Ceci est la dernière fan fiction potterrienne que j'ai écri et sera la dernière à paraître (reste juste un OS réservé au TO) : En 2010, une nouvelle année commence : je m'écrirai plus que des fics originales que je ne publierais pas sur le net.

C'est la période des fêtes donc le moment idéal pour vous offrir cette petite fic toute douce (oui, ça finit bien !) de 6 chapitres pour laquelle j'ai une tendresse particulière, j'espère qu'elle vous plaira.

Je tiens à en profiter pour remercier mes lecteurs de la première heure et ceux qui encore de nos jours me mettent dans leur favoris et me lisent alors que je n'ai plus publié depuis un bail : sans le savoir vous m'avez beaucoup apporté par vos commentaires, vous m'avez aidé à me sentir plus sûre de moi et à progresser en écriture.

Un grand merci aussi à Blacknemesis qui m'a aidé à améliorer cette histoire, pour ses critiques constructives et ses encouragements (en fait j'ai toujours l'impression de ton commentaire final dans mon sac à main^^)

Joyeuses fêtes à tous !!

Spoiler : jusqu'au tome 5 Note de l'auteur : Bisouuuuuus !!! JE TE HAIS, MOI NON PLUS
Chapitre 1 Le Réveil

La porte venait une fois de plus de se refermer sur Harry, allongé dans un lit sans un seul pli, comme si personne n'y reposait : Harry était trop immobile pour un être vraiment vivant. Il avait été soigné. Ou, plus exactement, tout ce que l'on pouvait faire avait été fait. Le médicomage avait indubitablement fait de son mieux. Son visage était reposé, donnant l'impression qu'il dormait paisiblement et qu'il pouvait se réveiller d'un moment à l'autre, mais il n'en était rien. Son corps était en bon état. Aucune nouvelle cicatrice ne témoignait de son ultime combat avec Voldemort.

La lutte entre les deux mages n'avait pas été que physique. Leurs esprits s'étaient affrontés dans un combat que Harry avait remporté par le biais de l'Ancienne Magie grâce aux souvenirs qu'il possédait. Tout s'était joué sur les sentiments que les deux adversaires éprouvaient, et il fallait croire que les sentiments positifs d'Harry étaient plus forts que la haine avancée par Voldemort, celle-ci étant le seul sentiment humain qu'il avait conservé. Il était étonnant que, malgré tout ce qu'il avait traversé, l'amour qu'Harry avait donné et reçu était suffisant pour tuer un être qui le rejetait. Le mage noir avait ressenti en lui tant d'émotions fortes en un seul coup que son cœur n'avait pas pu le supporter. Lord Voldemort était, en quelque sorte, mort d'amour.

Hélas, les deux mages étaient tombés en même temps, et si le cœur d'Harry battait encore, cela faisait un an que rien ne le faisait réagir. Un coma profond, pas même un battement de cil des plus instinctifs quand la lumière de la pièce où il était changeait. Seul son cœur continuait à battre régulièrement, paisiblement. Ainsi, depuis un an, des gens le nourrissaient, le lavaient, empêchaient ses muscles de s'atrophier. Depuis un an, il n'avait manifesté aucune réaction.

Ses amis venaient lui rendre visite régulièrement, et malgré leur découragement quand il le voyaient ainsi immobile, ils lui racontaient leurs nouvelles vies, la façon dont chacun se remettait de cette guerre et de toutes ces morts, les naissances et les études, les idylles et les conflits, toutes ces banalités qui faisaient une vie. Et quand ils repartaient, le silence reprenait toute la place.

Dans le noir qui était devenu son quotidien, Harry entendait ces voix lui parler. C'était pour lui un ronronnement de paroles revenant régulièrement, berçant son isolement mais qui n'avaient aucun sens pour lui. Un fond sonore, rien d'important, comme le chant d'un oiseau ou le bruit de la pluie qu'on écoute distraitement de l'autre côté de la fenêtre.

Un jour, il entendit la porte s'ouvrir à nouveau. Une main glissa dans la sienne. Il sentit ce parfum qui accompagnait sa solitude depuis quelques temps, qui lui rappelait vaguement quelque chose de doux et d'agréable dont il n'arrivait pas à se souvenir mais qui mettait tous ses sens en alerte. Il aurait voulu entendre la voix qui allait de paire avec cette main mais le visiteur ne disait rien, il n'avait rien dit depuis sa toute première visite, laissant seulement parfois échapper de profonds soupirs. Un pouce caressait doucement sa paume, seule partie de son corps encore sensible au contact.

