Disclaimer : Rien ne m'appartient, ni les personnages (à Mme JK Rowling), ni l'histoire originale. Je ne suis que l'humble traductrice.

Titre : Off the Map (« Rayé de la carte »)

Auteur : Sara Holmes

http: / www . fanfiction . net / u / 2200396 /Sara_Holmes (sans les espaces)

Béta-Lecture : Un grand merci aux merveilleuses Masamiya et Emilianor, pour leur patience, leur humour, leurs encouragements et surtout la qualité de leur travail.

Note : Chers lecteurs, cette fiction est la traduction d'un OS (qui sera publié en deux parties) de la très talentueuse Sara Holmes, un auteur anglais de fictions HP/DM. D'autres traductions suivront, dans le but de faire partager au lectorat français les très belles histoires de Sara. En espérant que cet OS vous plaira...

Bonne lecture à vous toutes/tous ! :)

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Mon café est froid. Et je m'en fous. C'est vraiment le début de la fin.

Il y a un an, si on avait servi du café froid à Draco Malfoy, il en aurait exigé un autre, aurait tempêté et menacé, et fait trembler les patrons du bar derrière leur comptoir car ils auraient su qu'il ne valait mieux ne pas se tromper dans sa commande.

Mais je suis là, affalé (par Merlin...) sur une chaise, à l'extérieur d'un petit café du Chemin de Traverse, avec une foutue tasse de café froid, pour laquelle je n'ai même pas le courage d'aller me plaindre. Je grimace, alors que la voix de Blaise s'insinue dans ma tête. Draco, tu es un Malfoy. Par pitié, agis en tant que tel.

'Blaise peut bien aller se faire voir', je pense avec humeur. Je m'enfonce un petit plus dans mon siège et j'essaie de ne pas penser au fait que ma robe est en train de se froisser.

Quelque chose ne va pas dans ma vie, et ce n'est pas uniquement cette apathie à propos d'une tasse de café qui me met la puce à l'oreille. C'est mon style de vie tout entier qui me fait me sentir mal à l'aise et désorienté. Bien sûr, quand j'étais encore à l'école, je prenais part aux jeux de pouvoir des Serpentard, et j'aimais ça, mais désormais, la guerre est bel et bien finie, et j'ai eu le temps de m'arrêter et de penser un peu...Je commence à me dire que je ne suis pas réellement fait pour tout ça.

Et trop cogiter est considéré comme un blasphème aux yeux de mon cercle social.

Je pousse un profond soupir, et levant les yeux, je me fige. Un visage familier s'avance vers moi au beau milieu du Chemin de Traverse. Un visage très familier, aux cheveux bruns ébouriffés, aux yeux verts perçants quelqu'un qui a toujours réussi à semer le trouble dans mes pensées. Aujourd'hui, n'est pas une exception.

Potter m'aperçoit et me fait un signe de tête, agitant faiblement sa main droite en un simulacre de salut, sans s'arrêter de marcher. Je hoche la tête en retour, mon cœur battant dans ma poitrine.

Nous ne sommes plus ennemis. Plus depuis environ un an. Il m'a rendu ma baguette, je me suis excusé (ce souvenir me fait toujours rougir) et nous nous sommes serré la main. Mais c'est tout. Sa vie et la mienne ne se ressemblent pas, et c'est comme ça.

Il arrive à mon niveau, il me dépasse, et pour une raison incompréhensible, je me retourne sur ma chaise :

« Potter ? »

Je me fige à nouveau. Je viens vraiment de dire ça ? Il s'arrête et se retourne vers moi; je grimace. Oui, apparemment, je l'ai fait.

« Oui? » me répond-il, avançant d'un pas vers moi, une expression neutre sur le visage.

« Comment ca va ? »

Je me maudis d'être un tel abruti, mais il sourit presque, et –oh putain non!- s'assoit sur la chaise en face de moi.

« Pourquoi tu me demandes ça? » me questionne-t-il, sans aucune trace de moquerie dans la voix.

« Je n'en ai aucune idée », je réponds d'un ton faible, et il rigole doucement.

Il porte un jean fatigué et un tee-shirt sobre, et il a l'air tellement bien dans sa peau que j'ai envie de l'étrangler.

« Je ne pensais pas te trouver ici », dit-il, désignant le café d'un geste de la main, les yeux toujours fixés sur moi.

« Et c'est exactement pour ça que je suis là », je murmure, plus pour moi que pour lui. « Je suis désolé Potter, je ne sais vraiment pas pourquoi je t'ai interpellé. Je plaide la folie passagère. Tu es certainement occupé. »

« Non, pas vraiment », réplique-t-il, et il ne bouge pas.

Le silence tombe entre nous, mais on ne dirait pas que cela le dérange. Il reste juste assis là, et me regarde avec curiosité.

Après un moment, il remue, et sort sa baguette de sa poche. Il tapote le bord de ma tasse de café, - et soudainement, la voilà brûlante, des volutes de vapeur s'échappant de la surface liquide. Il me lance un léger sourire.

« Ce sera meilleur si ce n'est pas froid », dit-il en se levant. « A bientôt, Malfoy ».

J'acquiesce bêtement, et il s'en va, sans un regard en arrière.

Je regarde sa silhouette s'éloigner, et puis mon café.

Un léger sourire me passe sur les lèvres.

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Deux semaines plus tard, je reçois une chouette de Potter. Je l'ignore et la renvoie sans prendre la lettre.

Le lendemain, la chouette est de retour. Je lance mon propre hibou – Apollo- à sa poursuite. Et avec succès: Apollo est très certainement le hibou le plus teigneux d'Angleterre, et bien qu'il soit jeune, il est courageux et ne recule pas devant le danger.

Tout comme Potter et sa foutue chouette, apparemment. Deux jours plus tard, Apollo s'infiltre de nouveau par la fenêtre, accompagné de la stupide chouette de Potter. Il vient se percher sur mon épaule en poussant un hululement, comme si de rien n'était.

