Titre: The spy who loved me – L'espion qui m'aimait.

Rating: M

Disclaimer: Tous les personnages appartiennent à Tite Kubo.

Résumé : Suite de « For your eyes only ». Après que Grimmjow, agent secret américain, ait échoué à dérober au scientifique et agent japonais Kurosaki Ichigo les formules d'une toute nouvelle énergie révolutionnaire, il est sommé par ses supérieurs de lui voler les formules en question. Lors d'un colloque scientifique en Suisse, Jaggerjack retrouve Ichigo et tente à nouveau de lui subtiliser ce qu'il sait. Mais les deux hommes sont interrompus par des étrangers qui en ont après le scientifique japonais. Leurs deux gouvernements décident de s'associer afin de mettre hors d'état de nuire ce nouvel ennemi bien plus dangereux…

Warning : Lemon !

Note : Suite direct de « For Your Eyes Only ». Néanmoins, sans l'avoir lu vous devriez être en mesure de comprendre celui-ci.

Note 2 : J'espère avoir pu rendre l'intrigue compréhensible. Parce qu'elle est un peu complexe et que je n'ai pas envie de vous embrouiller. Enjoy !


The spy who loved me.

I wasn't lookin', but somehow you found me,
I tried to hide from your love light,
But like heaven above me,
The spy who loved me,
Is keeping all my secrets safe tonight.

Nobody does it better,
Baby, you're the best.*

- Pentagone, près de Washington, États-Unis –

Tout le gratin du bâtiment consacré à la défense américaine était sur le pied de guerre ce matin-là. Un agent secret américain, Noitra, idéalement placé au sein du F.B.I. avait vendu à de hauts dignitaires nord-coréens des informations sur le programme nucléaire américain. Mais pas seulement. L'homme avait réussi également à rassembler des informations sur les programmes français, anglais et d'autres pays encore. Ce qui mettait la communauté internationale au bord d'un incident diplomatique sans précédent. Et la guerre menaçait d'éclater en Asie.

_La vérité messieurs, c'est que nous sommes menacés. J'le pense sérieusement. L'un des nôtres nous a trahis, dans l'optique de vendre aux coréens des informations top secrètes. Nous devons découvrir pourquoi et comment ils ont pu…

Et aujourd'hui, il se trouvait devant plus de dirigeants que s'il avait été trainé devant la Cour Suprême. Pourtant, ce n'était pas son procès qui avait lieu mais bien celui de l'un de ses anciens collègues maintenant disparu. Et comme d'habitude, il était le mieux placé pour survivre au milieu de l'ouragan.

_Ce qu'il faut d'abord découvrir, Grimmjow Jaggerjack, c'est ce que les coréens ont l'intention de faire avec ces informations, le coupa l'homme assis devant lui en croisant ses bras.

_Sauf vot' respect monsieur, qu'auriez-vous l'intention d'faire avec une formule atomique et un plan d'bombe entre les mains ? Du tricot ?

_Jaggerjack !

Devant l'agent aux cheveux bleus, quatre hommes étaient assis derrière une longue table sur laquelle étaient jonchés des rapports et dossiers en tous genres. Grimmjow se racla la gorge une fois et évita de faire le moindre commentaire. Son rapport n'était pas très brillant encore une fois, et il savait que sa carrière ne tenait plus qu'à un fil en ce moment. Et cette erreur pourrait bien inciter S. à le retirer des missions sur le terrain.

_Grimmjow, reprit alors S. qui se trouvait à droite de la tablée, nous devons absolument comprendre ce qu'il s'est produit.

_J'vous l'ai dit. Vous m'aviez donné l'ordre d'suivre Noitra, c'que j'ai fait. Mais euh... une fois au Japon, les services secrets japonais ont tenté de me doubler et j'ai tout simplement été incapable de retrouver Noitra.

_Nous devons prendre contact avec le gouvernement japonais afin de leur demander des explications, s'empressa de dire un autre homme qui se trouvait au centre de la table.

_Je pense qu'les japonais tenaient seulement à protéger leurs intérêts, monsieur, reprit Grimmjow en hochant la tête. Ils n'avaient pas d'autres objectifs que d'faire le travail à ma place.

_Vraiment ?

Un silence gêné s'installa dans la pièce. Le regard noir que lança l'homme qui avait parlé à Jaggerjack prouvait clairement qu'il était plus qu'agacé. Mais Grimmjow n'avait pas d'autre choix que de tenter de sauver sa peau en expliquant le pourquoi du comment. Kurosaki allait le lui payer ! Il s'était mis en travers de son chemin pour tenter d'attraper lui-même Noitra et au final il leur avait échappé à tous les deux.

_Si les japonais ont l'intention de défendre leur patrimoine alors nous devrions leur proposer une collaboration, reprit l'homme au centre de la lignée. Ils sont géographiquement proche de la Corée, donc impliqués et leurs relations avec le sud sont irréprochables et pourrait nous servir de tremplin.

_En parlant de ces coréens, embraya le quatrième homme qui se trouvait complètement à gauche de la table, que savons-nous d'eux ?

_Depuis le portable de Nnoitra nous avons pu tracer une tentative d'appel hier soir. Nous l'avons remontée jusqu'en Corée du Nord, mais c'est tout, impossible de localiser la source précisément. Ils étaient préparés à cette éventualité et ont répercuté le signal à quatre endroits différents de la planète. Autrement dit, nous ne pouvons pas être plus précis que ça : la Corée du Nord.

_Mph… Tenter de s'infiltrer en Corée du Nord est quasiment impossible, reprit S. en dodelinant de la tête. Cependant, nous pouvons tout à fait poser nos soupçons sur eux. Le gouvernement de Corée du Nord a toujours tenté de dérober à sa voisine du sud des informations sur le nucléaire. Nos correspondants en Corée du Sud ont eu des différents avec eux là-dessus. Leur menace est clairement établie, et s'ils construisent une bombe atomique, ils seront les premiers menacés, ce n'est un secret pour personne.

Les autres hommes autour de la table acquiescèrent silencieusement et restèrent silencieux pendant quelques instants. Grimmjow quant à lui, se garda bien de reprendre la parole. Il attendait juste sa sentence, voir si on le mettait à pied ou non. Il l'avait bien mérité après tout.

_Pour le moment, une association avec les services secrets sud-coréens est à exclure. Nous impliquer de front dans leur conflit serait déclarer une guerre qui irait au-delà des intérêts du continent asiatique, mais nous devons rester dans la course. Nous n'avons également aucun contact avec les coréens du sud, cependant vous avez un contact avec les japonais, Jaggerjack .

_Euh… j'ignore si on peut appeler cela un contact, monsieur.

S. lui lança un regard quelque peu déçu puis reprit après une courte inspiration :

_Bien, tentez de joindre ce contact et voyez si vous pouvez obtenir des informations là-dessus. Sinon, vous partez demain pour Genève en Suisse. Le Docteur Kurosaki participe au colloque scientifique, alors tentez de trouver cette fichue formule, numéro six. Nous devons l'arracher aux japonais avant que les coréens aient la même idée que nous ! Je mettrai ma main au feu qu'ils vont tenter de s'en emparer en Suisse.

Grimmjow ouvrit la bouche mais aucun son n'en sortit. Ses yeux s'écarquillèrent légèrement et il leva la main pour faire une objection. S. fronça les sourcils en voyant son air surpris :

_C'est que… mon contact japonais, c'est… c'est justement Kurosaki.

_Quoi ?! Vous… Décidément…, bégaya S. en le fusillant du regard. Il n'y a qu'à vous que ça arrive, Jaggerjack. Pfff… Qu'est-ce qui est le plus important ? Qu'il récupère les formules ou qu'il garde son contact sous le coude ?

Sa question s'adressait définitivement à ses collègues assis en ligne à ses côtés, mais Grimmjow se permit de répondre :

_Si vous l'permettez, je peux faire les deux, messieurs.

_Et vous croyez que c'est le moment de faire du zèle ?

Jaggerjack se racla la gorge à nouveau et baissa quelques instants ses yeux. Il était connu pour être un fougueux agent mais il n'était pas assez bête pour répondre à ses supérieurs, surtout lorsqu'il se trouvait dans les bureaux du Pentagone et que les dirigeants de la C.I.A. le questionnaient. Il mettait déjà sa carrière en jeu, alors il préférait faire profil bas.

_Euh non, monsieur. J'soulignais simplement l'fait qu'accomplir ces deux actes soit tout à fait possible.

_Rappelez-vous, numéro six, intervint S., votre réputation est en jeu. Nous vous faisons confiance pour cette fois. Enfin… plus pour le fait que vous soyez le seul agent ici à parler couramment japonais et à avoir un contact.

