Cadeau de Novembre

Chapitre Six

- Granger !

Hermione se figea à l'entente de son nom, le pied posé sur le premier barreau de l'échelle, et se retourna vers la voix qui l'avait interpellé.

Draco Malfoy sortit alors du coin sombre de la pièce dans lequel il était dissimulé et fit quelques pas nonchalants vers la griffondor, les mains dans les poches, avant de s'arrêter au milieu de la pièce. En quelques grandes enjambées, la brune l'avait rejoint. Sa main claqua fortement contre la joue du serpentard qui essuya du bout des doigts le sang qui coula alors de sa lèvre, sans manifester le moindre signe de douleur.

- Je présume l'avoir mérité…

- Bien sûr que tu l'as mérité espèce de salopard ! Murmura furieusement la brune, pour ne pas attirer l'attention de son ami dans la pièce au-dessus. Tu n'es qu'un irresponsable Malfoy ! continua-t-elle sur le même ton. Un connard d'égoïste ! Et dire qu'après tu viens me faire la morale, alors que c'est toi qui l'as laissé seul, Malfoy ! Une semaine ! Qui sait ce qui aurait pu se passer en une semaine ! Y as-tu au moins pensé ! Il aurait pu sauter un nombre incalculable de fois ! Nous l'aurions retrouvé mort, éclaté en bas de la tour le lendemain ! Tu y as pensé à tout ça avant de te tirer, pauvre con ?

La brune, toujours très en colère mais se forçant à chuchoter, avait la voix qui chevrotait par moment, la faisant monter dans des aigus désagréables et ses yeux se remplissaient lentement de larmes. Mais Draco ne pensa pas une seule seconde à se moquer, bien trop impressionné, même s'il ne l'avouera jamais, par l'aura meurtrière qui gravitait alors autour de la préfète. Il soupira un moment.

- Il n'était pas seul… lâcha-t-il dans un souffle.

- Quoi ? Bien sûr que si !

- Non. Je suis venu la première semaine. Tous les soirs. J'étais ici, dans cette pièce et j'écoutais. Je me calais sur l'échelle et j'écoutais ses pas, les pages qui tournait, la bruit de la couverture. Et quand j'entendais la porte de la terrasse s'ouvrir, je jetais un coup d'œil pour vérifier qu'il ne faisait pas de conneries. Il n'était pas seul. Pas complètement. Je le suivais même jusqu'à son dortoir pour m'assurer qu'il rentre en un seul morceau. Après tu étais là. Il n'a jamais été seul.

Hermione, bouche bée, observait le profil du serpentard qui s'était retourné vers la fenêtre où filtrait quelques rayons de lune. Elle avait du mal à l'imaginer passant ses soirées dans l'inconfort de cette pièce minable et pleine de poussière, dans le froid, attendant qu'Harry descende l'échelle et rentre au dortoir.

- Cela revient au même pour lui, Malfoy, soupira-t-elle dans un souffle. Lui, il a passé cette semaine seul. Pourquoi est-ce que tu as fait ça ? demanda-t-elle après un court silence.

- Mes raisons ne regardent que moi.

- Il va bien falloir que tu t'expliques.

- Je ne te dois rien.

- Mais tu dois beaucoup à Harry.

À ces mots, le serpentard leva la tête vers le plafond et le regarda un instant, comme s'il pouvait voir au travers.

- Oui, beaucoup trop, souffla-t-il au bout d'un moment.

- Si j'ai bien compris, ma présence n'est pas désirée ce soir, murmura la brune avec un sourire dans la voix.

Draco se retourna vers elle et l'observa attentivement. Elle soutint son regard scrutateur sans broncher jusqu'à ce qu'il esquisse un léger sourire amusé.

- Je n'aurais jamais imaginé que tu me laisses carte blanche, je m'étais plutôt préparé à devoir utiliser la force à vrai dire…

- Je veux le bonheur d'Harry.

- Et tu penses que je pourrais y contribuer ?

- Il allait mieux. Il faisait moins de cauchemars. Le problème Malfoy, c'est que tu as le pouvoir de le rendre heureux comme celui de le détruire tout à fait. Et je n'ai absolument pas confiance en toi.

- Je ne peux pas te dire ce que tu veux entendre Granger.

- Je sais. Alors je vais prendre le risque, dit-elle en s'éloignant de quelques pas vers la porte. Tu as de la chance que Ron ne soit au courant de rien Malfoy, rajouta-t-elle avant de partir pour de bon.


