Merci à tous ceux qui ont lu cette fanfiction, et plus particulièrement à ceux qui m'ont laissé leur avis dans de nombreuses reviews! Bonne lecture de ce bref Epilogue qui achève ainsi cette fanfiction.


Epilogue

Quatre morts.

Ses doigts glissèrent lentement sur la couverture en cuir d'un vieux carnet élimé. Sa tête dodelina sur l'oreiller, au rythme des gémissements incessants qui lui parvenaient. Plus que quelques secondes avant que le produit ne fasse effet… Pour que le calme revienne…

Pour un temps.

Une infirmière sortit de la chambre et referma la porte derrière elle.

Epuisé, Morgan tourna alors lentement la tête vers le lit à côté du sien. Il sentit les sutures tirer horriblement dans son dos. Reid avait les yeux troubles et agités et tremblait en tirant sur les liens qui l'entravaient au lit. Il revivait une fois de plus le calvaire dont il venait de sortir… Hanté par les souvenirs et l'effroi.

Lentement, Derek ouvrit la bouche, pour lui dire quelques mots de réconfort, pour lui signifier sa présence et son soutien… Mais aucun son ne franchit le seuil de ses lèvres craquelées. Il n'arrivait pas à trouver de baume à appliquer sur les souvenirs à vif du jeune homme, pour apaiser son ami qui commençait déjà doucement à sombrer dans un état de mi-conscience…

Les médecins avaient renoncé à essayer de lui parler et préféraient l'assommer plutôt que de le laisser se détruire petit à petit.

Les yeux de Derek se détournèrent du corps de Reid et ses mains impuissantes glissèrent une nouvelle fois sur le petit carnet noir qu'il avait machinalement extirpé de la poche du tueur… Il l'avait lu et relu, en essayant de trouver un sens à tout cela, de connaître l'homme qu'il avait tué sous l'impulsion de la colère…

Une victime, en quelque sorte

Derek soupira et passa une main lasse sur son visage. Un vague murmure aigu parvenait encore du lit d'à côté dans lequel Spencer était couché, flasque et dépouillé de toute raison.

Il avait lu dans ces gribouillis et cette fenêtre sur la vie du tueur, toute la souffrance d'une personne dépassée, écrasée et brisée… Longtemps, Eric avait été sous la coupelle de son frère, un véritable malade paranoïaque qui l'avait torturé et humilié à de nombreuses reprises… Jusqu'au jour où Thomas avait proposé au plus jeune de lui céder de la plus horrible manière, en échange de la tranquillité et de la sécurité. Après de longues hésitations qui s'étaient traduites par des coups et des sévices supplémentaires, le garçon alors âgé de dix-sept ans avait accepté, cédé à son aîné.

Pour le pire…

Les tortures ne s'étaient pas pour autant arrêtées… Au contraire, et elles étaient couplées d'abus sexuels et d'attouchements… L'enfer avait finalement cessé à la mort de son frère. Brisé et abandonné, le jeune homme qui avait perdu depuis longtemps la conscience du bien et du mal, avait dés lors reproduit, encore et encore, le même schéma, pour se prouver qu'il n'avait pas été plus faible qu'un autre, pour compenser sa culpabilité et pour combler le vide laisser par la mort de son bourreau, seul contact humain –ou presque- qu'il avait eu après la mort tragique de ses parents.

Tuer ses victimes était pour lui un acte honorable… Bien qu'il ait endossé la personnalité étrange de son frère, il se voulait meilleur que Thomas en accordant à tous ces jeunes hommes la paix et la tranquillité qu'ils méritaient… Tranquillité que son frère lui avait promise, sans jamais la lui offrir.

Morgan sentit des larmes perler dans ses yeux et déglutit difficilement. Il avait espéré lire de la haine dans ces pages jaunies et ternies par l'encre qui avait coulé à certains endroits, trouver une justification à l'acte horrible qu'il avait lui-même posé…

Trouver au moins un élément réconfortant après toute cette enquête… Mais tout se confondait entre le noir absolu et le dégoût… L'amertume et le désespoir le poignardaient plus profondément que la lame d'Eric et ce, à chaque gémissement torturé de Reid, à chaque respiration et à chaque battement de cœur.

Il embrassa d'un regard dénué de conviction et empli de larmes la chambre d'hôpital dans laquelle il se trouvait… Le silence avait remplacé les sordides lamentations de son ami et la pièce exigüe sonnait vide.

Prentiss, après leur avoir longuement rendu visite, était rentrée avec JJ qui s'en était sortie avec une fracture, pour se reposer... Toutes deux étaient en état de choc et avaient grandement besoin d'un peu de sommeil.