Grimmjow acquiesça d'un virulent signe de tête et serra les dents. Les remercier du bout des lèvres était déjà une réelle torture, alors il n'allait pas se laisser s'enfoncer encore plus. Il retrouverait Kurosaki et se chargerait personnellement de le faire cracher le morceau et de lui voler ses recherches.

Et si en plus il pouvait obtenir quelques informations sur les coréens et sur Noitra, il aurait réussi deux missions en une seule ! Et alors, à lui la considération de ses supérieurs et ils le laisseraient tranquille pour faire ce qu'il avait toujours aimé : tuer pour son pays.


Genève – Suisse.

Ichigo termina son énième coupe de champagne et prit congés de ses collègues pour la soirée. Depuis qu'il était arrivé à l'hôtel ce matin, il ne cessait d'être perdu dans ses pensées. La première journée du colloque n'avait même pas réussi à attirer son attention, alors qu'il avait pourtant été question d'énergies renouvelables. Lui qui était auparavant si friand de ces rendez-vous il avait une désagréable impression qui ne l'avait pas quitté de la journée.

Néanmoins, il ne cessait de penser à cette histoire de vol d'informations. Un agent secret américain qui vendait aux nord-coréens des informations sur le nucléaire, cela ne sentait pas bien bon. Tous les secrets du nucléaire mondiale étaient à présent entre les mains des dirigeants nord coréens et qui savait ce qu'ils en feraient ?

Ça l'inquiétait de plus en plus. Plus il y pensait, plus il sentait que quelque chose se préparait. Il devait absolument terminer ses formules avec Urahara. Plus personne ne se battrait de la sorte pour le nucléaire si une nouvelle énergie était trouvable dans le commerce, il en était persuadé.

Il composa le code sur la porte de sa suite d'hôtel et pénétra dans l'entrée. Il retira ses chaussures avant de glisser ses pieds dans des chaussons moelleux. Il poussa un soupir et alluma la lumière du living room qu'il traversa sans même faire attention, se dirigeant tout droit vers sa valise de laquelle il extirpa son ordinateur portable. Il ouvrit le boitier dans lequel il était enfermé à l'aide d'une clef qui pendait autour de son cou et prit l'appareil entre ses mains.

_Et moi qui craignais que tu ne sois venu accompagné…

L'orangé sursauta très haut et échappa un cri étouffé de surprise en découvrant un homme assis derrière la table du living room. Ses réflexes toujours aguerris, il arracha l'arme qu'il portait dans un holster, sous sa veste de costume et la pointa sur le visiteur.

Tranquillement attablé, devant un verre de whisky, Grimmjow lui lança un sourire colgate et dirigea le canon de son arme dans sa direction. Kurosaki se redressa, bombant le torse afin de reprendre une respiration normale. Il pinça ses lèvres et ferma ses yeux un court instant. Bien, c'était… absolument imprévu que Jaggerjack vienne le retrouver là mais…

_Comment… ? Tenta-t-il de demander, ses yeux se plissant sous la colère d'avoir été surpris aussi facilement. Comment m'as-tu trouvé et pourquoi… ?

_Oh, j'ai des amis en Suisse aussi, lui répondit Jaggerjack avant qu'il ne puisse terminer sa question. Je suis… comment dire… ? Assez en colère, vois-tu.

Ichigo tourna son corps dans sa direction, serrant l'ordinateur portable dans son autre main libre. Il savait que Grimmjow ne plaisantait pas, qu'il était ici pour une seule et bonne raison : la formule, et se venger de l'humiliation qu'il lui avait fait subir. Et le canon pointé sur son front n'était qu'une menace de plus parmi d'autres, cependant il se devait de la prendre au sérieux.

Jaggerjack n'était pas là par hasard. Qu'il vienne jusqu'en Suisse, sur un territoire qui ne faisait pas partie de ses attributions en tant qu'agent secret prouvait déjà que la situation était spéciale. Et Ichigo comprit immédiatement le danger qui en découlait. Cette fois-ci, Grimmjow ne se ferait pas avoir. Mais une question le taraudait tout de même en observant le visage bronzé de l'américain ; était-il là sur les ordres de son gouvernement ou seulement pour une vengeance personnelle ?

_Je suis venu pour savoir une chose : où en est le programme nucléaire nord-coréen ?

Un instant étonné, Kurosaki haussa un sourcil et adopta une moue boudeuse. Jaggerjack l'observa étroitement, mais il ne lui sembla pas que le jeune homme jouait la comédie :

_Que veux-tu dire ? Questionna enfin le scientifique en secouant la tête. La Corée du Nord ? Un programme nucléaire ? Tu ne confonds pas avec…

_Je sais encore la différence entre le Nord et le Sud, Kurosaki. La géographie tout ça, au Pentagone on a des cartes. Alors…

_Alors quoi ? Que veux-tu savoir ?! Le coupa-t-il sur un ton tranchant. C'est un sujet brûlant évidemment ! Mon gouvernement est en contact avec la Corée du Sud et je sais qu'il y a eu des tensions concernant cette rumeur…

_Quoi ? Quelle rumeur ?

Ichigo poussa un soupir et hésita quelques instants à révéler ces informations. Elles faisaient partie des renseignements top secrets mais… il savait que Grimmjow avait sans doute quelque chose derrière la tête et il en était curieux. Pourquoi lui parler tout à coup de la Corée du Nord ? Il devait découvrir ce qu'il savait à propos de ça.

_Depuis le vol des informations par ton ex-collègue, deux agents japonais ont été envoyés sur les terres chinoises pour enquêter sur le vol d'un transport d'uranium vers la Russie. On a suspecté des militants tchétchènes puis… nos soupçons se sont tournés vers la Corée du Nord.

Grimmjow acquiesça d'un signe de tête, l'écoutant attentivement. Des nord-coréens volant de l'uranium ? C'était bien plus inquiétant que tous leurs soupçons. Il lui fit signe de poursuivre :

_Mais on n'a jamais pu l'attester clairement. Que feraient-ils avec de l'uranium ? Un traité international leur interdit d'utiliser leurs installations nucléaires. Depuis 1965 et la première installation de recherche nucléaire, ils n'ont cessé d'inquiéter l'Asie avec leurs comportements. Vingt ans plus tard, les services secrets américains ont eux-mêmes découverts qu'ils avaient construits un second réacteur puis un troisième. Une crise diplomatique a éclaté…

Jaggerjack passa sa langue sur ses lèvres et hocha la tête. Étrangement, aux yeux d'Ichigo, il avait l'air particulièrement concentré ce soir, et il était plus que sérieux. Il le sentait suspendu à ses lèvres pas comme la dernière fois lorsqu'il était venu lui dérober ses formules.

Le bleuté inspira profondément et reprit la parole :

_J'sais tout ça, nous savons tout ça. La crise diplomatique ne s'est jamais calmée, pas vraiment. Ils ont toujours eu de l'uranium, la Corée du Nord est une terre qui en regorge. Enfin… y'a trente ans. Qu'ils aillent en dérober n'peut signifier qu'une seule chose.

_Qu'ils ont épuisé toutes leurs ressources en uranium ? Demanda Ichigo en haussant les sourcils. Ça voudrait dire qu'ils ont utilisé leurs réserves, faits des essais, ou qu'ils sont en train de se préparer à…

_A une guerre nucléaire.

Le rouquin écarquilla ses yeux de stupeur et sentit son souffle se couper. Qu'est-ce qu'il était en train de sous-entendre ? Qu'ils avaient la preuve que la Corée du Nord présentait des intentions belliqueuses ? Pourquoi ?

_Si le Nord avait eu des intentions belliqueuses, je crois que le Sud nous aurait prévenus. Nous sommes en étroite collaboration avec eux. Alors je doute que tes soupçons soient justifiés.

_Très bien, p'tet que non, effectivement, admit-il en se levant d'un seul coup, avançant dans des pas de chat en direction du roux. Mais... imagine deux secondes que ça soit vrai. Imagine qu'tu sois un dirigeant nord-coréen. T'as un arsenal nucléaire, qui date de vingt ans, de l'uranium à profusion. Tu veux t'assurer que les installations sont fiables, et performantes. Qu'est-ce que tu f'rais pour t'en assurer, à part… entamer une guerre. Avant d'la lancer… ?

Ichigo haussa les épaules sans pour autant desserrer sa poigne autour de son arme tandis que Jaggerjack se plantait devant lui. Ils étaient maintenant proches et il était évident qu'il n'était pas prêt de lâcher l'affaire.

_Disons que… avant il vaut mieux avoir l'avis d'experts. Des scientifiques qui ont à leur actif un programme nucléaire dans un pays développé...

