Disclamer : Tout à Rowling, je ne perçois que reviews en guise de mornilles.

Bla-bla d'usage : Non, il ne s'agit pas d'une blague, je reprends bel et bien du service. Mon année a été particulièrement chargée tant sur un plan universitaire que professionnel, et ma fic s'est malheureusement retrouvée reléguée à l'arrière-plan. Pour autant, je n'ai jamais cessé d'y penser et je compte bien la terminer. Un jour.

En tout cas, c'est un réel plaisir d'avoir à nouveau le temps d'écrire. Je ne promets pas d'être régulière dans les publications à venir, mais ayez néanmoins l'assurance qu'elles viendront ! J'ai mis à plat beaucoup de choses au brouillon, et la trame générale est désormais bien plus claire pour moi. Je ne sais pas quand j'en viendrai à bout, mais ça viendra !

Je vous remercie vivement pour votre patience en tout cas et pour vos retours généralement très positifs qui m'ont toujours fait extrêmement plaisir. Malgré mon absence du site cette année, j'ai tâché de répondre à toutes les reviews. Si cependant certaines étaient malencontreusement passées à la trappe, n'hésitez pas à me le signaler mais sachez en tout cas que je les accueille toujours avec le sourire.

Pas de défi pour ce chapitre, néanmoins le FoF est toujours en marche aux dernières nouvelles, additionné de quelques nouveautés qui peuvent éventuellement aider les auteurs en mal d'inspiration. Les liens ne sont plus actifs sur mon profil, mais je sais qu'Alixe les a répertoriés sur le sien. N'hésitez pas à y faire un saut !

Un merci spécial à Silv' et Lily qui j'espère passeront par ici, pour leur soutien et les discussions qui m'ont encouragée à persevérer.

Bonne lecture !

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L'automne était déjà plus qu'entamé, et les premières neiges avaient recouvert Poudlard et ses alentours. Transfiguré, le parc de l'école offrait en ce début du mois de novembre un terrain propice aux jeux extérieurs malgré la bise glaciale qui secouait les cimes des arbres centenaires. De la fenêtre de son bureau, Severus observait la scène qui se jouait au pied de l'aile est du château l'œil assombri d'un éclat nostalgique, des pensées lointaines à l'esprit qu'il n'aurait pour rien au monde délivrées de vive voix.

Un rien agacé de voir ses Serpentards se livrer à une bataille de boules de neige ridicule au possible, mêlés à une troupe constituée pour l'essentiel de Gryffondors qui s'ébrouaient sans distinction aucune sous les flocons sous les yeux ébahis d'un Potter-en-Culottes-Courtes qui frappait vigoureusement des mains tandis que Lupin souriait béatement, le maître des potion en arriva à la conclusion évidente qu'il se retrouverait avec un mouflet grippé lors de la prochaine pleine lune, soit, si ses calculs étaient justes, deux jours plus tard.

Depuis l'évasion de Black qui avait eu lieu en octobre, Dumbledore avait été retenu par ses obligations auprès du Magenmagot. En sa qualité de membre honoraire du tribunal sorcier, le vieil homme avait été sommé d'assurer ses fonctions à temps plein, et il fallait avouer que les circonstances l'exigeaient. Severus n'avait initialement ni saisit l'ampleur des retombées potentielles de la situation sur sa personne, pas plus qu'il ne les avaient commentées lorsque la scène politique avait commencé à se mettre en branle. Et en dépit des quelques éclats emportés dont il avait fait montre à plusieurs reprises, force était de constater qu'à l'heure actuelle le monde sorcier était dans un état fort peu reluisant. Et indirectement, sans compter les souvenirs détestables que ravivait le fait de savoir Black hors des murs d'Azkaban, le maître des potions en payait les conséquences, à savoir, seconder Lupin afin de tenir en respect Potter-Volume-Réduit.

Pas plus de quinze jours s'étaient écoulés depuis le coup fumeux du foutu Maraudeur que déjà une partie des Détraqueurs avait quitté l'îlot d'Azkaban où était construite la prison sorcière pour ratisser à l'aveugle les campagnes britanniques. Une organisation dont la discrétion laissait grandement à désirer selon Severus, puisque même les Moldus avaient recensé pour cet automne une hausse pour le moins inhabituelle de morts violentes, accidentelles, et surtout, inexpliquées pour la plupart d'entre elles. Et si les statistiques ne mentent jamais, le Ministère, lui, était hélas expert en ingérence et langue-de-bois.