Mais ce jour là, quelque chose de nouveau se produisit. Les soupirs se changèrent en sanglots et Harry sentit des larmes et des mèches de cheveux venir chatouiller ses doigts.

« Harry, je n'en peux plus. Je t'en prie... Reviens-moi » entendit-il. La voix était déformée par l'angoisse. Soudain, la main se dégagea brusquement de la sienne et il n'entendit plus que le bruit de pas précipités et le claquement d'une porte qui se refermait.

Pour la première fois depuis qu'on l'avait amené ici, il se sentit seul. Il avait l'impression d'étouffer dans ce silence. Son cocon protecteur n'était en vérité qu'une prison, et, le comprenant enfin, il tenta de s'en dégager. Malheureusement, il ne savait pas comment faire. Il essaya de crier mais il ne savait plus comment s'y prendre. Sa volonté toute neuve s'épuisa dans le vide et l'obscurité devenue oppressante jusqu'à ce qu'il se rappelle qu'il avait un corps. Il n'aurait pu sentir la main de son visiteur lovée dans la sienne autrement.

Harry se concentra donc sur sa main. Il y sentait encore vaguement la fraîcheur des larmes qu'on y avait déposé. Il tenta de la faire bouger pour reprendre le contrôle de son corps. Il n'était pas sûr d'y parvenir tant ses mouvements lui paraissaient faibles et l'effort fourni lui coûtait énormément. Il lui fallut une éternité angoissante de vide et de silence pour sentir ses doigts se refermer sur sa paume.

Enfin, il était de retour. Il était vivant. Il ne savait pas clairement ce qui le poussait à sortir de son emmurement mais il devait le faire. D'urgence. Aujourd'hui et maintenant.

Et il le fit. Quand il parvint à ouvrir les yeux, il ne vit qu'un simple plafond blanc. Pourtant son regard s'attarda sur la moindre aspérité comme s'il s'agissait du plus beau spectacle qu'il voyait de sa vie. Parce qu'il avait gagné. Parce qu'il était vivant. Parce qu'il sentait son cœur battre dans sa poitrine. Il essaya de parler, sans trop faire attention au premier mot qui franchit ses lèvres, trop fasciné d'entendre à nouveau sa voix résonner à l'intérieur de son crâne. Il se mit à sourire, heureux de ce nouvel exploit mais trop épuisé par ses récents efforts pour les poursuivre.

Une demi-heure plus tard, une infirmière découvrit Harry, les yeux ouverts, entrain d'observer les jeux d'ombre que sa main projetait sur le mur. Les rais d'un soleil d'été passaient entre ses doigts et ce simple spectacle le captivait.

Peu de temps après Ron, Hermione, Molly et Arthur Weasley déboulaient dans la chambre, accompagnés par Luna Lovegood. Il eut un mouvement de recul, un peu effrayé de voir autant de monde d'un coup. Et même s'il reconnaissait leurs visages, il ne se rappelait pas d'eux ainsi. En voyant Hermione le visage émacié, arborant prématurément quelques mèches grises, il se demanda combien de mois il était resté à Sainte Mangouste. Mais les autres ne semblaient pas avoir vieilli autant. Molly Weasley avait une vilaine cicatrice qui zébrait son décolleté, son mari avait perdu un avant bras et voir Luna sans son regard rêveur lui sembla également être une véritable amputation.

Ron avança vers lui d'une démarche claudicante et, la voix brisée par l'émotion, parla.

« Bon retour parmi nous, frère ! »

Harry le regarda en souriant puis fixa le groupe dans son ensemble. Luna l'observait attentivement. Il dit péniblement d'une voix un peu rauque :

« C'est le combat qui vous a fait ça ? »

« Nous avons tous été marqués d'une façon ou d'une autre, mon garçon » répondit Mme Weasley d'une voix tremblante. « Comment te sens-tu ? »

Harry ne savait que répondre. D'ailleurs, avant qu'il n'ouvre la bouche, Luna s'était approchée et intervint à sa place sur un ton qu'elle voulait froid.