« Traitre », je lui lance, alors qu'il me mordille l'oreille.

La chouette de Potter se glisse sur le dossier d'une chaise, d'un air – c'est à jurer- penaud, et je me sens tiraillé entre le respect et l'exaspération. Après tout, elle a réussi à se mettre Apollo dans la poche. Brave, tenace, têtue et imprudente, cette fichue chouette pourrait tout aussi bien porter des lunettes et avoir une putain de cicatrice sur le front...

Je prends la lettre, et la chouette hulule joyeusement.

« Ça ne veut rien dire », je dis méchamment. « Je dois prendre la lettre maintenant que tu es rentrée ici, mais ca ne veut pas dire que je vais la lire...Aie ! »

Apollo me mord l'oreille – fort- et je sursaute sous la douleur, effaré.

Il pousse un cri strident et s'envole, frappant ma tête de ses ailes au passage, et rejoint la chouette de Potter sur sa chaise. Ils se tiennent côte à côte, blottis l'un contre l'autre, me fixant d'un regard impassible.

« Espèce de sale traitre ! » je crache, une main sur mon oreille douloureuse, en jetant un regard à Apollo. Il hulule d'un air menaçant et je grimace, en ayant du mal à croire que mon propre stupide hibou est en train d'interférer dans ma vie personnelle.

Je lâche mon oreille et je remarque, sans surprise, du sang sur mes doigts. Fichu piaf !

Ne voulant pas être mordu de nouveau, je m'assois et ouvre la lettre, brisant le sceau de cire avec mon pouce. Je fixe la lettre pendant au moins vingt minutes avant que les mots inscrits sur le parchemin ne m'atteignent.

Malfoy,

Je ne sais pas vraiment pourquoi je t'écris, mais en renvoyant ma première lettre, tu m'as décidé à t'en adresser une autre. Je pense que j'ai attrapé ce dont tu parlais l'autre jour. Tu sais, « la folie passagère ».

J'espère juste que tu vasva bien. Tu ne m'as pas semblé dans ton assiette quand on s'est vu, et je ne sais pas pourquoi, mais je ne pouvais pas juste laisser tomber.

J'espère que tout va bien,

Potter.

C'est tellement ridicule que j'en ris. Ridicule, mais c'est presque exactement le genre de comportement que j'attends de lui. Il fait les choses sans même savoir pourquoi. Juste parce qu'il en a envie. Il me faut un moment pour me rendre compte que le petit pincement que je ressens dans ma poitrine est de la jalousie.

Apollo vole de nouveau vers moi et se perche sur mon autre épaule, fouillant mes cheveux de son bec.

« Est-ce que tu vas me mordre si je ne réponds pas ? »

Il agite sa tête de bas en haut, et mordille mon oreille épargnée. Je prends cela comme un avertissement.

« Puisque tu insistes », je soupire, en me levant pour aller chercher une plume et un bout de parchemin.

Potter,

Tu ne peux pas me laisser tranquille, n'est ce pas? Je suppose que bien que maintenant nous fassions semblant d'être des adultes, rien n'a vraiment changé.

Je vais bien. J'espère que toi aussi.

Malfoy.

La réponse revient le même jour, expéditive et impatiente..Son écriture est affreuse.

Malfoy,

Faire semblant est absolument le mot clé de cette phrase. Je suis content que tu ailles bien. Je vais bien, moi aussi.

Harry.

Potter,

Je n'ose même pas te demander ce que ca peut bien te faire. Et j'aurai pensé que le sauveur du monde sorcier allait un peu mieux que « bien ».

Malfoy.

Je déteste l'avouer, mais mon intérêt est maintenant éveillé. Quand j'étais plus jeune, ma mère me grondait souvent à propos de ma trop grande curiosité elle disait que ca m'attirerait des ennuis. Elle avait raison. Quand j'avais cinq ans, j'ai entendu un jour des voix, parvenant du bureau de Père, et je suis allé fouiner autour. J'ai été frappé par deux sorts en même temps, celui de Père et celui de Rogue et suis resté inconscient pendant deux jours.

Mère était folle de rage, aussi bien après lui que moi, et je me souviens parfaitement que ce fut la seule fois où j'ai ressenti un réel lien entre mon père et moi. Juste parce que nous étions tous les deux morts de trouille devant la colère froide de ma mère.

Souvenirs mis à part, j'ai envie de savoir pourquoi Potter s'intéresse soudainement à moi..Et pourquoi sa vie n'a pas l'air d'être aussi parfaite que je l'imaginais..

Malfoy,

Je me pose la même question très régulièrement.

Et je me dis la même chose que toi.

Harry

Potter,

Peut-être que nous avons plus de choses en commun que nous le pensions.

Draco

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Une autre semaine passe avant que je tombe de nouveau sur Potter, cette fois-ci devant la boutique Quidditch de Qualité. Je suis dehors, face à la vitrine, et j'admire leur dernier modèle – Le Coup de Foudre – qui est magnifique et absolument hors de prix.

« Il est beau, n'est ce pas ? » murmure une voix, juste derrière mon épaule.

Je sais à qui elle appartient et je ne me retourne pas, bien qu'un frisson parcoure mon échine. J'ai beaucoup pensé à lui depuis notre échange de lettres, et je suis perturbé de m'apercevoir que mes pensées le concernant ne sont ni agressives,,ni amères. Et quelque part cela me soulage. J'ai suffisamment grandi pour me rendre compte qu'être ennemi avec quelqu'un coûte bien plus d'énergie et d'efforts que cela ne rapporte.

Et il m'a sauvé la vie. Je ne peux plus le haïr.

« Hm. » j'acquiesce, mes yeux parcourant les lettres argentées gravées sur le manche rutilant. J'aime ce magasin, je l'ai toujours aimé. L'odeur du bois poli et du cuir de dragon, l'excitation de découvrir les nouveaux modèles... Je pourrais délibérément me perdre en contemplant ce qui ce vend ici.

