Disclaimer: Rien n'est à moi hormis l'histoire, évidemment.

Rating: T, pour langage.

Pairing: Kanda x Allen

Résumé: Il empruntait toujours le même trajet. A la dalle près, il pouvait même marcher les yeux fermés. Personne ne se risquait dans le sillage de l'enfant maudit. Jusqu'à ce jour où...

Petit mot de l'auteur: Enfin le dernier chapitre de cette toute petite fic! En espérant que ce dénouement vous plaira ^^ Merci encore à tous ceux qui ont reviewé! Vos critiques, commentaires et mots d'encouragement m'ont beaucoup apporté (et m'ont surtout fait très plaisir! =D). Sur ce, bonne fin de lecture et à une prochaine fois!


Kanda quitta l'école sans un mot, ignorant les rumeurs malveillantes naissant sur son passage, les regards mauvais des professeurs et ceux, méprisants, des passants. Au creux de son cou, les larmes d'Allen avaient tari, remplacées par une lourde torpeur et une appréhension craintive. Ses bras frêles se resserrèrent inconsciemment sur le cou du brun, s'assurant de sa présence à ses côtés. L'intéressé ne le repoussa pas, conscient que le plus jeune avait besoin de ce contact comme un noyé d'oxygène. Ses bras callèrent un peu mieux le petit corps contre lui, le laissant constater avec amertume les ravages des privations et des maltraitances sur la silhouette osseuse d'Allen. Il distribuait les regards menaçants, défiant quiconque de s'approcher du plus jeune ou même d'en émettre l'idée à voix haute. Allen lui en fut reconnaissant.

Enfin le kendoka s'immobilisa devant une grande maison de style japonais, toute en tatamis et cloisons de papier. Ils gravirent un étage, Allen toujours dans les bras du brun, pour finalement arriver dans une chambre vaste, parfaitement éclairée par la lumière du jour. Là, Kanda desserra son étreinte sur le plus petit qui paniqua, s'agrippant de plus belle à sa chemise, son visage effrayé enfoncé dans le cou pâle et les larmes recommençant à couler.

Kanda soupira. Puis, doucement, il s'assit sur le lit et repoussa méthodiquement Allen, usant de toute sa patience et toute sa persuasion pour le convaincre que non, il n'allait pas s'en aller, ni mourir, et encore moins l'abandonner. Finalement, Allen accepta de s'écarter, mais garda ses mains fermement ancrées sur la chemise du brun. Tête baissée, ses yeux fuyants évitaient tant bien que mal le regard de Kanda, honteux. Il avait craqué. Il s'était accroché à lui, il s'était conduit comme un parfait imbécile. Et, pire encore, il ne pouvait absolument pas se résoudre à le lâcher. Il ne voulait plus être seul plus jamais. Une fois encore, Kanda prit sur lui et posa des mains qu'il voulait rassurantes sur celles d'Allen. Ses gestes étaient maladroits, un peu gauches. Bien qu'il fasse tout ce qu'il pu, il restait un profond asocial. Les contacts humains le rendaient mal à l'aise, principalement parce qu'il ignorait comment s'y prendre, ne s'y étant jamais attaché avant, jugeant toute relation inutile. Pourtant, ce simple contact sembla rasséréner Allen. Encouragé par cette réaction positive, Kanda continua.

« Lâche-moi, Moyashi. Je ne vais pas m'en aller. »

L'intéressé déglutit bruyamment, ses doigts relâchant peu à peu l'étoffe, millimètre par millimètre, jusqu'à libérer complètement le kendoka qui se leva immédiatement, arrachant un souffle paniqué à Allen.

« Imbécile, ne t'affole pas comme ça. Je vais chercher de quoi te soigner et je reviens. »

Allen sembla comprendre mais ne se calma pas pour autant. Ses mains serrèrent le drap du lit et sa respiration ne se tranquillisa pas. Il hocha pourtant la tête en guise d'assentiment, le regard toujours ostensiblement baissé. Quelques minutes s'écoulèrent avant que Kanda ne revienne dans la chambre, une trousse de secours sous le bras. A peine fut-il assis sur le lit que les mains d'Allen vinrent se placer d'autorité sur sa chemise, froissant d'avantage le tissu déjà bien maltraité. Mais Kanda n'y prêta pas attention. Doucement, il entreprit de déshabiller le plus jeune, découvrant avec une grimace les ravages qui marquaient le corps d'Allen. De multiples cicatrices barraient ses flancs, ses côtes saillantes étaient recouvertes d'hématomes plus ou moins récents, de griffures et autres marques similaires, colorant la peau tendre d'un panel de couleur oscillant entre le rouge, le bleu et le violet. Un énorme soupire lui échappa avant qu'il ne se mette au travail, lâchant un « t'es vraiment stupide, Moyashi » qui résonna dans la pièce. Allen se laissa faire, totalement passif sous ses mains, grimaçant parfois lorsque la douleur se faisait vraiment trop insoutenable. Enfin, toutes les blessures qui striaient son corps furent correctement soignées. Ne restaient plus que celles de son visage.

