Comptines sous la Lune


Disclaimer : L'univers appartient à JK Rowling, ainsi que les personnages que vous connaissez. Sylvana, Cassandre et leurs familles sont des êtres libres.

Merci : Á LaPaumée, Mihamster (malheureusement anonyme), Wizzette, « »(également anonyme), Mebahiah26, kam0, Angharrad, The Na Na Na H, LittleFraise, Anadyomède et clodina pour leur lecture et la marque de leur passage qu'elles/ils m'ont laissé. Á ceux qui passent, lisent et ne savent que dire. Á Lena Zeynom et FrankincenseB pour leur relecture et leur soutien ponctuel ou quotidien.

« Il y a des choses de l'enfance que seule l'enfance connait. » (Colum McCann)


Chapitre 5 : Comme tous les matins !

Florian avait découvert l'existence de Remus durant les grandes vacances. Cela faisait déjà quelques mois qu'il avait noté des changements dans l'attitude de sa maman. Elle était gaie, enjouée, parfois pensive, mais presque exclusivement positive. Florian avait égoïstement mis la bonne humeur maternelle sur les excellentes notes qu'il obtenait à l'école, mais il avait dû se rendre à l'évidence après un difficile contrôle de conjugaison; si même un 3/10 n'arrivait pas à le faire gronder – ce en quoi il fut agréablement surpris, se promettant d'en profiter dès que l'occasion se représenterait – alors ce qui faisait sourire Sylvana devait être très important et sans relation avec ses résultats scolaires.

La joie de sa mère était devenue communicative. Cassandre ne venait plus sans un cadeau, si petit soit-il, quand elle leur rendait visite. Et ses apparitions surprises fréquentes enchantaient Florian qui n'avait jamais reçu autant d'autocollants de Dragon Ball Z.

Ce ne fut qu'au début du mois de juillet que le voile du mystère fut levé : la cause de toute cette gaité, c'était l'Amour. Maman avait un amoureux. Cassandre aussi. Florian se sentait perdu. Voilà qu'il perdait l'exclusivité de l'affection que lui portaient sa mère et sa marraine. Tout ça pour des vieux! Enfin, vieux... Kingsley était plutôt cool. Il jouait bien au basket – Florian voyait dans sa grande taille une sorte de triche – connaissait plein de choses sur les dragons – il lui avait assuré en avoir déjà vu un vrai avant que Sylvana ne lui demande d'arrêter de dire des bêtises – et donnait l'espoir fou à Florian d'avoir bientôt un bébé à cajoler – peut-être même serait-il le parrain. Florian tolérait bien l'amoureux de sa marraine. Ils ne vivaient pas sous le même toit, ce qui lui facilitait vraiment la vie. Florian pouvait s'enfermer dans sa chambre, si Kingsley l'ennuyait, et n'en ressortir qu'après son départ.

Les choses étaient un peu plus compliquées avec l'amoureux de sa maman.

Remus n'était pas méchant. Il n'était même pas envahissant. Il ne parlait pas beaucoup – Sylvana s'en chargeait pour deux – faisait d'admirables constructions en Lego, donnait très bien la main lors des promenades, ne rechignait pas à entrer dans des jeux d'enfants, à lire des histoires ou à regarder tout ce qu'il lui indiquait – de la couleur étrange d'une maison aux canards nageants dans le lac. En fait, Remus était quelqu'un de fondamentalement gentil.

Et c'était bien ça qui ennuyait Florian.

Il aurait aimé que l'amoureux de sa maman soit méchant. Il aurait pu le détester en toute bonne conscience. Détester Remus le faisait se sentir coupable. Remus n'avait rien fait de mal. Il faisait sourire Sylvana, ce qui était une bonne action, surtout après de mauvaises notes, mais Florian le trouvait un peu trop présent. Depuis le mois de juillet, Remus était là. Toujours là. Un peu trop là. Florian n'avait plus le loisir de profiter de sa maman avec impudence comme il pouvait le faire dans le passé. Il n'osait timidement plus se jeter sur son lit le matin et la couvrir de bisous tout en exigeant un petit déjeuner à la française. S'il l'avait fait devant Remus, il aurait eu l'impression de se mettre en scène avec, face à lui, un public impitoyable qui ne lui passerait aucune erreur.

