dessus son épaule. Rebrousser chemin. Sa tête le commandait à ses pieds qui refusaient d'obéir. Qu'est-ce qu'ils avaient ces fichus pieds tout à coup? À quoi bon vivre maintenant?
Rick continuait de le fixer, sans un mot, sans une expression. Il avait fait une promesse qu'il tiendrait coûte que coûte.
Ses stupides pieds écoutaient Rick plus que lui. Ils grimpèrent les marches et le chasseur pénétra dans la maison, le shérif à sa suite qui ferma la porte.

À l'intérieur, Maggie s'était précipitée sur son père, à la fois horrifiée de son état et soulagée qu'il soit de nouveau avec elle, vivant. Carl se rapprocha de Rick qui le serra contre lui avec affection. Talie quitta les bras de sa tante pour se jeter sur Ray avec plaisir. Même fatigué, le lieutenant la souleva dans ses bras, un triste sourire teintant ses lèvres.
Merle était tranquillement assis dans son coin. Il s'était appuyé entre deux murs pour pouvoir se reposer sans devoir se coucher. Si quelque chose d'hostile entrait cette maison, il voulait être rapidement sur ses pieds. Les yeux bleus de son frère parcoururent les nouveaux arrivants de la pièce et, après le maigre décompte, les planta ensuite dans ceux de Daryl. Et ce fut la première fois que le chasseur vit cette expression dans le regard de son ainé. Merle était désolé, profondément et sincèrement désolé.

« Où est Noah? Et Milie? » demanda innocemment Talie en notant l'absence des deux jeunes adultes.

Rebecca porta les mains à sa bouche pour retenir l'éclat de sanglot incontrôlé. Maggie quitta son père des yeux pour réaliser que les deux amis manquaient à l'appel.

« Qu'est-ce qui s'est passé? » demanda la fille du vétérinaire.
« Je… Je suis pas sûr que ce soit une bonne idée de… »

La voix du shérif mourut avec un coup d'œil pour chacun des enfants. Rebecca pleurait en silence, maintenant, et Talie avait déjà vu trop de morts pour qu'on ait besoin de lui expliquer, elle se cacha la tête dans le cou de Ray.

« Papa, je veux savoir ce qui est arrivé à mes amis. »

Carl avait changé cette nuit. Il avait déjà commencé à changer avant le décès de sa mère, plus encore à sa mort, mais, ce soir, il avait acquis une maturité qui ne convenait pas à son âge. Prendre part aux actions du groupe lui avait définitivement fait quitter l'enfance. Et Daryl ne fut pas le seul à le réaliser. Rick le dévisagea attentivement avant de porter le regard sur Hershel, semblant lui demander quelque chose à travers sa pensée. Il eut un hochement de tête en réponse. À quoi? Le chasseur n'en avait aucune idée.

« Noah a été touché à la cuisse pendant la fusillade » raconta le shérif en pressant l'épaule de son fils avec affection. « Ils nous ont pas donné la chance de soigner les blessés correctement. Ils nous ont juste gardés là, dans le parc, le temps de tout fouiller et de préparer ce truc horrible. »

Il détailla une sorte de ring formé par des rôdeurs enchainés. Un ring où ils ont fait combattre les chefs et ceux qui présentaient le potentiel de s'opposer à eux. Que Rick et Milie s'y retrouvent coincés ne surprit pas Daryl. Comme la mort de Reynolds qui n'avait jamais été un tueur, même pour sauver sa propre peau. Mais il s'attendit à ce que ce soit ce qui avait eu raison de Milie.

« Vous auriez dû la voir » continua Rick avec un regard plus appuyé pour Daryl et Ray. « Elle s'est battue comme une tigresse. Même blessée, elle s'est relevée à tous les coups. Elle a envoyé au tapis tous ceux qui se sont approchés d'elle. »

Et leur diversion avait fonctionné. Les explosions éparses avaient dispersé les hommes qui les obligeaient à s'entretuer. Ils avaient pu sortir vivants de ce combat. Ce n'était pas ce qui l'avait tuée. Le shérif poursuivit son récit. Comment Noah avait perdu trop de sang, qu'il était trop faible. Comment ce géant était sorti de nulle part pour tirer sur Hershel. Comment il était tombé à court de munitions et avait sorti son couteau.
Elle n'avait pas hésité, elle avait foncé, pour leur donner le temps de se mettre à l'abri. Parce que c'était ce qu'elle faisait. Milie se mettait en première ligne sans penser aux risques si c'était pour des gens qu'elle aimait. Et ça lui avait été fatal. Le temps à Rick d'arriver et tuer le gars par derrière, Milie s'était faite poignarder.

« Et j'ai fait ce que je pouvais ensuite » conclut Rick. « Je pouvais pas faire plus que les empêcher de revenir. »

Il ferma les yeux, sous le remord du survivant, peut-être. Tout ça, toute cette histoire, la connaitre ou non ne changeait rien pour Daryl. Elle n'était plus là.

« Elle s'est sacrifiée » sourit Ray malgré sa tristesse et les larmes qui obstruaient ses yeux et sa voix « pour que d'autres puissent vivre. Et maintenant, elle, Noah, T-Dog et Andrea ont fini de lutter. Ils peuvent se reposer pour de bon. »

Ces discours préfabriqués, y croyait-il vraiment ou se réfugiait-il derrière eux pour avoir moins mal?
Il y eut un petit instant où personne ne dit mot, ni ne bougea, avant qu'Hershel ne puisse plus retenir son inconfort. Ray remit Talie à sa tante et se pencha sur la blessure du vieil homme avec l'aide de Maggie. Glenn retourna à son poste de vigile et Rick insista pour que Carl essaie de se mettre au lit. Rebecca s'en chargea et coucha Talie avec lui. Daryl, lui, grimpa à l'étage derrière la rouquine et les enfants et s'installa à une fenêtre qui donnait vue sur la rue.

Il pouvait sortir par cette fenêtre, ni vu ni connu. Il était assez agile pour le faire et assez silencieux pour ne même pas alerter Glenn en s'éloignant de la maison. Mais que ferait-il une fois là-bas? Il se ferait prendre avant d'avoir pu la regarder une derrière fois. Il se ferait tuer avant même de la trouver, peut-être. Et même s'il y arrivait? Ramener son corps ne lui rendrait pas la vie. Elle resterait morte et tout ce qu'il aurait alors de plus ce serait son visage éteint pour le fixer. Une vision qui le suivrait et le hanterait jusqu'à l'heure de sa propre mort.

« Tu penses rien faire de stupide comme sortir par cette fenêtre par hasard? »

Merle. Daryl ne quitta pas la rue des yeux mais écouta attentivement les pas lourds de son frère se rapprocher de lui. Qu'est-ce qu'il venait faire au juste? Ce n'était pas comme s'ils étaient très câlins dans la famille.

