NEVER FORGET
PROLOGUE.
Il sortit de sa voiture quand je sortis de ma Chevrolet et vint à ma rencontre. Il me débarrassa de mon cartable. Rien que de très normal. Il le remit sur le siège –anormal.
-Viens te promener avec moi, m'invita-il platement en saisissant ma main.
Je ne répondis pas, ne trouvant rien à lui objecter, alors que j'en avais eu immédiatement envie. Je le suivis de mauvaise grâce, essayant de contenir mon affolement pour réfléchir. Il s'adossa à un tronc et me dévisagea, impassible.
-Allons-y, discutons, décrétai-je.
Une manière de bravoure que j'étais loin de ressentir. Il prit une grande inspiration.
-Nous partons, Bella.
J'inhalai moi aussi. C'était une option acceptable à laquelle je m'étais préparée. N'empêche.
-Pourquoi maintenant ? Encore un an, et…
-Il est grand temps, Bella. Nous ne nous sommes déjà que trop attardés à Forks. Carlisle a beau prétendre avoir trente-trois ans, il à l'air d'un gamin. C'était inéluctable, alors aujourd'hui ou demain…
Je perdis pied. J'avais cru que le seul intérêt de notre départ était de laisser sa famille en paix. Pourquoi nous en allions-nous si les Cullen déménageaient eux aussi ? Je l'interrogeais du regard, le cerveau en ébullition. Il me toisa froidement. Soudain, je compris ma méprise.
-Quand tu dis nous…, chuchotai-je.
-Il s'agit de moi et des miens.
Chacun des mots martelés avec soin. Il me fallut quelques minutes pour retrouver la parole.
-D'accord, je viens aussi.
-Impossible, Bella. Notre destination… ce n'est pas un endroit pour toi.
-Quelque soit le lieu où tu es, j'y ai ma place.
-Je ne t'apporte rien de bon, Bella.
-Ne soit pas idiot.
J'avais tenté d'insuffler de la colère à cette répartie, qui sonna comme une prière.
-Tu es ce qu'il y a de mieux dans ma vie, ajoutai-je.
-Mon univers n'est pas fait pour toi.
-Ce qui s'est passé avec Jasper ce n'était rien, Edward, rien du tout !
-En effet. Il est juste arrivé ce qui devait tôt ou tard arriver.
-Tu as juré ! A Phoenix, tu as promis que tu resterais…
-Tant que c'était ce qu'il y avait de mieux pour toi, me rappela-t-il d'un ton brusque.
-Non ! C'est à cause de mon âme, hein ?
Je criais, à présent, bien que mes paroles aient toujours des allures de suppliques.
-Carlisle m'en a parlé. Je m'en moque, Edward, si tu savais comme je m'en moque ! Prends mon âme. Je n'en veux pas, sans toi. Je te l'ai déjà donnée.
-Je ne veux pas que tu viennes, Bella, m'asséna-t-il lentement, distinctement, ses yeux différents, plus durs, comme si leur or s'était figé.
-Tu…me…quittes ? résumais-je tout fort.
-Oui.
Hébétée, je plongeais dans son regard. Il me fixait sans l'ombre d'un regret.
-Ca change tout.
-J'ai trop longtemps laissé l'imposture s'installer. J'en suis désolé.
-Arrête ! Ne fais pas ça.
-Tu ne m'apportes rien de bon, Bella.
Je sentis quelqu'un me pousser, à des kilomètres de cette forêt maudite, et retrouvai mes esprits. Folle de rage, je cherchais mon cavalier dans la foule. Comment avait-il pu ? Lui qui se disait être mon ami ! Lui qui prétendait vouloir m'aider à retrouver la mémoire ! lui qui m'avait caché la vérité ! Et pas seulement lui ! Mon père, Angela, Mike, Jessica… Ils m'avaient tout caché de mon année précédente ! Enfin, j'aperçus une chevelure cuivrée et fendais la foule dans sa direction. Lorsqu'il se retourna et me scruta de ses yeux dorés, je perdis toute ma détermination et ressentis une vague de tristesse m'envahir. Sentant les larmes affluer, je m'enfuis…