_Exactement, confirma-t-il avec un petit sourire. Et… si les nord-coréens prévoient d'se trouver quelques scientifiques étrangers pour parfaire leur programme nucléaire tu penses qu'ils se fourniraient où ?

_Qu'est-ce que… Oh !

Les connexions dans le cerveau de Kurosaki semblèrent se réaliser d'elles-même et ses yeux s'écarquillèrent en comprenant où il voulait en venir.

Le colloque ! Le colloque évidemment ! La plus forte concentration de scientifique au monde. Ils n'avaient plus qu'à entrer dans cet hôtel, frapper à une chambre et enlever le scientifique qu'ils voulaient ! C'était presque simple comme bonjour.

_Combien de scientifiques ici ont bossé sur le nucléaire ? S'empressa de demander Grimmjow.

_Eh bien… Il y a un français, un allemand… Certainement deux américains et…

_Non, plutôt asiatiques. Il y en a ?

Ichigo baissa les yeux et poussa un soupir à moitié entre l'ironie et la surprise. Ses pupilles balayèrent la moquette de la pièce et ses pensées défilèrent à mille à l'heure avant qu'il ne puisse mettre le doigt sur quelque chose :

_Oui. Il y a moi. Grimmjow, si c'est moi qu'ils…

_Oublie ça. Ils t'auront pas.

_Quoi ?

_J'ai dit : ils t'auront pas, répéta-t-il en fouillant dans sa veste pour en retirer ce qui semblait être une lettre officielle.

Il la tendit à Kurosaki qui hésita à la prendre en mains. Il considéra l'enveloppe avec des yeux noirs, s'attendant à une quelconque ruse dont Grimmjow avait le pouvoir. Que pouvait-il bien lui vouloir encore ? Haussant ses sourcils pour l'encourager à ouvrir l'enveloppe, Grimmjow désigna la porte du menton :

_Ils sont p'tet' même déjà en train de faire leur marché. Trouver ta chambre est pas difficile, suffit de pirater leur système informatique qui soit dit en passant est pas franchement costaud, se vanta-t-il en reniflant bruyamment.

Pendant ce temps, Ichigo avait ouvert l'enveloppe et avait déplié la feuille . Celle-ci était frappé des sceaux de la C.I.A. et des services secrets japonais.

_Une collaboration...? Lut-il, les yeux plissés. Une coopération entre nos pays a été signé ? Quand ?

_Il y a deux jours, à Sydney. Nous avons les mêmes objectifs, Kurosaki. Faut empêcher ces coréens d'obtenir ce qu'ils veulent.

Le scientifique secoua la tête et inspira profondément. Ce n'était pas seulement ça qui l'inquiétait, mais c'était plutôt ce qui suivait. On lui ordonnait de faire équipe avec l'agent américain qui lui serait envoyé à Genève et de s'en remettre à lui pour sa protection et son retour à Tokyo.

_Ta sécurité est d'puis quarante huit heures une priorité internationale.

_Comment ça me protéger ? Je peux me protéger tout seul, merci bien ! S'écria-t-il, piqué au vif en chiffonnant la lettre dans sa main.

Grimmjow échappa un rire amusé, il s'y était attendu à cette réaction, entre autres choses. Kurosaki était comme lui en fin de compte, même s'ils différaient sur bien des points ils n'aimaient guère qu'on vienne jouer sur leur propre terrain. Ichigo était un agent surentrainé, tout comme lui, et qu'on lui envoie un baby-sitter américain – qu'il connaissait même intimement – le rendait furieux. Il avait l'impression que son pays ne le croyait pas assez fort pour le protéger des coréens.

_Les coréens sont le genre qui fonce dans le tas, lui expliqua Jaggerjack en s'avançant vers la fenêtre pour jeter un œil dehors. Ils ont des méthodes pas très catholiques. Et les méthodes pas très catholiques, ça me connait !

Il se tourna vers le rouquin en lui lançant un sourire séducteur, mais Ichigo resta de glace. Il adopta une moue désappointée et serra de plus belle son ordinateur contre son torse. Comment pouvait-il lui faire confiance ? Sa hiérarchie le sommait de travailler avec cet homme, mais il le savait bien plus dangereux que tous les coréens du monde. D'autant plus qu'il l'avait humilié lors de leur dernière rencontre et Grimmjow Jaggerjack n'était certainement pas le genre à laisser passer ça.

Mais le jeune homme voulait en avoir le cœur net. Il fallait qu'il le teste, même s'il n'avait aucunement envie de désobéir aux ordres de son gouvernement.

_Bien, d'accord. Je comprends, il en va de la sécurité internationale, récita-t-il sur un ton faussement convaincu. Dans ce cas, tu ne m'en voudras pas d'aller mettre en sûreté mes formules ?

_Comment ça ? Interrogea le bleuté, tout à coup déstabilisé.

Il se tourna vers lui et sourcilla, jetant un œil soudain intéressé à l'ordinateur portable qui reposait entre les bras du japonais. Ichigo remarqua bien son intérêt soudain pour son outil de travail et sut qu'il avait vu juste.

_Ils ont un coffre-fort ici, dans cet hôtel, reprit-il en reculant de quelques pas. Je vais l'y mettre et je viendrai le récupérer seulement lorsque nos gouvernements auront cessé la coopération. Si je veux pouvoir te faire confiance, je veux que ces formules restent loin de tes griffes acérées.

Étonné, Jaggerjack jeta un œil à ses mains et plia ses doigts pour observer ses ongles parfaitement limés. Griffes acérées ? C'était quoi la blague ? Oh, il le prenait pour un prédateur ?

_Fais comme tu veux. En même temps, j'me vois mal voler un truc en pleine coopération internationale. J'essaye d'éviter les incidents diplomatiques ces derniers temps.

_Vraiment ? Lança Kurosaki, interloqué, qui avait pratiquement atteint la porte de la chambre à reculons.

Son dos heurta la porte et il chercha la poignée de la main lorsque des voix se firent entendre dans le couloir. Les deux hommes se figèrent dans la chambre et Jaggerjack eut à peine le temps de courir à travers la pièce, de tirer Ichigo par la main qu'une détonation tonitruante se fit entendre. Dans un souffle brûlant entremêlé de bouts de bois – vestiges de la porte qui avait explosé en mille morceaux – et autres morceaux métalliques, ils s'écrasèrent tous deux au sol.

Ichigo fut celui qui heurta le sol, sur le dos, son ordinateur plaqué contre son torse. Grimmjow était allongé sur lui, le dos jonché de bouts de bois et autres débris causés par la déflagration de l'explosion. Pendant un instant, ils restèrent éberlués, leur ouïe mise à rude épreuve par la détonation. Quand enfin, quelques ombres se dessinèrent dans l'encadrement de la porte. Ichigo porta instinctivement la main à son arme et tira plusieurs fois en direction des étrangers.

Cette diversion leur permit de se remettre sur pieds et d'aller plonger derrière le lit, tandis qu'une salve de tirs s'abattait sur la pièce. Blottit dans les bras l'un de l'autre, Grimmjow et Ichigo attendirent que les tirs ne se soient calmés pour tenter de jeter un coup d'œil.

« Quatre. » Forma Kurosaki sur ses lèvres et Jaggerjack acquiesça d'un féroce coup de tête en brandissant son arme devant son visage.

Son bras se tendit au-dessus du lit et il tira, à l'aveugle, deux fois avant de jeter un œil à l'ennemi qui se tenait à découvert dans l'entrée de la chambre. Un cri de douleur lui fit comprendre qu'il avait atteint l'un de ses assaillants, et il redoubla de tirs et cette fois-ci, ils se plaquèrent contre les murs en attendant que la salve ne se calme.

Mais Grimmjow ne faiblit pas. Ichigo se joignit à lui et un concert de détonations et de coups d'arme à feu s'éleva, faisant bourdonner leurs oreilles. Jaggerjack agrippa le scientifique par le col de sa chemise et tous deux sur leurs pieds, couverts par leurs tirs ils reculèrent jusqu'à se retrouver acculés à la fenêtre.

Interloqué et quelque peu nerveux, Kurosaki lui lança un regard empli d'angoisse mais Grimmjow se contenta de sourire. Quand son pied explosa la vitre de la fenêtre dans un coup puissant, et qu'il plaqua le rouquin contre son torse pour sauter à travers le trou béant, Ichigo poussa un cri strident.

Ils avaient sauté !

Le froid glacial de la nuit suissesse emplit son nez et ses poumons, figeant sa respiration. Ses cheveux volaient dans tous les sens, se plaquaient devant ses yeux alors que leurs deux corps tombaient dans le vide à une allure hallucinante. Rien que le vide sous eux, et le vent qui sifflait à ses oreilles sonnait la fin de la vie du jeune japonais.

