Chapitre 1 - L'héritier de Serpentard
[ Harry Potter & la Chambre des Secrets, Ch.17 ]
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Il secouait Ginny, mais sa tête ballottait de droite et de gauche, sans le moindre signe de vie.
- Inutile, elle ne se réveillera pas, dit alors une voix douce.
Harry sursauta et se retourna, toujours à genoux.
Un jeune homme de grande taille, les cheveux noirs, l'observait, adossé contre un pilier. Ses contours étaient étrangement flous comme si Harry l'avait regardé à travers une fenêtre aux vitres givrées. Mais il était parfaitement reconnaissable.
- Tom… Tom Jedusor?
Jedusor approuva d'un signe de tête sans quitter Harry des yeux.
- Qu'est-ce que vous voulez dire par « elle ne se réveillera pas? » demanda Harry, désespéré. Elle n'est pas… Elle n'est pas…
- Elle est toujours vivante, répondit Jedusor, mais c'est tout juste.
Harry l'observa. Tom Jedusor avait été élève de Poudlard cinquante ans auparavant et pourtant, il était là, devant lui, baigné d'une lueur brumeuse qui brillait autour de lui, avec le même visage qu'il avait à seize ans.
- Vous êtes un fantôme? Demanda Harry d'une voix hésitante.
- Disons plutôt un souvenir, répondit Jedusor d'une voix paisible. Conservé pendant cinquante ans dans un journal intime.
[…]
- Qu'est-ce qui est arrivé à Ginny? Demanda lentement Harry.
- Voilà une intéressante question, répondit Jedusor d'un ton aimable. C'est une longue histoire. La raison pour laquelle Ginny se trouve dans cet état, c'est qu'elle a ouvert son cœur et révélé tous ses secrets à quelqu'un qu'elle ne connaissait pas et qu'elle ne pouvait même pas voir.
- De quoi parlez-vous?
- Du journal intime, dit Jedusor. Mon journal. La petite Ginny y a écrit ses confidences pendant des mois et des mois, en me racontant ses petites préoccupations dérisoires, ses frères qui se moquaient d'elle, son arrivée à Poudlard, avec des vêtements et des livres d'occasion, et aussi -une lueur s'alluma dans les yeux de Jedusor- la grande question : le beau, le bon, le grand, le célèbre Harry Potter allait-il un jour l'aimer?
[…]
- Je dois reconnaitre que j'ai toujours eu le don de séduire les gens dont j'avais besoin. Alors Ginny m'a ouvert son âme, et il se trouve que son âme représente exactement ce qu'il me fallait. Ses peurs les plus profondes, ses secrets les plus obscurs me donnaient de la force, de plus en plus de force. J'ai senti grandir en moi un pouvoir infiniment plus grand que celui de la petite Ginny. Un pouvoir suffisant pour commencer à confier à Miss Weasley mes propres secrets, pour déverser un peu de mon âme dans la sienne…
[…]
- J'ai fait écrire à Ginny son propre message d'adieu sur le mur, et je l'ai amenée ici en t'attendant. Elle est devenue insupportable, mais il ne reste plus beaucoup d'énergie vitale en elle : elle en a trop mis dans le journal, c'est-à-dire en moi. Suffisamment en tout cas pour me permettre de me détacher de ses pages et de reprendre une existence autonome. Depuis que nous sommes arrivés ici, elle et moi, je t'ai attendu. Je savais que tu viendrais et j'ai beaucoup de questions à te poser, Harry Potter.
- Quoi, par exemple? Lança Harry, les poings serrés.
- Par exemple, dit Jedusor avec un sourire engageant, comment se fait-il qu'un bébé sans talent magique particulier ait pu vaincre le plus grand sorcier de tous les temps? Comment as-tu réussi à t'en tirer avec une simple cicatrice, alors que les pouvoirs de Voldemort ont été détruits?
Il y avait à présent une étrange lueur rougeâtre dans ses yeux avides.
- Qu'est-ce que ça peut vous faire? Dit lentement Harry. Voldemort a vécu après vous.
- Voldemort, dit Jedusor d'une voix douce, est à la fois mon passé, mon présent, et mon avenir, Harry Potter…
[…]
Dans un bruissement d'ailes, Fumseck tournoya alors au-dessus de Harry et laissa tomber sur ses genoux… le journal intime. Pendant une fraction de seconde, Harry et Jedusor, la baguette toujours levée, regardèrent le petit livre noir. Puis, sans réfléchir, sans hésiter, comme s'il avait toujours eu cette idée en tête, Harry empoigna le crocher du serpent et le plongea au cœur du livre.
...
Le cœur palpitant, il attendit durant quelques secondes un quelconque évènement qui aurait pu lui prouver que son idée avait eu l'effet escompté. Jedusor éclata d'un rire froid et ne cacha pas son hystérie.
- Pensais-tu peut-être que j'aurai laissé à ta portée un objet pouvant courir à ma perte? Détruire le journal ne change rien. Plus maintenant.
Son sourire s'agrandit.
- Il est trop tard, Harry Potter. Ton amie est morte. Elle vient de me fournir le reste de force vitale dont j'avais besoin pour retrouver mon corps.
Harry se releva, le teint livide.
- Vous mentez! C'est impossible…
- Tu n'es pas un héros, Potter! Seule la chance a su te sauver face à moi. T'attendais-tu vraiment à réussir à m'empêcher d'arriver à mes fins?
Il jeta un rapide coup d'œil au corps inerte de Ginny, et un rictus mauvais s'empara de ses lèvres.
- La vie de cette petite idiote aura finalement trouvé son utilité…
Le Survivant serra ses poings, la rage déformant son visage.
- Vous allez payer pour ça! Vous n'allez pas vous en tirer ainsi! Dumbledore…
- Dumbledore n'est pas là pour le moment! Et quand il sera de retour, Potter… Je serai loin. Et tu seras mort.