Cerf, cerf, ouvre-moi!

Résumé : 1980. Pour conserver sa couverture auprès des Mangemorts, dans un cas désespéré, Severus Snape n'a d'autre choix que de frapper à la porte de Lily Evans. Dommage, cette nuit-là, il n'y avait que James Potter de disponible… (une fois n'est pas coutume :) PAS DE SLASH

NdA: A la base, cette fic était censée être un OS, mais je me suis rendue compte que j'avais envie de couper à certains endroits, ce qui donne au final une courte fic de 5 chapitres (courts eux aussi! désolée...). L'option "épilogue" n'est pas encore exclue, cela dépendra des demandes.

NdA II (le retour) : Cette fiction se déroule fin 1980(plus précisément en novembre), les Potter ne sont pas encore installés à Godric's Hollow. En ce qui concerne la géographie de Londres, je vous prie de me pardonner, c'est lamentable. A ma décharge, je n'y suis jamais allée.

Disclaimer: Tout est à JK Rowling, bien sûr. Bon, et puis, on peut presque qualifier cette fic de song-fic (désolée pour ça aussi, je suis encore très jeune intérieurement), alors je suppose qu'on peut dire qu'elle appartient aussi aux auteurs de la chansonette!

Enjoy!



Dans sa maison un grand cerf regardait par la fenêtre.

Un lapin venir à l'huis et frapper ainsi :

« Cerf, cerf ouvre-moi, ou le chasseur me tuera !

-Lapin, lapin entre et viens, me serrer la main »

« Bon. Très bien. J'ai compris ! Tes petites oreilles sont trop sensibles pour ma chansonnette ! »

Harry gazouilla avec éloquence et James secoua la tête, amusé.

« Si tu veux tout savoir, c'est ta mère qui me chantait ça ! Comptine moldue, tu sais. Mais bon comme il y avait un cerf… »

Le bébé le fixa de ses immenses yeux verts. Ceux de Lily. Le jeune père eut du mal à soutenir son regard. Finalement, il soupira.

« Toi, quand tu seras grand… »

Son cœur fut submergé par une vague d'amour, de tendresse, de fierté, et d'amour, d'amour, d'amour… Il but la tasse. Il se sentit perdre pied dans tous ses bons sentiments. Peut-on se noyer de bonheur ? La chaleur remontait de sa poitrine, dans ses joues, remplissait ses yeux et passait par-dessus sa tête. Comme une drogue. Il planait, se savait heureux, ses sentait heureux dans toutes les fibres de son corps, jusqu'à la racine des cheveux. Profondément, en surface et dans une sorte de halo doré.

Et puis, comme une ancre, un port, la guerre se ramenait.

James détacha ses yeux du berceau et les planta sur la fenêtre légèrement embuée, et bien plus loin.

Les morts, la peur, les pleurs… Terre en vue ! De là où il était tout était sous l'eau, mais au dehors… Putain de guerre, putain de terre !

James aurait mille fois préféré aller visiter les fonds marins, en bouffer jusqu'à étouffement, en recracher par tous les pores, du bonheur ! Aller jusqu'à l'overdose, tout pour épargner à bébé Harry une enfance anxieuse et effrayante. Une enfance de sang et de larmes.

Quelque chose bougea derrière la vitre.

Une poignée de secondes s'écoulèrent, le temps que James esquisse un mouvement, que sa respiration reprenne, qu'il réalise… A cette heure ?

Vent ? Animal ?

Et les batailles, dehors, c'est du vent, aussi ?

Il sortit sa baguette de sa poche. De lourds battements résonnaient à ses tempes.

Son vœu le plus cher, quand il songeait à se qui se cachait dans le jardin, dans les ombres et les buissons, c'était de prendre Harry, de s'en aller le plus loin possible, de le mettre en sécurité, cette sécurité qu'il avait cru détenir jusqu'à cet instant précis…

Je leur en foutrai, de la noyade en plein bonheur !

Alors, avec précaution, il fit quelques pas hors de la chambre, referma doucement la porte, et descendit les escaliers. Il n'avait pas peur. En réalité, il n'avait jamais été aussi calme de sa vie.

Quand il atteignit l'entrée, trois coups furent frappés à la porte.

oOo

Il fallait le dire, Severus Snape était dans la merde.

Jusqu'au cou. Jusqu'au dessus de la tête. Vraiment dans la merde.