Un samedi matin, à la fin du mois d'août, n'y tenant plus, Florian prit son courage à deux mains et entra dans la chambre de sa maman aussi silencieusement qu'un enfant de sept ans en était capable, malgré Remus qui dormait là tous les weekends depuis un mois. A peine était-il entré que Sylvana se tourna vers lui avec des yeux ensommeillés. Elle s'assit à moitié dans son lit et lui tendit les bras, comme elle le faisait toujours quand il venait la réveiller.

- Câlins? suggéra-t-elle.

Florian acquiesça avec un grand sourire. Certaines habitudes pouvaient être conservées, se rassura-t-il pendant que sa maman lui transmettait chaleur et amour dans leur traditionnelle embrassade matinale. Il jeta un rapide regard à Remus qui n'était pas le spectateur attendu. Au contraire, il regardait distraitement ailleurs, le visage un peu rouge.

Lorsque l'étreinte se desserra, Florian se tourna vers lui. Peut-être avait-il trop chaud dans son pyjama. Ou alors, il avait aussi envie d'un câlin, mais n'osait pas le demander. Il avait peut-être oublié les rituels pourtant incontournables quand on est enfant. Après tout, c'était une grande personne sans être un papa. Florian décida qu'il était de son devoir d'apprendre à Remus tout ce qu'il y avait à savoir sur les us et coutumes de la famille Winblow et de l'enfance. La première étape étant le lever, il se plaça face à l'amoureux de sa maman et le regarda fixement.

- Tu veux aussi un câlin?

Sans attendre la réponse, il se pelotonna à coté de lui et le prit dans ses bras en posant sa tête dans le creux de l'épaule de l'adulte. Il y mit fin plus rapidement qu'avec sa maman parce que Remus, lui, piquait et que ça ne rendait pas le câlin aussi agréable. Florian sortit ensuite du lit parental.

- On va manger maintenant? J'ai faim, réclama-t-il

- Oui, mon chéri, répondit Sylvana. Descends déjà, on te rejoint.

Florian partit en courant. Il ne s'était pas rendu compte de sa faim de loup avant de l'avoir exprimée. Ce n'est que quand il eut déjà dévalé la moitié des escaliers qu'il entendit sa maman se lever, ouvrir grand la porte de sa chambre et crier.

- N'oublie pas de mettre tes chaussons, tu vas tomber malade si tu continues à courir pieds nus dans toute la maison!

Il rit. Les mamans sont parfois un peu trop... mamans, quand même. Il obtempéra malgré tout à l'injonction, remonta la volée de marches et cavala jusqu'à sa chambre pour s'emparer d'une paire de chaussons verts à l'effigie des Tortues Ninja. Malgré ce petit détour qui avait rogné sur son temps de petit déjeuner, Florian arriva dans la cuisine avant Sylvana et Remus. Il put ainsi sortir tout le matériel indispensable à la préparation d'un vrai petit déjeuner sophistiqué, plein de confitures, de chocolats et de tranches de pain. S'il se souvenait bien de ce que sa maman lui avait raconté, son arrière-grand mère était française et elle avait importé cette merveilleuse tradition sucrée chez les Winblow. Florian n'avait jamais compris comment ses camarades de classe pouvaient démarrer la journée avec des œufs ou du bacon. Rien ne valait une tartine avec du beurre et de la marmelade d'orange... ou des céréales à la rigueur.