« Qu'est-ce que ça peut te foutre si j'y pense? » marmonna Daryl toujours sans le regarder.
« J'en ai à foutre que t'es mon frère, connard. Y'a pas de jolie façon de le dire, ta copine est morte. Elle est morte comme la casse-pieds brave qu'elle a toujours été. Être fier de ça et garder un bon souvenir d'elle, c'est tout ce que qui te reste à faire. »

Le chasseur ne dit rien et demeura fixé sur la rue déserte. Il sentit la main de Merle sur son épaule mais ne broncha toujours pas. Il resta complètement immobile plusieurs minutes après que son frère l'ait laissé seul.
Après, seulement après, il s'autorisa à pleurer. Si quelqu'un l'entendit, personne ne vint le voir et c'était tout aussi bien. Cette peine-là, il voulait la vivre tout seul.


Retirer la balle de la hanche d'Hershel ne fut pas aisé. Ray n'était pas un expert soignant. Il avait appris deux-trois trucs à la ramasse sur les champs de bataille, mais ça consistait principalement à contenir les blessures le temps qu'un infirmier ou un docteur s'y penche plus sérieusement.
Dans le cas présent, le docteur était touché, dans le dos, Ray n'avait pas eu le choix d'opérer, assisté de Maggie. La jeune femme fit preuve de beaucoup de sang froid étant donné les circonstances et l'hispanique ne la rappela à l'ordre que deux fois lorsqu'elle se laissait distraire par les suppliques douloureuses de son père souffrant.
Une fois la balle extraite, il ne restait plus qu'à nettoyer et panser la plaie. Le militaire laissa Maggie se charger de cette besogne, étudiant le vétérinaire avec soin. Atteindre le projectile, l'attraper et l'extirper avait été laborieux. Ray avait très certainement endommagé les chairs et les muscles autour de la blessure. Le bonhomme était vieux, il n'allait ni se remettre rapidement, ni complètement. Il allait devenir lent et encore moins agile que s'il n'y avait que l'âge pour obstruer ses mouvements. Le lieutenant savait qu'Hershel allait devenir un poids mort, mais ils ne pouvaient pas se permettre de le perdre, pas lui, et surtout pas maintenant.

À cette pensée, Ray s'isola dans la cuisine. Il trouva un vieux linge à vaisselle pour éponger le sang gluant qui lui collait aux doigts. Ça ne chassa pas tout, sa peau en garda des traces rougeâtres, mais c'était déjà mieux. Il continua de s'essuyer les mains, même lorsque le geste n'eut plus d'impact. Il n'arrivait pas à croire que le matin même, il se trouvait dans un lit moelleux, que les armoires contenaient de la nourriture, qu'il avait un travail, une famille.
Cette nuit, il ne lui restait plus rien. De retour à la vie de vagabondage, il allait devoir dormir par terre parce que la maison ne contenait pas assez de matelas. Il allait devoir se contenter de trois bouchées parce qu'il fallait rationner prudemment. Il allait devoir être le rempart entre la mort et ceux qu'il aimait.
Chose à laquelle il n'était pas doué du tout, visiblement.
Il avait échoué pour Nate, il venait d'échouer pour sa fille.

Milie, il n'arrivait pas à croire qu'elle était morte. Ils s'étaient retrouvés, bon dieu! Ils avaient trompé l'impossible, ils l'avaient fait, mais ça ne l'avait pas empêchée de mourir.
Ray jeta le chiffon ensanglanté à bout de bras, violement, et se pinça l'arête du nez en fermant les yeux. Il tenta de se l'imaginer. Milie, sans vie. Ça ne faisait aucun sens dans son esprit. Pas plus que Noah, qu'il avait pourtant vu blessé.
Il se laissa tomber lourdement sur une chaise, abattu.
Ces deux gamins avaient la vie devant eux. Un an plus tôt, ils formaient ce couple d'artistes bohèmes, candides et adorables. Ils avaient des rêves plein la tête et du talent pour y arriver.
Aujourd'hui, ils étaient morts. Milie et Noah étaient morts. Les larmes lui emplirent les yeux. Ce qui lui restait d'avant, ce qui lui restait de son meilleur ami, était mort. À cet instant, il aurait tout donné pour une rime stupide. Pour un regard tendre envers un homme trop vieux pour le recevoir. Juste pour qu'ils soient là.
Mais ils ne le seraient plus jamais.

Rick entra dans la cuisine et Ray leva le menton vers lui. Il ne cacha pas sa peine, il n'en avait pas la force, et le shérif vint se joindre à lui, s'asseyant sur la chaise face à la sienne, avec plus de douceur que lui l'avait fait.

« Ils ont souffert? »

C'était préférable de ne pas savoir, mais Ray voulait savoir quand même. Il avait besoin de le savoir. Il n'avait pas été là, s'il était resté, peut-être que les choses auraient tourné différemment. Il était parti, comme un couard, et ses deux gamins étaient morts.

« Noah était trop faible sur la fin pour sentir quoi que ce soit » répondit consciencieusement Rick. « Milie… elle est partie rapidement. »

Le marine referma les yeux. Il les imagina. Pâles, à se vider de leur sang. Il pressa les paupières encore plus fort pour chasser cette vision. Il préféra se les figurer pelotonnés dans un coin de canapé devant la télévision. Noah avait une passion stupide, parmi d'autres, regarder des films sans le son et inventer les dialogues. Un soir, ils avaient tous participé à cette bêtise, endossant chacun le rôle de divers personnages, Noah, Milie, Nate et lui.
Il avait rarement autant ri de sa vie.

« Au début, Nate a désapprouvé Noah » raconta l'hispanique sans trop savoir pourquoi.

Il reporta les yeux sur Rick, un sourire nostalgique au coin des lèvres. Il ne se rendait même pas compte qu'une larme avait coulé.

« Il m'avait dit je comprends vraiment pas ce qu'Em' peut trouver à cet imbécile heureux! Et je lui ai dit que c'était justement ce qui devait lui plaire le plus. Noah a… avait ce don de rendre les choses faciles, jolies et drôles. Il forçait Milie à être moins sérieuse tout le temps. Je l'ai jamais entendue rire autant qu'avec ce gars-là. Et il a gardé ça, jusqu'à la fin. Je sais pas comment, mais il s'est pas laissé bouffer par la fin du monde. Il était pas foutu d'ouvrir une conserve sans ouvre-boite, mais il a su garder le sourire. Le gamin avait de la force de caractère, quoi qu'on en pense. »

Rick sourit à son tour, accordant raison au militaire. L'épidémie aura changé la face du monde entier, mais pas Noah, jamais Noah. Et il aura été fort pour ça, parmi les plus forts, même. Parce que rire et faire rire, quand tout le monde crève de faim et de soif, que tout le monde crève, littéralement, c'était rare.