La destitution de Bagnold fin octobre avait été marquée par divers discours avides de politiques peu scrupuleux, Fudge en tête, qui s'étendaient en conclusions hâtives sur le terme expéditif de son mandat, malmenant d'élucubrations verbeuses la décision prise par le Magenmagot qui avait été relayée par quelques journalistes dont la réputation n'était plus à faire. Severus n'avait jamais accordé grand crédit aux feuilles de choux sorcières, en particulier la Gazette, qu'il jugeait bien plus soumise aux résultats financiers des tirages – Merlin en remerciera les ménagères bien pensantes ! – qu'à une ligne éditoriale impartiale et objective. En bref, le maître des potions tenait pour acquis le fait que sans ses relations personnelles, il lui aurait été bien impossible de démêler le vrai du faux, et que si Albus n'avait pas pris le soin de le tenir au courant des affaires en cours, il aurait probablement lynché ce pauvre Bagnold comme tout le monde.

Un hibou Grand-Duc au plumage cuivré lui avait délivré le matin même un courrier du Directeur de Poudlard, éloquent et plein de bon sens comme souvent lorsque le vieil homme s'accordait à un minimum de sérieux :

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Mon cher ami,

Voyez-vous, ces derniers jours ont été fort animés tant l'intendance du Magenmagot est difficile à mener, et c'est un homme usé qui prend la plume aujourd'hui pour s'enquérir de vos nouvelles. Je perçois avec grand amusement l'air revêche que vous affichez certainement à la lecture des ces lignes, vous demandant probablement combien de tournures inutiles seront nécessaires avant que je n'en vienne au fait. Je vous épargnerais donc les banalités d'usage, par égard pour votre patience déjà émoussée.

Comme vous l'imaginez, la destitution de notre Ministre – ou devrais-je plutôt dire notre ancien Ministre – n'a pas eu l'effet que nous escomptions, mes camarades de mauvaise fortune et moi-même, sur la population. Nous avions en effet espéré que cette décision aurait été perçue pour ce qu'elle était : un élan de transparence et d'efficacité. Ne pas laisser aux mains d'un même homme la charge colossale d'un peuple craintif a été voté unanimement par le Magenmagot. Nous pensions naïvement que la confiance reviendrait, mais hélas il n'en est rien, au contraire ! La presse ne nous a bien entendu aidé aucunement, mais c'est une autre histoire, que vous avez su lire entre les lignes des journaux, je n'en doute pas.

Toujours est-il que parmi les choix formulés lors de nos séances qui ont pris effet, et j'appuis ici tout particulièrement sur l'envoi de Détraqueurs à travers le pays, bien peu ont mon aval. C'est là l'inconvénient d'un gouvernement de transition : l'horizon politique est flou, et les bévues, nombreuses. Comme vous l'aurez compris, je ne siège pas du côté de la majorité.

La priorité de départ était légitime – retrouver Black n'est et n'a jamais été une option, tous nous accordons sur ce point. Je crains cela dit que beaucoup l'utilise à des fins bien plus vicieuses que je n'admets aucunement. Je ne peux vous en dire plus à ce sujet pour l'instant mon ami – la confidentialité de nos débats m'impose le silence sur certains éléments, mais lorsque l'annonce prévue pour la semaine prochaine sera faite, vous saisirez l'ampleur du problème !

Sur une note plus légère, j'ai appris de Remus que le petit Harry achevait de prendre ses marques au château et que désormais il lui donnait parfois du fil à retordre paraitrait-il même qu'un soir où il avait été puni pour une raison que j'ignore, il se serait éclipsé en catimini des appartements de Remus et que Minerva l'aurait retrouvé allongé en boule à la porte de votre bureau, endormi. Je suis ravi de l'attachement que vous porte le petit. Cela ne peut que faciliter les choses à court terme. Les changements sont bien trop perturbants pour un si petit enfant, hélas...

Je dispose de bien trop peu de temps pour pour me consacrer pleinement à la recherche d'une famille correspondant aux attentes des services sociaux du Ministère et l'échéance de janvier arrive à grands pas. J'ai échangé quelques courriers avec des sorciers de ma connaissance, mais rien de concret pour l'instant. Nous pourrons en discuter lors de ma venue à Poudlard fin novembre pour le conseil d'administration.