Florian ajoutait la dernière touche décorative à sa table quand les deux adultes arrivèrent enfin dans la cuisine. Sylvana s'assit en s'extasiant sur les efforts de Florian. Elle commença à beurrer quelques tranches de pain pendant que Remus faisait chauffer de l'eau pour lethé. Florian ne buvait pas ce breuvage amer, lui préférant une grande tasse de chocolat froid, mais il était content que sa maman ait trouvé un compagnon de thé. Il dévora rapidement la première tartine qu'elle lui avait préparée et s'attaqua plus doucement à la seconde. Sylvana en proposa une à Remus qui la refusa avec un rictus de dégout. Il aimait le thé, mais l'acidité de la marmelade semblait le déranger. Ce n'était pas encore parfait, pensa Florian, mais c'était un bon début.

Pendant qu'ils terminaient leur boisson en s'envoyant des œillades dont Florian se sentait à nouveau exclu, ce dernier demanda à quitter la table et s'en fut dans le salon, pour jouer avec ses Lego. Il construisit une voiture verte avec de grosses roues, puis un château avec le toit bleu et enfin un dragon blanc. Il venait de le terminer quand il sentit une présence derrière lui.

- C'est très ressemblant.

Remus avait ce sourire qu'ont les adultes lorsqu'ils sont fiers de leur enfant. Florian avait l'habitude de le voir sur les visages de sa maman ou de sa marraine. Le voir sur le visage de Remus était assez perturbant; pas désagréable, simplement déroutant.

- Comment tu sais à quoi ressemble un vrai dragon? interrogea l'enfant.

- J'en ai vu sur les couvertures de tes livres. Celui-ci ressemble furieusement à celle du Magicien Merveilleux, tu ne trouves pas?

Florian se concentra sur sa construction. Remus n'avait pas complètement tort, il était vraiment ressemblant. Florian fut si content de lui qu'il estima ne plus pouvoir faire mieux ce jour-là. Il décida donc que son dragon allait attaquer le château-fort construit quelques instants plus tôt.

Plongé dans son jeu, Florian ne remarqua pas que Sylvana sortait leurs premiers albums photos pour les montrer à Remus. S'il l'avait remarqué, il aurait sauté sur l'occasion de revoir tous ces moments dont il se souvenait avec plus ou moins de netteté ou dont on lui avait tellement parlé qu'il était maintenant persuadé de les avoir réellement vécus. Il aurait alors développé ses talents de conteur pour expliquer tel ou tel détail à son... à Remus. Il adorait regarder les sept albums - un par année - que collectionnait sa maman. Les photos lui permettaient de conserver un lien avec ses grands-parents qu'il ne voyait que trois ou quatre fois par an. Sylvana avait trouvé cela important lorsqu'il était un petit bébé. Maintenant, il aimait revoir ce qu'il avait vécu comme il se racontait volontiers des histoires.

Ce n'est que lorsque Remus rit doucement qu'il tourna la tête. Sylvana lui montrait l'album de la première année de Florian. Si Remus riait, c'est qu'ils en étaient à cette horrible photo de lui dans un bain. Pourquoi les parents s'obstinaient-ils à prendre des photos de leur progéniture dans cette pose ridicule? C'était certainement une vengeance pour toutes les nuits blanches de colique.

Florian abandonna son dragon qui vint se fracasser sur la plus haute tour de son château - celle abritant la princesse - pour sauter sur le canapé à droite de sa maman. Il fut accueilli par un "pas les pieds sur le canapé" exaspéré.

- Je peux voir? ânonna-t-il pour la forme.

Sa maman soupira et centra l'album pour que Remus, à sa gauche, et Florian puissent tous les deux voir les différentes images, immobiles sur le papier glacé. Ils passèrent rapidement en revue les différents stades de la petite enfance de Florian. Elle s'attarda sur quelques photos pour s'extasier sur la petitesse de son fils, à l'époque, ce qui exaspéra Florian. Remus, heureusement pour lui, ne fit aucun commentaire de ce genre. Il nota simplement que Sylvana était toujours aussi jolie - ce à quoi elle rougit - et qu'elle changeait souvent de coupe de cheveux. Il exprima d'ailleurs rapidement sa préférence pour celle qu'elle arborait actuellement. Florian était d'accord avec lui : elle était bien plus jolie avec les cheveux lâchés flottant dans son dos.