« Et Milie… » poursuivit plus tristement Ray, « j'en ai connu des gens courageux dans ma vie, mais jamais autant qu'elle. Nate avait assez de tête pour savoir quand avoir peur, mais pas sa fille. En fait, je suis pas sûr s'il faut appeler ça du courage ou de l'inconscience. Qu'est-ce qui lui a pris de faire ça? »

Il n'était plus nostalgique maintenant. Il voulait comprendre. Comprendre pourquoi elle avait foncé comme une furie sur un malabar de trois fois son poids et sa taille, armé qui plus est.

« Parce qu'elle ne voulait pas mourir? » proposa le shérif. « Parce que c'était une battante acharnée? »
« Parce qu'elle était trop bouchée pour se laisser guider par la peur » rétorqua plutôt l'hispanique, « voilà pourquoi. Et parce que j'étais pas là. »

Il aurait dû y être. Il aurait dû rester. Insister pour que ce vieux fou de vétérinaire sauve sa vieille peau et être celui qui reste. S'il avait été là, ils auraient pu sortir Milie et Noah du camp. S'il avait été là…

« Commence pas ça Ray. Jouer à et si, c'est jamais bon » l'avertit Rick.
« Et je dois faire quoi? L'accepter? Milie est morte, bordel! »

Il frappa du poing sur la table. Les larmes devinrent rageuses et redoublèrent.

« Je l'ai vue grandir, j'étais là le jour de sa promo, bon sang! Et quand elle a fait ses valises pour le collège, et sa première peine d'amour, et le lendemain de sa première cuite. C'était pas ma fille, mais c'était tout comme. J'vais pas accepter, juste comme ça, qu'elle soit morte, j'peux pas! »
« C'est normal d'être en colère, Ray, mais commence pas à te blâmer pour ça. Parce que c'est ça qui est malsain. »
«Et si c'était Carl, hein, tu te sentirais comment? »

Le marine se leva. Il n'avait plus envie d'écouter, ni de partager.

« Je serais inconsolable » admit le shérif.
« Ouais, précisément. »

Il prit la porte arrière pour sortir dehors. Il avait besoin d'air frais. Il avait besoin d'être tout seul. Il avait besoin que son cerveau prenne le temps d'assimiler l'improbable fait que Milie était morte. Que Noah et elle étaient morts.


Le reste de la nuit fut longue. Daryl refusa de fermer l'œil. Il en était incapable. Il n'avait pas voulu s'allonger par terre et fermer les yeux. Dormir, il n'y serait jamais parvenu de toute façon. Il n'y aurait eu que son visage pour le hanter durant ces quelques heures et ça il préférait l'éviter. Il s'allongerait lorsqu'il serait à bout de force. Lorsqu'il lui serait impossible de garder les yeux ouverts. Là, et seulement là, il dormirait en évitant la hantise de son visage qu'il ne verrait plus jamais.
Lorsqu'il s'autorisa à quitter son poste et descendre au rez-de-chaussée, Hershel se trouvait encore sur le canapé. Il y avait du sang sur le plancher et les coussins que personne ne s'était donné la peine de nettoyer. Maggie s'était endormie appuyée contre le canapé, la main de son père dans la sienne. Glenn était allongé à proximité, Merle roupillait dans son coin et Ray montait à la garde à la fenêtre. Il avait du sang séché sur les mains. Celui d'Hershel.

Daryl ne s'attarda pas dans la pièce. Il continua son chemin jusqu'à la cuisine. Rick s'y trouvait, appuyé contre la table, les yeux fixés sur la carte que Glenn avait eu la bonne idée de prendre avec lui. Il n'était pas plus frais que la dernière fois qu'il l'avait vu, mais il n'était pas pire, ce qui susurra au chasseur que le shérif s'était reposé une heure ou deux avant de se planter devant cette carte.

« Une idée de par où aller? » questionna Daryl en guise d'introduction.

Absorbé, Rick leva seulement le regard sur lui à ce moment. Il le reposa rapidement sur la carte, la passant au crible pour la millième fois.

« J'attends que Glenn se réveille. Il était du ravitaillement, il sait où le Fort a déjà tout pris. »
« On reste dans les parages? »
« Bien sûr que non. Plus loin on sera d'ici, le mieux ce sera. Mais entre les deux, il faut prendre une direction qui nous permettra de s'équiper. »
« Si on peut mettre la patte sur une camionnette de transport ou un truc du genre, on aura besoin que d'un véhicule. »

L'essence serait moins difficile à trouver que pour deux voitures. Rick approuva l'idée, mais encore fallait-il trouver le transport propice. Ils étaient dix à devoir y entrer.
Seulement dix. À un certain moment, ils avaient été le double de ça.

« Sinon, j'aimerais qu'on vise un bord de plage » enchaina le shérif en glissant un doigt le long de la carte.

Sa peau aussi était teintée de sang. Celui de Noah. Celui d'Hershel. Celui de Milie. Il y avait du sang de Milie sur ses mains. Cette idée tordit l'estomac vide de Daryl, mais il s'efforça de n'en rien laisser paraitre. Ce n'était pas le moment. Ils n'avaient pas le temps.

« Ça nous offrira une surface dégagée plus facile à surveiller. »

L'idée n'était pas bête. Et il y avait aussi la question de la nourriture. En bord de mer, il y avait moyen de pêcher. Plus le temps avançait, moins la nourriture en boite était facile à trouver et elle se ferait encore plus rare dans les environs que Fort Walton avait parcouru dans toutes les directions.
Tous deux conservèrent le silence après ça, fouillant la carte à la recherche d'un point lumineux magique qui leur dirait voici l'endroit parfait. Il n'y eut bien sûr aucun phénomène du genre qui se produisit, mais il y avait quelques options possibles.

« Je suis désolé » lâcha Rick à un moment. « Je voulais pas que ça se passe comme ça. Je voulais pas la laisser. »
« Ça se passe jamais comme on veut. »

Tous les morts qui appartenaient maintenant au passé, ça ne s'était jamais passé comme ils l'auraient voulu.

« Je suis désolé » répéta Rick avec plus de sincérité qu'il n'en avait jamais eue.

Daryl ne dit rien en retour parce qu'il n'y avait rien à dire. Rick ne pouvait pas mieux savoir ce qu'il ressentait. Il avait perdu sa femme. Il savait ce qu'était cette déchirure. Cette impression soudaine de ne plus être complet. D'avoir perdu la moitié de soi-même en sachant qu'on ne la retrouverait pas de si tôt, voire jamais.
Ils étaient tous les deux dans le même bateau. Ça n'enlevait pas la peine, ça ne l'amoindrissait pas non plus, mais Daryl n'était pas tout seul.
Il pouvait entendre sa voix dans sa tête. C'est déjà ça, pas vrai?
Elle avait toujours été optimiste pour ce genre de choses.