Kanda releva la tête d'Allen, le forçant, encore, à rencontrer son regard. Les larmes avaient laissé sur ses joues de longues trainées rougeâtres, là où la peau était irritée par le sel. Ses yeux métalliques avaient enfin perdu ce voile terne et résigné au profit de quelque chose de plus incertain, comme si Allen était perdu entre deux eaux, incapable de pencher d'un côté plutôt que de l'autre. La honte, l'espoir, la peur et la gratitude se battaient dans ces eaux mercures, arrachant au kendoka un claquement de langue agacé.

« Combien de temps encore comptes-tu te morfondre ? »

Surpris, les yeux d'Allen rencontrèrent ceux de Kanda, dont les traits s'étaient déformés en une moue agacée. Le petit blanc ouvrit la bouche mais les mots ne vinrent pas.

« Tu sais quoi ? T'es vraiment bête. » continua Kanda.

« Sur quoi hésites-tu ? Tu sais ce qu'il te reste à faire, alors pourquoi réfléchis-tu ? A moins que tu ne sois trop stupide pour comprendre ce que je t'ai dit tout à l'heure ? »

Dans les yeux d'Allen, la surprise fit place à l'outrage et ses yeux s'écarquillèrent, une nouvelle force naissant au fond de ses prunelles, tandis qu'il ouvrait et fermait la bouche sans réussir à lâcher un mot.

« Ou alors tu as peur ? Tu es donc si bête que tu as peur de vivre ? Tu es si faible que ça ? »

La chose au fond du ventre d'Allen s'agita de plus belle, grondant d'indignation. Ses yeux brillaient de plus en plus, reprenant les couleurs de la vie à chaque pique que lui envoyait Kanda. Finalement, le kendoka décida d'en finir.

« La taille de ton cerveau est donc proportionnelle à celle de ton corps, Moyashi?

_ Je ne suis pas un moyashi, Ba-Kanda ! »

A peine eut-il crié ces quelques mots qu'Allen se figea, sous le choc, tandis que sur le visage de Kanda fleurissait un sourire satisfait. Lentement, il passa une main dans les cheveux du plus jeune, ébouriffant ses mèches blanches d'un geste maladroitement affectueux. Encore abasourdi d'avoir ainsi haussé la voix et insulté son sauveur, l'adolescent n'osait presque plus respirer, les mains crispées sur sa bouche comme la toute première fois où il s'était ainsi laissé allé. Mains qui lui furent retirées par celles du kendoka qui s'était lentement rapproché, son nez frôlant celui du plus jeune et leurs deux souffles se mêlant à la lie de leurs lèvres.

« Je te préfère comme ça, idiot de moyashi… » murmura le brun, sa main frôlant tendrement la joue d'Allen.

Le plus jeune sentit sa respiration se couper sous la caresse, son cœur louper quelques battements puis repartir plus rapidement qu'avant, cognant contre ses côtes d'un bruit sourd et répétitif. Son sang battait à ses oreilles, irradiant de vie et impossible à ignorer. Jamais, depuis toutes ces années, il ne s'était senti si vivant. La présence du kendoka enflammait ses sens, réveillant des sensations dont il ne se souvenait même plus, en éveillant d'autres, des nouvelles, toutes plus incongrues et délicieuses les unes que les autres. La respiration haletante, ses yeux furent irrémédiablement attirés par les lèvres fines du brun, par cette teinte de porcelaine, cette langue mutine encore totalement vierge à ce jour. Lui non plus n'avait jamais embrassé personne, pourtant l'envie lui brûlait les reins, de plus en plus urgente et impérieuse. Enfin, Kanda combla la distance qui séparaient leurs deux visages, embrassant tendrement les lèvres du plus jeune, frôlant ses joues, caressant ses cheveux blancs, si blancs qu'ils semblaient de neige, de givre et de glace. Sa langue glissa furtivement sur les lèvres tendres qui s'entrouvrirent pour se refermer aussitôt, joueuses, tandis qu'un sourire taquin flottait sur les lèvres d'Allen. Kanda gronda de frustration en exigeant plus fermement l'accès à la bouche tendre, accès qui lui fut accordé dans un gémissement appréciateur. Les mains se perdirent dans les cheveux, sous les chemises, à l'orée des lèvres où se jouait un combat sans pause, chacun exigeant cette tendresse déroutante qu'il ne pouvait trouver que dans les bras de l'autre. Les corps se rapprochèrent, les mains se nouèrent, les langues s'entrelacèrent lascivement jusqu'aux toutes dernières limites. Le lien qui retenait les cheveux du brun se délia, libérant un fin voile couleur de nuit qui lui recouvrit les épaules, quelques mèches venant se mêler à celles, diamétralement opposées, d'Allen. Doucement, il pressa ses mains sur les épaules du plus jeune qui se laissa allonger sur le lit, entraînant le brun à sa suite.