« Harry, Hagrid est mort. Seamus, Neville, Fred et Georges le sont également. Ainsi qu'Albus Dumbledore et Minerva Mac Gonagall. Et je ne fais que citer ceux que tu connais le plus. Qu'en penses-tu ? »

Les autres la dévisageaient, visiblement choqués de l'entendre lui donner tant de tristes nouvelles si vite et avec si peu de tact mais Harry ne su que répondre :

« Ah bon ?»

Le reste du groupe était atterré.

« Je vous l'avais bien dit » se contenta de dire Luna sur un ton qui n'avait cependant rien de victorieux. Molly Weasley pleurait, silencieusement, soutenue par son mari. Ron semblait abattu tandis qu'Hermione était hébétée.

« Elle m'a piqué ma réplique ! » murmura-t-elle, incapable d'avoir une pensée plus cohérente. Luna était la seule à supporter le choc, probablement parce qu'elle s'y était préparée.

« Nous sommes tristes. Nous avons perdus les nôtres, tu vois… Tu ne ressens pas de peine à l'idée de ne plus jamais les revoir ? »

« Pas vraiment… »Puis Harry se rendit compte de ce que sa réponse avait de choquant. « Je suis devenu un monstre ? » dit-il d'une voix blanche.

« Non Harry, tu es juste malade. Dis-moi… Ron ? Qui est-ce pour toi ?

- C'est mon plus vieil ami, tu le sais bien ! On se connaît depuis qu'on est gamins, on a appris à marcher ensemble…

- Harry, tu ne le connais que depuis que tu as onze ans. Tu l'as rencontré sur le quai 9 ¾, juste avant ta première année à Poudlard ». Elle s'arrêta un instant puis reprit son explication. « Tu souffres du syndrome de BABD »

« Pardon ? » s'exclama le concerné.

« BABD, Belle Au Bois Dormant. Je fais mon mémoire de psychologie sorcière sur ce sujet parce que j'étais sûre que tu en avais été atteint.

- Je te reconnais bien là » se moqua-t-il. « Luna Lovegood et ses idées farfelues…

- Elles sont peut-être farfelues mais elles sont vraies, Harry. Tu te souviens de ton combat contre Voldemort ?

- Bien sûr » répondit-il. « Comme si c'était hier. Il me menaçait pendant que les Mangemorts combattaient les membres de l'Ordre. J'étais épuisé et puis je me suis souvenu de ce que Dumbledore m'avait dit après la mort de mon parrain, dans son bureau. Que mon humanité était ma force face à Lord Voldemort. Alors je ne sais plus comment j'ai fait mais… J'ai pensé à tous ceux que j'aimais, qui me faisaient sentir vivant et qui étaient entrain de souffrir et j'ai envoyé toute la force de mes sentiments pour eux sur Voldemort. Je l'ai vu se déchirer en une lumière rouge, et puis… je suis tombé.

«-C'est bien ce que je pensais… » Encore une fois, Luna s'interrompit, songeuse. « Et maintenant, que ressens-tu quand tu nous vois ?

- Je suis… Je suis content t'être vivant… Mais, je ne ressens rien de fort… Merlin ?! Qu'est-ce qui m'est arrivé ? » Demanda-t-il, commençant à comprendre qu'il n'était pas sorti indemne de son combat.

Luna l'observa longuement, s'apprêta à lui répondre puis se tut à nouveau durant d'interminable secondes. Enfin, elle reprit la parole.

« Toutes les émotions fortes que tu avais en toi, tu les a expulsées pour le vaincre. Tu ne peux plus ressentir d'amour, de l'amitié, de la compassion ou une franche colère. »

Harry paniqua.

« Je suis devenu inhumain !

- Non » le rassura Luna d'un ton calme. « Tu es juste… Handicapé. Ton cœur ne ressent plus rien de fort parce que tu as trop donné. La magie que tu as utilisée est surpuissante et très rare, très difficile à maîtriser aussi. C'est cette absence d'attachement qui t'a empêché de te réveiller une fois que ton corps s'était remis du choc. Parce que rien ne te rattachait à ce monde. Je ne sais pas qui ou quoi a réussi à te ramener parmi nous mais il faut le découvrir vite parce que la vie sans sentiments risque de te paraître fade et tu risquerais de tomber dans une léthargie bien plus longue. »

Un peu anxieux par ce qu'il venait d'entendre, Harry dévia la conversation.