Lorsqu'Harry entendit la trappe s'ouvrir ce soir-là, il fit semblant de dormir, allongé de côté sur le canapé. Il n'avait aucune envie de parler à Hermione. L'absence de Draco s'était douloureusement fait sentir tout au long de la journée et il n'avait qu'une envie, rester seul. Mais quand il l'entendit retirer sa cape et ses chaussure avant de se rapprocher de lui pour se glisser sous la couverture, coincé entre le dossier du canapé et son dos, il n'eut plus aucun doute sur son identité. Draco était finalement venu. Harry essaya de rester calme et impassible quand il sentit une main timide se poser sur son ventre pour le serrer un peu plus contre le torse du serpentard mais son cœur ne put s'empêcher de bondir dans sa cage thoracique. Il savait qu'il ne devrait pas se laisser faire, le laisser le prendre ainsi dans ses bras mais c'était juste trop bon. Alors il s'accorda un moment de répit, et se colla instinctivement plus près de son amant pour absorber sa chaleur. Aux portes du sommeil, son cœur contracté se relâcha enfin, lorsqu'une bouche se posa sur sa nuque et qu'une voix tendre répéta en une douce litanie « je suis désolé ».


Avant même d'ouvrir les yeux le lendemain matin, Harry perçu l'absence de Draco dans son dos. Ainsi il était repartit, et l'avait une fois de plus laissé seul. Hermione avait raison. Il l'avait attendu pour rien. Une unique larme roula alors sur sa joue. Il frissonna violemment lorsqu'une main douce la recueillit délicatement entre ses doigts. Il ouvrit alors lentement les yeux pour les plonger dans ceux de Draco, assis en tailleur devant le canapé à moins d'un mètre de lui.

- Bonjour, souffla doucement le blond.

Le griffondor, sans répondre, se rassit sur le canapé en passant une main lasse dans ses cheveux. Il poussa ensuite un long soupir en relevant les yeux vers le blond, interceptant son regard anxieux qui ne l'avait pas lâché.

- Pourquoi es-tu venu, Malfoy ? demanda-t-il d'une voix froide.

Le blond tressaillit devant l'utilisation de son nom ainsi prononcé, un peu comme une insulte. Il paniqua un moment, craignant d'avoir comprit à demi-mots que le brun ne souhaitait plus le voir. Mais il s'était juré d'aller jusqu'au bout avant de venir, quitte à essuyer un refus.

- Pour m'expliquer… répondit-il alors.

- Il n'y a rien a expliquer. Tu as encore eu peur c'est ça ? Tu as paniqué parce que tu as encore « prit en pleine gueule cette relation bizarre qu'on a depuis novembre » ? Demanda-t-il en reprenant narquoisement les mots que Draco avait utilisé un mois plus tôt.

- Harry ne fait pas ça…

- Ne fait pas quoi ?

- Parler comme ça. Ce n'est pas toi. Tu ne me facilite pas les choses…

- Ce n'est pas mon intention.

- Ecoute j'ai bien réfléchit et-

- Ah oui, pour ça, j'imagine que tu as bien réfléchit. Dix-neuf jours Draco ! Dix-neuf putain de jours ! Ça on peut dire que tu as prit le temps pour réfléchir ! Bordel s'était si dur que ça d'assimiler qu'on avait couché ensemble ?

- J'ai paniqué le lendemain matin et puis... Comprends-moi aussi merdre, j'ai pas bien l'impression que tu te rendes compte des conséquences… On est dans deux camps ennemis Harry…

- Mais j'en ai rien à foutre Draco… J'ai toujours pensé qu'il y avait des choses pour lesquelles on se bat coûte que coûte. Mais apparemment j'me suis trompé. Moi j'ai pas envie de réfléchir. J'ai pas envie de penser aux conséquences. J'ai envie de vivre. Il y a quelques temps je voulais mourir. Et j'ai faillit crever. Ça me suffit. J'ai envie de vivre Draco, tu comprends ? Cela faisait si longtemps que cela ne m'était pas arrivé, ne me retire pas ça…

- Tu réagis comme si le monde n'existait plus en dehors de cette tour. Mais c'est faux et tu le sais. Ici… c'est différent, ici on est quelqu'un d'autre. Mais il faut redescendre sur terre de temps en temps. On va y être forcé tu sais ?

- Tu te trompes Draco. Il n'y a qu'ici que nous sommes nous-mêmes.

- Peut importe, cela revient au même… soupira le blond.

- Non. C'est très important au contraire. Regarde-toi. Regarde ce que tu es devenu, murmura-t-il en passant doucement un doigt dans les cheveux blonds qui retombaient sur son front. Tu as changé Draco. Ose me dire que tu ne te sens pas mieux depuis novembre, ose me dire que tu n'attendais pas le soir avec impatience, ose me dire que tu n'appréciais pas nos silences et nos discussions, nos baisers…

Harry posa tendrement sa main sur la joue du blond qui ferma les yeux en soupirant d'aise, s'appuyant un peu plus contre la paume chaude, avant d'embrasser l'intérieur du poignet du brun. Le griffondor ne pu retenir un tressaillement à ce geste et une vague de chaleur irradia dans son corps.