« Intéressé ? »me demande Potter. « Ils n'en ont que dix en stock jusqu'à l'année prochaine ».»

« Peut-être », je réponds, vaguement, les yeux toujours fixés sur le balai. « J'imagine que si je dépensais tout mon argent pour en balais, les Greengrass n'essaieraient plus de me faire épouser leur fille »

« Ils veulent te faire quoi ? »

Je ferme brièvement les yeux, réalisant ce que je viens juste de dire. Merde. « Laisse tomber », je lâche, en me retournant pour le regarder. Il est débraillé et se mordille la lèvre, un léger pli barrant son front.

« Tu veux dire...comme un mariage arrangé ? » il poursuit, et je déteste la lueur de pitié que j'entrevois dans ses yeux.

« Je n'ai pas envie d'en parler » je lui lance. Au prix d'un effort considérable, je parviens à ne pas ajouter « et surtout pas à toi... »,à la fin de ma phrase. Les vielles habitudes ont la vie dure.

« Ok, ok... » Réplique-t-il, en haussant les épaules. Après une légère pause, il reprend : « Ca te dirait de discuter de Quidditch autour d'un verre à la place ? »

Sa question me surprend, et je sais que cela se voit sur mon visage. « Toi et moi? Boire un coup? Discuter?»,je demande, sceptique. Il me lance un pauvre sourire, en se grattant la tête.

« Oui, pourquoi pas. Je me suis dit que cela ne serait pas une mauvaise idée, tu sais, l'alcool aidant, et puis après tout, les choses ne peuvent pas vraiment être pires entre nous, non ? »

Je rigole. Et ce son me surprend. Je n'ai pas vraiment eu l'occasion de rire ces derniers temps. A part quand Pansy a cassé son talon au beau milieu du salon des Nott, lors de notre dernier dîner mondain. Ensuite, elle s'est vengée en me jetant un sort. La garce.

« Je dirais qu'on s'en sort beaucoup mieux qu'à l'école », je réplique, d'une voix trainante, me tournant de nouveau pour observer le balai. «Deux conversations entières sans une seule insulte. Il y a clairement quelque chose qui cloche. »

« J'avoue que c'est une nette amélioration », approuve-t-il sérieusement, avant de me donner un coup d'épaule. « Allez viens. Si ça se passe mal, tu pourras courir dire à tes amis que je suis toujours un abruti complet. »

Saleté de Potter. Je souris de nouveau, et je n'arrive même pas à me retenir. « Ok », j'accepte, et cet idiot me renvoie un grand sourire. « Un verre ».

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« Tu n'aurais pas pu être mon ami! Je faisais cavalier seul », je déclare, et Potter rigole de plus belle.

Il en est peut-être à sa cinquième ou sixième pinte, j'ai moi-même descendu pas mal de whiskys, et je me sens délicieusement chaud à l'intérieur. Nous sommes passés du Quidditch aux vielles histoires d'école – c'est probablement stupide.

« Bon, d'accord, je suis désolé », finit-il par dire, le regard malicieux. « Je suis désolé de t'avoir vexé quand nous avions onze ans »

« Tu fais bien de l'être ... » Je renifle d'un air dédaigneux, en attrapant mon verre. « Ca m'a psychologiquement perturbé pour le reste de mes années d'école. »

Il rit de nouveau et j'ai du mal à ne pas rire, moi aussi. Ce n'est vraiment pas la même chose de boire avec Potter, que de boire avec Blaise ou Theo, ou encore lors de n'importe laquelle de ces soirées mondaines.

C'est inexplicable et cela va à l'encontre de toutes mes prédictions, de tous les idées reçues que j'ai pu avoir jusque là, mais je me rends compte qu'avec Potter, quelque part, je peux me laisser aller. Je n'ai pas à garder dans un coin de mon esprit que je dois faire attention à ne pas boire trop, ou à me souvenir de mes bonnes manières, et des noms des gens – ou encore à faire attention à ne pas me tromper de couverts.

Nous sommes bien entendu prudents dans nos discussions – et il serait stupide de ne pas l'être. Aucune mention de Dumbledore, de la tour d'astronomie, ou du Seigneur des Ténèbres. Nous pouvons bien nous moquer des choses que nous nous sommes dites ou faites, mais nous ne pouvons pas parler du reste. Pas encore.

Malgré cela, je suis plus détendu à ce moment là que je ne l'ai pas été depuis des semaines. J'ai déjà ôté ma robe de sorcier- un véritable soulagement – mais ma chemise noire et ma cravate jurent toujours à côté du T-shirt et du jean de Potter.

« Je suis désolé, tu sais », son ton reste neutre, mais soudainement, il me semble plus sérieux. Il remonte ses lunettes le long de son nez.

« Je me suis toujours demandé comment se seraient passé les choses si je n'avais pas été aussi con avec toi. »

Exaspéré, je vide mon verre d'un trait. « Je n'arrive pas à croire que c'est toi qui t'excuse. J'ai été bien pire avec toi que tu ne l'as été avec moi. »

« Mais je... », il déglutit. « Toi, tu n'as pas manqué de me tuer. »

« Ne penses pas que je n'ai pas essayé », je réplique, mais il ne rigole pas.

« Est-ce que ça t'as laissé des cicatrices ? »

En soupirant, je passe une main dans mes cheveux, les décoiffant, et attrape ma cravate.

Ses yeux s'écarquillent alors que je la détache et ouvre les trois premiers boutons de ma chemise. Je la tire un peu, de manière à lui montrer le début de la mince cicatrice blanche qui s'étale le long de mon torse. Elle est à peine visible, si ce n'est en pleine lumière.

Il lève une main tremblante de la table, et je me fige. Est-ce qu'il a l'intention de la toucher ? De me toucher. Ses yeux sont grands ouverts et fixent ma peau –

Sa main dévie et attrape de nouveau la pinte. J'expire lentement et reboutonne ma chemise. J'ai un léger vertige – je n'avais certainement pas anticipé une telle réaction à la vue de la cicatrice.