A ce propos, Lucius Malefoy m'a de nouveau fait part de son ravissement quant au maintient de son siège au Conseil. Nous saurons utiliser ses relations, et sa voix je n'en doute pas, bien que je n'adhère que froidement au principe.

Avec toute ma considération,

Votre dévoué,

APWBD.

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L'insupportable vieil homme avait été bien trop elliptique pour que Severus fut pleinement satisfait des informations données, mais le ton et l'humeur sérieuse qui émaillaient les lignes de ce courrier ne laisser présager que peu d'issues satisfaisantes. Tant sur le plan politique que sur le cas Potter qui était un véritable casse-tête. Une fois la liasse de parchemins remisée soigneusement dans le double fond du tiroir de son bureau, qui fut lui-même scellé de quelques sorts plus ou moins douteux, Severus s'en retourna à la fenêtre où il s'accouda soucieusement.

Potter-Volume-Réduit venait de s'étaler dans la neige, et un Lupin catastrophé accourrait précipitamment. Le maître de potions ne put retenir un sourire. Il se rappela l'anecdote évoquée par Dumbledore dans sa lettre. Le loup-garou aurait puni le gamin, rien que l'idée pouvait prêter à rire. Le fait est que Lupin s'était contenté d'une légère remontrance, à peine un reproche alors que Potter-en-Culottes-Courtes aurait mérité une bonne fessée si cela n'avait tenu qu'à lui.

Le môme n'avait rien trouvé de plus divertissant ce jour là que d'envoyer deux élèves de première année dans la Forêt Interdite – un Weasley et une gamine dotée de deux mains gauches, fille de l'ainée des Black, lui semblait-il – sous prétexte qu'il y avait égaré sa ridicule peluche et qu'il la lui fallait absolument. Aussi grotesque que fut la ruse, les deux gamins avaient mordu à l'hameçon et Hagrid avait retrouvé les deux nigauds transis de froid prêt d'un nid d'Acromentules, rien de moins !

Ce n'était que le lendemain que Severus avait appris la farce de Potter-Volume-Réduit, et son étrange fugue en direction de ses appartements. Furieux qu'une telle mise en danger d'autrui ne fut pas prise avec plus de sérieux qu'une privation de dessert, il avait été trouver le gamin Potter qui occupait une fois de plus toute l'attention tranquille de Lupin afin de le sermonner.

Le loup-garou en était resté bouche bée lorsque Potter avait confessé finalement que son projet était d'obtenir un vrai récit d'aventures, et non pas des histoires de bébé comme celles qu'on lui lisait :

« A part Serpy, on ne me lit jamais des vraies histoires, avec des monstres et des trésors et des méchants sorciers. Et on me parle toujours comme à un bébé ! Les livres sur Vampirus qui va à l'école, la fée des dents et tout ça, c'est nul ! » avait éructé l'affreux gamin, bien trop gâté depuis son arrivée à Poudlard, stoïque face au maître des potions, ses petits bras maigrichons croisés sur le torse.

« Et si vos amis n'avaient pas été retrouvés par Hagrid dans la forêt Potter ? S'ils avaient été blessés, hein ! Auriez-vous trouvé la fin plus à votre goût, l'histoire plus savoureuse ? » lui fit remarquer perfidement Severus avec un regard sombre qui aurait fait fuir le plus téméraire des Gryffondors.

« Mais... », tenta de plaider Potter, la lèvre tremblante.

« Pas de mais avec moi, jeune homme. Si vous jugez être assez grand pour écouter des histoires sordides, alors soit. La Forêt Interdite porte son nom pour une raison bien précise. Les créatures qui y vivent sont pour certaines plus que dangereuses, mortelles même, Potter. Un chapitre de l'Histoire de Poudlard est consacré aux accidents qui y sont survenus, et c'est loin d'être le plus amusant du livre. Quant à votre langage, il va falloir remédier au ton que vous employez et apprendre à cesser de vous justifier. A respecter les ordres que l'on vous donne, aussi », réprimanda Severus avec vigueur, bien que sa voix resta doucereuse tout le long de la remontrance.