Le deuxième album s'ouvrit. Florian savait que sa marraine y apparaissait moins, mais Remus semblait l'ignorer.

- C'est parce qu'elle a déménagé, se sentit obligé d'expliquer Florian. Elle ne pouvait pas rester avec nous, je grandissais et prenais beaucoup trop de place.

- Ce n'est pas tant toi que tous tes jouets qui prenaient beaucoup de place, l'apostropha Sylvana. Ça n'a d'ailleurs pas beaucoup changé, soupira-t-elle en regardant les Lego abandonnés d'un regard désapprobateur.

- Pas tant que ça. Et puis j'arrête pas de ranger!

- Donc elle a déménagé? interrogea Remus, coupant court à une dispute qui n'aurait pas manqué d'arriver.

- Oui, reprit Sylvana, mais elle n'est pas partie loin. Elle vit à deux rues d'ici. Tu la croiseras certainement demain, elle vient déjeuner avec son petit-ami, un mec sympa mais un peu étrange. Il est d'ailleurs sur les photos les plus récentes, je te le montrerai.

Les images défilèrent. Sylvana pointa du doigt Papy Jack et Mamie Gwenn qui apparaissaient sur les photos de Noël. Il y avait aussi quelques photos de la famille de Cassandre, datant de l'été précédent.

- Tu reconnais Cassandre, à droite.

- Oui, oui. C'est fou, elle ressemble étonnamment à une fille qui était dans mon lycée, intervint Remus.

Sylvana le regarda de biais, attendant une éventuelle justification.

- Une fille bien plus jeune, je ne connaissais même pas son prénom, mais ton amie lui ressemble beaucoup. Bref, conclut-il d'un geste de la main, rien de bien important. Tu continues?

- A côté d'elle, c'est son frère, Justin.

- Il est rigolo, Justin, ajouta Florian.

- Et banquier, ce qui peut aider quand on doit faire un prêt. Il nous a aidés à obtenir celui pour la maison. Il vit à Douvres. Ensuite tu as Jade, la femme de Justin - ils étaient fiancés à l'époque - puis Victoria, leur petite sœur.

- Elle, je l'aime pas beaucoup.

- Elle n'est pas très proche de Cassandre. On la voit rarement, expliqua Sylvana.

- Et les deux personnes derrière, ce sont ses parents? demanda-t-il.

- Sebastian et Melody, oui. Je les considère un peu comme ma famille. J'allais souvent chez eux quand j'étais petite, au point qu'ils ont envisagé de me donner un double des clés de leur maison pour que je n'attende pas dehors quand Cassie revenait de pension pour les vacances.

- Je ne vous savais pas amies à ce point, s'étonna Remus.

- Amies, sœurs, voisines, on est un peut tout cela en même temps. Ça fait dix-huit ans qu'on se connaît. On s'est rencontré en primaire et on est très vite devenues amies. Depuis le temps, je la connais par cœur. Je ne crois pas qu'il y ait une seule chose que je ne sache pas sur elle. On a toujours partagé tous nos secrets, les confidences comme les bêtises.

Florian s'empara de l'album que Sylvana avait délaissé pour raconter ses souvenirs de petite fille à Remus et en profita pour revoir les photos de sa marraine. Il cherchait à chaque fois quelque chose de magique sur ces images, mais il n'y avait jamais rien vu d'extraordinaire. Peut-être que les personnes magiques se cachaient toujours derrière des masques de normalité pour cacher leur secret. Il se promit de poser la question à sa marraine le lendemain.

