Petite Fic (j'en suis à écrire le 3e chapitre) RL/SB, UA (Slash, OOC, OC, …), Rating T pour langage, référence au sexe...

Petite mise en bouche plus courte que les chapitres à venir, l'action (comprenez "introduction de dialogues") commençant réellement au chap 2… En espérant que cela vous plaira,

Bonne lecture


Picturing Sirius

Prologue

Obsession

Sur la première page du magazine s'étalait le corps musclé du modèle. Sa chemise noire, visiblement en soie ou dans une quelconque matière brillante, était ouverte sur son torse si bien dessiné. Il avait croisé ses bras dans sa nuque, comme les femmes le faisaient pour mettre leur poitrine en avant. Ce mouvement, pourtant anodin, donnait une dimension incroyable à ses pectoraux, de plus en plus présents au fil des mois, et allongeait ses abdominaux qui laissait deviner les prémices de tablettes à venir. Son pantalon tombait bas sur ses hanches, du moins on le supposait car le cadre de la couverture le coupait quelques centimètres sous le nombril.

Pour l'occasion, ses cheveux avaient été peignés vers l'arrière, découvrant son front blanc, laissant ses yeux, d'habitude si durs à trouver entre les mèches sauvages de ses cheveux, totalement admirables – et qui aurait pu ne pas les admirer ? L'expression de son visage, la couleur orageuse de son regard, la forme de sa bouche… Il semblait crier 'Achète-moi, oh, achète-moi fidèle Remus ! Jamais tu ne me verras jamais plus beau qu'aujourd'hui'.

Et bien sûr, Remus acheta le magazine. Comme d'habitude, il détesta ça. Le regard amusé de la vendeuse quand il lui tendait le numéro de Wild Ones ou Witch'es ou encore Sorcer's girl. Des magazines féminins. Forcément, ça ne forçait pas le respect. Surtout que la vendeuse commençait à le connaître à force qu'il vienne presque toutes les quinzaines fouiner après la photo, la pose, le style qu'il n'avait pas encore. C'était comme une obsession : il ne pouvait pas laisser un seul cliché de Sirius Black sans le posséder. Il travaillait toutes ses vacances pour se permettre ces achats.

Mais obtenir la récompense ultime – le sourire de Black, les yeux de Black, le torse de Black – valait bien qu'il se ridiculise à acheter des magazines féminins et qu'il se ruine. C'était une telle joie, une telle satisfaction, quand il rentrait à Poudlard, ses achats sous le bras, qu'il allait s'enfermer derrière les baldaquins de son lit pour, tout doucement, comme si c'était réellement Sirius Black qu'il touchait, ouvrir le magazine, le feuilleter, page après page, en n'omettant pas de regarder un article, une pub, à la recherche de la moindre trace du mannequin. Un tel soulagement, une telle euphorie quand il trouvait l'article qu'il illustrait, le poster qui le représentait, la publicité qu'il promotionnait.

Durant deux à trois jours, pour chaque magazine, il recommençait l'opération, mémorisant les numéros de page qui l'intéressaient. Puis précautionneusement, pendant un cours de divination qu'il ne suivait pas au contraire de tous les autres garçons de son dortoir (la professeure y était pour beaucoup…), il s'attablait à un des bureaux communs, prenait un cutter affûté et découpait la page, ou les pages quand il était chanceux, où Sirius Black était présent.

Il prenait son carnet secret, sa collection, son œuvre, appliquait un sort de glue perpétuelle sur le papier glacé et le collait dans son cahier. Grâce à la magie et à quelques sortilèges performants, il était maintenant capable de faire en sorte que la page prenne la taille de l'image. Ca ressemblait à un livre, tout ce qu'il y a de plus banal – bien qu'un journal intime ne soit pas banal dans un dortoir de mecs – mais quand on l'ouvrait, la page de droite se mettait automatiquement à la taille de la photo découpée dans le magazine. Ainsi, au fur et à mesure du feuilletage, les pages allaient des portraits de quelques centimètres aux posters géants des créateurs de mode.

Ensuite, il pouvait passer des heures à regarder son livre si précieux. Revenir aux débuts hésitants de sa carrière, à ses 14 ans et son air canaille, ses grands yeux expressifs, passer à ses 15 ans, l'année des changements, du succès, de ses yeux s'ombrageant, de sa silhouette s'élançant, des ses habits s'ouvrant pour finir à ses 16 ans, clamant l'ombre de l'homme qu'il deviendrait, encore protégé par les traits juvéniles de son corps. Et enfin, sa 17e année, celle de tous les essais, de toutes les victoires. Des photos des plus grands photographes, des apparats des plus grands couturiers, des poses osées, déshabillées, des expressions sexuées, choquantes, indignantes, excitantes.

Était-il pitoyable, pathétique ? Sans l'ombre d'un doute, oui. Il le reconnaissait, savait que cette obsession pour le jeune homme était malsaine, anormale, peut-être même pathologique. Est-ce qu'il s'en souciait ? Pas vraiment. Depuis qu'il avait été mordu par Fenrir Greyback, Sirius Black était la première chose qui réveillait en lui une telle passion, un tel engouement. Quand il rentrait de l'infirmerie le lendemain de la pleine lune, il n'y avait rien qui lui remontait le moral plus que se glisser sous ses couvertures épaisses avec une tisane antidouleur et son livre aux merveilles.

Mais le plus pathétique, le plus pitoyable, n'était pas sa collection, son besoin de magazines pour filles, son obsession pour Sirius Black. Non, le plus pitoyable était son incapacité à visualiser Sirius Black comme un être humain. A ses yeux, il était mannequin, un personnage de papier, pas une personne réelle, un corps réel.

Et pourtant, il était le fan le mieux placé pour savoir qui était Sirius Black. Pour la simple et bonne raison que son idole occupait le lit juste à côté du sien dans le dortoir.