Il ne leur fallut pas attendre longtemps pour que Glenn apparaisse dans la pièce. Encore embrouillé par le sommeil pas très réparateur, il s'étirait dans tous les sens comme un chat pour tenter de faire disparaitre les courbatures.
Rick n'attendit pas qu'il ait terminé pour mettre l'asiatique au fait de ses intentions et celui-ci se pencha immédiatement sur la carte pour satisfaire les demandes du shérif. Il ne lui prit qu'une minute pour exclure toutes les possibilités.

« Mais on pourrait aller ici » pointa Glenn sur la carte. « C'est plus loin, environ 1500 kilomètres, mais Billy m'a dit qu'il y avait une orangeraie à l'abandon dans le secteur. Elle a été jugée trop loin du Fort pour que le voyage vaille la peine. Au minimum, on aura des fruits à ne plus savoir qu'en faire. »
« C'est pas si loin de la côte que ça » évalua Daryl. « Peut-être deux ou trois kilomètres, sera possible d'aller pêcher de temps en temps. »

Ils pesèrent et soupesèrent la possibilité. C'était la meilleure qu'ils avaient et de loin. Ils avaient besoin de trouver un endroit où se poser, ne serait-ce que temporairement, loin de ce sinistre endroit qui venait de leur coûter quatre des leurs. Ray et Maggie approuvèrent d'emblée. Hershel était plus que satisfait. Même Merle ne trouva rien à reprocher à cette entreprise. Seule Rebecca ne paraissait pas enchantée, mais Daryl savait que l'incertitude, plus que la destination, la rongeait de cette manière.
En une heure, la décision était prise. 1500 kilomètres les séparaient de leur nouvel objectif et ils allaient devoir s'équiper consciencieusement avant de partir, en plus d'être vigilants pendant qu'ils le faisaient. Les types qui avaient envahi Fort Walton pouvaient très bien leur tomber dessus lors d'une patrouille de reconnaissance.

Ils avaient trouvé une fourgonnette. Celle qu'une épicerie utilisait pour effectuer ses livraisons. Le principal problème était la batterie complètement déchargée du véhicule laissé à l'abandon trop longtemps. Alors, pendant que Glenn et Maggie ratissaient des maisons pour trouver des couvertures, des vêtements, peut-être de la nourriture avec un peu de chance, Daryl s'était donné pour mission de visiter des garages pour réparer la fourgonnette. C'était le deuxième, et il était seul.
Ray avait voulu l'accompagner, mais le chasseur avait refusé. Rick avait voulu le seconder, il n'avait pas voulu non plus. Merle, lui, ne lui avait pas laissé le choix. Il ne lui avait pas demandé s'il voulait de l'aide, il s'était levé, s'était armé, avait ouvert la porte et avait attendu que son petit frère sorte de la maison pour le suivre.
Personne ne voulait le laisser tout seul au cas où il désirait commettre une bêtise. Une connerie du genre retourner au camp. Mais une fois au premier garage rencontré, Merle n'avait pas tenu le même discours que durant la nuit.

« Y'en a un autre à deux pâtés de maison, vas-y, on gagnera du temps. »

Il n'avait rien dit d'autre, ne l'avait pas regardé non plus, faisant mine de vérifier si le bâtiment contenait des menaces mortes-vivantes. Merle lui avait laissé le choix de découvrir par lui-même s'il y retournerait ou pas. Parce qu'il savait que si Daryl le décidait, même une surveillance constante ne l'empêcherait de rien. Il préférait l'y confronter tout de suite, qu'il résiste ou qu'il flanche, mais qu'il le fasse aujourd'hui au lieu de devenir une bombe à retardement. Son frère n'avait jamais été très patient.

Avant de remonter la lourde porte de métal, Daryl avait frappé dedans avec le pied et écouté attentivement. Pas un son, pas un chuintement ne provenait de l'intérieur. Aucun macchabée, du moins rien pour lui sauter dessus dès l'ouverture de la porte.
Arbalète solidement coincée contre l'épaule, il fit un tour rapide pour s'assurer qu'aucune surprise ne viendrait l'attaquer, puis, il se concentra davantage sur ce qui l'entourait. Une voiture était encore perchée à quelques mètres dans les airs. Elle était en train de se faire remplacer les plaquettes de frein lorsque tout était arrivé. Un semi-remorque étaient installé pour une inspection, juste à côté. Sur le sol se mêlaient la poussière, le cambouis et le sang. L'œil affuté du traqueur arrivait à comprendre ce qui s'était passé des mois auparavant, mais il ne s'y attarda pas. Il n'avait pas envie d'être témoin du malheur des autres, de malheurs passés, qui plus est.
Il attrapa plutôt une boite en carton pour y jeter des outils au potentiel utile dans l'avenir. Il trouva une batterie, déchargée elle aussi, sous un établi. Il ratissa les lieux avant de passer au bureau administratif, contigu au garage. Il brisa le distributeur d'arachides pour le vider dans un sac plastique passablement propre. Elles avaient sûrement pris l'humidité depuis le temps, mais ce serait mieux que rien.
Ensuite, il passa à l'extérieur. Il devait trouver une batterie ou de quoi charger celle de la camionnette. Il se promena de voiture en voiture avant de remarquer un fourgon de livraisons de pièces automobiles, s'il en croyait le logo.
Il dut retourner à l'intérieur pour prendre un pied-de-biche et fracturer la serrure du camion, mais il n'en regretta pas l'effort. Au milieu des pièces empaquetées et étiquetées avec soin, il trouva ce qu'il cherchait. Une batterie flambant neuve, encore dans sa boite. Il se permit un soupir de contentement. Il utilisa un diable pour y déposer la batterie, sa boite d'outils et le sac d'arachides.

Et ça le frappa. Mais qu'est-ce qu'il était en train de faire? Qu'est-ce qu'il fichait là, heureux d'avoir une batterie de voiture, des stupides outils et des cochonneries d'arachides humides?
Diable en mains, il le remit en position verticale, choqué, et recula de deux pas. C'était ridicule. Comment pouvait-il être content? Il ne l'était plus maintenant.
Il ne la reverrait plus jamais. Ne la serrerait plus jamais dans ses bras. Elle lui avait été arrachée, comme ça, sans prévenir. Pourquoi n'avait-il pas pris le temps de l'embrasser plus que ça avant de partir à la recherche de T-Dog et Andrea? Pourquoi ne lui avait-il pas dit combien il l'aimait?
L'air se raréfia autour de lui, l'étourdissant. Sa tête s'éleva et se posa dans du coton. Le bout de ses doigts et de ses orteils se mit à picoter. Son sang bouillit. Les battements de son cœur accélérèrent. Il ouvrit la bouche et respira bruyamment pour approvisionner ses poumons. Rien n'y fit. Ses mains tremblaient, ses genoux devenaient mous et ses jambes flageolantes.
Milie était morte.
Et ça venait de le frapper, comme un putain de train.