_Aaaaah ! Ouh !

Il heurta bientôt de plein fouet ce qui semblait être une toile tendue au-dessus du vide : la devanture du restaurant de l'hôtel, qui couvrait les tables d'extérieur. Ichigo sentit sa respiration se couper sous le choc et ils continuèrent à se balancer sensiblement au rythme de la toile. Grimmjow se retourna sur lui-même et aperçut les hommes à la fenêtre qui les cherchait des yeux dans le noir de la nuit.

_Ah ! Je vais te tuer ! Rugit Kurosaki en lui donnant un coup dans l'épaule.

Un coup de revolver fusa dans l'air, frôlant leurs positions et Grimmjow l'agrippa à nouveau par le col de sa chemise :

_Commence déjà par rester en vie pour ça !

Ils sautèrent à bas de la toile et se retrouvèrent devant l'entrée du restaurant de l'hôtel, essoufflés. Tournant leurs têtes de droite à gauche ils savaient qu'ils n'avaient guère de temps avant que ces hommes ne les retrouvent. Ichigo ne se posa aucune question, son ordinateur toujours étroitement serré contre sa poitrine, il suivit Grimmjow jusqu'au parking. Celui-ci grimpa à bord d'une Porsche Carrera GT décapotable de couleur grise métallisée. Ichigo ne put empêcher un rire ironique de lui échapper :

_Eh bin, la crise c'est pas pour tout le monde.

_Monte ! Lui beugla l'américain.

Le japonais ne se fit pas prier et le démarrage de la voiture de course manqua lui asséner le coup du lapin. Son cou craqua sous le choc et il échappa un gémissement de douleur, lançant un regard foudroyant au conducteur. Celui-ci était bien trop occupé à vérifier que personne ne les suivait, à remonter la capote et à mettre le chauffage pour le remarquer.

Kurosaki sentit son corps se calmer quelque peu, et il observa son ordinateur portable sous toutes les coutures avant de s'apercevoir que celui-ci était abimé.

_Merde ! S'écria-t-il. Oh non ! Il a le derrière complètement défoncé !

_Tch ! Ça risque bien d't'arriver aussi c'soir, lança-t-il sur le ton de la plaisanterie.

Mais le roux n'avait plus du tout envie de jouer à ce jeu. Il venait peut-être de perdre toutes les informations de son disque dur et sa formule en faisait partie. Si Grimmjow en était responsable...

_Tu l'as fait exprès !

_Bien sûr, répondit-il faisant avancer le bolide comme s'il courait un rallye. C'est moi qui ai lancé ces coréens à nos fesses, j'les ai même aidés à défoncer la porte et tout ça, hein ?

_Comment tu sais qu'ils étaient coréens ? Tout ce qui a des yeux bridés et qui s'attaque à toi est coréen maintenant ? Belle mentalité.

_Non, mais j'ai l'œil. Ils portaient un drapeau sur leur veston. Si t'avais ma vue, tu l'aurais aussi remarqué. Mais t'étais trop occupé à tirer dans l'vide.

Ichigo grogna férocement, lui prouvant son animosité. Il détestait ce type, et maintenant il se retrouvait coincé avec lui à fuir une équipe de fous furieux coréens. Il savait qu'il n'avait cependant pas le choix, et échapper à Grimmjow reviendrait à ne pas honorer le traité de coopération entre leurs deux pays. Mais quand bien même, si sa formule venait de périr dans les limbes de son ordinateur cassé, tout ça aura été fait pour rien.

Il soupira profondément et chercha son portable au fond de sa poche :

_Je dois contacter mes supérieurs, commenta-t-il sans lui lancer un quelconque regard.

_Ouais. Dis-leur que j't'ai sauvé la vie.

_Pfff...

Il haussa les épaules et composa un numéro complexe. Et pendant qu'il discutait avec ses supérieurs, Grimmjow se complaisait dans sa conduite sportive. Il semblait s'amuser comme un gamin derrière le volant de sa Porsche, un coude déposé contre la vitre et deux doigts seulement sur le volant. Ses yeux ne cessaient de glisser des rétroviseurs à la route et Ichigo remarqua bien qu'il pianotait sur son portable de son côté.

Lorsqu'il raccrocha, il était plus furieux que jamais. Non seulement ses supérieurs lui avaient fait la leçon mais en plus, ils lui demandaient de récupérer illico les informations contenues dans son ordinateur endommagé.

_Et dire que j'vais devoir me taper c'type...? Grommelât-il entre ses dents.

_Si c'est de moi que tu parles, on peut s'arranger.

_La ferme !

Il lui donna un coup de coude dans la cuisse et Grimmjow échappa un juron.

_Où est-ce qu'on va ?

_Quoi ? T'as peur que j'te kidnappe, hein ?

_Dis-le moi, Grimmjow. Si je dois te faire confiance autant commencer à m'habituer maintenant, non ?

Le bleuté haussa les sourcils, surpris et chercha le regard du jeune homme qui se fit plus fuyant tout à coup. Il s'était fait passer un savon par ses supérieurs, ça pouvait se voir sur son visage, et c'était sûrement une première pour le petit scientifique super-intelligent qu'il était. Grimmjow lui, avait l'habitude, S. le remettait sur les rails en lui tirant les bretelles tout le temps.. Il trouvait ça plutôt drôle en fin de compte, mais ce n'était pas le cas d'Ichigo.

_Une auberge se trouve pas loin d'ici, à dix kilomètres d'un p'tit village perdu dans les montagnes.

_Tu t'étais renseigné, tu savais que quelque chose arriverait ?! Lui demanda Ichigo, qui le soupçonnait déjà de trahison.

_Ne me regarde pas comme ça. Disons que je suis préparé à toutes les éventualités.

_Super. Et maintenant j'ai vraiment l'impression d'être une sous-merde, si même toi t'as plus de cervelle que moi.

_Wouah, si ça peut t'aider je peux jouer les parfaits imbéciles.

_Non, merci, bougonna-t-il en se pelotonnant contre son fauteuil. Il fait un froid glacial dans ce pays de merde !

_J'te réchaufferai autant que tu le voudras, darling. Mais là, j'conduis.

Le roux lui lança un sourire moqueur mais ses yeux le fusillaient. Il avait horreur qu'il lui parle de la sorte. Avec ses petits surnoms à la noix et ses intonations coquines, ses insinuations pas vraiment cachées, c'était Grimmjow... Et il lui sortait déjà par les trous de nez ! Mais il se rendait compte qu'il ne s'ennuyait pas avec lui, même dans une situation pareille, il était tout ce qu'il y avait de plus décontracté. Et il le mettait à l'aise, enfin autant à l'aise qu'il pouvait l'être avec ses blagues salaces à deux yens !

Il glissa ses yeux vers Grimmjow et observa un instant son profil concentré. Avait-il maigri depuis la dernière fois qu'il l'avait vu ? Il en avait bien l'impression. Il avait l'air plus austère également, seulement dans l'allure évidemment. Était-ce la trahison de son collègue et ami de longue date, Noitra qui l'avait rendu si sinistre ? Non, personne ne pouvait détruire ce personnage haut en couleurs. Il était toujours lui, ce Grimmjow aguicheur et joueur avec ce regard tentateur. Et pourtant, il ne lui avait pas encore sauté dessus. Il trouvait ça,... inquiétant. Bien plus inquiétant que ces coréens à leurs trousses.

_Tu veux une photo dédicacée ? Finit par lui demander l'américain en le prenant la main dans le sac. Si t'as tellement envie de me reluquer, j'pourrais te montrer des parties d'mon anatomie plus...

_Ça va, ça va ! Le coupa sauvagement le plus jeune. Je regarde ailleurs, ça te va ?

Il se détourna de lui et passa le reste du voyage à regarder par la fenêtre, ignorant les ricanements rauques de son voisin.

L'auberge dans laquelle ils s'arrêtèrent était rustique et lugubre, mais elle avait l'avantage d'être isolée. L'aubergiste ne posa même pas un œil sur Ichigo et Grimmjow s'adressa à lui dans un allemand impeccable. Il se demandait parfois quand ce type arrêterait de le surprendre.

La chambre qu'on leur attribua était sombre et quelque peu poussiéreuse, et bien sûr ne contenait qu'un seul lit pour deux personnes. Ichigo le soupçonnait de l'avoir fait exprès mais balaya cette pensée d'un revers de main. Il se dirigea tout droit vers la coiffeuse à côté de la fenêtre et déposa son ordinateur dessus, puis pris place sur une chaise en commençant à démonter l'appareil.

