Et voila, après près de trois ans l'aventure s'achève ici. Un grand merci à tout le monde.

July : j'espère que l'épilogue sera à ton goût.


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Epilogue :

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Il resserre instinctivement le col de son manteau pour empêcher le vent de s'y engouffrer.

La cime des hauts cyprès se balancent de gauche à droite sous l'assaut des bourrasques et le ciel au-dessus offre un étonnant dégradé de gris allant du pâle au noir féroce, seulement troublé par de l'or ruisselant lorsqu'un éclair vient le fendre en deux, bientôt suivi d'un roulement de tambour.

Il se tient là, immobile, le regard posé à ses pieds, à se demander ce qui est attendu de lui, quelle convenance suivre et surtout ce qu'il doit dire. Ce n'est pas comme s'ils pouvaient l'entendre n'est-ce pas ? Ils ne sont pas vraiment là de toute façon. Juste deux stèles et du marbre gravé, des inscriptions finement ciselées.

Ce qu'ils avaient été ne reposent pas en ces lieux, il n'y a là que deux réceptacles vides.

Alors pourquoi ? Pourquoi est-ce aussi difficile de formuler les mots qui ne trouveront nulle oreille pour les entendre ? Pourquoi faire comme ces milliers, millions de personnes qui chaque jour parlent avec leurs disparus, vont se tenir comme lui le regard au sol ou vers le ciel et discutent, se confient, protestent et tempêtent même.

Il ne sait pas.

C'est juste ainsi. Un conditionnement pavlovien. Et avoir été élevé par les prêtres n'arrange en rien.

Alors il commence. Au bout d'interminable minutes. Doucement, presque un murmure. Les mots ont du mal à se former, à s'articuler. Ils butent, se rétractent, s'expulsent sous la contrainte.

Il s'excuse pour n'être jamais venu en ce lieu, pour ne pas avoir parlé d'eux jusqu'à récemment, pour avoir gardé leur identité, leur vie secrète comme s'il en avait honte. Ce qui n'est bien sûr pas le cas, c'est même l'inverse, c'est de lui dont ils devraient avoir honte. Il n'a aucune excuse en dehors du fait qu'il n'allait alors pas très bien, ses idées n'étaient pas des plus clairs et il lui aura fallu dix ans pour faire le point.

Même à présent leur dit-il il n'est pas très à l'aise. Ça se voit, ça s'entend surtout. Il ne s'y fait que peu à peu à la lumière, les ténèbres sont longues à se dissiper. Un jour après l'autre, un pas franchi et encore dix à venir, et dix encore. Le chemin est long.

Et aujourd'hui, après Cobb, ou plutôt le nez cassé de Cobb, après Ariadne et son étonnante combinaison gifle/étreinte/remontrance tout en un, après Yusuf et son regard d'abord courroucé puis bien plus amical, après tout ça et de multiples autres parcours encore, son chemin l'avait finalement conduit ici.

Et il n'y serait sans doute jamais arrivé si ce n'est grâce à l'homme qui se tenait dans son dos, une main posée sur son épaule.

Il ne le regrette pas.

Sans se retourner il saisit les doigts de l'homme et les comprime, pour y puiser du courage, pour le remercier. Eames. Son roc. Son sauveur. Son ami. Son amant. Sa vie.

- Elysa, Allan, j'ai quelqu'un à vous présenter. Quelqu'un qui m'est devenu très cher, une personne que j'aime vraiment beaucoup et qui me fais revivre, me redonne foi …

Et les mots viennent enfin, il parle, parle de cette nouvelle vie qui débute, du futur qu'il entrevoit enfin sans ténèbres, juste quelques ombres disperses, de la solitude qui a enfin déserté son cœur.

Il pleut à présent mais il n'a pas froid. C'est même le contraire, une douce chaleur envahit son corps. Car au fond de lui il sait qu'il l'a, cette absolution, et leur bénédiction.

Après de longues minutes il se penche et dépose deux roses rouges sur la pierre détrempée et sourit, mais pas ce sourire triste qu'il arborait jusqu'à peu.

Non, il s'agit de ce sourire qu'il adresse chaque matin à Eames lorsqu'il se réveille et que l'anglais est la première chose sur lequel se pose son regard, ce sourire qui signifie que tout ira bien, qu'il y croit enfin.

Il embrasse l'extrémité de ses doigts et les déposent sur la pierre froide, ses lèvres s'entrouvrent pour laisser passer une courte prière et il se redresse enfin, se retourne et se retrouve plaqué contre une poitrine musclé.

Et une fois encore il sourit.

A Eames.

A lui-même.

A la vie.

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Fin. La vraie. Celle qui veut tout dire.