Etait-ce à lui qu'elle souriait, ou pensait-elle encore à son Truman, se demanda-t-il. D'une certaine façon, il aurait aimé que ce soit lui qui occupe ses pensées, lui qui la fasse sourire. Ce Truman French ne la méritait pas, c'était certain. Elle aurait été tellement mieux avec lui, même si cela allait contre tous ses principes. Il secoua la tête pour faire disparaître ces idioties. N'y arrivant pas, il murmura une vague excuse à Casey, et se rua dans sa chambre. Il ne remarqua pas le regard de sa demi-sœur, comme il n'entendit pas son soupir.

Une fois enfermé dans son antre, la musique à fond, allongé sur son lit, les bras derrière la tête, il laissa divaguer son esprit. Il songea à son sourire, à l'envie qu'il avait d'écraser ses lèvres dessus. Ce baiser aurait sans doute la douceur de l'échec, mais il n'aurait pas le goût de la douleur qui l'accompagne si souvent. En parlant de goût, quel était celui de ses lèvres ? Celui des fraises, dont elle est si friande ? Ou juste celui de Casey ? Il imagina le fantôme illusoire de sa demi-sœur qui encerclait son cou avec ses bras, enroulait ses jambes autour des siennes. Il sentit presque la douceur de ses cheveux sous ses doigts quand il essaya de saisir sa taille. C'est alors que quelqu'un ouvrit la porte, faisait s'évaporer le rêve. Et l'objets des ses obsessions fit irruption dans sa chambre et éteignit la radio. Il ne réagit pas immédiatement, encore à moitié dans son fantasme, pensant à son corps parfait, qu'il avait admiré une nuit, dans son album de photos de danse. Pour une fois, il avait remercié le créateur de ces tenues de les avoir fait aussi succinctes.

Enfin, il se rendit compte que son absence de réaction l'intriguait. Alors il s'approcha d'elle et il passa son bras dans son dos pour rallumer la radio. Il en profita pour baisser le son. Puis il osa enfin la regarder dans les yeux. Son visage n'affichait aucune émotion, à part son regard, légèrement fixe et troublé. Il sentit son cœur s'emballer, heureux de savoir qu'il provoquait quelque chose chez elle. En désignant la radio, il lui demanda :

-Satisfaite ?

-Parfaitement, répondit-elle avant de partir presque en courant, les joues rosies.