Soudain, Allen les retourna d'un coup de rein et s'assit sur les hanches du kendoka qui, surpris, haussa un sourcil interrogateur. Les yeux gris brillaient d'une lueur nouvelle, forte, presque aveuglante. L'enfance ressuscitait au fond de ces billes mercures, une flammèche joueuse dansant sous ses paupières, un sourire mutin jouant sur ses lèvres. Allen Walker renaissait de ses cendres sous les yeux du brun qui, satisfait, passa une main tendre derrière la nuque de l'adolescent et l'attira à lui, espérant happer ces lèvres qui souriaient si maladroitement, comme si elles devaient réapprendre ce geste autrefois si naturel. Pourtant, Allen dévia au tout dernier moment, ne lui offrant que sa joue et un clin d'œil complice avant de se relever brusquement, jetant un « à demain, Ba-Kanda ! » moqueur, et de filer à l'anglaise, s'amusant des plaintes et autres menaces de morts qui fusèrent de la chambres où un kendoka très en colère pestait contre un moyashi inconscient.

Lorsqu'Allen rentra chez lui, ce soir là, il ne prit pas le même chemin que d'habitude. Le chemin du maudit resta désert tandis qu'Allen traça sa route dans la foule, le menton relevé et le regard perçant droit devant lui, un sourire incertain flottant au coin de ses lèvres. Plusieurs passants le bousculèrent, d'autres l'insultèrent, d'autres encore tentèrent de le maltraiter. Et chacun fut surpris par la disparition de ce gamin passif et soumis, chacun se trouva déconcerté par cet Allen fier et enfin soulagé. Il ignora les uns, répondit aux autres, et échappa aux derniers d'une pirouette, préférant éviter l'affrontement tant que son corps ne serait pas encore totalement remis de son long sevrage de soin et de nourriture.

Le lendemain et les jours qui suivirent virent renaître un Allen Walker comme certains l'avaient connu et aimé. Kanda resta constamment à ses côtés, s'assurant de la sécurité de son protégé jusqu'à ce que celui-ci soit capable de le faire seul, veillant à garder son moral et sa détermination au beau fixe grâce à ses piques constantes, lui rappelant sans cesse comment vivre, et lui donnant une raison de continuer. L'enfant maudit disparu petit à petit des mémoires, Kanda résistant inlassablement à n'importe quel imprévu. Jour après jour, l'étincelle au fond des yeux d'Allen se renforça, pour devenir flammèche puis brasier. Désormais, il ne restait plus rien de l'enfant craintif et apeuré qu'il fut alors. Plus jamais il ne marcha la tête basse ni ne baissa les yeux devant quiconque. Il répondait à chaque attaque, qu'elle soit verbale ou physique, et sa langue bien pendue n'avait d'égale que sa fougue et sa force. Il retrouva le sourire, un sourire étincelant qu'il n'adressait qu'à une seule personne…

« Kanda ! Attends-moi !

_ Tu n'avais qu'à te lever plus tôt, Moyashi.

_ Mon nom c'est Allen, Ba-Kanda ! Et je te signale que c'est ta faute si je n'ai pas beaucoup dormi cette nuit !

_ Comme si tu t'étais plaint…

_ Comme si t'avais besoin de me sauter dessus six fois de suite !

_ Grmbl…

_ Kanda...

_ …

_ Tu boudes ?

_ …

_ Oui, tu boudes !

_ Pas du tout.

_ … Eh, Kanda ?

_ Hmpf…

_ Je t'aime. »

… un kendoka bourru et asocial, qui un jour s'était trouvé sur sa route par hasard, au bon moment…