Il commence :

« Je... »

« Non... », je le coupe, calmement, mais fermement. « Je suis parfaitement convaincu que je le méritais, et je pense que ce n'est que justice quand on voit quel connard j'ai pu être avec toi. Je t'ai pété le nez,quand même. Ne commences pas à t'excuser sinon je vais finir par avoir un cas de conscience : je vais devoir trouver un autre moyen de me racheter auprès de toi, et je n'ai vraiment pas envie de m'emmerder avec ça. »

Un léger sourire éclaire son visage. Étrangement, cela me fait plaisir.

« Pardon », marmonne-t-il. « L'alcool », ajoute-t-il, en guise d'explication.

Je souris, hoche la tête.

« Il serait temps de rentrer peut-être ? Je suis sûr que quelqu'un t'attend et je ne voudrais surtout pas qu'on m'accuse de te retenir. Ma réputation est déjà suffisamment mauvaise. »

Il me lance un regard de travers, mais ne discute pas. Il vide sa pinte d'un seul trait et se lève, en lâchant un rot bruyant. Je noue soigneusement ma cravate et remets ma robe avant de quitter le pub.

Harry me ramène chez moi. Stupide Gryffondor. J'ai mon propre appartement à Londres – j'ai beau aimer ma mère, vivre avec elle est une véritable é seraisprêt à jurer qu'elle a pour objectif de me rendre dingue avant mes trente ans.

Il jette un œil à l'entrée de ma maison, et demande, curieux :

« Pas de manoir? »

« Vu ce que ca m'a couté, ca pourrait tout aussi bien en être un », je soupire.

« Je n'habite pas très loin d'ici », lâche-t-il.

Je ne sais pas d'où ça sort, ça. Je ne sais pas quoi répondre, donc je me tais. Il me lance un regard en coin, et je ressens le besoin urgent de lui expliquer que je ne peux pas épouser Astoria Greengrass car je préfère – et de loin- les pénis à tout ce que pourra jamais m'offrir une femme. Mais je reste silencieux.

Pour je ne sais quelle stupide raison, j'aime cette trêve étrange qui s'installe entre nous. Et je l'aime bien trop pour lâcher ce morceau d'information. Les réactions à l'annonce de mon homosexualité passent généralement par le choc, le dégout, la colère, la compréhension et parfois même par des regards impassibles qui disent clairement « Comme si je n'étais pas déjà au courant »

Apprendre à connaître Harry, est ...une goulée d'air frais. Etre loin de mon monde – juste pour un moment – est incroyable. C'est exactement ce dont j'ai besoin en ce moment – une pause. Et le destin est suffisamment farceur pour faire en sorte que ce soit Monsieur Harry Potter qui m'aide à faire cette pause.

Et finalement, essayer de devenir ami avec lui, c'est comme laisser une partie de mon passé derrière les pages les plus sombres de ma vie,,et avancer. Bien sûr, je le ferai toujours chier, mais la haine d'avant n'est plus là.

Il se racle la gorge, en me lançant un regard nerveux :

« Bon, ben, c'était... »

« Ouais », j'acquiesce, dans un faible sourire. Il me sourit à son tour, en me tendant la main.

Je l'attrape, et nous nous serrons la main pour la deuxième fois de notre vie. J'ai l'impression que ce ne sera pas la dernière.

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« Franchement, aurais dû te rendre compte que des photographes n'étaient pas loin. »

Je grimace légèrement, alors que ma mère me lance un regard de reproche. Un exemplaire de la Gazette du sorcier, vieux d'une semaine, est ouvert sur la table entre nous : une photographie de Harry et moi, assis côte à côte au Chaudron Baveur s'étale sur toute la page trois. 'Potter et Malfoy mettent de côté leur querelle' écrit en gros.L'article est étrangement gentil – pour une fois. L'auteur de l'article surfe visiblement toujours sur la vague d'amour post-guerre, et se frotte les mains de voir deux anciens ennemis 's'efforcer de combler le fossé entre les différentes sphères sociales de notre monde '.

« C'était juste un verre », je dis, et ma mère fronce les sourcils.

« Mais pourquoi ? »

« Je ne sais pas, ok ? »,je rétorque brusquement. « Je suis tombé sur lui devant « Quidditch de Qualité »,et il m'a proposé d'aller boire un verre. J'en avais marre et je n'avais rien de mieux à faire. »

« Marre ? »

Ma mère me connait trop bien.

« Oui, je continue », amer. « J'en ai marre de ne pas pouvoir me détendre, marre de toutes ces règles, d'avoir à faire attention –tout le temps. Passer du temps avec lui était tellement agréable, tu n'imagines même pas. Pouvoir juste parler et boire un verre, et ne pas m'inquiéter d'avoir choisi le mauvais vin, au mauvais moment, ou d'avoir agacé le second archiduc de Worcester ou n'importe quelle autre connerie. »

Elle lâche un petit rire, qu'elle tente de dissimuler dans sa tasse de thé. Puis, se redressant, elle me dévisage, tâchant d'être sérieuse.

« Draco, tu as un devoir envers le nom des Malfoy. Tu sais que les Greengrass pensent énormément de bien de toi. Et si tur efuses leur proposition, tu ne pourras probablement pas garder ton poste dans leur compagnie. »

« Je sais », je rétorque, mécontent. C'est juste que...je ne sais pas ce que je veux.

« Et bien moi, je veux que tu sois heureux. »

Son commentaire me prend par surprise, et je lève les yeux sur elle. Elle me sourit, presque tristement.

« Je le pense vraiment. Sois heureux », soupire-t-elle, en reportant son attention sur le journal. Sur l'image, Potter et moi rions tous les deux, inconscients d'être observés.