Le gamin avait fini par s'excuser et avait pleuré à chaudes larmes pendant quelques minutes. Lupin, qui avait assisté à toute la scène avait bien essayé d'aller prendre Potter-en-Culottes-Courtes dans ses bras pour le consoler, mais un raclement de gorge du maître des potions l'avait stoppé dans son élan. Apercevant le fameux Godric, la petite salamandre un peluche qui trainait sur la table du salon, Severus s'en saisit et la donna au gamin avant de le congédier. Et sans argumenter, Potter s'en était allé, reniflant, dans sa chambre. Et sans claquement de porte impétueux, merci bien.

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Lupin s'était rendu à l'infirmerie une demi-heure plus tôt, et les derniers rayons du soleil commençaient à disparaître en volutes irisées. Dans moins d'une heure, le calvaire du loup-garou commencerait, mais également celui de Severus qui aurait à supporter Potter-en-Culottes-Courtes, bien que ce dernier fut plus sage dernièrement. Sans doute le sermon du maître des potions n'était pas étranger à ce changement d'attitude. Bien qu'il ne le reconnaitrait pas, hormis la farce de mauvais goût dont Potter avait été l'instigateur quelques jours plus tôt, le comportement de l'enfant était tout sauf incommodant la majeure partie du temps.

C'était probablement le plus dérangeant d'ailleurs. Rares étaient ses colères et débordements d'enthousiasme. Tout ce qui fait qu'un petit enfant est ce qu'il est en réalité – avec tous les inconvénients que cela implique bien entendu – faisait défaut au jeune Potter. Ce soir donc, conscient des différences propres à Potter-Volume-Réduit, à la tombée de la nuit, dans le salon rouge et or de Lupin, le maître des potions se retrouva désarmé face à la première question ouverte que lui posa gamin : Pourquoi Remus c'est un loup-garou ? En dehors de l'aspect scientifique de la chose, Severus n'en savait fichtrement rien. Choisissant de détourner le fond embarrassant de l'interrogation, il décida d'y répondre par une autre question :

« Pour toi Harry, qu'est-ce qu'un loup-garou ? » demanda précautionneusement le maître des potions.

« Bah, c'est quand un monsieur il se transforme en loup. Quand la lune est pleine je crois-c'est-que-ça », répondit Potter-en-Culottes-Courtes tout en continuant à tenter de faire tenir une construction étrange faite de cubes colorés sur le tapis du salon. « Mais pourquoi Remus c'en est un ? » relança le gamin qui ne perdait hélas pas le nord.

« Je ne sais pas exactement, Harry, je ne le connait pas bien, » reconnut Severus, contrarié de ne pas avoir réponse à tout pour une fois. « Un loup-garou, ce n'est pas n'importe qui qui se transforme en loup d'une part, et d'autre part, ce n'est pas exactement un loup, » avait-il poursuivi.

Le gamin avait à présent cessé de jouer avec son jeu et était en train de s'installer aux côtés du maître des potions sur le canapé en cuir ocre, attirant à lui un plaid carmin qui reposait sur le dossier.

« Tu veux bien m'expliquer c'est quoi alors, Sev'rus ? » demanda le gamin en plantant son regard dans celui du maître des potions.

Sachant qu'un soupir las n'arrêterait pas Potter-Volume-Réduit en si bonne voie, Severus prit sur lui d'éclaircir les choses aussi simplement que possible :

« En règle générale, on ne nait pas loup-garou. On ne le choisit pas non plus. En fait, on en devient souvent un par accident, » le maître des potions espéra avoir choisi ses mots avec soin – si Potter se mettait à craindre Lupin, il ne donnait pas cher de sa peau ! « Pour être un loup-garou, il faut avoir été mordu par un loup-garou. »

« Alors si moi je veux aussi être comme Remus, j'ai juste à lui dire de me mordre ? » s'enthousiasma le môme – décidément, A + B ne donnait pas la même chose pour tout le monde...

« Être loup-garou est très douloureux Harry. Quand le loup-garou se transforme, il souffre beaucoup. Personne ne veut devenir un loup-garou », affirma Severus, songeant que cette assertion valait bien ce qu'elle valait pour généralité, mais qu'elle ne comprenait pas les illuminés de l'acabit de Greyback et consort.

Le gamin parut troublé et sembla se retenir de dire quelque chose. Dans son propre intérêt – ne manquerait plus qu'il se retrouve avec un môme larmoyant sur les bras, Severus choisit de rassurer Potter :

« Remus est très courageux, tu sais, et il ne te fera pas la moindre mal. Tu ne dois pas le voir différemment à cause de cela Harry, tu comprends bien ? » s'assura Severus, conscient de l'énormité mielleuse de ces propos digne d'un Poufsouffle bien pensant.