Il se débrouilla comme il put, se servant d'une pince à épiler pour dévisser la carcasse de la machine, puis de quelques cures dents pour les parties les plus délicates. Pendant ce temps, Grimmjow s'était isolé dans la salle de bain pour téléphoner. Lui aussi contactait ses supérieurs et Ichigo n'entendit qu'à peine sa conversation en anglais.

Lorsque Jaggerjack sortit de la pièce, il se dirigea vers lui et s'enquit de l'état de son ordinateur :

_J'en sais rien, répondit l'orangé, je vais récupérer la carte mère mais la carte mémoire est à moitié broyée ici. Bon sang, si je perds cette formule...

_Au moins plus personne ne courra après. Non ?

_Tu ne comprends pas Grimmjow ! Insista le jeune homme en prenant sa tête entre ses mains. Ces recherches, cette formule c'est... c'est tout ce que j'ai ! Tu comprends ça ?

_Ouais, comme tout ce que j'ai moi c'est mon calibre 22, répondit-il en déposant son arme à côté de lui sur la coiffeuse.

Encore une pirouette, pour s'éviter une conversation sérieuse, pensa Ichigo en soupirant. Cet homme n'était pas surprenant en fait, il était désespérant ! Il se leva dans un énième soupir et désigna l'emplacement où le tapis à bas du lit reposait au sol :

_Tu dormiras par terre. Moi je prends le lit.

_Évidemment. Et puis quoi encore ?! Beugla le bleuté en lui balançant sa veste à la figure.

Mais Ichigo l'évita et s'enferma dans la salle de bain pour se détendre. Il ne voulait plus le voir, plus l'entendre. Il voulait seulement rentrer chez lui, et c'était ce qu'il devait faire. Jaggerjack devait le ramener coûte que coûte à Tokyo et il ne serait pas débarrassé de lui tant qu'il ne serait pas dans son pays à nouveau.

Il y demeura de longues minutes, et quand il en sortit, Grimmjow était accoudé à la fenêtre, une cigarette à la bouche. Il l'ignora et retourna s'occuper du reste de son portable démonté sur la petite table. Il était impossible que dans ce trou il trouve un ordinateur assez costaud pour qu'il puisse le démonter et ensuite le remonter dans le but de s'assurer que sa carte mémoire n'était pas morte. Il n'avait pas d'autre solution que d'attendre pour s'en assurer, et l'attente risquait d'être longue.

En se tournant, il observa Grimmjow jeter sur le lit sa chemise et retirer sa ceinture. N'en éprouvant aucune gêne, il se sentit piquer par une envie de voyeurisme et détailla le corps se dénuder devant lui. Une fois nu, l'américain disparu dans la salle de bain ne s'étant pas rendu compte qu'Ichigo l'observait.

Le jeune homme soupira, délestant ses poumons de tout leur air. Être avec cet homme, devoir lui faire confiance, il n'aurait jamais imaginé pire. Avant. Avant d'être là dans cette chambre miteuse avec lui et de ne pouvoir s'en remettre qu'à lui. Il aurait pu se débrouiller seul, oui évidemment qu'il l'aurait pu il était un agent secret lui aussi ! Lui aussi avait suivi un entrainement militaire rigoureux. Mais là, il n'était plus l'agent gouvernementale il était le scientifique avec sa formule secrète et qu'il fallait protéger. Si aujourd'hui le Japon et les États-Unis s'alliaient pour éviter que la Corée du Nord ne s'empare de formules nucléaires et même de ses formules, alors demain risquait d'éclater un conflit international. Et Grimmjow et lui seraient au cœur du cyclone.

Il n'avait que lui à qui se raccrocher, que lui qui puisse ramener cette formule à Tokyo. Il avait besoin d'aide, il ne le niait pas. Et il avait besoin de soutient. Avant cette journée il aurait souhaité n'importe qui plutôt que lui pour l'aider à s'enfuir. Mais là, il ne pouvait considérer que cet homme avec lui, dans cette chambre. Car il était le seul à pouvoir le décontracter et à pouvoir le rassurer. C'était idiot, se dit-il en étouffant un rire tout bas, c'était bête même mais cet imbécile avait le pouvoir de le détendre. Et de lui faire oublier la situation catastrophique dans laquelle il se trouvait.

Isolés, presque seuls au monde, à des kilomètres d'un aéroport, des coréens sur les routes et des ennemis qui pullulaient partout. Non, Grimmjow était vraiment son seul soutien et s'il voulait sauver ce qu'il restait de sa formule il n'avait pas d'autre choix que de s'en remettre à lui.

_Qu'est-ce qui t'arrive on dirait qu'tu vas chialer !

Et voilà, toujours là pour vous remonter le moral Grimmjow ! Entre deux piques, il déboule de la salle de bain complètement trempé, seulement une petite serviette riquiqui autour de la taille. Et l'eau tombe en gouttelettes sur ses muscles durs comme la pierre et sur sa peau bronzée. Sérieusement, il a passé deux semaines à Hawaii avant de se cailler les miches ici ? Se demanda Ichigo en secouant la tête. Ses cheveux d'habitude coiffés en pics sur sa tête tombaient, mous, sur son front couvrant à moitié ses yeux mais le rendant oh combien sexy.

Il soupira, ses épaules s'affaissant sous le poids de la vérité : ils lui avaient envoyé Grimmjow pour tester sa résistance à la tentation. Il le détestait lui et sa manière d'être, mais comment détester ces tablettes de chocolat ou ces fesses de fer cachées sous sa serviette. Oh allez, il pouvait bien se l'avouer pour une seule fois dans sa vie : non, il n'avait jamais oublié Grimmjow et leur folle escapade dans son laboratoire. Non, il n'avait jamais oublié le plaisir qu'il avait connu avec lui. Même s'il transgressait toutes les règles en l'acceptant dans son esprit.

Le bleuté enfilait son caleçon tout en préparant son lit de fortune sur le sol ; une couverture à la propreté discutable et son jean roulé en boule en guise d'oreiller. Et sur ces entre faits, Ichigo s'entendit dire :

_Tu peux dormir dans le lit, c'est bon je vais pas te laisser dormir par terre comme un clochard.

Grimmjow haussa ses sourcils et se tourna vers lui, étonné :

_Tu prends des risques, sweetie...

_Pas autant qu'avec ces coréens.

Jaggerjack se contenta d'étirer un sourire qui criait « qui sait ? », mais Ichigo savait à quoi s'en tenir. Ce n'était pas Grimmjow qui était dangereux mais c'était bien lui-même. Lui et ses sentiments, ses pensées contradictoires et ses yeux qui ne cessaient de se poser sur sa peau nue. Bon sang, s'il avait su qu'il passerait une nuit en sa compagnie il se serait débrouillé pour... Pour quoi ? S'envoyer en l'air avant pour ne pas avoir l'air d'un mort de faim ? Ou pour se prendre une bonne douche et sentir bon pour l'attirer ? Il était exactement comme sa situation présente : pathétique.

_De toute façon j'compte pas vraiment dormir, ajouta-t-il en se glissant sous les draps.

Ichigo sentit son rythme cardiaque accélérer sensiblement à sa réplique et se tourna vers lui, les yeux plissés.

_Faut bien que quelqu'un garde un œil ouvert au cas où ils nous retrouveraient ! On va pas pioncer tous les deux ! S'esclaffa l'américain devant son air indécis.

Ichigo se sentit comme un imbécile et se décida qu'il fallait mieux dormir. Il irait certainement mieux demain, et il aurait toute sa tête pour penser à la situation calmement.

Le lit grinça quand il se glissa à son tour sous les draps à côté de l'américain, à l'intérieur il y faisait déjà chaud. Le corps de Grimmjow agissait comme une fournaise et chauffait le lit de façon hallucinante. Mais le jeune homme se coucha sur le flanc et lui tourna le dos, son visage enfouit dans l'oreiller qui sentait la naphtaline. Non, pensa-t-il en laissant ses paupières recouvrir ses yeux, ils étaient collègues, alliés. Ils travaillaient ensemble et ils étaient plutôt dans une situation compliquée, empêtrés jusqu'au cou. Il était hors de question qu'il laisse ses souvenirs de leur dernière rencontre surgir et balayer cette bonne entente cordiale. Pour une fois que Grimmjow semblait enclin à l'aider et à le respecter quelque peu.

Il était perdu dans ses pensées lorsqu'un soupçon de sommeil le gagna. Il lui sembla alors basculer dans le monde de l'inconscient lorsque la voix feutrée de Jaggerjack le ramena à la réalité :

_Imagine un peu que j'sois le dernier homme sur terre..., commença l'américain qui avait déposé le journal allemand qu'il lisait sur ses genoux, est-ce que ça...