« Et si boire des verres au Chaudron Baveur avec Harry Potter te rend heureux, alors envoies tout le monde au diable et fais-le. »

C'est dans ce genre de moments que je réalise à quel point j'aime ma mère.

« Merci », je réponds, posément.

Elle agite une main dans le vague, comme pour balayer ma remarque.

« Ce n'est rien. De toute façon, tu n'as jamais vraiment été fait pour toute cette vie là, n'est-ce pas ? »

Je ris et elle me sourit d'un air malicieux.

« Non. Je ne pense franchement pas. »

La mystérieuse bénédiction de ma mère me remplit d'une énergie dont je ne me souvenais plus. Je ne sais toujours pas ce que je suis en train de faire, mais c'est terriblement rassurant de savoir que quel que soit mon choix, elle sera heureuse pour moi.

La folie s'empare de moi, et j'envoie un hibou à Potter. Juste une note rapide de remerciement pour les verres – une semaine en retard, mais c'est mieux que rien, et un merci également pour le temps qu'il m'a accordé. J'admets que je me suis amusé, que c'était agréable de pouvoir se détendre et de sortir de ce monde élitiste, pour un moment. Apollo me lance un regard suspicieux alors que j'attache le message à sa patte, et je ne peux pas lui en vouloir. Moi aussi, je pense que je suis devenu fou.

J'ai gardé la coupure de la gazette du sorcier. J'y jette un œil agacé, ayant du mal à croire que je ne me suis pas rendu compte que quelqu'un me prenait en photo. Quelque part, ce sentiment est libérateur.

Mes amis m'en veulent. Pansy me traite d'idiot, de ne pas avoir vérifié qu'il n'y avait pas de paparazzis, mais dit également que Potter et moi sommes vraiment beaux gosses – ce sont ses mots, pas les miens- ensemble. Cette fille est un fardeau...

Blaise me traite de bien pire qu'un idiot. Il me fait remarquer sèchement que je devrais passer du temps avec la fille que je suis censé épouser, et pas avec un autre homme, et certainement pas avec ce putain d'Harry Potter.

Il a toujours eu du mal avec le fait que je passe du temps avec d'autres hommes. Il prétend toujours qu'il s'en fout, mais je suis sûr du contraire, quand je vois la difficulté qu'il a à en parler, et le stupide vocabulaire qu'il utilise : « Tes connaissances, tes préférences, ta petite différence ». Quand je souligne le fait que je ne vais pas me mettre à baiser Potter dans les toilettes du Chaudron Baveur, devant le nez de tous les photographes de la Gazette du sorcier, il me lance un regard assassin, mais heureusement, change de tactique. Il me rappelle que Potter est tellement éloigné de notre cercle social, qu'il est pratiquement devenu l'ennemi, et ajoute d'un ton presque menaçant que cet indicent est à un cheveu de devenir un véritable scandale.

Il n'a pas tort, je suppose. L'enfoiré...

Théo, le calme petit Théo, m'a carrément crié dessus. Il en veut toujours à Potter et à l'Ordre du Phoenix pour ce qui est arrivé à son père. Je ne fais pas remarquer que son père et le mien ont fini où ils sont – Azkaban et six pieds sous terre –à cause de leurs propres stupides erreurs.

Bien évidemment, leurs reproches me touchent – après tout, ce sont toujours mes amis. Mais je me rends compte que cela ne me touche pas suffisamment pour que j'en vienne à regretter mes actions. Cette chose avec Potter, quelle qu'elle soit, est ma propre petite rébellion contre mon monde, et m'aide à survivre à une soirée mondaine, chez Blaise, quelques jours plus tard. Je porte, enfoui quelque part dans ma poitrine, comme un petit talisman, la certitude que je vais bientôt reparler à Potter, et cela me donne le courage d'acquiescer aux discours politiques de Blaise, et à sourire à Madame Greengrass lorsqu'elle me fait remarquer peu subtilement à quel point Astoria est belle.

C'est quelque chose que j'ai, et qu'ils ne peuvent pas me prendre. Ils ne peuvent pas le contrôler, et c'est merveilleux de faire quelque chose qui est considéré comme socialement inacceptable, quelque chose qui les ferait tous s'étouffer et lâcher leurs verres de vin si seulement ils savaient.

Mon petit secret – combiné aux chuchotements de Pansy concernant la prise de poids de Daphné Greengrass – me permet d'aller au bout de la soirée sans trop de peine. Quand je rentre à la maison, je n'ai pas cette envie – d'habitude toujours là – de tout saccager autour de moi, de hurler et de créer du désordre dans ce monde bien trop rangé. Mes bibelots et mes livres me sont reconnaissants, j'en suis sûr.

Apollo m'attends avec une réponse, à mon retour. J'ouvre le petit rouleau de parchemin avidement, et je me gifle mentalement. Par Merlin, j'agis comme un adolescent.

Malfoy,

Mais avec plaisir. Je dois t'avouer que je suis aussi étonné que toi, car je me suis également beaucoup amusé. Je le pense vraiment. Tu n'es pas si atroce que ça, tu sais. J'aime bien ton sens de l'humour quand il ne s'agit pas de remarques sournoises à mon égard.

Je vais faire du shopping à Londres jeudi, et j'aimerais savoir si ça te dirait de m'accompagner ? Si tu veux, considère ça comme une autre petite pause.

Harry

J'ai une réception prévue avec Blaise jeudi prochain, mais cela ne m'empêche pas d'envoyer immédiatement un "oui" à Potter. Je suis devenu fou

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Toujours fou, je me retrouve devant chez lui, à neuf heures tapantes, le jeudi matin, mais je reste pétrifié sur le pas de la porte, bien trop nerveux pour oser frapper. Bien qu'il soit tôt, le soleil est déjà haut et chaud, et je ne me sens pas très bien. Je pense à m'enfuir, mais avant que je puise vraiment y réfléchir, la porte s'ouvre en grand, et Potter me trouve planté devant chez lui.