La journée se déroula tranquillement. L'après-midi, Remus proposa d'aller au parc et Florian emmena son ballon de football pour jouer avec quelques amis qui y venait régulièrement. Remus joua dans son équipe, mais il était très mauvais car il ne connaissait presque pas les règles du jeu, malgré de très bons réflexes. Leur équipe perdit cinq à neuf et Florian râla un peu pour la forme quand ils rentrèrent. Le soir, pourtant, du fond de son lit, il pensa que cette journée avait été plutôt chouette et que Remus gagnait peut-être à être connu et apprécié.

Le lendemain, Florian reprit l'habitude d'aller réveiller sa maman avant de descendre. Il voulait profiter un peu d'elle tôt le matin, car il savait qu'elle et Remus seraient très occupés le reste de la matinée. Elle avait invité Cassandre et Kingsley pour le diner afin de leur présenter son homme, et voulait mettre les petits plats dans les grands. Florian avait protesté devant ce déploiement d'adultes, argumentant que si chacun avait le droit d'inviter son amoureux, lui aussi voulait inviter la sienne. Sylvana avait donc téléphoné aux parents de Joan et l'avait invitée à passer la journée en leur compagnie. Florian en était très satisfait.

Il passa sa matinée à lui préparer un collage avec des fleurs, des feuilles et des cailloux qu'il avait collecté au parc la veille. Il y mit plein de couleurs et soigna sa présentation jusqu'à ce qu'elle lui semble impeccable. Il voulu rajouter une touche de rose – les filles aiment le rose, c'est bien connu – avant de s'apercevoir qu'il avait jeté tous les marqueurs, crayons et pastels de cette couleur trop peu masculine. Tant pis, il n'y aurait pas de rose. Florian ne pensait pas qu'une fille qui joue au foot s'en offusquerait.

Florian aimait dessiner. Il ne savait pas s'il était doué, mais ça lui plaisait beaucoup d'assembler les choses, de tracer sur le papier des formes reconnaissables et de les colorer avec des couleurs inappropriées. Il était très heureux quand son entourage le félicitait pour la vraisemblance de ses dessins et en offrait régulièrement aux personnes qu'il aimait. Sylvana en avait des caisses entières qu'ils triaient une fois par an en jetant les moins bonnes œuvres du jeune artiste. Elle lui disait souvent qu'il possédait un regard qui n'appartenait qu'à lui pour repeindre ce qui l'entourait parce qu'il aimait observer leurs albums photos pendant des heures. Florian n'avait pas vraiment compris ce que sa maman voulait dire, mais il avait poliment acquiescé.

Il recréait de très beaux paysages, des arbres majestueux, des fleurs délicates et des dragons terrifiants. Ses bonshommes, par contre, avaient toujours l'air un peu figés. Sylvana l'avait inscrit à un cours de dessin pour qu'il affirme son talent et il y avait appris une multitude de techniques. Le collage était la dernière qu'il avait découverte et il ne jurait plus que par ça depuis, en confectionnant pour chaque nouvelle opportunité qui se présentait. Cela pouvait être après la vision d'un dessin animé en particulier – il avait fait un magnifique montage sur Nicky Larson dernièrement – la découverte d'une nouvelle matière, un anniversaire, le début d'un nouveau mois ou une fête calendaire. Aujourd'hui, il voyait Joan pour la première fois depuis près de deux mois et l'occasion était trop belle.

Quand il lui sembla que son travail était achevé, il demanda à sa maman s'il pouvait regarder la télévision. La réponse fut sans appel.

- Seulement quand tu auras rangé tout ton matériel de dessin. Tu as mis des morceaux de papier partout! le prévint sa mère en jetant un coup d'œil à la table sur laquelle il avait travaillé. Je ne suis pas ta bonne et je ne veux pas passer derrière toi pour ranger à ta place, surtout que tu ne retrouves jamais rien quand je range.