Il attrapa un marteau et le lança à bout de bras, de toutes ses forces, en grognant. Un tournevis. Une clé à molettes. Lorsque ses doigts se serrèrent autour du manche d'une masse, Daryl devint aveugle. Il frappa la vitre, la carrosserie, le coffre à outils, tout ce qui se trouvait autour de lui. Il frappa en hurlant, jusqu'à ce que ses bras faiblissent, jusqu'à ce que la masse devienne trop lourde.
Il se laissa tomber sur le béton, la douleur de ses genoux se répercuta en écho lointain dans ses jambes, son cerveau n'arrivant pas à analyser la souffrance créée. Il était en larmes, mais pas ces larmes timides et silencieuses de la veille. Des grosses larmes, comme il n'en avait jamais versées de sa vie. Des larmes d'un flot ininterrompu. Des larmes qui l'engourdissaient et lui faisaient tourner la tête. Des larmes qui l'empêchaient de respirer autrement que par à-coups. Des larmes incontrôlables dans lesquelles il voulait se perdre et s'étouffer pour de bon.

Milie était morte.
Elle était tout ce dont il avait besoin, et il venait de la perdre. Elle était tout ce qui faisait de lui ce qu'il était, et elle n'était plus là. Elle était tout ce qu'il n'avait jamais osé espérer, et il ne l'aurait plus jamais.
Il se laissa tomber sur le côté, sa tête heurtant douloureusement le ciment à l'odeur prononcée d'huile à moteur. Des points noirs envahirent ses yeux et, au milieu, il la vit. Allongée à côté de lui, papillonnant des cils pour lutter contre la lumière aveuglante du matin. Elle semblait confortable sur le béton, comme plongée dans des draps frais et des oreillers duveteux. Elle souriait, comme elle ne lui souriait qu'à lui.
Elle était magnifique parce qu'elle était sienne. Elle l'avait préféré à des gars parfaits comme Anderson, à des gars plus marrants comme Noah. Elle l'avait choisi, lui. Qui n'était rien, n'avait rien à offrir et ne savait pas comment aimer.
Elle lui avait appris à s'accepter, à s'affirmer… à s'aimer et aimer les autres. Bon dieu, il n'avait jamais aimé autant que ça et maintenant qu'il ne savait plus quoi faire de ce sentiment, il en avait mal. Bien plus mal que ses genoux ou son crâne. Il en avait mal comme si quelqu'un était en train de creuser un trou dans sa poitrine avec une cuillère.

« J'vais faire quoi? » murmura-t-il difficilement, douloureusement, complètement désemparé.
« Mais vivre, idiot, c'est pas la fin du monde. »

Elle s'esclaffa à sa propre blague. Ça ne le faisait pas rire du tout. C'était la fin, la vraie. Celle où absolument tout s'était écroulé. Où il ne restait plus rien.
L'apocalypse avait été les plus beaux moments de sa vie, parce qu'il l'avait connue. Jamais, autrement, cette femme-là n'aurait croisé sa route pour le rendre meilleur. Si par malheur ils s'étaient rencontrés, elle aurait changé de trottoir ou, pire, l'aurait complètement ignoré. De toute manière, il n'aurait jamais posé les yeux sur elle dans le monde d'avant. Elle était cette fille de bonne famille, jeune, pleine de vie, d'avenir et d'espoir. La société était morte avec ses idées préconçues qu'un type comme lui et une fille comme elle n'allaient pas ensemble.
Le soulèvement des morts n'avait pas été la fin pour lui, mais le début. La fin, elle venait de lui tomber dessus avec cruauté. Elle était morte et pas lui. Il devait continuer de marcher avec les morts, mais pas avec elle.

Milie était morte.
Et il ne comprenait pas pourquoi il continuait de respirer.
Milie était morte.
Et c'était la fin de son monde à lui.

« T'es morte… »

Son estomac reçut un poing invisible, se tordant d'une douleur incomparable, et les larmes s'échappèrent plus encore au coin de ses yeux.

« Je sais. »
« J'voudrais être mort avec toi. »
« Soit pas bête, tu peux vivre sans moi. »
« Mais j'ai pas envie. »

Elle lui glissa un tendre sourire et porta la main à sa joue. Il arrivait presque à la sentir, cette main si douce et si assurée tout à la fois, cette main chaude plus rassurante et enveloppante que ne l'avait jamais été celle de sa propre mère.

« T'es plus fort que ça. Le Daryl que je connais n'abandonne pas, jamais. Même quand il n'arrive pas à pardonner. »
« Et si j'te pardonne? T'vas revenir? »

Son visage se barra de douleur. Il était prêt à tout pour qu'elle lui soit rendue. Il l'aurait pardonnée cent fois, mille fois, si ça avait fait une différence.

« J'te pardonne, ok? C'est pas grave si tu pars encore, tant que tu reviens. Reviens, s'te plait. »
« J'aimerais bien, mais c'est pas comme ça que ça marche. »

Le trou béant dans sa poitrine s'agrandit encore. La morsure de la solitude lui coupa le souffle et anesthésia tous ses sens, à l'exception de celui capable de ressentir la douleur.

« Je vais rester ici » ajouta-t-elle en pointant son cœur saignant, « bien au chaud, juste là, toujours avec toi. Ça, je peux t'en faire la promesse. »

Il ferma les yeux un instant et lorsqu'il les ouvrit à nouveau, il était seul. Fin seul.
Il demeura allongé sur le béton froid un moment impossible à quantifier. Il y resta jusqu'à ce que les larmes cessent de couler, jusqu'à ce qu'il n'en reste plus une seule à verser.
Ensuite il se releva, passa les mains sur son visage boursoufflé, reprit son arbalète, le diable chargé et quitta le garage.


Ray n'avait pas beaucoup dormi. Il avait presque oublié combien le sommeil était difficile à trouver en dehors d'un lit qu'il s'y trouvait confronté à nouveau. Ça ne le dérangeait pas. Il avait l'habitude et ça faisait partie de son métier depuis toujours. Normalement il arrivait à passer outre l'inconfort, parce qu'il était en paix.
Là, il ne l'était pas du tout. Après que Daryl ait décliné son offre, Rick n'avait pas voulu qu'il sorte seul pour marauder à sa guise. Il fallait qu'il reste ici, avec lui, pour surveiller la maison et les occupants qui y restaient.
Les enfants, Rebecca et Hershel.