_Tu parles allemand ? Demanda alors, sorti de nulle part, Ichigo en se tournant vers lui.

Comme s'il avait voulu couper sa phrase, par pure peur de ce qu'il allait lui demander – et il savait ce qu'il allait lui demander, il ne voulait pas faire ce choix – la question qui échappa ses lèvres était la plus insignifiante à laquelle il put penser. Mais il se l'était bien posée en arrivant plus tôt dans cette auberge.

_Quoi ? Bredouilla Jaggerjack, prix au dépourvu. J'parle quatorze langues, sweetie. Dont l'chinois et l'coréen. Et évidemment l'japonais sinon on s'rait pas en train d'parler.

_Quatorze ?!

Il se foutait de lui, il en était convaincu ! Pourtant, cette révélation ne put l'empêcher d'étirer un large sourire sur son visage. Peut-être de contentement, de fierté ou... ou quoi d'autre ?

_Ouaip, quatorze. Comme deux fois sept. Comme dix plus quatre. Putain... vous les jap vous croyez tous que l'habit fait le moine, hein ? Crois-moi, il le fait pas ! Sinon, comment tu pourrais être un super bon coup toi, le scientifique surdoué qui a l'air tout le temps de mauvaise humeur et au regard noir ?

Cette autre révélation soudaine plongea la pièce dans un silence gêné quelques instants. Le sourire d'Ichigo s'effaça et il hocha la tête de façon comique comme s'il venait d'apprendre une information d'une importance capitale. Cependant, malgré son cœur battant et son visage échaudé, il se recoucha sur le flanc et lui tourna le dos à nouveau. Pourquoi avait-il posé cette question débile tout à coup ? Évidemment que s'il était le dernier homme sur terre il... Oh, même s'il restait des millions d'hommes sur cette foutue planète il le choisirait ! Mais il ne le lui avouerait jamais. Non, il savait qu'il ne le pensait pas vraiment, que c'était simplement parce qu'ils se trouvaient tous les deux ici, dans cette chambre, loin de leurs pays. La situation était propice à ce genre de sentiments. Mais Kurosaki était un scientifique, pas un hippie des années 70 ! Il était plus raisonné que ça, il savait se contenir et se réfréner.

Enfin en théorie. Et il savait que la théorie pouvait parfois contredire la pratique...

Il s'était attendu à ce que Grimmjow fasse le premier pas, qu'il tente quelque chose. Bon sang, ils étaient tous les deux dans un lit en pleine nuit et il allait lui faire croire qu'il n'avait pas en tête de faire de lui son quatre heures ? Cette pensée le perturbait. Était-ce de la déception... ? Il n'aurait su le dire, peut-être qu'il aurait aimé qu'il lui fasse des avances.

Subitement, sans même savoir lui-même pourquoi, le jeune homme se retourna en direction de l'américain et s'assit sur le matelas. Ses mouvements étaient vifs et presque rageurs, si bien que Grimmjow l'observa par-dessus ses lunettes de vue en haussant les sourcils.

_Qu'est-ce qui va pas chez toi, Grimmjow ?! S'écria-t-il en tapant du poing sur le lit. Pourquoi... pourquoi tu ne fais rien ? Tu n'as même pas tenté la moindre petite chose pour profiter de moi !

Bouche bée, Jaggerjack parvint à bredouiller quelque chose :

_Quoi ?

_Oh ne fais pas ton innocent ! Vociféra en retour le rouquin. Tu sais très bien de quoi je parle !

Grimmjow retira d'un geste élégant les lunettes qu'il portait sur son nez et se laissa quelques secondes pour soupirer. Il n'en croyait pas ses oreilles. Qu'est-ce qui lui prenait de lui sortir ça tout à coup ?

_Et toi, qu'est-ce qui te prend de me demander tout à coup ce que je ferai si tu était le dernier homme sur terre !

_Oh, j'voulais juste te titiller un peu. J'adore t'embêter, sweetie. Et puis, si j'avais tenté un truc tu m'aurais envoyé balader. J'suis pas l'genre à renoncer parce qu'on m'dit non, mais... j'préfère quand c'est réciproque. Et à c'que j'sache, la dernière fois c'était bon mais il a fallu que j'te force la main. Et ça me soule...

Kurosaki resta interdit. Il l'observa rechausser ses lunettes et se remettre à sa lecture. Il hésita un instant entre se recoucher sans rien dire ou bien lui mettre son poing dans la figure. Il le faisait exprès, ça ne pouvait être que ça ! Il voulait qu'il fasse le premier pas pour ne pas encore à faire tous les efforts. Mais même si Ichigo avait connu d'autres hommes dans sa vie, celui-là était une énigme qu'il n'était pas encore prêt à tenter de déchiffrer.

Pourquoi tous ces simagrées après tout ? Ils étaient collègues, rien ne pouvait se passer entre eux. Sauf une petite partie de jambes en l'air de temps en temps. Et en se remémorant sa dernière fois avec Grimmjow Jaggerjack, Ichigo sut qu'il en crevait d'envie. Mais était-il prêt à mettre sa fierté de côté et à se jeter dans ses bras ?

Il ne réfléchit pas plus longtemps et plongea sur lui, agrippant son visage entre ses mains pour coller ses lèvre sur les siennes. Pris au dépourvu, Grimmjow en laissa tomber sa lecture sur ses genoux et écarquilla les yeux. Le baiser ne dura qu'un court instant, ils n'avaient pas besoin de plus. Ichigo voulait seulement lui faire passer un message et le bleuté avait enfin obtenu ce qu'il voulait.

_Tu ne sais pas à quel point je te déteste, Grimmjow.

_Oh que si j'le sais, marmonna-t-il en envoyant valser ses lunettes à l'autre bout de la pièce.

Puis, il le poussa contre le matelas, leurs deux corps se retrouvant collés serrés. Ichigo ouvrit ses jambes afin que Grimmjow puisse se glisser entre elles. Les bouches se retrouvèrent et ne se quittèrent pratiquement plus. Ichigo sentait son cœur battre très fort contre sa poitrine, presque douloureusement, et il se rendit compte à quel point il avait attendu ce moment. Depuis la dernière fois, depuis qu'ils avaient fait l'amour dans son laboratoire il n'avait pas été aussi excité. Rien ni personne n'était parvenu à éveiller son désir depuis Grimmjow Jaggerjack. Mais il n'en avait rien dit, et surtout pas à l'intéressé, plutôt mourir !

Quelques soupirs parvenaient à s'échapper de leurs lèvres, de temps à autre. L'américain avait pris le contrôle, sa main se frayant un chemin sous le tee-shirt du japonais puis descendant jusqu'à l'élastique de son caleçon. Il passa la barrière de tissu et prit immédiatement au creux de sa main les testicules du jeune homme en les massant sensiblement. Ichigo poussa un gémissement de bien-être et, par mimétisme, dirigea aussi sa main entre les jambes du bleuté. Ils l'avaient senti avant de se toucher qu'ils étaient durs tous les deux, mais cela ne fit que les exciter d'autant plus. Il avait retiré à moitié le caleçon de Kurosaki, quand Grimmjow se redressa sur ses mains et observa le visage du jeune homme :

_J'aurais pensé que ça s'rait plus excitant quand on était ennemis... mais en fait non, dit-il essoufflé avec un sourire amusé sur les lèvres.

Ichigo ne put s'empêcher de ricaner quelques instants, puis il planta un doigt sur les lèvres de Grimmjow :

_C'est même encore plus excitant comme ça, lui répondit-il.

Mais Grimmjow avait déjà replongé dans son cou et s'appliquait à mordre sa peau à plusieurs endroits. Ichigo ferma les yeux et se laissa faire. Pourtant, il était loin d'être le genre d'homme qui faisait l'étoile de mer, mais son partenaire de cette nuit était le genre qui n'avait pas besoin d'aide. Et puis, se laisser aller de temps en temps ne faisait pas de mal. Il le laissa mordiller ses mamelons, titiller de sa langue son nombril et tout comme la première fois qu'ils avaient fait l'amour, il commença à caresser l'entrée de son intimité.

Ichigo se tendit instinctivement, et laissa échapper un gémissement d'anxiété. Mais ce n'était pas l'impression qu'il donnait au bleuté. Ses cuisses s'écartèrent encore un peu plus, pour lui laisser un meilleur accès et petit à petit il accueillit son doigt entièrement en lui. Il sentait une chaleur étouffante dans son bas ventre et sur son visage. Son autre main avait saisi son membre et s'attelait à le stimuler d'un coup de poignet rapide. Le rouquin tentait d'avoir accès au sexe de Jaggerjack, désireux lui aussi de lui donner du plaisir. Mais l'américain restait délibérément hors de son atteinte, et lorsque le jeune homme se dégagea de son emprise, hors d'haleine, il se redressa et plaqua ses mains sur le torse de Grimmjow. Il tenta de plonger entre les jambes de ce dernier mais fut stoppé dans son élan :

_J'crois que ça s'ra pas la peine, baby. J'suis déjà bien prêt...