- J'ai peur, Harry… murmura-t-il après un court silence.

Le brun fit glisser sa main sur la nuque du serpentard afin de le tirer doucement vers lui, le faisant s'asseoir sur le canapé, et lui embrassa délicatement le front. Il sentit ensuite avec stupéfaction un corps chaud et tremblant se blottir contre lui. Bientôt il faudra se lever. Retrouver leur vies, leurs amis, leurs mensonges et leur haine factice. Alors pour l'instant, il pouvait bien se laisser aller contre le dossier dans un soupir de bien-être, serrant toujours son amant contre son torse.


Ils s'étaient retrouvés le soir même, impatients et indécis. Après s'être fixés en chiens de faïences une dizaines de secondes interminables, ils s'étaient précipités l'un sur l'autre, leurs bouches inexorablement attirées. Ils échangèrent alors un long baisé désespéré au goût d'espoir suivit de nombreux autres, des tendres et timides, des passionnés et exigeants, des soulagés et apaisés…

Tendrement enlacés sur le canapé et nus sous la couverture, Harry couvait du regard l'ange qui dormait dans ses bras, dos à lui. C'était lui qui avait peur désormais. Il avait peur de revivre un réveil douloureux. Et seul.

- Potter, c'est très valorisant d'être fixé de la sorte, je sais que je suis magnifique, mais j'aimerais vraiment dormir là, tu m'as épuisé… marmonna une voix à moitié assoupie.

Harry eu un sourire tendre et ébouriffa doucement les cheveux clairs, s'attirant de nouveaux grommèlements.

- Draco ?

- Quoi ?

- Tu seras là demain matin ? Demanda-t-il d'une toute petite voix.

Le serpentard resta silencieux un court moment avant de se retourner difficilement entre les bras de son amant pour le regarder dans les yeux. Il fronça les sourcils lorsqu'Harry détourna le regard en rougissant.

- Oh, Harry… soupira-t-il lorsque quelques larmes douloureuses coulèrent sur les joues du brun. Il l'enlaça plus fortement encore, embrassant sa gorge et sa nuque puis lui murmura doucement à l'oreille des « toujours » et des « plus jamais », recevant en plein cœur sa détresse et son air éperdu, d'autant plus qu'il l'avait lui-même provoqué. Il fit cette nuit-là la promesse d'être là, toujours là, de ne plus jamais le laisser seul, de ne plus jamais le faire souffrir. Et Harry revécu.


Harry avait rejoint Draco sur la terrasse et s'était appuyé, comme au début, sur le parapet. Le serpentard fumait une cigarette sans le regarder, les yeux perdus dans le vide. Le brun respecta cet étrange silence et attendit patiemment, sentant qu'une chose très importante était en suspend. Une cigarette plus tard, Draco ouvrit la bouche et sa voix, un peu rauque, s'éleva dans cette nuit de janvier.

- Tu te souviens, Potter, il y a deux mois, tu t'es mis en tête d'ouvrir un cadeau, pour en découvrir le cœur. On dirait bien que tu as fini par y arriver. Je l'ai découvert avec toi, grâce à toi. Alors j'imagine que désormais il t'appartient...

- Fait attention Malfoy, on dirait une déclaration d'amour, souffla Harry, la gorge nouée.

Le serpentard accrocha son regard avant de murmurer, le plus sérieusement du monde :

- Oui. C'en est une.


FIN


Et voilà, ultime chapitre de cette bien courte et, je le reconnais, plutôt simple histoire. Mais c'était voulu, je n'avais pas envie de me lancer dans une histoire rocambolesque que je n'aurais pas eu le courage de finir. J'espère cependant qu'elle vous aura plut, c'est une petite histoire d'amour sans prétentions, juste des sentiments. Je suis sinon très fière de vous l'avoir présenté et surtout, surtout, je vous remercie infiniment de toutes vos reviews, surtout à Yamashita6 et a Jes-Cullen-Malfoy qui en ont laissé une à chaque chapitre ou presque. Mais aussi à Machiik, PrincessSly, sama-66 et shimizuu qui l'ont mise dans leur favoris et à tous ceux qui l'ont suivit. J'espère vous avoir laissé une bonne impression et pouvoir revenir bientôt avec une nouvelle histoire, peut-être plus aboutie qui sait ?

Merci à vous tous ! (merde voilà que je pleure -_-")