« Je crois... » répondit Potter un brin dubitatif en réajustant sa couverture malhabilement. « Mais pourquoi il y a encore des loup-garous si ça fait mal d'en être un ? »

Et voilà le nœud du problème, tu es dans de beaux draps Severus !

« Quand le loup-garou se transforme à la pleine lune, il n'a pas conscience de ce qu'il fait, il ne maîtrise pas ses actes et devient violent. A la pleine lune, si le loup-garou est en liberté, il peut mordre quelqu'un », le maître des potions préféra jouer sur la demi-vérité.

Étonnamment, Potter n'eut pas l'air horrifié le moins du monde et déclara naïvement :

« Ce n'est pas sa faute s'il mord alors. »

Severus ne commenta pas et estima que la conversation avait bien assez duré. L'heure du coucher s'avéra un excellent prétexte pour clore le débat, et sans tergiverser, Potter se laissa border en baillant.

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La table basse du salon de Lupin était à présent recouverte de parchemins gribouillés d'annotations compliquées, savant mélange d'arithmancie, de runes et de formules scientifiques alliant chimie moldue et signes alchimiques. Des archives de journaux et de publications scientifiques sud-américaines complétait le désordre à même le sol, et plusieurs carnets trônaient entrouverts au bout du canapé opposé à Severus.

Le maître des potions parcourait des yeux un courrier de refus qui lui avait été adressé par les autorités argentines, suite à sa tentative – infructueuse, cela va sans dire ! – de contacter Ernesto Lubo.

L'argentin, dont les derniers travaux s'étaient attachés à l'élaboration d'une potion permettant de limiter les souffrances endurées par les lycanthropes lors de leurs transformations et de rendre celles-ci moins dangereuses pour le pauvre quidam qui passerait malencontreusement à porter de crocs, avait en effet été assigné à résidence par le gouvernement de son pays pour d'obscures raisons politiques qui n'intéressaient que très moyennement le maître des potions.

De ce qu'il en avait retenu, Lubo appartiendrait à l'ancienne caste régnante des sorciers d'Argentine, les Guaraní. La communauté sorcière argentine avait rencontré des hauts et des bas au début des années 70 et une guerre civile avait agité la population. C'était d'ailleurs à cette époque que les Guaraní s'étaient imposés à la tête du gouvernement, installant aux postes clés les Chefs de Chasse et leurs descendants.

Ainsi, Lubo, fils d'un honorable Chef de Chasse, s'était retrouvé, à même pas trente-cinq ans révolus, à gérer le département de recherche du Ministère argentin – rien de moins ! Puis le vent avait tourné, bien entendu, et comme toujours pour les régimes politiques instables, au printemps dernier, une obscure caste avait contesté l'ordre établi et Chefs de Chasse et assimilés avaient été priés, de façon plus ou moins sanglante selon les cas, de regagner leurs pénates originelles, loin de Buenos Aires. Ce que beaucoup avaient fait sans ciller. Quant à Lubo, son cerveau avait été jugé bien trop précieux pour qu'il fut perdu dans les tréfonds de l'Amazonie d'où avait initialement migré les Guaraní, ou pire encore, à l'étranger.

C'était sans grand espoir que Severus avait essayé de prendre contact avec l'argentin, mais sa missive avait été grandement argumentée, animée par la principale conviction que si Lubo n'avait pas fini au piloris comme tant d'autres, c'était pour que son esprit puisse servir la fière République Argentine. Pourtant, l'argument scientifique n'avait pas fait fléchir la milice qui assurément gardait Lubo bien au chaud, et la réponse concise qu'il tenait à présent entre ses mains l'invitait sèchement à ne pas retenter de le contacter. L'incident diplomatique ne menaçait pas explicitement, mais le maître des potions ne se sentait pas d'en prendre le risque pour le bien-être des loup-garous.

Toutefois, les recherches entamées s'étaient avérées réellement passionnantes, et Severus ne démordait pas de confirmer les hypothèses de Lubo, voire même de dépasser le postulat d'origine. Si ses propres découvertes étaient justes, peut-être serait-il possible non plus de simplement limiter l'agressivité du sujet lycanthrope, mais de tout bonnement rendre la transformation tout à fait inoffensive.