Lorsqu'il avait ouvert les yeux au matin et que Noah et Milie n'étaient pas là, il avait compris que ce n'était pas un cauchemar. Ils étaient vraiment morts. Milie était vraiment morte.
Il avait perdu des hommes au combat, il avait perdu son meilleur ami, mais c'était la première fois qu'il faisait face à un tel sentiment d'impuissance.
C'était bête, mais il n'avait pas cru Milie capable de mourir. Pas avant lui, en tout cas. Parce que c'était dans cet ordre que les choses auraient dû se dérouler. Mais rien n'avait de sens dans la vie, jamais, et encore moins dans la mort.

À l'étage, il observait la rue déserte, à moitié absent. Il avait les yeux lourds et les courbatures le faisaient changer de position toutes les trois minutes. Il tourna la tête vers l'escalier lorsqu'il entendit des pas y monter et la ramena sur l'extérieur en voyant des cheveux roux apparaitre au sommet des marches.
Rebecca et lui ne s'étaient pas vraiment parlés depuis qu'il avait haussé le ton sur elle. Quand il lui avait dit qu'il avait une famille avant sa nièce et elle. Ils n'avaient échangé que des paroles nécessaires et il ne savait plus comment se comporter. En partie parce qu'il n'avait jamais tenu une relation si longtemps pour être confronté à ce genre de situation, mais également parce qu'il n'avait pas l'esprit à chercher de réponse dans l'immédiat.

« Un signe des autres? » demanda la jolie femme en guise d'introduction.
« Pas encore. »

Elle glissa ses yeux verts sur ses pieds avant de faire mine de regarder la rue. Elle était mal à l'aise elle aussi. Ils étaient à la même image, en réalité. Rebecca n'était pas plus experte que lui en relations longues durées. Qu'est-ce qu'il fallait faire dans un cas comme celui-là?

« J'ai l'impression que Milie et Noah vont passer la porte d'un instant à l'autre » admit la rousse avec le souffle d'un rire idiot. « Surtout Milie. J'ai déjà été tellement certaine qu'elle était morte alors qu'elle ne l'était pas. Ça me fait bizarre… comme une impression de déjà vu. »
« Elle est morte. Qu'on y croie ou non, faut se faire à l'idée. »
« Et t'y arrives, toi? »

Elle lui jeta un regard et il osa tourner les yeux dans sa direction. Il réalisa qu'il se sentait moins seul avec Rebecca à ses côtés.

« Non, pas vraiment. »

Elle pinça les lèvres et plissa le front, se hissant sur la pointe des pieds en ouvrant les bras. Elle le serra contre elle, avec force, pressant une main affectueuse sur sa nuque, attirant son nez au creux de son cou.
Il ferma les bras autour de sa taille, appréciant la proximité rassurante de son corps. Il ne savait pas trop si ça l'aidait vraiment. Si ça faisait réellement une différence, mais il préférait croire que oui.

« Je suis désolé pour ce que je t'ai dit. »

Les mots le quittèrent sans qu'il n'y songe tout à fait. Il y avait assez de Milie et de Noah, il ne voulait pas de ça sur ses épaules plus longtemps s'il pouvait l'éviter.

« Moi aussi » assura-t-elle en le serrant encore plus fort. « J'avais peur, j'ai encore peur, mais je sais que Milie et toi ça remonte à loin et j'avais pas le droit de m'immiscer là-dedans. »
« T'étais pas la seule » révéla-t-il sincèrement. « J'ai pas l'habitude de jouer au papa avec une fillette qui en a vraiment de besoin… Et j'ai plutôt tendance à faire les trucs de travers alors... »
« Je suis pas la maman de remplacement idéale non plus. Je sais que c'est différent, que Talie, c'est ma nièce et pas la tienne, c'est pas ton fardeau, mais je me sens capable d'être à la hauteur depuis que je suis avec toi, je sais pas trop pourquoi. »

Il se détacha de son cou et les pieds de la rousse retrouvèrent complètement le sol. Elle passa les mains sur ses joues, barbues de quelques jours. Ray ne savait pas s'il aimait vraiment cette femme. Comme Nate avait pu aimer sa femme. Comme Milie avait pu aimer Daryl. Mais il y tenait, ça, c'était certain. Il était bien avec elle, ils se comprenaient, se ressemblaient et se complétaient. Et il tenait aussi à Talie, comment pouvait-il en être autrement? Cette petite fille était l'innocence et la douceur incarnées.

« Tu devrais peut-être pas me faire confiance » ajouta-t-il avec moins de certitude cette fois-ci. « Si tu comptes sur moi pour garder Talie en vie, tu pourrais être déçue. »

Il avait été incapable de le faire avec Milie. Qui dit qu'il y arriverait avec une petite fille de cinq ans?

« Si tu m'apprends, on pourra la garder en vie ensemble. »

Son regard se perdit un instant dans le vague. Nate lui avait dit une fois qu'il était idiot, mais seulement à demi. Parce qu'il ne refaisait pas les mêmes erreurs deux fois. Il pouvait se planter royalement, c'était certain, mais jamais deux fois de la même façon, ça non.
Alors, il allait être plus vigilant. Il avait une chance d'être pour Talie ce qu'il n'avait pas pu être pour Milie. Est-ce que ça changeait quelque chose? Non. Est-ce que ça allégeait la peine? Non plus.
Mais c'était une mission.
Et Ray était un soldat.

« Marché conclu. »

Rebecca l'embrassa.
S'il avait pu parler aux morts, Ray se serait excusé. À Nate de ne pas avoir su protéger sa fille. À Milie de ne pas avoir été là. Et il aurait également fait une promesse. Celle de ne pas commettre à nouveau cette erreur.
C'était peu. Peut-être trop peu.
Mais c'était une motivation suffisante pour ne pas tout laisser tomber. Il ne pouvait pas abandonner, c'était son métier de résister, et de se battre.
Parce que Ray était un soldat.


Être fins prêts pour ce nouveau départ leur prit la journée entière, sans compter d'incident notable. Ce qui s'était passé dans le garage, il ne l'avait dit à personne et personne ne lui avait rien demandé malgré la tête affreuse qu'il se trimbalait depuis.
Il n'avait toujours pas fermé l'œil et même si la fatigue commençait à lui engourdir le corps et l'esprit, il ne désirait pas s'allonger. Pas encore.
L'astre solaire avait terminé une nouvelle course, laissant place à la nuit noire qui n'offrait aucun signe de vie qui faisait autrefois partie du décor. Les réverbères n'étaient pas allumés, pas plus que les lumières des maisons. Aucun moteur, même pas les aboiements d'un chien ou le son de bataille de chats de gouttières. Il ne se passait rien dans les rues peuplées de morts qui suivaient leurs pieds sans se poser de question.