« Pourquoi ai-je cru que je connaissais Ron depuis toujours ?

- En l'absence de sentiments, ta mémoire confond tes envies profondes avec la réalité » continua Luna sur un ton professoral. « Tu aurais tellement voulu connaître ton meilleur ami plus tôt que ton cerveau te le fait croire. Tu ne sauras pas faire le point entre rêve et réalité et ta mémoire mélangera tout tant que tu ne seras pas guéri…

«-Et quel est le rapport avec ce conte de fées ? Je n'ai rien d'une princesse en détresse ! » l'interrompit-il, piqué.

- C'est bien. Au moins possèdes-tu un reste d'orgueil » ironisa la jeune fille. Les autres l'écoutaient religieusement. Sans doute était-ce pour la première fois. « Les contes de fées sont des légendes, souvent tirés de faits historiques du monde sorcier, que les moldus se racontent et déforment. Le conte de la Belle au Bois Dormant relate le sommeil dans lequel est tombé la sorcière Morgane Rowleng, dite Morgane l'Ecarlate après avoir tué Ylcurd Syfilis , dite la Vérolée , de la même manière que tu as tué Lord Voldemort. Son fiancé a pleuré sur son corps et l'a embrassée, provoquant ainsi le reste d'émotion qui lui restait. Elle se réveilla et retrouva la faculté d'éprouver des sentiments. Cette histoire, remaniée siècle après siècle, a fini par signifier une ineptie : l'amour pouvant sauver de la mort. En vérité, il s'agit de quelque chose de bien plus compliqué puisque la magie des sorciers y intervient, consciemment ou non. J'en conclus que la personne que tu aimes le plus au monde t'a réveillé, mais partiellement. Puisque Ron a été le dernier à te rendre visite hier, et bien qu'il n'y ait aucun cas dans l'histoire de ce syndrome rarissime qui fasse appel à l'amitié, je suppose que c'est lui qui a déclenché le processus d'une façon ou d'une autre. Maintenant, il faut trouver un moyen de ne pas te perdre encore alors que nous venons à peine de te retrouver. A la longue, tu risquerais de te laisser dépérir puisque tu n'es plus capable de ressentir des émotions …

- C'est rassurant… » Répondit Harry, ironique à son tour.

« Le mieux à faire pour l'instant serait que Ron vienne te voir le plus régulièrement possible. Hermione et moi chercherons un moyen de te sortir de là durant ce temps. »

Dans la mesure qui lui était permise, Harry était inquiet. Il se sentait également un peu coupable de ne pas pouvoir réagir de la façon dont ses amis l'auraient voulu. En plus de cela, il ne pouvait même plus faire confiance à ses souvenirs. Il était le blessé de guerre le plus étrange dont il avait entendu parler et se serait bien passé de cette nouvelle bizarrerie dans sa vie.

Il décida de se focaliser sur le présent et adressa à ses amis un sourire qu'il espérait rassurant. Il demanda poliment des nouvelles de chacun et les laissa s'abandonner à des preuves d'affection à son égard dont il n'avait nul besoin mais qu'il sentait essentielles pour eux.

Tout ce petit monde quitta la chambre d'Harry peu après, à l'exception de Ron. Harry remit certains souvenirs en place grâce à lui. Malheureusement, une tension vibrait dans l'air, comme si Ron lui en voulait de rester indifférent, de ne sourire qu'à peine à l'évocation de leurs aventures. Ron savait pourtant qu'il n'y pouvait rien.

Celui-ci allait prendre congé quand un membre du personnel hospitalier fit son entrée pour constater l'amélioration de son patient. Ron le dévisagea pendant que celui-ci passait devant lui et fulmina de se voir ignoré. Il grimaça.

« Alors, on vient voir pourquoi Harry a disparu malgré tes 'bons soins ' ?!

- Je n'ai pas de compte à te rendre. Maintenant, sors ! J'ai un patient à ausculter » répondit le médecin.

Pendant que les deux hommes se défiaient du regard, Harry, subjugué face à Drago Malefoy, se demandait si la scène qui lui venait en tête en le voyant était bien un souvenir cette fois et non une invention de son esprit.

La sixième année d'enseignement à Poudlard avait débuté. Malgré les menaces que Drago avait proféré lors de leur dernière entrevue l'an passé, le serpentard s'était fait des plus discrets, du moins quand Harry était à proximité.