Merde. Maintenant je me sens vraiment stupide.

« Bonjour », me dit-il. Il marque une pause, et m'observe de bas en haut.

« Tu ne sors pas habillé comme ça. »

« Quoi? » Je fronce les sourcils. Il porte un tee-shirt et un bermuda, et je dois avouer que bien qu'il ait l'air ridicule, sa tenue est bien plus adaptée au temps que ma chemise, cravate et pantalon à pinces.

« Il fait trop chaud », ajoute-t-il, en faisant un pas de côté pour me laisser entrer chez lui.

Je suis chez Harry Potter. J'ai une folle envie de rire.

Haussant les sourcils, je lui lance un regard :

« Je ne porte pas de vêtements confortables, Potter. Je veux dire, je n'ai pas vraiment envie de m'habiller comme toi. »

Sans se départir de son sourire, il ferme la porte derrière nous. Tout à coup, je me méfie ce sourire a l'air bien trop calculateur pour s'y fier. J'ai entendu une rumeur comme quoi le Choixpeau aurait voulu envoyer Harry Potter chez les Serpentard, et je n'y ai pas cru - jusqu'à maintenant.

« Oh, vraiment ? » Il me sourit, une étincelle de défi dans le regard.

Bordel, cela n'annonce rien de bon.

Une demi-heure plus tard, plusieurs tentatives de corruption, deux engueulades et un sort après, je porte les fringues d'Harry Potter. Hilarant, je sais. Un bermuda gris, un polo noir et des baskets. A cet instant précis, mon père doit être en train de ramper hors de sa tombe pour venir m'étrangler.

Harry a l'air ravi de ma tenue. Il réussit à me trainer jusqu'à la salle de bain et m'observe de la tête aux pieds.

« Cela te va bien, » dit-il, en me tendant une paire de lunettes de soleil.

J'ai l'air d'un con.

« J'ai l'air d'un con. »

Une expression de franche surprise passe sur son visage à ma remarque, et je me retiens de le traiter d'abruti.

« Vraiment ? Tu as l'air à l'aise pourtant. »

« Enfoiré», je souffle, agacé, en mettant les lunettes de soleil.

« Il faut en être un, pour en reconnaitre un autre », réplique-il sèchement, et me pousse en direction des escaliers. « Avance maintenant, crétin. Nous n'allons croiser personne que nous connaissons. »

Parfois, je le déteste toujours.

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Deux heures plus tard, Potter est pardonné. Nous nous promenons paresseusement le long d'une rue, quelques achats à la main, et je suis en train de siroter un liquide délicieusement pétillant dans un gobelet en carton. Je mâchouille la paille alors que nous marchons, et à chaque fois que je m'arrête, je me rappelle que mâchouiller une paille avec Potter, ce n'est pas grave, au moins pour aujourd'hui.

Je passe de longs moments à me demander comment nous avons bien pu faire pour en arriver là, mais à cet instant précis, Harry me sourit, me donne un léger coup d'épaule et me dit d'arrêter de trop réfléchir. Je suis sur le point de lui crier dessus quand je me rends compte qu'il a raison. Trainer avec lui est justement bien, car je n'ai pas à penser à tout. Je peux juste me laisser aller.

« Donc...Astoria Greengrass. »

Il change brusquement de sujet, sans aucun avertissement. Il n'y a rien de mieux que la belle subtilité des Gryffondor.

« Oui... »,je réponds. « Je travaille pour son père. Il veut que je l'épouse. »

« Et tu as envie de l'épouser ? »,me demande-t-il.

« Je n'ai pas vraiment envie, non. Du coup, en dernier recours, j'ai décidé d'éviter tous mes amis, et de trainer avec mon ennemi d'enfance », je réplique d'une voix trainante, le faisant pouffer de rire.

« Les choses vont mal alors, hein ? »

« Pourquoi tu fais ça, Potter ? »

Je m'arrête devant la vitrine d'un magasin, la regardant sans la voir. Les moldus défilent autour de nous, sans nous accorder un seul regard.

« Je ne sais pas, répond-il, en s'arrêtant à côté de moi, feignant lui aussi d'être absorbé par le contenu de la vitrine. Mais je sais que j'aime trainer avec toi, donc je ne vais pas trop me prendre la tête là-dessus. »

« On se déteste. »

« Non, on ne se déteste pas », réplique-t-il, en se tournant vers mois. Il tend la main et me pique ma boisson, avant de tirer une gorgée sur ma paille, bien que j'aie tellement mâchouillé le plastique, que le liquide à du mal à passer au travers.

« C'est dégoutant, » je lui fais remarquer, et il hausse les épaules.

« Désolé, j'oubliais que les sangs purs ont des règles de ce genre... »

Reprenant brutalement mon gobelet, je crache :

« Ce ne sont pas des règles, mais des bonnes manières. »

Il me lance un long regard dur, et tourne les talons. Je jure avant de lui emboiter le pas, sans savoir pourquoi je fais ça.

« Potter. »

Je fais quelques pas pour me mettre à sa hauteur, et l'attrape par l'épaule.

Il regarde ma main, posée sur son épaule et je le lâche brusquement.

« C'est bon, » dit-il, et je sais qu'il le pense.

« J'ai juste tendance à oublier que tu viens d'un... »,il fait un geste vague avec sa main, à la recherche du mot exact « ...monde différent du mien. Spécialement quand tu agis comme ça, normalement.»

J'ai envie de souligner le fait que nous sommes très très loin de la normalité. Si loin que je risque de prendre feu, tellement toute cette situation est étrange – mais tout va bien. Je sens que ce n'est pas le moment de contredire Potter maintenant, alors, à la place, j'essaie de parler :

« Je ne ...je ne suis pas sûr d'aimer toujours ce monde. »

« Vraiment ? »

Il s'éloigne de quelques pas vers une fontaine, un large bassin carré, avec un petit jet bouillonnant en son centre. Il s'assoit sur le rebord de pierre, et je l'imite.