Florian soupira, visiblement exaspéré, mais s'exécuta. Il avait à peine entamé son rangement que la porte sonna. Il courut l'ouvrir, négligeant au passage la tâche que s a maman lui avait confiée et se jeta dans les bras de sa marraine qui arrivait avec Kingsley.

- Bonjour Florian! le salua-t-il.

- Bonjour, bonjour, lui répondit Florian. Maman, cria-t-il, Marraine est là! Et Kingsley aussi!

- Entrez, entrez, s'exclama-t-elle de la cuisine. On n'a pas encore complètement fini de cuisiner. Florian, ajouta-t-elle, tu les conduis au salon et tu leur offres à boire?

Florian s'exécuta et conduisit ses invités, en parfait gentleman, comme le lui avait montré Remus. Il avait expressément évité de ranger ses collages et sa marraine s'extasia un instant sur ceux-ci avant de l'aider à rendre la place nette. Pendant qu'ils s'activaient, Florian se pencha vers sa marraine d'un air conspirateur.

- Marraine, je peux te poser une question... secrète devant Kingsley? Je veux dire, il est comme toi ou comme maman?

- Comme moi, Florian, comme moi.

Florian jaugea l'homme du regard. Cela ne l'étonnait pas vraiment que Kingsley soit sorcier. Tous les africains n'étaient-ils pas un peu chaman, comme il l'avait vu dans un documentaire sur l'Afrique?

- Bon, alors, je voulais savoir, continua l'enfant, comment tu fais pour cacher la magie?

Cassandre sourit et s'apprêta à lui répondre quand Sylvana et Remus entrèrent dans la pièce. Son sourire disparut aussi vite qu'il était venu et elle marmonna, un peu trop sèchement au goût de Florian

- Plus tard, plus tard.

Sylvana vint embrasser ses invités et se tourna vers Remus avec la ferme intention de les présenter.

- Remus, je te présente Cassandre Bach, ma meilleure amie et la marraine de Florian; et son ami, Kingsley Shaklebolt. Cassandre, Kingsley, voici Remus...

- Lupin, termina Cassandre à sa place.

Sylvana perdit son sourire, comme son amie avant elle. Florian s'assit sur le canapé dans sa position préférée pour regarder les films d'action – les jambes croisées et le haut du corps tiré vers l'avant – pressentant une discussion passionnante.

- Vous vous connaissez? Questionna Sylvana.

- Vaguement, répondit Cassandre. On était dans le même pensionnat. Il faisait partie d'un groupe très populaire à l'époque. Tout le monde connaissait Remus Lupin et ses amis.

Elle se tourna vers Remus qui semblait très mal à l'aise. Il avait les bras croisés sur la poitrine et se balançait d'un pied sur l'autre.

- Par contre, ajouta-t-elle, la réciproque n'est pas forcement vraie avec un sourire crispé. J'étais beaucoup plus jeune et pas vraiment au centre de l'attention générale. Tu ne dois pas te souvenir de moi, Remus.

- Oh, si! la contredit Sylvana avec un sourire plus détendu que l'atmosphère. On regardait les photos, hier, et tu lui rappelais quelqu'un. Personne n'oublie ton joli minois, Cassie.

Cassandre dévisagea Remus comme si elle voulait vérifier qu'il n'allait pas mentir. Elle regardait parfois Florian de la même façon, surtout quand il avait fait une bêtise.

Pour couper court à l'interrogatoire que Cassandre n'allait pas manquer de démarrer, Kingsley s'assit. Tout le monde l'imita, sauf Sylvana qui partit chercher à boire, après un regard chargé de reproches à Florian qui avait oublié sa mission. Elle revint avec une carafe de jus de fruits dans une main et cinq verres dans l'autre. Quand tout fut déposé sur la table, elle servit l'assemblée en commençant par son fils.

- Alors, comme ça, tu étais populaire, relança-elle, avec une clin d'œil pour Remus. Tu ne m'en as jamais parlé. En fait, tu ne m'as jamais parlé de tes années d'école, ni de tes amis.

