Disclaimer : Tout appartient à Tachibana Higuchi-sama, à part le petit robot sans nom qui appartient à Hotaru.

Spoilers : Pas à ma connaissance. Peut-être un sous-entendu de spoiler, mais...

Note : Un petit OS comme ça, sans vraiment de sens. Il est presque minuit, et je commence un peu à perdre la boule, je crois...


Manichéisme

La silhouette, immobile, dont l'ombre se confondait avec l'obscurité, était indécelable.
Depuis une demi-heure, sans se lasser, ni bouger d'un centimètre, elle attendait que le moment propice, celui où elle pourrait avancer et mettre son plan à exécution sans prendre le risque d'être vue, arrive. Ce n'était pas la première fois, et les crampes ne la dérangeaient plus : si quelqu'un l'avait vue, nul doute qu'il l'aurait confondue avec une statue.
Et, soudain, ce fut bon : un des hommes, faisant sa ronde, était hors du champ de vision des autres, dos à elle, à l'endroit parfait. Raffermissant sa prise sur la pierre qu'elle tenait, elle la lança de toutes ses forces sur une poutre qu'elle avait déplacé quelques dizaines de minutes plus tôt pour la placer dans un équilibre précaire, équilibre que son caillou n'eut aucun mal à briser.
L'homme entendit le choc, et releva la tête pour voir la poutre dégringoler sur lui. Qu'il soit en possession d'un Alice ou pas, il n'eut pas le temps de l'utiliser qu'il s'écroula, assommé.
Attiré par le bruit, un autre homme de main s'approcha, vite suivi d'un deuxième.
Des déclics retentirent dans le hangar : ils ôtaient le cran de sûreté de leurs armes. Comme si cela pouvait être suffisant…
Elle se faufila silencieusement entre les nombreuses caisses qui meublaient le hangar, et, par chance, étaient suffisamment grandes pour la cacher, puis vérifia que personne ne pouvait la voir. C'était le cas, et elle put donc lancer ce qu'elle tenait dans la main gauche à une trentaine de mètres de là.
Le petit robot alla se cogner contre une caisse, émettant un bruit infime, mais qui suffit à le faire repérer. Trois hommes partirent en direction de la machine, pendant que la silhouette continuait à avancer, tout doucement, pas par pas, sans se presser.
Elle était tout près de son but, désormais. Assez près pour voir les gouttes de sueur qui perlaient sur les tempes des deux derniers gardiens.
Cette fois encore, elle prit son mal en patience, et attendit, recroquevillée dans l'ombre.
Elle compta les secondes, qui se transformèrent rapidement en minutes, en dizaines de minutes. Puis, enfin, les hommes roulèrent au sol, leurs armes tombant au sol avec un bruit mat.
Le hangar était silencieux – le robot avait réduit au silence ses opposants depuis belle lurette. La silhouette se félicita d'être tombée sur une bande de dépendants à la caféine : le seul à ne pas avoir absorbé de café, ainsi que la drogue qu'elle y avait mise, avait commencé sa nuit sous une poutre.
Mais, parce qu'elle était prudente, elle s'avança avec tout autant de précautions qu'auparavant.
Elle prit le pouls des hommes inconscients, et s'autorisa un soupir soulagé : la dernière fois, l'un de ses adversaires avait fait une réaction allergique au somnifère, et elle avait dû l'emmener de toute urgence à l'hôpital. Mais, cette fois, tout allait bien.
Elle attrapa le trousseau de clé, et introduit celle que les gardes avaient utilisée dans la serrure, qui émit un cliquetis avant de permettre à la porte de s'ouvrir.
Elle se faufila dans la pièce, attentive au moindre bruit : une fois, elle avait été prise par surprise par un homme embusqué avec sa proie, et avait été obligée de l'emmener lui aussi à l'hôpital, histoire qu'il ne meure pas d'une commotion. Mais, heureusement, il n'y avait personne.
Finalement, c'en était presque ennuyant.
Elle palpa le mur, trouva l'interrupteur.
La proie était consciente – elle n'aurait su dire si c'était une bonne ou une mauvaise chose.
Préférant remettre les choses ennuyantes à plus tard, elle commença par défaire ses liens plutôt que son bâillon, mais, malheureusement, elle avait un couteau sur elle qui lui facilita la tâche, et dut finalement s'occuper du bâillon bien trop tôt à son goût.

« Je t'avais dit de ne plus venir ! Si tu te fais attraper… »

Et voilà ! Elle allait vraiment finir par l'écouter, un de ces jours, et le laisser se débrouiller, d'ailleurs, elle ne se gêna pas pour le lui dire.
Mais un bruit derrière elle gêna leur dispute naissante : un homme, au métabolisme certainement plus performant que les autres, avait repris conscience. Elle se félicita d'avoir gardé son masque.

« Le… le Chat Blanc… »

Le pauvre homme était terrorisé, et, quand elle approcha doucement, il se révéla incapable de bouger. Elle ne savait pas si c'était par la faute de la peur qu'elle lui inspirait, ou un effet secondaire du somnifère qu'elle lui avait administré.

« Quel est ton Alice ? »

Il secoua la tête, mais c'était un geste de défaite plutôt que de refus.

« La vision… infrarouge.
- Je suis désolée si tu la perds. »

Lorsqu'elle retira la main qu'elle avait posée sur sa joue, l'homme s'évanouit.
Le Chat Blanc espèra qu'il ne perdrait pas son don de manière définitive, mais il avait encore du mal à maîtriser cette facette de son Alice.

« On y va, ou tu as l'intention de lui laisser un cadeau en guise de lot de consolation ?
- Allons-y. »

Le Chat Noir passa devant. Comme d'habitude, il était vexé que son compagnon soit venu à son secours, au mépris des risques qu'il encourait s'il devait être reconnu.
Un miaulement les fit sursauter. Un chat gris se faufila entre eux.

« Il n'y a pas de gris…
- Ni de bleu, de vert ou de rose, poursuivit le Chat Blanc, comme si cette conversation avait déjà eu lieu des milliers de fois auparavant. Juste le noir, et le blanc, qui jamais ne se mêlent…
- Et un jour, il n'y aura plus ni noir, ni blanc…
- Juste toi, et moi…
- Mais jamais de nous. »

Le chat miaula de nouveau, et s'écarta, disparaissant rapidement dans le hangar obscur.
Dehors, le Chat Noir et le Chat Blanc continuèrent à marcher, sans dire un mot, parce qu'ils n'avaient pas besoin de gris – dans sa suffisance, le Noir n'avait besoin de personne ; dans sa plénitude, le Blanc n'avait besoin que du Noir.
Alors ils marchèrent. Le Chat Blanc ne lui reprocha pas de s'être fait capturé, le Chat Noir ne lui reprocha pas d'être venu le chercher. Mais il ne dit pas merci non plus.
Et, tout en observant la silhouette auréolée de soleil du Chat Blanc, il se demanda quel Dieu sournois et cruel pouvait l'avoir affublé d'un Alice de feu, alors que d'autres voyaient à travers les masques… ou les vêtements.