Merle et Rick montaient la garde. Maggie revoyait le pansement de son père et l'état de sa blessure. Rebecca préparait les gamins pour le lit. Glenn dressait la liste des stops potentiels sur la route pour se réapprovisionner pendant le voyage.
Et Daryl n'avait rien à faire. Rick ne lui avait rien demandé, espérant sûrement qu'il en profite pour se reposer. L'attention était louable, mais le chasseur lui en voulait. Ça lui laissait la tête assez vide pour penser, ce qu'il avait voulu éviter toute la journée.
Afin de l'éviter, il prit son sac pour en faire l'inventaire. Il n'aurait pas dû.

Assis à même le sol du salon, après avoir renversé le contenu du sac entre ses jambes, Daryl regretta son geste. Ce n'était pas que son sac, c'était leur sac. Celui ou celle qui l'avait fait avait, pour gagner du temps, empaqueté des vêtements à lui, mais également à Milie. Il prit sa veste fétiche —ou plutôt la seule qu'elle possédait— entre ses doigts, les laissant se perdre dans le tissu. Son odeur lui monta au nez, rappelant cruellement qu'elle n'était plus là. Il porta délicatement le vêtement à ses narines pour inspirer profondément, se moquant d'être à découvert, se moquant de pouvoir être observé, se moquant de tout le reste.
Au milieu des effluves de sueur séchée et de soleil plombant, il repéra celle, un peu sucrée, comme fruitée, de Milie. Dans quelques jours, cette veste perdrait de son odeur caractéristique. Elle ne sera plus qu'un bout d'étoffe anonyme. Et cette idée l'enragea autant que le reste. Même ça, il n'avait aucun contrôle dessus. Cette trace de Milie, aussi éphémère qu'elle l'était devenue.

Il reprit le sac dans une main pour y fourrer la veste, presque avec violence, et le bruit de papier froissé attira son attention. Dans l'une des poches frontales, il trouva une liasse de papiers repliés. Lorsqu'il découvrit les croquis de Milie, il sut que Noah avait fait ce bagage. Il n'y avait que lui pour avoir eu cette attention délicate à ce moment d'urgence.
Sur les feuilles abimées, le chasseur reconnut les visages de tout le monde. Talie et Carl, Maggie et Glenn, Beth, son père et sa sœur tous ensemble, Ray, Talie et Rebecca. Carol et Travis. Rick, Carl, Lori et son ventre rond, T-Dog, Reynolds, Anderson, Marshall et Jackson. Un visage inconnu d'homme mûr à la coupe militaire lui permit de savoir à quoi devait ressembler le capitaine Nathan Collins de son vivant. Même Merle avait la vedette sur une page, accompagné d'une moto, sa moto abandonnée au Fort. Et Andrea aussi avait son esquisse, ce qui était plutôt surprenant. Noah en avait quelques-unes, ce qui l'était moins, et le chien également. Lui, avait eu droit à plusieurs, parfois petites, condensées sur la même feuille. Il pouvait presque y suivre une histoire. Leur histoire, celle de leurs moments d'intimité.
Il sentit une boule se former dans sa gorge. Il scrutait chaque dessin avec attention, mais pas un seul ne lui donnait ce qu'il voulait. Il n'y en avait pas un seul d'elle. Sur aucune de ces pages ne se trouvait son visage, le seul qu'il désirait voir à tout prix.

Ce n'était pas faute de le chercher, pourtant. Ce visage trop rond aux fossettes adorables lorsqu'elle souriait. Ce teint halé par la vie de labeur sous le soleil de Géorgie et de Floride. Ces yeux légèrement en amande, marrons foncés, presque noirs. Ils pouvaient être si froids, mais pour Daryl ils n'avaient toujours été que chatoyants de malice, chaleureux, plus profond qu'une abime… aimants. Et lorsque le soleil y plongeait, il réveillait des paillettes vertes et dorées qui la rendaient plus lumineuse que jamais.
Ses lèvres, à celle, inférieure, plus charnue que sa jumelle, qu'il était tellement bon d'embrasser. Ses longs cheveux bruns aux reflets cuivrés et aux boucles lâches, bourrés de nœuds à faire jalouser les plus fervents marins si elle n'y faisait pas attention. Ses épaules larges et solides, ses bras forts. Son tronc, plutôt court, et son ventre, pas tout à fait plat, donnaient une fausse impression d'hanches rondes et pleines. Son presque mètre soixante-dix, il était dans ses jambes longues aux cuisses infinies, fuselées, musclées par son goût pour la marche et la course.

Mais il n'était pas là, ce corps imparfait qui pour lui l'était néanmoins. Milie était trop humble pour s'être adonnée à l'exercice de l'autoportrait. Il avait envie de lui crier dessus, où qu'elle soit dans l'autre monde, pour ne pas lui avoir donné cette trace infime d'elle, ce souvenir intarissable. Mais ce dessin n'existait pas, elle ne l'avait jamais fait. Il allait devoir tout faire pour ne jamais oublier les détails de son visage, sans un bout de papier à chérir.
C'était un coup de poignard supplémentaire, cette chance ratée.

« Ça va, mon gars?... Daryl? »

La voix d'Hershel lui parvint difficilement. Daryl émergea de sa transe lentement, réalisant tout d'un coup que tous les regards de la pièce étaient tournés vers lui. Dans ces paires d'yeux, il lisait la tristesse, l'abattement et la pitié. Il en eut horreur en moins de deux secondes.

« Ouais » grommela-t-il à peine.

Il replia les dessins avec soin pour les ranger dans leur pochette, même si ses gestes voulaient paraitre désintéressés. Il ne voulait pas de cette attention, pas de cette pitié. La seule chose qu'il voulait, personne ne pouvait lui donner, alors l'ignorer, le laisser tranquille, c'était tout ce qu'il espérait se voir offrir à cet instant.
En moins d'une minute, il remit tout dans le sac, prit son arbalète et sortit de la maison. Personne ne s'y opposa. L'envie de repartir dans le camp lui était passée désormais. Il voulait juste de l'air frais et se soustraire à tout le monde.

Il avait trouvé des clopes aujourd'hui. Deux minables cigarettes à demi écrasées dans leur paquet, mais elles feraient le boulot. Sans la moindre compassion ou pensée pour son frère avec qui il aurait normalement partagé sa trouvaille, Daryl s'alluma une fois assis sur la rambarde, le dos appuyé contre une poutre de bois peint en blanc délavé et écaillé avec le temps. Il expira la première bouffée avec délice, mais la seconde avait déjà un goût désagréable d'amertume.
Milie lui manquait comme pas permis. Et il se sentait stupide. Tellement stupide de ne pas avoir profité du temps limité qu'ils avaient eu ensemble. Il avait passé des semaines à l'éviter, fermé comme une huitre, au lieu de vivre ces moments qu'ils ne vivraient plus jamais. Il se souvenait encore de sa voix, de son visage, de l'effet de ses caresses, mais pour combien de temps? Est-ce qu'il allait crever dans des années avec le minable souvenir d'un nom qui aura fait partie de sa vie l'espace d'une dizaine de mois à tout casser?