« Oui », je réponds. Je n'arrive pas à croire que je suis en train de parler de ça, et certainement pas à Potter.

« Tu sais ce que je fais à chaque fois que je rentre chez moi, après un diner ou une soirée ? »

Il me regarde, intrigué.

« Je casse quelque chose. Je rentre, j'enlève mes robes de soirée, et je casse quelque chose. Juste parce que j'ai passé trop de temps à jouer un rôle qui ne me convient pas. C'est étouffant. »

« Je vois ce que tu veux dire », dit-il.

J'ai envie d'être cynique, mais je me retiens.

« Après la guerre, on attendait beaucoup de choses de moi..Et je n'avais pas envie de faire la plupart de ces choses. J'ai pu m'en sortir en disant seulement « non », donc j'ai de la chance. »

Il marque une pause, et je sens qu'il n'a pas terminé.

« Les Weasley... », il commence, s'agitant. Son genou frôle le mien. « Ils s'attendaient tous à ce que j'épouse Ginny, et je les ai tous déçus. Ca n'a pas été facile. Je me suis éloigné un moment, en étant convaincu que c'était la meilleure chose à faire. »

« Mais ça ne l'était pas ?, je demande. J'ai envie de savoir pourquoi il n'a pas épousé Weaslette, mais j'essaie de mettre du détachement dans ma question. Je n'arriverai pas à me taire longtemps : ce serait comme essayer d'étouffer un volcan.

« Pas du tout », dit-il. « Donc je ne l'ai pas fait. J'ai juste dit non. »

« Je ne peux pas juste dire « non ». »

« Je sais », répond-il dans un pauvre petit sourire triste. « Comme je l'ai dit, j'ai eu de la chance. »

Il se penche en arrière et frôle de ses doigts la surface de l'eau. J'ai une envie folle de sauter dans la fontaine. Je suis certain qu'il le ferait si je lui demandais.

« Je n'arrive pas à croire que je te dis tout ça », s'amuse-t-il, en se penchant de plus en plus,une jambe tendue pour garder l'équilibre, ses doigts touchant maintenant la pierre bleue dans le fond de la fontaine.

Inconsciemment, je pose une main sur sa jambe pour l'empêcher de tomber. Sa peau est chaude contre ma main, ses poils sont sombres, doux.

« De toutes les personnes que je connais, qui pourraient comprendre, ...je t'en parle à toi », poursuit-il, dans un petit rire, intrigué. Il passe sa main le long des carreaux.

« L'eau est chaude », ajoute-t-il, en se redressant, ses deux jambes touchant de nouveau le sol.

En regardant l'eau fendue de ridules, je souris :

« Tu as envie d'y sauter, parfois ? »

Il me rend mon sourire :

« Tous les jours. »

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« Apollo! Ca te dit une petite sortie? » Je cours au grenier qu'Apollo à pris pour résidence. La pièce est pleine de vieux meubles et d'étranges objets, dont je n'ai réellement pas envie de m'occuper. Mère serait outrée si elle savait.

Il est perché en haut d'une vielle armoire poussiéreuse, et entrouvre une pupille ambrée, avant de déployer ses ailes, dans un hululement impérieux. C'est sa façon de dire « Bien sûr que je peux ».

Je lui donne quelques friandises supplémentaires avant son départ. Depuis que j'ai été faire du shopping avec Potter, nous nous sommes écrit presque tous les jours, parfois plus d'une fois par jour. Apollo doit être épuisé – je n'ai pas échangé autant de courrier depuis des mois.

Apollo vient à peine de s'envoler quand un autre hibou s'engouffre dans la pièce, et les deux oiseaux s'évitent de peu. Je reconnais le hibou et soupire, n'ayant aucune envie de lire le message accroché à sa patte. Mais j'ai retenu la leçon – il faut toujours prendre les messages portés par ces satanées chouettes – alors je prends la lettre de mauvaise grâce.

Draco,

Cela fait maintenant deux soirées de suite que tu loupes: à quoi tu joues ? Si tu ne fais pas un peu attention, Pierre Loubelle va prendre ta place la prochaine fois, et tu devras t'assoir à côté de Nott – qui t'en veux toujours pour cette histoire de « Potter n'est pas si affreux que ça ».

Jeudi – soirée jeux de cartes – tu as intérêt à être là ! Je m'échine à essayer de te garder au top, et il serait sympathique que tu fasses un petit effort pour me remercier.

Et va voir Astoria, bon sang- apparemment Lady Greengrass t'en veut de ne pas être venu récemment.

Blaise

Je fixe la lettre un moment avant de la rouler en boule et de la jeter par-dessus mon épaule.

« Va te faire voir », je crache au hibou de Blaise, et obéissant, l'oiseau s'envole immédiatement par la fenêtre.

Cette lettre m'a mis de sale humeur. J'oublie complètement que je suis censé être avec Blaise et les autres, lorsque je pense à Potter, et le message m'a ramené brutalement et douloureusement sur terre.

Dix minutes plus tard, j'ai appelé le travail pour prévenir que je serai malade le lendemain, et j'ai commencé àboire jusqu'à plus soif. C'est un vieux jeu, mais qui marche terriblement bien.

Allongé sur le dos, sur le sol, à côté du canapé dans ma salle à manger, plusieurs heures et plusieurs bouteilles plus tard, je regarde le plafond qui tourne au dessus de moi, et j'aimerais que les choses soient plus simples. J'ai envie d'être hétéro et d'aimer les jeux de pouvoir et mondains, comme ça, je pourrai juste épouser Astoria et en finir avec tout ça.

Chaque putain de fois que je me décide à aller la voir, un visage passe devant mes yeux. Une tête aux cheveux ébouriffés, qui porte des lunettes et me sourit alors qu'il est prêt à tomber dans la fontaine, qui me sourit encore en me prêtant des fringues, qui me regarde gravement alors que nous discutons de Quidditch autour d'un verre au Chaudron Baveur.