Remus ne semblait pas avoir envie d'en discuter. Florian, qui s'était levé et adorait les histoires, le pressa, autant physiquement qu'oralement, de leur raconter tout ce qu'il avait fait quand il était adolescent. Il pressentait que le récit serait passionnant.

- Bien, bien, le calma Remus, je raconte. Mais seulement si tu promets d'être sage et de ne pas m'interrompre!

L'enfant promit avec un grand sourire, prit son jus de fruits, une paille et se rassit sur son fauteuil, l'attention toute tournée vers le conteur.

- C'est un peu loin, tout ça, alors vous excuserez le manque de détails, d'accord?

Tous acquiescèrent.

- J'avais trois amis à l'école. Les meilleurs du monde. On s'était baptisé les Maraudeurs, car on passait nos nuits à arpenter les couloirs du collège malgré le couvre-feu. On était tous pensionnaires, dans la même année et dans la même chambre. Il y avait James, Sirius, Peter et moi. Ce n'est pas qu'on était vraiment populaires, mais on faisait pas mal de bêtises. Du coup, tout le monde savait plus ou moins qui on était.

Remus se détendit au fur et à mesure qu'il racontait son histoire. Il était question d'amitié, de professeurs, de cours, d'aventures, de batailles de polochons et de beaucoup, beaucoup de rires.

- Et nous avons quitté l'école en nous promettant de nous revoir aussi souvent que possible. Bien sûr, ce n'était plus pareil, mais on est restés très unis...

Remus semblait sur le point d'ajouter quelque chose, mais il s'interrompit. Ce fut Sylvana qui le relança en posant la question qui brulait les lèvres de Florian.

- Tu les revois encore?

Remus reprit l'expression de malaise qu'il avait affiché au début de son récit.

- James est mort dans un attentat, avec sa femme. Leur maison a explosé. Seul leur fils a survécu.

Sylvana ouvrit la bouche, surprise, mais aucun son n'en sortit. Elle se pencha légèrement vers Rémus, comme pour le soulager par sa présence physique, mais retint son geste. Elle avait visiblement l'habitude d'écouter, pas celle d'agir.

Cassandre et Kingsley conversaient par regard et Florian ne comprenait pas grand chose. Il fit alors la seule chose qu'il pensait juste : il s'assit à côté de Remus et le serra contre lui, volant, sans le savoir, au secours de sa maman, incapable de réagir. L'adulte se laissa faire.

- L'ETA? questionna finalement Sylvana.

Remus hocha lentement la tête, en silence.

- Et Sirius? continua-t-elle.

- Il était à l'origine de l'attentat.

Le silence fut encore plus lourd, si c'était possible.

- Et Peter? termina-elle, appréhendant une réponse encore pire que les précédentes.

- Tué par Sirius alors qu'il tentait de l'arrêter.

Cassandre et Kingsley joignirent leurs mains pour s'accrocher l'un à l'autre.

- Je suis désolée, souffla Sylvana. Je ne voulais pas... Je ne pensais pas... Enfin, je ne savais pas que tu avais vécu autant de... Tu ne m'en as jamais parlé... Pardon.

- Ce n'est pas de ta faute, la rassura Remus. Ce n'est pas un souvenir agréable, mais ça fait dix ans, maintenant. Je suis passé outre. C'est un peu grâce à toi, d'ailleurs.

Il lui sourit en la regardant droit dans les yeux. Kingsley et Cassandre entrelacèrent leurs doigts comme pour ne pas être en reste dans ce moment amoureux. Florian trouvait que ça ressemblait à un mauvais film romantique. Après un dernier silence, il demanda enfin:

- Quand est-ce qu'on mange?