Hotch, quant à lui, se trouvait dans la chambre en face de la leur, dans le coma. Personne ne pouvait dire s'il allait ou non se réveiller. Son fils, Jack, était passé, un peu plus tôt. Morgan l'avait entendu sangloter après son père dans le couloir, l'appeler pour qu'il se réveille et le prenne dans ses bras… Pour ne pas qu'il l'abandonne, pour ne pas qu'il parte à jamais « comme maman ».

Insupportable.

Morgan s'était bouché les oreilles pour ne pas entendre la peine de cet enfant qui avait perdu sa mère et peut-être son père. Il ne pouvait pas affronter ou même percevoir un tel chagrin, une telle souffrance venant d'un enfant délaissé alors que lui-même était rongé par le remords et les doutes… Doutes que partageaient les affaires internes qui souhaitaient l'interroger au sujet de la mort d'Eric… pour le suspendre ou exiger son renvoi.

Quatre morts.

Il avait tué de ses propres mains un homme maîtrisé qui gisait au sol, à sa merci… Un jeune agent et l'inspecteur Timson étaient morts dans une maison piégée… Et Dave s'était vidé de son sang à l'étage d'un lugubre chalet, seul avec un cadavre et des centaines de mouches qui volaient au-dessus de lui comme des vautours.

Abandonné.

Sans même une présence pour le soutenir, pour l'aider, pour l'accompagner ou pour arrêter les torrents de sang qui se répandaient autour de lui… Il était mort dans le froid, dans la douleur et dans le noir…

Morgan se mit doucement à sangloter en pensant à Rossi… Pendant qu'il s'enfonçait dans les bois sans se soucier de ses coéquipiers pour sauver Reid et se venger, un homme était mort dans d'atroces circonstances.

Un être humain, comme lui, qui avait vécu, aimé, ri, respiré, travaillé,…

Bien sûr, de cette manière, il avait pu sauver Reid… Mais de quoi ? De la mort ? De ce repos éternel qui efface la douleur ?

Il lança un regard perdu à son ami fermement ligoté à son lit et qui bavait sur ses draps, la tête penchée vers la droite, le regard rivé sur un monde que lui seul pouvait voir.

Spencer avait déjà tenté de se donner la mort à l'hôpital. Par trois fois, il s'était rouvert les veines. Jusqu'à ce qu'on l'attache et qu'on le drogue…

Aucun médicament, aucune parole, aucun pansement, rien ne pouvait soigner cette plaie béante qui creusait son esprit et qui le ravageait…

Le prochain moment d'inattention serait d'ailleurs peut-être le bon… Et tout serait vain… La mort de Rossi, les pleurs de Jack, le sang sur ses mains…

Son esprit était encore revenu à l'image de cet homme qu'il avait tant apprécié et admiré. Morgan hoqueta de douleur en repensant à nouveau à l'agonie de David. Il se mit doucement à pleurer.

Encore.

Il pensa qu'en ce moment même, Rossi devait se faire charcuter sur une table d'autopsie, qu'on l'ouvrait sans sentiment sur une table glaciale… Il pensa ensuite qu'il ne devait de toute manière plus rien sentir et pleura plus fort.

Cette histoire n'avait pas seulement emporté quatre vies, en fin de compte… Mais elle leur avait volé à tous leur existence. Il sanglota doucement dans ce lit qui formait de nombreux plis sur son corps, jusqu'à ce que le vide ne s'empare à nouveau de lui et le paralyse…

Les larmes se tarirent. Tout était absurde. La vie. La mort. Il avait sauvé un homme qui voulait mourir, pour en laisser mourir un autre qui souhaitait vivre et en avait finalement tué un dernier qui n'avait été que le fruit de sévices et de douleurs…

Hébété, Morgan songea vaguement à ce point précis où tout homme sombre dans la folie… Il pensa à Reid qui l'avait atteint par la torture… A lui-même qui n'était plus qu'un meurtrier… Et à Eric…

Le point de rupture…

La frontière entre bourreau, victime et folie ne tenait qu'à un fil…

Quatre morts…dans les faits.

Et tous autres avaient sombré avec eux.

Fin.


N'hésitez pas à me laisser un commentaire... Et pour répondre à une question qui m'a été posée, je ne compte pas faire de suite à cette histoire qui pour moi doit se terminer ici... Bien sûr, je pourrais décrire de quelle manière Reid va finir par se pendre, de quelle manière Morgan va être mis à la porte de la BAU ou décrire le moment où l'on débranchera Hotch, mais je préfère laisser une porte ouverte à d'autres possibilités et vous laissez créer vous-même la suite des évènements... ;-)

Encore merci de m'avoir lue. Je reviendrai bientôt avec de nouvelles fanfictions...