Elle était entrée dans sa vie sans prévenir, déboulant dans une nuit noire exactement comme celle-ci. Il prit une nouvelle bouffée de nicotine, laissant son regard errer dans la rue à la recherche d'une apparition qui ne viendrait jamais. Elle s'était immiscée en lui, abattant chaque barrière érigée des années auparavant. Elle l'avait touché. Elle ne l'avait pas seulement vu pour l'homme qu'il était, mais l'homme qu'il pouvait devenir. Et il était devenu cet homme-là, parce que cette image de lui, qu'il n'aurait jamais imaginée autrement, lui plaisait. Elle l'avait transformé en quelque chose dont il pouvait être fier.
Elle l'avait compris, mais plus encore, elle l'avait aimé.
Et, comme une étoile filante, elle avait laissé un passage luminescent derrière elle avant de s'éteindre et de tout replonger dans les ténèbres. Fugace, mais magnifique, elle n'était plus là et il lui était impossible de savoir s'il en verrait une autre comme celle-là un jour.
Une part de lui espéra que oui. Il voulait connaitre à nouveau la sensation d'être gorgé de la lumière d'une personne comme elle. L'autre espéra que non. Il voulait que ce qu'il avait connu avec Milie soit aussi unique, aussi singulier, aussi percutant et envoutant qu'elle. Que rien ne l'égale ou ne la surpasse jamais, parce qu'elle méritait cette place de haut prestige dans son cœur.

Au fil des minutes passées dans le silence, Daryl laissa tomber le mégot de la première clope par terre après l'avoir écrasé contre la poutre. Il n'attendit pas pour allumer la deuxième. Il avait fumé la précédente au nom d'un passé maintenant révolu. Il fuma celle-ci au nom du futur.
Un futur qu'il allait devoir vivre sans Milie. Il savait déjà que ce futur serait vide. Au début, tout du moins. Il aura la sensation qu'il lui manque quelque chose. Il cherchera refuge dans une paire d'yeux qu'il ne croiserait plus jamais. Il songera à l'appui confortable d'une poitrine qui ne lui sera plus offerte, au chant d'un cœur qu'il n'entendra plus également.
Oh Milie allait être encore là, quelque part, au fond de son esprit. Parfois, elle lui dictera quoi faire, comment se conduire, comment réagir, comment réfléchir. Elle lui manquera, ici et là, et, quelques fois, il sera même content, comme Ray l'avait dit, que son combat soit terminé. Qu'elle soit épargnée de toutes ces horreurs qui les attendaient, sur cette route infinie qu'était la vie. À un moment, il ne supportera plus son absence.
Puis… un matin, le soleil se lèvera et Daryl aura fait la paix avec lui-même.
L'habitude se fera, il se souviendra avec nostalgie de cette femme à la fois si forte et si fragile. Il se réfugiera dans des réminiscences qu'il ne gardera que pour lui, son jardin secret. Il y aura d'autres gens, d'autres femmes. Peut-être que l'une d'entre elle saura l'atteindre à son tour et le changer du tout au tout. Qui sait?

À l'aube, Daryl se trouvait encore sur sa rambarde. Fatigué, courbaturé, la naissance d'un torticolis se faisait sentir, mais Rick sortant de la maison fut ce qui le força à se lever de sa position peu confortable. Il se frotta la nuque pour la dégourdir pendant que le shérif venait le rejoindre sans se presser. Ils avaient prévu de partir tôt. Le chasseur entendait le groupe s'activer à l'intérieur depuis une dizaine de minutes.
L'ancien homme de loi le dévisagea. En silence, sans jugement, sans pitié, juste de l'attention, juste de la compréhension. Juste de la fraternité et de l'amitié.

« Tu vas bien? »

Daryl y songea un instant, sérieusement. Son regard se déporta sur le sol. Sur le premier mégot, le passé, puis le second, le futur.

« Ça va mieux. »

Pas bien, mais mieux. La réponse fut satisfaisante pour le shérif qui lui administra une tape amicale à l'épaule pour l'attirer à l'intérieur de la maison.
Et la réponse était également satisfaisante pour Daryl.

À l'arrière du fourgon qui les abriterait tous pour le voyage jusqu'à l'orangeraie, le chasseur se pelotonna dans un coin et ferma les yeux, éreinté, enfin prêt à dormir.
Il ressentait encore ce désarroi, cette peine, ce trou béant dans sa poitrine. Mais il l'avait assimilé. Cette nuit, il avait amorcé la paix. Avec du temps, il apprivoiserait la perte de Milie.
Parce que les pertes ne s'arrêtaient jamais et qu'il était un survivant. Mais plus encore, il devait également vivre. Se laisser détruire par la mort de Milie, ça ne ferait pas de lui un vivant, mais un survivant. Et, même dans un univers déglingué où les morts marchaient, il fallait arriver à vivre, au-delà de l'unique survie.

Parce que c'était le rêve d'une gamine perdue au milieu de la fin du monde.
Et parce que, ce rêve, c'était tout ce qui lui restait d'elle.

THE END


Et voilà!
Comme on dit, toute bonne chose a une fin, même si ce n'est pas facile. C'est comme une partie de soi qu'on laisse derrière lorsqu'on a mis autant d'heures -que je me prendrai bien garde de compter de peur de friser la folie- dans un projet comme celui-ci.
Dans tous les cas, je tiens à remercier tout un chacun parmi vous, lecteurs, qui êtes ici depuis peut-être peu longtemps, depuis peut-être les tous débuts! Je vous salue tout particulièrement, vous qui avez tenu bon au milieu du carnage des deux dernières années de publication, votre patience est d'or! x.x
Petite dédicace spéciale à mes trois mousquetaires qui ont vraiment été là d'un bout à l'autre de cette aventure : Eponyme, Saphira, BoneyKing, ce fut un merveilleux bonus de pouvoir échanger avec vous sur une base régulière (et moins régulière depuis quelques temps, mais l'intention demeure!), qu'il s'agisse de TWD, de l'écriture en général et de toutes autres choses.
Et un dernier salut tout particulier à Eponyme, mitrailleuse de grammaire, qui aura su pendant une trentaine de chapitres d'éviter les fautes inutiles qui fuyaient mes yeux comme des coquerelles le soleil! Between ne serait pas le même sans toi!

Sur ce, adios amigos.
Que la Force vous accompagne et gare aux ananas sauvages!