Harry avait d'abord pensé que, privé de la protection de Lucius Malefoy, ce fils à papa craignait de le provoquer et s'en réjouit. Mais au bout de deux semaines, il se sentit…désœuvré. Voldemort, dont le retour était à présent connu de tous, se faisait moins remarquer et n'avait plus tenté d'influencer son esprit. Drago ne cherchait plus à combattre le Gryffondor, refusant de reprendre son poste d'attrapeur au Quidditch ou de s'inscrire aux duels sorciers.

Certes, Hermione, Ron et les autres amis d'Harry comblaient son temps libre en discussions et en projets de combats sorciers mais le tempérament guerrier du Gryffondor se trouvait mis à l'abandon.

Il avait envie de se battre.

De se battre avec Malefoy.

Alors, Harry se décida à provoquer le Sang Pur à la moindre occasion. Il était moins doué pour cela que son adversaire en son temps, mais quoiqu'il dise, quoi qu'il fasse, celui-ci se contentait de le regarder avec un rictus condescendant comme si rien de tout cela ne l'atteignait. La rage d'Harry s'accentuait jour après jour.

Furieux d'être ignoré ainsi, Harry alla trop loin. Un soir, il attaqua Drago durant une des rondes du préfet. Il s'agissait d'un acte stupide mais il en était arrivé à un tel état de frustration qu'il ne parvenait plus à se contrôler. Drago se défendit, montrant un don étonnant pour cela mais ne rendit aucun coup. Il restait d'un calme déconcertant, ce qui avait encore davantage exaspéré le Survivant.

Quand, épuisé par ce combat inutile, Harry cessa d'enchaîner les attaques et s'appuya au mur pour reprendre son souffle, Drago l'avait regardé et avait enfin ouvert la bouche.

« Pourquoi as-tu fait ça ? » demanda-t-il, placide.

« Je te hais » avait répondu Harry avec un regard assassin.

« Moi non plus » avait répliqué Drago en s'approchant de lui.

Et avant qu'Harry ne comprenne sa réponse, il l'avait embrassé, lentement, avec douceur. Et était ensuite reparti faire sa ronde, laissant sur place un Harry sous le choc.

Quand il revint à la réalité, Ron et Drago le fixaient, attendant apparemment sa réponse à une question qu'il n'avait pas entendue. Il ne pouvait détacher son regard de Drago. D'une voix hésitante il prononça quelques mots sur un ton dont on n'aurait pu déterminer s'il s'agissait d'une question ou d'une affirmation.

« Je te hais… »

Drago le fixa sans que son regard ne laisse transparaître la moindre réaction de sa part.

« Bien sûr que tu le hais ! » éructa Ron. « Il a passé son temps à nous insulter quand nous étions à Poudlard et à chercher à nous faire chier, voire à nous faire tuer ! Il a même eu le culot de te menacer quand son cher père s'est retrouvé en prison où il croupit d'ailleurs encore ! Et ces imbéciles du ministère prétendent qu'on a rien à lui reprocher alors que nous savons tous de quelle charmante famille il vient !

«-Weasley, pour mémoire, cette charmante famille fait partie de la tienne, ce qui ne m'enchante pas plus que toi. Tu n'as plus rien à faire dans cette chambre. L'heure des visites est passée » répondit calmement Drago.

« Je me suis battu pour que tu n'approches pas mon ami, mais tu as du en graisser des pattes dans cet hôpital pour avoir l'assurance de t'occuper de lui. Tu veux que je te laisse tranquillement l'achever sans doute? » s'écria Ron, hargneux.

« Arrête ce cinéma qui n'intéresse personne et va rejoindre ta femme. Sinon, j'appelle la sécurité. J'ai du travail qui m'attend. »

Le ton était posé mais ferme. Le regard, clairement menaçant. Ron s'exécuta de mauvaise grâce tandis que le regard froidement professionnel de Drago vint se poser sur Harry. Ce dernier frissonna sans qu'il parvienne à déterminer pourquoi.

« Bien », reprit calmement Drago quand Ron ferma la porte derrière lui. « Etant donné que cela fait un an que nous ne nous sommes pas vu, il faudrait sans doute que je te précise certaines choses. Oui, je suis bien Drago Malefoy mais ici, je suis surtout l'interne qui a été désigné pour surveiller ton évolution. A présent, je vais m'occuper de ta rééducation.