Je vais peut-être passer le restant de ma triste vie de solitude, fin saoul à rêvasser de Potter.

Un léger tapotement me fait froncer les sourcils, avant de réaliser que le bruit vient d'Apollo, qui se dandine peu élégamment sur le sol, dans ma direction, ses griffes sur mon parquet, à l'origine du Tap Tap.

« Apollo ! » Je lève mon verre dans sa direction, pour porter un toast.

« Mon cher ami et hibou messager. Mon petit cachotier. Comment s'est passé ton voyage chez Potter ? »

Dans un immense effort, je roule sur le côté et tend ma main. Cela me prend un certain temps, étant donné mon manque de coordination, mais j'arrive à lui arracher la lettre. Je souris comme un idiot en brisant le sceau, et je déroule lentement le parchemin. Chaque fois que je reçois un message de Potter, je me sens à la fois excité et nerveux, un sentiment que je n'ai pas ressenti depuis longtemps.

Je reste allongé par terre sur le ventre, le menton posé sur le tapis, tout en louchant sur le parchemin, jusqu'à ce que les mots soient nets.

Malfoy,

Tu as complètement tort quand tu dis que les Krestlers sont favoris – leur gardien est merdique, même si les autres le rattrapent un peu. Ils vont se faire écraser par les Harpies juste à cause de leur goal.

Et, pour ton information, sache que j'ai lu la dernière nouvelle de Hardman's, et j'ai trouvé ça nul à chier ! Equilibre littéraire mon cul. Arrivé au milieu du livre, l'histoire ne fait que se répéter encore et encore – inutile.

Tu seras probablement amusé de savoir qu'Apollo a mordu Ron – tout le monde commence à se demander à qui je n'arrête pas d'écrire, alors il a essayé de chopper une des lettres. Tu dois déteindre sur moi, car j'ai trouvé ça hilarant.

J'espère que cette histoire te mettra suffisamment de bonne humeur pour que tu dises oui à ma prochaine question : jeudi nous avons prévu un match de Quidditch et il nous manque un joueur. Hermione a proposé que j'invite mon correspondant secret et j'ai – en quelque sorte- dis oui.

Donc, s'il te plait, pourrais-tu envisager l'idée de sauver mes fesses, et de venir jeudi ?

Harry

En m'étouffant légèrement, je roule sur le dos, secoué par un rire incontrôlable, depuis que j'ai lu " tu dois déteindre sur moi". Mon esprit embrumé par le whiskey trouve ca incroyablement amusant et il me faut quelques minutes pour me calmer suffisamment et comprendre la fin de la lettre.

Déteindre sur Potter est une perspective qui ne me déplait pas du tout. Je peux facilement l'imaginer allongé sur moi, me clouant au lit, sa bouche sur la mienne et ses hanches frottant contre les...

Hey, stop – je chasse brusquement ces pensées inappropriées de ma tête et j'essaye de me concentrer à nouveau. Il veut que je vienne trainer avec lui et ses amis ? Il veut que j'aille jouer au Quidditch avec eux ?

Les choses deviennent étranges. Ce n'est plus seulement des discussions amicales, c'est un peu plus. Les limites dessinées dans mon esprit, entre l'ennemi, l'ami, le fantasme, sont dangereusement en train de se flouter, et je ne suis plus très sûr de l'endroit où se situe Harry, désormais. Je pense que c'est un peu des trois.

Je pense que – peut-être, je suis dans la merde.

« Apollo, apporte-moi une plume », j'arrive à baragouiner. « Et de l'encre. »

Je regarde, plein d'espoir là où il est perché, sur l'accoudoir du canapé, mais il me lance un regard clairement dédaigneux. Il ne bouge pas d'une plume.

« Va te faire voir, dans ce cas. »

Je ne parviens qu'à ramper jusqu'au secrétaire, et je me redresse péniblement, attrapant une plume et de l'encre. Je me demande si je vais réussir à écrire, étant donné les problèmes actuels de coordination entre ma tête et mes membres. Et merde, je vais quand même essayer.

HARRY,

Je ne devrais pas t'écrire alors que je suis énervé. Mon écriture ressemble à la tienne.

OUI oui oui. Quidditch jeudi, c'est super. Viens me chercher quand tu veux sur mon balai.

Dis à la belette que ca lui apprendra à voler du courrier, spécialement le tien et le mien.

Bien à toi,

Draco

Je me réveille le lendemain matin sur le canapé, le moindre de mes os douloureux, et avec un mal de crâne abominable, un bout de parchemin froissé dans la main.

Draco,

Je te supporterai, même si tu es énervé. Merci, je me rattraperai, je te le promets. On se voit jeudi alors.

Bien à toi, Harry.

Oh-putain-de-bordel-de-merde. Je suis censé être à la soirée de Blaise ce jeudi. Et si je n'y vais pas, il sera furieux, Pansy va pleurnicher, ma mère va râler, et tous les autres vont parler dans mon dos.

Je déteste qu'on parle dans mon dos. A moins que ce ne soit en bien, mais je suis persuadé que cela ne le sera pas si j'esquive encore un rassemblement mondain.

Mais aller chez Harry jeudi signifie que je peux éviter les chuchotements des gens. Bien qu'à la place je doive affronter les Weasley- et j'ai du mal à imaginer recevoir un accueil chaleureux, même si Harry m'a invité. Qu'est ce que je préfère ? Un affrontement ouvert avec les Weasley, ou supporter les chuchotements discrets de mes soit disant amis,qui sont fort peu satisfaits de mon comportement ces derniers temps.

Si j'y vais jeudi, je pourrai voir Harry, le voir jouer au Quidditch...

Je pense que je vais déjà un petit peu mieux.

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A suivre...

J'espère que cela vous a plu, n'hésitez pas à me laisser un commentaire.

A bientôt pour la suite et fin de cette traduction.

Merci de lire cette histoire :)