Cassandre rit doucement et Sylvana se leva pour surveiller son four. Kingsley se pencha vers Florian pour le taquiner sur son ventre sans fond. Très opportunément, quelqu'un sonna à la porte à ce moment-là. Florian courut, comme à son habitude, pour l'ouvrir et tomba sur Joan et sa maman.

- Maman, Joan est arrivée!

- Fais-la entrer, cria une nouvelle fois Sylvana de la cuisine dont elle jaillit un instant plus tard.

Pendant que la maman de Joan s'excusait de son retard, Florian conduisit son amoureuse dans le salon, lui prenant un verre de jus de fruits au passage, et lui donna son collage.

- Tiens, j'ai fait ça pour toi ce matin.

Il savait que Joan aimait les cadeaux. D'après sa maman, toutes les filles aimaient les cadeaux. Ce que Florian aimait, c'était ce que qu'elle lui rendait quand elle en recevait un. Elle lui offrait un baiser. Pas un sur la bouche, grand dieu non. Les adultes faisaient ça – Sylvana et Remus, Cassandre et Kingsley – mais Florian ne le ferait pas avant... au moins trente ans. Il recevait parcimonieusement les doux baisers de Joan sur les joues et s'en accommodait très bien, profitant de chacune des occasions qui lui étaient offertes.

Pendant cet intermède fort à propos, les adultes s'étaient déplacés vers la grande table de la salle à manger autour de laquelle Sylvana se pressait pour installer ici une assiette, là un couvert, ailleurs un verre. Florian et Joan s'installèrent en bout de table, comme ils le faisaient toujours quand ils étaient à deux, et commencèrent à jouer avec leurs fourchettes. Celle de Joan avait été emprisonnée au milieu de son assiette par le terrible Capitaine Couteau et le brave Fourchette-Pan démarrait un duel avec son ennemi de toujours pour la délivrer quand le repas fut servi. Les couverts reprirent aussitôt leur fonction première et les deux enfants dévorèrent littéralement ce qui se trouvait devant eux. Puis, ils délaissèrent les adultes qui abordaient des sujets ennuyeux et incompréhensibles pour jouer dans la chambre de Florian. Leur imagination débordante ne leur fit prendre conscience du temps qui était passé qu'au moment où la maman de Joan vint la rechercher. Florian et elle protestèrent haut et fort qu'il était beaucoup trop tôt, mais rien n'y fit : Joan dut rentrer chez elle avec la promesse de revenir le voir très, très, très vite.

Quelques heures plus tard, Florian se retrouvait dans son lit, rompu par la journée intense qu'il avait vécu. Il ne doutait pas qu'il se souviendrait encore longtemps du weekend qu'il avait passé.


Là, il va falloir que je m'excuse. Je n'ai eu de cesse de repousser au lendemain l'écriture de ce chapitre. J'ai d'abord fait cinq versions alpha avant de trouver que tout était très mauvais (surtout mon angle de vue). J'ai ensuite essayé de me mettre dans la peau d'un enfant de 7 ans, ce qui est remarquablement compliqué quand on en a presque vingt de plus, je me suis ensuite aperçue que, malgré les longueurs que prenait le chapitre, je n'arrivais pas à y mettre tous les éléments que je voulais voir aborder, d'où une grande frustration. Rajoutez à cela un déménagement, une vie à reconstruire et un changement de travail et vous pourrez peut-être me pardonner.

Quoiqu'il en soit, sachez que cette histoire n'est pas abandonnée. Point du tout. J'accouche simplement dans la douleur et le travail est toujours long et difficile. Je reviendrai (bientôt?) avec la suite. Je dois retrouver mes notes pour le chapitre suivant dans un de mes cartons pas encore déballé et vous l'écrire.

Des questions? Des avis à partager? Des cris de protestation? Des mots d'amour? C'est possible, désormais, grâce aux commentaires! Usez-en, abusez-en, c'est toujours agréable de savoir son travail suivi.

Les commentaires, c'est mieux qu'un après-midi entier avec Joan (dixit Florian).