« Un an ?! Je suis resté un an inconscient !?! » s'exclama le malade.

Drago poussa un soupir d'exaspération.

« J'aurais dû me douter que cette bande de… Enfin, qu'ils oublieraient de te dire l'essentiel.

«-Ils m'ont expliqué la fin du combat et le syndrome dont je souffre » répliqua Harry afin de défendre ses amis.

«-Tu veux parler de la théorie de Lovegood, future détentrice d'un Master en psychologie ? Elle est un peu tirée par les cheveux mais, peut-être, y a-t-il un fond de vrai. Je dis bien peut-être… Ceci dit, je trouve que ce serait un peu trop simple. De toute façon, chez toi, c'est ton corps qui m'intéresse… »

Harry rougit légèrement. Drago s'en aperçut. Il se racla la gorge avant de continuer.

« Je veux dire que c'est lui que je vais soigner. Je ne peux rien pour le reste. Les machines ont permis que tu ne perdes pas trop de muscles mais il faut que tu réapprennes à t'en servir, à manger, à gérer le quotidien. Comment te sens-tu ?

-Pour quelqu'un qui ne ressent émotionnellement plus rien, qui vient d'apprendre qu'il a perdu un an de sa vie à dormir et qu'il ne peut même plus faire confiance à ses propres souvenirs… Pas trop mal. Bon sang, j'ai perdu trop de temps je veux sortir d'ici ! » Pesta le garçon.

« Hey ! Je ne te laisserais pas nous quitter si vite. De plus, je doute que tu puisses te lever aussi facilement que tu le penses » dit-il en examinant Harry. Pour ce faire, il passa les mains à quelques centimètres au dessus de son patient.

Harry avait envie de lui demander si la scène qui s'était imposée à lui quand Drago était arrivé était un produit de son imagination ou un véritable souvenir. Mais l'air glacé du jeune homme l'en dissuada bien vite. L'attitude de Drago n'était pourtant pas à proprement parler répulsive.

S'il s'agissait vraiment de souvenirs d'une relation clandestine entre eux alors Drago le confirmerait mais s'il avait tort, cela voulait dire que son subconscient le voulait, que cela n'avait jamais eu lieu et Drago pourrait se moquer de lui à loisir. Plutôt que de se libérer de ce dilemme, il se contenta de poser une question d'intérêt secondaire alors que le médicomage continuait son examen silencieux.

« Puisque le combat à eu lieu à la fin de notre septième année et que cela fait un an que je dors, comment peux-tu déjà être médicomage ?

-Je suis interne. Ce qui veut dire que j'ai obtenu mon diplôme de médecine mais je n'ai pas encore soutenu ma thèse. Ne crains rien, tu es entre de bonnes mains. Si j'ai obtenu mon diplôme en un an plutôt que dix, c'est parce qu'à la fin de la guerre il y avait bien trop de blessés pour le nombre de médicomages disponibles. Alors on a offert un choix aux étudiants de médecine sorcière : soit commencer ou continuer leurs études de la façon traditionnelle, soit subir un sort d'Infuscienzia. Ce sort permet d'obtenir en quelques minutes une masse de connaissances théoriques impressionnante. L'équivalent de dix ans d'études classiques. Restait ensuite à tester la pratique, ce qui se fait plus rapidement.

-Tu dis qu'on vous a laissé le choix mais je suppose que tous ceux qui voulaient devenir médicomages ont dû sauter sur l'occasion ? » demanda Harry.

« Non, nous n'avons été qu'une vingtaine à accepter sur cinq cents.

-Pourquoi ?

- Cette proposition avait un prix

-Cela devait être très cher pour en décourager autant. Combien as-tu dû payer pour cela ?

- Le prix n'était pas monnayable. Le sort est puissant et difficile à supporter pour le cerveau. Il enlève à celui qui l'utilise d'une à trois années d'espérance de vie.

«-Merlin ! Ce n'est pas rien. Qu'est-ce qui a bien pu te pousser à un tel sacrifice ?

- La perspective de pouvoir soigner le Survivant, bien sûr ! » dit Drago d'un ton ironique, un sourire grinçant en prime.

- « non, mais sérieusement… ?