_Mais...

_Et ça risque d'durer plus longtemps si t'y touches pas...

Il haussa ses sourcils turquoise et Ichigo comprit où il voulait en venir. Bien, ça lui allait. Il escalada ses jambes et s'assit sur ses cuisses, collant son entrejambe contre celle de son amant. Légèrement surélevé par rapport à lui, Ichigo baissa son visage pour poser quelques baisers sur ses lèvres entrouvertes. Sa langue rencontra celle de Grimmjow et l'envie ravagea son bas ventre, allumant un feu ardent. Les mains qui appuyaient sur ses reins, ses jambes qui semblaient brûlantes contre les siennes et son souffle chaud sur son menton il voulait tout de lui, tout et maintenant. Séparant leurs deux bouches, il balança son bassin en avant afin que ses fesses se posent sur son sexe érigé, encore entravé dans son sous-vêtement.

_Je veux que tu me prennes, Grimmjow, souffla-t-il, les yeux dans les siens. Pas comme la dernière fois, je veux que ça soit toi qui te glisse en moi...

Jaggerjack mordilla sa lèvre inférieure en secouant la tête, ses yeux écarquillés. Il voulait dire quelque chose, Ichigo le sentit, mais il se contenta d'agripper ses fesses à pleines mains et de mordre dans son cou à nouveau. Ils basculèrent tous deux contre le matelas et Grimmjow prit quelques instants pour retirer ses sous-vêtements avant d'allonger son corps entièrement nu sur celui du rouquin. Le jeune homme ne savait comment il avait fait ce tour de passe-passe, mais il était déjà en train de glisser un préservatif sur son membre et il sentit l'excitation grimper un peu plus dans son corps.

Quand Grimmjow se positionna entre ses jambes, son sexe à son entrée, il ferma les yeux et inspira profondément. Les mains ne cessant d'aller et venir sur le torse musclé de son amant, il tentait de calmer cette rage, cette envie brûlante qui ne s'était pas calmée depuis toute à l'heure. Et pourtant il le sentit, dur comme le fer, et brûlant comme le feu, avancer en lui. Lentement, très lentement, il se fraya un chemin et s'immobilisa sans avoir pu le pénétrer entièrement.

Ichigo soupira et ouvrit ses yeux. Le visage de Jaggerjack était penché au-dessus du sien et les grands yeux turquoise le dévoraient. Ce fut à cet instant qu'il se sentit le plus proche de lui, qu'il ne l'avait jamais été. Ils étaient liés à présent, qu'ils le veulent ou non ils étaient liés par toute cette aventure. Et même par plus que cela : par le plaisir de s'apprécier l'un l'autre. Ses yeux turquoise ne faisaient que retourner la lumière qui vibrait dans ses propres yeux, et Ichigo se sentit spécial. Il y avait quelque chose dans les pupilles bleu azur qu'il n'avait jamais vu ailleurs et ils ne purent détourner leurs regards l'un l'autre. Était-ce le désir qu'il ressentait pour lui, le désir qui le tiraillait depuis le début de la soirée, ou quelque chose de plus puissant qui l'empêcha de parler à cet instant ? Il aurait voulu lui dire qu'il pouvait bouger, qu'il pouvait faire tout ce qu'il voulait de lui, de son corps, mais ce n'était pas la peine.

Il déposa seulement ses mains sur les fesses musclées de Jaggerjack et y imprima une légère pression. Le bleuté comprit le message immédiatement et commença un mouvement de bassin qui fit rouler les yeux d'Ichigo dans ses orbites. Il se sentit engloutit dans un trou où les sentiments et les sensations étaient tous plus affolants les uns que les autres. Il voulait ne jamais se réveiller, ne jamais le laisser sortir de son corps. L'attraction est une science bien occulte, mais lorsqu'elle est criante de vérité il n'y aucun moyen de lutter contre elle. Elle s'était installée entre Grimmjow Ichigo, collée à eux et laissait maintenant la place à la puissance du désir.

Ichigo voulait crier, à mesure que le rythme instauré par Grimmjow accélérait. Il aurait aimé crier sa passion, cette boule de plaisir qui était là, dans sa gorge, mais qu'il ne parvint jamais à faire surgir. Il le redoutait, peut-être même avait-il peur de sa réaction, qu'aurait-il pensé, qu'aurait-il dit s'il avait su qu'il avait pensé à lui ? Qu'il avait pensé à eux, dans son laboratoire, corps contre corps, étroitement serrés... Il lui en aurait voulu, ou il se serait moqué de lui. Mais dans tous les cas, il n'aurait guère aimé.

La bouche de Grimmjow se plaça tout près de son oreille et y susurra :

_Si j'demande ma mut' au Japon, on pourra faire ça tous les jours, mm ?

Les yeux interrogateurs d'Ichigo cherchèrent les deux lagons de son partenaire, mais celui-ci se fit plus fuyant. Que voulait-il dire ? Pensa Kurosaki, malgré le plaisir qui le submergeait. Oh non, il ne voulait pas y réfléchir, et d'ailleurs il n'y parvint plus lorsque Grimmjow s'enfonça au plus profond de lui et fit courir un violent frisson le long de son échine. Le jeune homme se cambra et échappa un gémissement incontrôlé. Le bleuté haletait lui aussi et il se redressa pour s'asseoir sur ses talons. Prenant les genoux d'Ichigo entre ses mains il posa ses jambes sur ses épaules et continua d'aller et venir en lui. Le corps du rouquin avait par moment des soubresauts étonnants, et il ignorait s'ils étaient dues à la douleur ou à l'immense plaisir qu'il ressentait. Il opta pour la seconde solution lorsque les mains de l'orangé tentèrent de se refermer sur son visage - hors de sa portée cependant - et qu'il brassa l'air inconsciemment. Il comprit qu'il n'était plus vraiment avec lui, mais bien parti au septième ciel.

Lui aussi avait envie de se laisser complètement aller. Ses ongles s'enfoncèrent dans les cuisses de la jeune personne, si profondément qu'ils en laissèrent des marques. Mais ce qui retenait toute son attention c'était bien le visage, et les expressions d'Ichigo. Il adorait le voir si expressif, surtout lorsqu'il était si libéré et que ses petits cris laissaient entendre qu'il était littéralement en train de jouir.

Grimmjow fit une pause dans ses mouvements pour changer de position. Les mains d'Ichigo attrapèrent ses bras et serrèrent ses muscles fortement.

_T'arrête pas... Vas-y, continue, lui souffla-t-il, à moitié conscient.

L'américain ne se fit pas prier et se pencha en avant pour coller son torse à celui du jeune homme. Et en quelques mouvements de bassin, il plongea si loin en lui que la semence du jeune homme s'étala sur son ventre et qu'il poussa un long râle de délivrance. Grimmjow en fit de même, son corps pétrifié par le plaisir qui le frappa de plein fouet.

Il retomba sur le coté, sur le lit, essoufflé et trempé de sueur. Il s'assit sur le rebord du lit, malgré ses muscles tremblants et ses yeux embués, et retira lentement le préservatif de son membre. En jetant un œil derrière lui, il constata que le japonais était déjà endormi, sans avoir pris la peine d'essuyer ce qui souillait son ventre. Grimmjow ricana puis attrapa un mouchoir dans la boite déposée sur la table de nuit et nettoya pour lui la semence. Puis, il remonta la couverture sur le corps nu du jeune homme et resta à fixer son visage quelques instants. Son ricanement s'évanouit et son sourire se figea. Il aurait aimé pouvoir dormir aussi paisiblement que lui, mais il savait déjà qu'il ne pourrait trouver le sommeil. Et la raison de son insomnie n'était pas très difficile à deviner.

Car viendrait un jour où on lui ordonnerait de tirer une balle dans le dos de Kurosaki Ichigo. Il le savait, il le voyait venir gros comme une maison. Et lorsque ce jour viendrait, il savait qu'il ne pourrait s'y résoudre, qu'il trahirait son pays.


Le lendemain ~

Les nuages à l'allure de coton défilaient sous ses yeux. Là en dessous, il disait adieu à la Suisse sans vraiment regretter ce voyage. Il soupira, et parcourut du regard l'habitat du jet privé dans lequel il avait pris place. A l'autre bout de l'appareil, dans un fauteuil qui lui faisait face, Grimmjow était dissimulé derrière un journal, immobile, les jambes croisées.