Alors que Severus se préparait une énième tasse de café dans la kitchenette adjacente au salon de Lupin, un reniflement le fit sursauter. À quelques pas de lui, Potter-Volume-Réduit, pieds nus sur le carrelage, le pyjama débraillé et les cheveux collés par la sueur sur le front orné de la fameuse cicatrice, essuyait de son nez ce qui paraissait être... de la morve.

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Les pronostics de Severus s'étaient avérés exacts. Potter-en-Culottes-Courtes avait été malade et les murs de l'infirmerie l'avait accueilli dix jours durant. Poppy avait toujours fait montre d'une conscience professionnelle passablement excessive, et son petit malade n'avait pu quitter son fief qu'à la grâce d'une missive expresse du Directeur de Poudlard, quelles qu'aient pu être les jérémiades du loup-garou avant cela.

Depuis la fenêtre de l'infirmerie, Severus aperçut Albus Dumbledore accompagné par deux hommes qu'il ne connaissait pas longer le sentier qui menait de l'entrée du parc de Poudlard au château. Leurs capes rouges détrempées par la pluie verglaçante qui avait remplacé la neige laissaient cependant présager de leur fonction, et la conclusion qu'en fit Severus fut tout sauf accueillie avec soulagement par Lupin qui se trouvait à ses côtés.

« Qu'est ce que peuvent bien foutre des Aurors ici ? » maugréa le loup-garou.

Severus n'eut pas même le temps de lui préparer une réponse sarcastique de son cru, que déjà Dumbledore gravissait les quelques marches qui le séparait du hall du château. Potter-Volume-Réduit, tout sourire s'avançait vers eux le pas guilleret et lança à la volée :

« Ça y est, je suis prêt ! C'est pourquoi que papy Albus veut tous nous voir ? S'enquit-il.

– Aucune idée mon bonhomme, mais une chose est sûre, il sera ravi de te revoir ! » lui répondit le loup-garou d'une voix suave qui se voulait probablement rassurante mais dont les yeux ne trompaient guère de monde, à commencer par le maître des potions qui leur emboita le pas vers la sortie de l'infirmerie sans prononcer le moindre mot.

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Si le vieil homme s'était toujours sincèrement soucié du gamin Potter depuis son arrivée à Poudlard, il n'en était pas moins vrai qu'il n'aurait jamais fait preuve d'une telle insistance pour le voir. Certes, Potter-Volume-Réduit n'avait pas été au meilleur de sa forme depuis quelques jours, mais cela ne justifiait pas l'arrivée subite et en grande pompe du Directeur.

L'enfant babillait joyeusement et distribuait des sourires à la ronde que les élèves qu'ils croisèrent sur le chemin du bureau du directeur lui renvoyaient le plus naturellement du monde. Severus avait été étonné que la présence du gamin Potter ne suscita pas plus de curiosité et d'engouement parmi les pensionnaires de Poudlard. Des consignes avaient bien entendu été distribuées en ce sens, néanmoins le maître des potions ne s'était pas préparé à ce que des adolescents boutonneux les mirent en application.

Une fois parvenu devant la gargouille qui marquait l'entrée des appartements d'Albus Dumbledore, Severus soupira bruyamment, ce qui ne manqua pas de faire pouffer Potter-l'-Effronté à qui l'on avait plus d'une fois répété qu'il s'agissait d'une réelle marque d'impolitesse – décidément, le petit diable avait bonne mémoire lorsque cela l'arrangeait.

Dumbledore et les deux Aurors qui l'accompagnaient étaient déjà installés dans le bureau. Un grand noir d'une quarantaine d'années au regard perçant tapotait d'agacement sur sa cuisse. Manifestement, le déplacement à Poudlard ne l'enchantait guère. Son compagnon en revanche, un blondinet bien plus jeune, affichait un sourire ravi et ne se lassait pas d'observer les objets curieux disséminés partout dans la pièce. Sans préambule, le Directeur les invita tous à se diriger vers la bibliothèque adjacente au bureau.

Potter, que l'atmosphère pesante avait finalement contaminé, se planquait à présent derrière les jambes du garou. Pas d'effusions pour aujourd'hui, et c'est à peine si Dumbledore lui avait offert un sourire. Pour un peu, le maître des potions se serait offusqué du peu d'intérêt que le vieillard avait porté au gamin qu'il n'avait pas vu depuis près d'un mois. Pourtant, Potter-en-Culotte-Courtes sembla à peine désappointé, bien que sa lippe boudeuse indiqua malgré tout une déception résignée.