- Sérieusement, cela ne te regarde pas.»

Le doute s'insinuait toujours plus loin en Harry et il crevait d'envie d'avoir raison. Si la théorie de Luna se révélait exacte, il serait sûrement sauvé puisque Drago lui plaisait. Celui-ci n'avait pas trop changé physiquement durant sa propre année d'absence, mis à part qu'il était encore plus grand. Non, le vrai changement était dans son attitude. Son discours, bien qu'un peu cassant, était moins hargneux qu'auparavant. Ses gestes qui avaient toujours été gracieux mais un peu brusques avaient acquis une mesure nouvelle. Peut-être était-ce dû à la profession de médicomage. Peut-être avait-il acquis cette attitude propre aux meilleurs praticiens, des gestes précis et rassurants…

Face au regard sans émotion particulière de Drago, Harry se sentait seul face à ses interrogations. S'il lui avouait les souvenirs qu'il croyait avoir et qu'il ne s'agisse que d'un mirage, Drago lui rirait probablement au nez. Quelque chose lui disait que malgré la pauvreté de ses émotions, il aurait du mal à s'en remettre.

Une fois que Drago eut fini son examen, l'effleurant à peine, il se prépara à partir et le salua sobrement. Demain commenceraient les séances de rééducation. Harry chercha un moyen de le retenir mais n'en trouvant pas, il dut se contenter de le saluer en retour.

Le reste de la journée se passa sans incident notable. Une journaliste s'était bien introduite jusque dans sa chambre mais elle avait été chassée en un temps record. Elle n'avait même pas réussi à prendre un cliché d'un Harry épuisé et surpris. Celui-ci avait oublié qu'il était célèbre. La mémoire sélective résultante de sa drôle de maladie lui avait fait oublier ce détail trop pesant.

Le lendemain matin, peu de temps après son réveil, Harry tenta de se lever. Malheureusement, il eut un vertige et sa tête retomba lourdement sur l'oreiller. L'infirmier qui lui apporta son petit déjeuner ainsi qu'une potion énergisante l'aida à se recoucher de façon plus confortable avant que Malefoy n'arrive pour l'examiner. Quand il aurait fini, commencerait la première séance de rééducation d'Harry.

Drago arriva alors qu'il reposait sa tasse de thé et il l'encouragea à se lever en douceur. Harry eut honte de la lenteur de ses gestes mais Drago en parut satisfait. Il lui donna le bras pour qu'il s'y appuie et Harry retint un frisson à ce contact. Le médicomage lui fit faire quelques pas et Harry dut rassembler toute sa volonté pour ne pas laisser ses jambes se dérober sous lui. Elles paraissaient être de plomb.

Il réprima un soupir de soulagement quand Drago le ramena vers le lit pour qu'il s'y asseye. Drago testa alors la motricité de ses bras. Harry pouvait les bouger sans trop de peine, mais si l'interne lui demandait d'effectuer les mêmes gestes avec un poids léger dans le creux de la main, ses mouvements devenaient franchement douloureux. Drago s'en rendit compte mais l'encouragea tout de même à en faire plusieurs séries.

L'attitude du praticien mettait Harry mal à l'aise. A la fois attentionné et distant, Drago se montrait parfaitement professionnel. Il ne l'appelait jamais par son nom, au mieux, Harry pouvait-il l'entendre parler aux infirmières sous l'appellation neutre de Monsieur Potter.

Ron revint lui rendre visite et Harry se sentit plus proche de son ami sans pouvoir se l'expliquer. Il se mit à espérer que cette absence de sentiments disparaîtrait petit à petit. A un moment, Harry parvint même à rire. Ce qui lui valu le spectacle de Ron, la bouche grande ouverte : celui-ci ne l'avait plus vu rire depuis leur cinquième année.

Ron l'informa qu'Hermione travaillait à la bibliothèque nationale sorcière tout en menant des études de restauration de livres magiques. Elle avait passé des nuits à faire des recherches mais les informations sur le syndrome de BABD étaient rares et aucun cas n'était semblable à celui d'Harry. Il avait toujours fallu que le sorcier ou la sorcière utilise ses sentiments amoureux pour que le sort soit assez puissant au moment du combat et pour le ou la sortir de l'état comateux dans lequel ce dernier l'avait mis.

Ça ne collait pas…