Il s'était réveillé fatigué ce matin, plus fatigué encore que la veille et avec une certaine pointe au ventre. Pourtant, après plus de trois heures de voiture, ils avaient enfin trouvé l'aéroport de Genève et avaient embarqué illico dans le jet privé mis à disposition par la CIA américaine. Pas de coréens en vue pendant leur fuite, ce qui les avait inquiétés mais au final cela leur démontrait qu'ils étaient bien parvenus à les semer. Grimmjow avait tout prévu, il n'avait eu qu'à se soucier de son heure d'arrivée à Tokyo, et jusqu'à présent leur voyage se déroulait sans encombres. Il était sur la bonne voie pour rentrer chez lui, et son ordinateur endommagé était là, sur ses genoux. Sa formule allait enfin être en sécurité et il pourrait rentrer chez lui.A l'intérieur de ce jet privé, il avait trouvé un ordinateur portable, donné gracieusement par les services secrets américains, et il était parvenu à récupérer sa formule. Ce qui pour lui était un soulagement sans équivalent.

Mais pour l'instant, il n'était guère rassuré encore. Surtout lorsque, sans un bruit, Jaggerjack prit place à côté de lui et engagea la conversation :

_J'me fais chier, dit-il comme si le rouquin y pouvait quelque chose.

_Prends un parachute et jette toi dans le vide, Grimmjow !

_Nan... J'pensais à quelque chose de plus... amusant, reprit-il avec un petit sourire en coin. Les toilettes sont grands, on peut y loger tous les deux et...

_Va te faire voir ! Et tes propositions sont dégoûtantes !

_Tu disais pas ça hier soir, chuchota-t-il en plaçant sa main sur la cuisse du jeune homme.

C'en fut trop pour Kurosaki, qui prit son ordinateur sous son bras et se leva. Il traversa l'appareil et entra dans les toilettes, où il espérait enfin pouvoir être tranquille. Il s'apprêtait à refermer le verrou de la porte derrière lui lorsque une main puissante appuya contre la paroi et fit se rouvrir la porte en moins de deux seconde. Surpris, il laissa entrer Grimmjow sans rien pouvoir dire, ni faire. L'américain ferma le verrou et se retourna vers lui, la mine contrariée.

_Y'a un truc que j'suis pas, commença-t-il à dire en le pointant de son index. Un coup t'es chaud comme la braise, et l'autre t'es plus glacial qu'un putain d'glaçon !

_Grimmjow, laisse...

_Quoi ? Laisse-moi tranquille ? Désolé mais j'suis p'tet pas très logique, mais toi tu l'es carrément pas ! On m'allume pas comme ça et on m'jette pas comme ça, baby !

_Ne m'appelle pas comme ça ! Ragea le scientifique en serrant les poings.

Ichigo se sentait coupable, c'était de sa faute. Il n'aurait jamais dû lui céder pour commencer, et il n'aurait jamais dû laisser ses désirs prendre le pas sur ses engagements. Il aurait souhaité lui dire la vérité mais il était certain que Jaggerjack ne le croirait plus. A quoi cela servirait-il maintenant ?

_Pourquoi ? S'enquit le bleuté en fronçant les sourcils. On s'envoie en l'air, c'est quoi l'problème ? Et on est plutôt bons. A moins qu't'ai pas aimé ça, ce dont j'doute parce que...

_J'ai quelqu'un dans ma vie, Grimmjow, le coupa-t-il en inspirant profondément. Je vis avec quelqu'un. Et j'en ai assez de m'abaisser à le tromper !

La révélation cloua le bec à l'américain, qui sentit son estomac se contracter. Interloqué et à la fois surpris, Grimmjow sembla ne pas réagir jusqu'à ce que le jeune homme tente de s'enfuir de la pièce une nouvelle fois. Mais il le retint en l'attrapant par le bras.

_J'te crois pas, lui cracha-t-il dans l'oreille. C'est le seul truc que t'as trouvé pour te débarrasser d'moi, Kurosaki ? J'croyais qu'tu valais mieux qu'ça.

Les yeux ambrés du japonais se tournèrent vers lui, plein d'animosité :

_Dans ce cas, si tu veux savoir si je mens, tu n'auras qu'à bien observer mon comité d'accueil à Tokyo. Il viendra me retrouver, je le sais. Et tu sauras que je ne mens pas. Et tu laisseras tomber ! Jeta-t-il en retirant violemment son bras de sa main.

Jaggerjack l'observa regagner sa place dans de grands pas rageurs. Il ricana en dodelinant de la tête; lui, laisser tomber ? S'il croyait que ça l'arrêterait, Kurosaki se mettait le doigt dans l'œil ! Mais s'il était effectivement engagé avec quelqu'un cela expliquerait beaucoup de choses, notamment con comportement envers lui. Se sentait-il coupable ? Grimmjow lui, se sentait plutôt fier qu'Ichigo trompe son amant avec lui. Quelque part c'était qu'il l'attirait beaucoup plus que son actuel... Sur ces bonnes pensées, il décida de laisser le temps lui donner des réponses, et passa le reste du voyage tranquillement assis. Il aimait terminer sur un point positif, et qu'Ichigo ait un amant, un petit copain ou un mari ne changeait rien au fait qu'il ne pouvait cacher son attirance pour lui.

Ichigo s'était endormi lorsqu'ils atterrirent enfin à Tokyo. Cependant, l'annonce du commandant de bord le réveilla dans un sursaut et une fois posés sur la piste, il s'empressa d'attraper ses affaires et de se précipiter à la porte d'embarquement. Grimmjow avait bien eu dans l'idée de l'interpeller avant qu'il ne descende de l'appareil mais il réalisa que cela ne servait à rien. Il n'obtiendrait plus rien de Kurosaki maintenant, et il préférait garder son énergie pour leur prochaine rencontre.

Il observa le jeune homme dévaler l'escalier jusqu'à la piste d'atterrissage et se précipiter vers un petit groupe de japonais qui l'attendaient sur la piste. Le bleuté se tenait sur le pas de la porte d'embarquement. Il n'était là que pour quelques minutes encore, le temps que le plein de l'avion ne soit fait, et il rentrerait aux États-Unis. Il n'avait aucune autorisation pour pénétrer le territoire japonais, mais bientôt il en obtiendrait une, il ferait tout pour cela. Et il retrouverait Kurosaki...

Ses sourcils se froncèrent lorsqu'il aperçut le jeune homme se jeter au cou d'un homme à la carrure impressionnante. L'étreinte était chaleureuse et aurait attiré l'oeil de n'importe qui, et il se sentit quelque peu contrarié par cet homme qui semblait tout à coup plus proche de Kurosaki qu'il ne le serait jamais. Pendant un instant, il fut pratiquement prêt à descendre sur la piste et à lui mettre une bonne droite, mais son élan fut coupé net lorsqu'Ichigo déposa un baiser sur les lèvres de l'homme en question. Il était plus grand que le rouquin, avec une carrure imposante, ses cheveux argentés brillaient à la lumière du soleil et pendant une fraction de seconde Jaggerjack resta sidéré.

Ichigo ne s'était pas moqué de lui, il n'avait pas menti. Il avait bien quelqu'un. Et ce n'était pas n'importe qui.

Sa gorge sembla s'assécher alors que le petit groupe s'éloignait de l'avion. Et pourquoi ça le mettait tant en rogne ? Il aurait mis la tête au carré de ce sale type s'il avait pu, mais d'un autre côté il savait pertinemment qu'il ne le pourrait jamais à moins de chercher à mourir dans d'atroces circonstances. Ichigo, bras dessus bras dessous avec l'homme en question, se retourna dans sa direction entre deux pas. Ses yeux se braquèrent droit sur Jaggerjack et bien qu'il ne put déchiffrer le contenu de son regard d'aussi loin, il ne put rater le petit sourire moqueur sur les lèvres roses du scientifique.

_Mon p'tit Grimmjow, tu t'es encore foutu dans la merde, marmonna-t-il pour lui-même en hochant la tête.

Si l'amant d'Ichigo apprenait qu'ils avaient eu une aventure, c'en était fini de lui ! Parce que ce type, ce Muguruma Kensei, il le connaissait bien. Bordel, comment aurait-il pu savoir que l'amant d'Ichigo n'était autre que le directeur des services secrets japonais ?!

Et cette révélation lui fit tout oublier, jusqu'à l'échec de sa mission de récupérer la formule d'Ichigo.

_Putain d'merde j'vais m'faire virer.


* Nobody Does It Better - The Spy Who Loved Me : Chanson composée par Marvin Hamlisch et écrite par Carole Bayer Sager, chantée par Carly Simon. Thème du dixième film de James Bond : "L'espion qui m'aimait".