Enfin, c'était vrai qu'il l'avait un peu cherché. A commencer par le jour où il avait eu la mauvaise idée de tomber amoureux de sa Sans de Bourbe de voisine.

Pas « Sang de Bourbe », Severus ! Tu as juré…

Et le voilà qui parlait tout seul.

Certainement, tout était de la faute de Dumbledore.

Pourquoi avait-il accepté cette mission suicidaire, aussi ? Il ne voulait pas mourir.

Ah. Oui. Ce devait être pour ça. Merlin seul savait (et lui également, désormais) à quel point un vieillard de 130 ans pouvait être effrayant.

Alors effectivement, il était parti effectuer une mission de sabotage. Dans le manoir Malfoy. Au milieu de la nuit. Ne pas se faire prendre relevait de l'impossible, Dumbledore l'avait bien fait remarquer. Pour s'en tirer, avait-il assuré (peut-être pas dans ces termes), seules les capacités hors du commun d'espion graisseux seraient utiles.

La fuite.

Severus Snape avait donc pris ses jambes à son cou, suivi par une Bellatrix très en forme (grand bien lui fasse), d'un Rodolphus un peu frustré , d'un Rabastan très énervé (ah, le réveil forcé…) et d'un Macnair plus sadique que jamais(rien à faire de ce côté-là). Lucius était resté derrière pour réparer les dégâts. Un grand rêveur, Lucius. Snape faisait peu de choses, mais il les faisait parfaitement.

Son sang froid l'avait tout de même gardé de se défaire de sa couverture. Haha. Pas sûr que Voldemort apprécierait autant que lui les jeux de mots.

Semer quatre Mangemorts n'est pas tâche aisée. Ses transplanages étaient repérés, et il était aussitôt suivi. Il soupçonnait Bellatrix de lui avoir jeté un sort de détection à distance, juste avant qu'il ne disparaisse, son identité toujours cachée.

Plus pour longtemps.

Son seul espoir était d'atteindre un lieu protégé de tous les maléfices. Hogwarts, bien sûr. Gringotts, probablement. Cependant, déambulant dans le Londres moldu (premier transpalanage. Réflexe stupide. Il avait simplement rameuté un troupeau de tueurs avides de sang face à leur gibier préféré…), ces deux options étaient légèrement limitées. Si toute l'enceinte de Hogwarts était protégée des transplanages, le parc ne l'était pas des maléfices. Il serait pris sous le nez aquilin de Dumbledore. Et il était hors de question qu'il aille se réfugier dans ses robes. Gringotts, quant à elle, était sûrement fermée, à cette heure. Le temps qu'un Gobelin lui ouvre, il aurait déjà été mené à Voldemort par les tripes.

Non, il fallait trouver autre chose.

Tout en cavalant, bien sûr.

Son cœur battait si vite qu'il se demandait s'il n'allait pas finir par exploser. Encore pire qu'un gosse tombant amoureux pour la première fois ! Il aurait aimé que ses jambes se déconnectent de son corps, et continuent à courir toutes seules, mais la triste réalité était qu'il les sentait plus durement ne les avait jamais senti. Tiens ! J'ai un muscle, ici !

L'air qui rentrait rageusement dans ses poumons lui irritait la peau, lui brulait la gorge, l'étouffait. N'était jamais suffisant.

Un lieu protégé… Un lieu sûr…

« Et Lily ?

Dumbledore fronça les sourcils. Il siffla entre ses dents, et rectifia.

-Et les Potter ?

-Ils sont en sécurité. »

Snape faillit trébucher, mais se rattrapa se justesse. Pourquoi fallait-il qu'il pense à des sujets minés ?

Une autre voix s'immisça dans son esprit.

« Une petite maison, en plein cœur du Londres moldu. Très mignon !

-Pour toi, tout ce qui n'est pas la maison de tes parents est mignon, Padfoot !

-Peut-être, mais je pense qu'ils vont l'acheter. Tu devrais passer, Moony. 21 bis, Edinson Street. »

Où avait-il entendu cette conversation ? Il se souvenait d'un couloir, d'un mur derrière lequel il s'était caché. Deux hommes. Des sourires. Le Ministère ? Non, le chien-chien de Potter ne mentionnerait pas l'adresse de « gueule d'amour » là-bas. Une réunion de l'Ordre ? Oui. Une à laquelle il n'était pas censé avoir assisté. Comme toutes les réunions de l'Ordre, d'ailleurs… Il était arrivé à la fin. Un rapport à remettre à Dumbledore. Il s'était planqué, personne ne savait qu'il était un espion : celui de Voldemort s'empresserait de le lui raconter. Et les silhouettes de Black et Lupin en pleine conversation.