« Si je vous ai tous convoqués aujourd'hui, commença le Directeur en s'asseyant lourdement sur un voltaire tapissé de velours bordeaux, c'est que les circonstances actuelles nous obligent à mettre en place certains aménagements pour la sécurité d'Harry. »

À l'évocation de son nom, Potter-Volume-Réduit s'était tassé plus encore sur les genoux du loup-garou. Quant à Lupin, ses sourcils froncés n'annonçaient pas des meilleures dispositions. Et si Severus ne le portait pas en haute estime, il était cependant conscient que le garou s'était avéré un gardien loyal et attentif pour le gamin.

« Je vous présente les Aurors Shacklebolt et Williamson. Ils logeront désormais à Poudlard près de vos appartements, Rémus. En cas de problème, adressez-vous directement à eux, ils ont toute ma confiance, » poursuivit le vieil homme d'un ton grave tout en désignant alternativement les deux hommes.

« Harry, tu devras impérativement obéir à ces messieurs si jamais ils t'en donnent l'ordre. C'est très important. Si tu le veux bien, nous devons discuter de choses de grandes personnes qui ne t'intéresseront pas et je préférerais que aille dans mon bureau. Je suis sûr que Fumseck appréciera ta compagnie », suggéra Dumbledore au gamin qui décampa sans se faire prier, quoiqu'il en profita pour lui voler le câlin qu'il n'avait pas eu.

« Allez-vous enfin nous dire à quoi rime tout ce cirque ? exigea Lupin sans politesse aucune, au grand soulagement de Severus qui attendait lui aussi des réponses qu'on ne semblait décidé à leur donné qu'au compte-goutte.

– Black a été aperçu hier à Pré-au-Lard selon nos sources et le Ministère a décidé d'un dispositif de sécurité renforcé pour Poudlard, répondit le dénommé Shacklebolt avec l'assurance de ceux qui commandent.

– Je n'ai rien pu y faire, renchérit Dumbledore. Le Conseil devra se réunir en urgence dans la soirée, mais la décision du Ministère est irréversible.

– Ne me dites quand même pas qu'ils vont envoyer ces horreurs à Poudlard ! » coupa Severus en blêmissant, saisissant soudain ce qu'impliquait l'ingérence du Ministère à Poudlard.

Le regard bleu pâle du Directeur s'arrima fermement au sien et lui confirma douloureusement que ses suppositions s'avéraient exactes. La présence d'Aurors à Poudlard annonçait celle à venir de Détraqueurs, ni plus ni moins. Et plus que jamais, le maître des potions détesta Black.

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Lupin n'avait pas trainé plus longtemps que nécessaire après cette discussion houleuse chez le Directeur qu'il rendait responsable des changements à venir. Potter-Volume-Réduit avait été laissé à la garde de McGonnagall qu'ils avaient croisée à la sortie du bureau directorial et qui n'avait eu d'autre choix que d'accepter la charge devant le ton impérieux du garou. Et c'est sans comprendre véritablement pourquoi, que Severus le suivit en direction de ses appartements personnels.

Le loup-garou était prodigieusement furieux, et pour une fois, cela n'amusa pas Severus qui craignait que son emportement ne le poussa à des extrémités irréfléchies. Sans pour autant tenter de le calmer – ils n'avaient tout de même pas élevé des Hippogriffes ensemble !, le maître des potions l'encouragea néanmoins à s'asseoir et alla s'enquérir d'une bouteille de Whisky-Pur-Feu qu'il avait découverte planquée au fond du bahut du salon à la faveur de l'une de ses fameuses journées de baby-sitting.

« Bordel Severus, ils vont quand même pas envoyer des Détraqueurs dans une école ? Une école, merde ! C'est pas un endroit où on envoie des créatures pareils ! C'est dangereux ! Et quand bien même Sirius pourrait vouloir s'en prendre à Harry, on ne peut pas décemment imposer ça à tous les gamins... » s'indigna Lupin tandis que Severus vidait d'un trait l'un des verres qu'il venait de servir.

« Crier ne résoudra rien, et je ne suis pas sourd », persiffla le maître des potions qui, certes, n'avait rien contre quelques grossièretés bien senties, mais qui ne supportait définitivement pas l'exubérance de Lupin en la matière.