Puis, l'information percuta enfin sa conscience. Edison Street ! A peine quelques rues plus loin… Et l'un des endroits les mieux protégés de Grande Bretagne !

Malgré la peur, malgré la course, malgré le danger, Snape se figea sur place. Les Mangemorts n'étaient pas en vue, mais l'auraient-ils été qu'il n'aurait pas réagi autrement.

Absurde ! Il ne pouvait pas aller se réfugier chez Lily Evans. Lily Potter. Ne le croyait-elle pas Mangemort ?

Ce qu'il était, soit dit en passant.

Mais de toute façon, elle le détestait. Vraiment ? N'avait-il pas le droit d'espérer qu'il reste une miette d'affection dans son cœur si grand ? Assez grand pour un traitre, par ailleurs. Plus de quatre ans qu'ils ne s'étaient pas parlé… N'avait-il pas le droit de rêver ?

Pas quand ta vie ne tient qu'à un fil !

Jamais elle ne lui ouvrirait. Jamais elle ne le laisserait s'expliquer… Lily était une vraie furie. Jamais, jamais, jamais…

Etait-ce l'idée de la mort qui lui remplissait la tête de pensées insensées ? D'espoir idiot ? Il ne fallait vraiment pas qu'il risque sa vie trop souvent !

Il ne se rendit même pas compte immédiatement qu'il s'était remis en route. Précisément en direction d'Edison Street.

Petit con ! Petit con graisseux !

Un lieu sûr… Un autre lieu sûr ! Vite !

En cas désespéré, ne dit-on pas « mesures désespérées » ?

Pas aussi désespérées que ça !

Foutu Dumbledore ! Il devait vraiment conserver sa couverture.

Combien de tentatives de suicide vais-je donc réussir à cumuler en une seule soirée ?

Son cœur battait trop vite. Mais plus pour les mêmes raisons.

C'était la seule solution. La plus sensée et la plus folle. Frapper à la porte de Lily Potter, et puis quoi encore ! La surprendre au milieu de la nuit, au milieu de sa vie, entourée de son fils et de son crétin de mari ?

Pourtant, il voulait y croire. Croire qu'il pouvait s'en réchapper, croire qu'il pouvait être sauvé par sa princesse de contes de fée. Croire que tout n'était pas perdu.

Il prit le virage à gauche, un suivant à droite. L'espoir n'avait pas diminué ses souffrances, mais au contraire les avait accrues. Ses jambes pesaient plusieurs tonnes chacune, sa tête était bien trop lourde, et l'apnée n'avait jamais été son point fort. Bien sûr, il y avait également la pensée horrible que les frères Lestrange le rattrape, et qu'il meure à quelques mètres de son but. Mieux valait ne pas y penser.

Songer à quoi, alors ? A son amour inconditionnel et inutile pour une femme mariée et en première place sur la liste de Voldemort ? A cette peur qui tordait ses entrailles désoxygénées ? Cette impatience, de la revoir ?

Enfin, la bonne rue.

« Ils sont en sécurité. »

Putain, Dumbledore avait intérêt à avoir bien fait son job !

Le 19, le 21, le 23…

Snape suait à grosses goutes, son souffle s'éjectant de sa gorge sèche en un bruit de fin du monde.

Pas de 21 bis.

Bon. Pas trop con, le Dumbledore.

Il ferma les yeux, se concentra. Il fallait savoir que la maison était là. Il enchaîna quelques gestes compliqués de sa baguette, marmonna une formule en latin. Croisa très fort les doigts de la main gauche.

Ses paupières se relevèrent. La maison était là.

Très mignon, effectivement, Black.

Il enjamba la barrière, leva d'autres sorts de protection, les replaçant derrière lui, vérifiant à chaque seconde l'angle de la rue.

Sur le seuil, il marqua un temps d'hésitation. Plus de quatre ans…

Essoufflé, la robe déchirée, les cheveux plus graisseux que jamais. Il espérait que Lily n'en tiendrait pas compte.

Il frappa trois coups distincts à la porte.

Celle-ci pivota plus vite qu'il ne l'eut escompté.

Un battement de cœur plus tard, une baguette était enfoncée dans la chair tendre de son cou et ses yeux plantés dans ceux, noisette et dégoutés (dégoutants, aussi) – de James Potter.

« Merde »