Lupin lui renvoya un regard noir qui ne l'effraya pas même un instant, bien que les colères des garous eurent été de tout temps réputées comme particulièrement impressionnantes. Évidemment, Lupin ne pouvait que déroger à la règle.

« Je veux bien croire que tu n'as pas de contacts avec Black, mais ne me dit quand même pas que tu n'as pas la moindre idée de l'endroit où il pourrait se planquer », embraya Severus d'un ton inquisiteur.

Hésitant, Lupin le jaugea un long moment. Bien évidemment, le maître des potions savait pertinemment qu'il n'était probablement pas la personne la mieux indiquée pour lui soutirer des confidences. Mais la haine qu'il ressentait à l'égard de Black, plus intense que jamais, ne pouvait freiner sa détermination à faire tout son possible pour que cette enflure retourna au plus vite croupir au fond de sa cellule.

L'évasion de Black, au-delà du fait qu'elle venait raviver des souvenirs douloureux que Severus aurait volontiers oubliés, bouleversait le bon fonctionnement du petit monde qu'il s'était efforcé de reconstruire péniblement après la mort de Lily. Tout à ses pensées, tout comme Lupin l'était manifestement aux siennes, il sentit au fond de la poche de sa robe, tout contre sa paume, le papier glacé rassurant des photographies qu'il transportait désormais partout avec lui, attendant que le moment se présenta de les montrer à un Potter-Volume-Réduit qui les mérita.

Oublieux de son orgueil qui de toute manière lui avait irrémédiablement faussé compagnie en 1981, le maître des potions se resservit un verre puis déposa les clichés sur la table, sans considérer la petite voix qui lui susurrait qu'il ne s'agissait assurément pas de son meilleur coup de bluff.

Néanmoins, Lupin sembla baisser sa garde. Il saisit d'une main indécise le premier cliché. Lily, plus belle que jamais rayonnait en virevoltant dans sa robe de mariée. Severus nota le tic au coin des lèvres du garou tandis qu'il caressait du pouce le bord de la photo qui avait été déchiré, mais il lui sut gré d'avoir gardé le silence. Puis Lupin passa à la suivante, celle où l'on pouvait voir Lily et le maître des potions, âgés d'environ cinq ans, en train de jouer dans un bac à sable moldu. Cette fois-ci, un sourire sincère étira les lèvres du loup-garou.

« C'est pour elle, que tu fais tout ça, n'est-ce pas ? » devina sans grande difficulté Lupin et Severus leva les yeux au ciel – décidément, ce foutu garou était encore plus lent d'esprit qu'il l'aurait cru.

« Écoute, Severus, on ne s'est jamais entendu. Et je te remercie de m'avoir accordé ta confiance. Mais... Ce n'est pas aussi simple. Sirius était mon ami et... Ce qu'il a fait est abominable, et crois bien que si je l'avais entre les mains je lui tordrais le cou sans préavis », reprit le loup-garou cependant que Severus tâchait de garder le visage impassible, malgré l'amertume cuisante qu'il ressentait. « C'est trop compliqué, désolé. »

Le maître des potions se leva brusquement, sans même prendre le temps de rassembler les clichés. D'un pas leste, il se dirigea avec ce qui lui restait de dignité vers la porte. Sa tentative avait été vaine. Alors qu'il posait sa main sur la poignée en cuivre, la voix de Lupin retentit inopinément :

« On ne s'est pas compris, Severus, c'est juste que tu as intérêt d'avoir un peu de temps devant toi, ça risque d'être un peu long. »

Bien qu'un peu raide, Severus se retourna et lui offrit son premier sourire sincère.

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Bon, je me doute que c'est frustrant, mais si je ne coupais pas ici, vous auriez eu à attendre encore plus longtemps. Beaucoup de choses découleront de la discussion entre Severus et Remus, vous le verrez au prochain chapitre. Nous reverrons aussi Lucius. Et peut-être un bout de Sirius, mais entre mes mains, son avenir est encore incertain^^ Plus de politique et de recherches également.

En tout cas, j'espère que ce chapitre vous aura plu et que l'attente n'aura pas fait fuir les plus fidèles ! Je m'excuse également pour les fautes s'il en reste – et c'est probable – ainsi que pour ma lenteur d'escargot qui est inexcusable.

À bientôt !

Circ'