Coucou!! Me voici rentrée de voyage, crevée, mais ravie. J'ai un peu de mal à atterrir, hum..., alors je fais confiance au boulot pour m'aider à reprendre pied dans la réalité (beurk) (je n'ai pas le choix de toute façon)!!

Comme promis, voici le dernier chapitre de « Passion coupable ». Je vous laisse lire et vous donne rendez-vous en bas de page.

Note du 22 mai 2009: vous trouverez des nouvelles de la suite en bas de page...

0o0o0o0

CHAPITRE TRENTE ET UN

Il tournait en rond dans sa prison comme un lion en cage. Oh, pas que sa cellule fût petite, ou misérable! Il était plutôt bien logé et bien nourri, après avoir bataillé pour bénéficier de conditions d'incarcération dignes de son rang.

Son avocat venait de sortir, le laissant seul. Par chance, Benjamin Cooper était un ami, quelqu'un de très prisé et respecté que Tom connaissait de longue date. Le Lord ne doutait pas qu'il saurait le défendre honorablement. Et quelques pots de vin, versés discrètement aux personnes bien placées, feraient avantageusement le reste…

Aux dires de Cooper, Tom ne végèterait guère plus de quelques mois dans cette prison londonienne. Personne n'aurait les moyens (ni d'ailleurs la volonté) de prouver qu'il avait sciemment commis quelque crime que ce fût. Les témoins à charge étaient tous des repris de justice ou des miséreux qui ne pouvaient espérer qu'on prît leur parole au sérieux. Quant au victimes, elles n'étaient plus là pour porter plainte.

Pour sa part , Tom avait des amis riches et puissants sur lesquels il pouvait compter. Nombre d'entre eux étaient en effet impliqués -de près ou de loin- dans ses activités esclavagistes, et intéressés de le voir libre, l'accroissement de leurs revenus en dépendant fortement.

Cooper, son avocat, était en train de battre le rappel des troupes…Et l'homme avait déjà tout mis en œuvre pour que les biens de son client ne lui fussent pas confisqués…

Donc, les choses s'annonçaient plutôt favorablement. Il n'y avait pas deux jours que Tom occupait cette « cellule » londonienne que déjà, il disposait de tout le confort. Il ne s'ennuierait pas jusqu'à sa libération, ayant largement de quoi lire et écrire... Et il comptait sur ses amis pour lui fournir tout le nécessaire, dès que le besoin s'en ferait sentir.

Pour garder une bonne forme physique, il se contraignait à marcher de long en large des heures durant. Mieux valait profiter de cette réclusion forcée pour faire le plein de sommeil, entretenir ses muscles et retrouver l'énergie de la jeunesse… Ainsi, à sa sortie, il se montrerait plein de vaillance, au lieu de présenter le visage d'un homme abattu et diminué.

Il jeta une bûche dans le feu, se servit un verre de Brandy, puis se laissa enfin tomber dans son fauteuil. Côté boisson, il avait veillé à ne manquer de rien. Une rasade offerte de temps à autre à ses gardiens lui garantissait d'être royalement traité…

Une chose le préoccupait encore cependant: le sort de son ami Jack. Le peintre avait été emprisonné à Bristol, dans des conditions beaucoup moins enviables que les siennes. Il fallait espérer que les charges retenues contre lui seraient trop légères pour qu'il eût à subir un long enfermement.

Tom avala une gorgée d'alcool, et ferma les yeux, le corps détendu. Ses pensées, tout naturellement, dérivèrent vers celui qui l'obsédait et dont la présence lui manquait cruellement.

Il s'agissait, bien sûr, du jeune Harry Potter.

Une idée lui vint. Pour patienter agréablement, il demanderait à Cooper, la prochaine fois qu'il le verrait, qu'on lui apportât dans sa prison tous les carnets à croquis de ce cher Mulciber. Personne ne pourrait s'opposer à cette requête inoffensive…

Il savait que Harry Potter avait survécu à la blessure qu'il lui avait infligé. Son soulagement avait été immense… Dès lors, il s'était juré de remettre la main sur le garçon, et de lui prouver qu'il ne lui avait pas lancé une promesse en l'air. Cette perspective stimulante le remplissait de courage et de détermination.

Où se trouvait à présent l'adolescent? Sans doute était-il revenu à Wardour, où il avait repris sa vie paisible de musicien…

Voyait-il souvent cette chauve-souris de Rogue? C'était probable. Mais Tom n'était pas inquiet à ce sujet. L'homme d'église était beaucoup trop lâche, beaucoup trop coincé et bien-pensant pour se risquer à tenter quoi que ce fût sur la personne de son ancien élève…

Et puis, il n'était pas à proprement parler ce qu'on appelle un « homme séduisant »… Cette pensée le fit ricaner à haute voix.

Une nouvelle goulée de Brandy enflamma un peu plus l'esprit du prisonnier. Le souvenir de ses étreintes avec le garçon se fit plus précis, plus intense.

Il se revit, caressant inlassablement ce corps parfait… lui emprisonnant les mains pour taquiner plus librement ses zones sensibles… palpant et pétrissant sa chair jeune et ferme… la goûtant de ses lèvres, de ses dents, de sa langue…Baisant cette bouche si attirante, s'introduisant en elle avec une tendre hardiesse… Plongeant son regard dans ces yeux magnifiques, s'en abreuvant sans retenue… ébouriffant cette chevelure généreuse, qui encadrait si harmonieusement ce visage d'ange rêveur, concentré ou espiègle…

Assurément, il était en manque de ce garçon qui avait pris tant de place dans sa vie, en quelques semaines à peine …

Jack lui avait reproché d'être « amoureux »…et il commençait à penser que son artiste d'ami avait visé juste. Cependant, un quadragénaire peut-il réellement s'éprendre d'un adolescent d'à peine dix-sept ans? N'était-ce pas ridicule, insensé ?

Il pouvait certes le convoiter en tant qu'objet capable d'assouvir ses pulsions et de lui donner du plaisir…Tom ne comptait plus le nombre de garçons qui l'avaient ainsi attiré et qu'il avait menés jusqu'à son lit pour profiter de leurs charmes…avant de les envoyer promener, quand ils devenaient trop encombrants. Il ne supportait plus leurs regards mélancoliques de chiens fidèles.

Mais pour Harry, il sentait bien que son attirance était plus forte, plus durable, plus passionnée… De surcroît, fait suffisamment rare pour être signalé, le garçon lui résistait, attisant son désir. Et pour la première fois, Tom espérait plus de réciprocité.

Comment expliquer cet état de fait? Tom avait déjà longuement réfléchi à la question, et en était arrivé à la conclusion que Harry était un être exceptionnel, au même titre que lui, lord Voldemort. Et qu'incontestablement, quelque chose de puissant les rapprochait, créant entre eux une attraction étrange, irrésistible, mais complexe.

Tom ne pouvait tout simplement plus se passer de Harry Potter. Cet étonnant garçon était devenu sa drogue, et il n'avait nullement l'intention de se défaire de cette dépendance enivrante qui, au lieu de l'affaiblir, lui donnait envie de vivre et de se battre…

Il était certain que de son côté, le garçon se languissait de lui…Qu'il avait la nostalgie de leurs étreintes, même s'il refusait probablement de se l'avouer.

Le verre à la main, il se leva et se mit à parcourir nerveusement sa cellule une nouvelle fois.

Il voulait le revoir. Il voulait l'entendre à nouveau jouer du violon pour lui. Il voulait plonger les yeux dans les siens, aussi longtemps qu'il en aurait envie. Il voulait le voir rire, le voir chanter. Il voulait le sentir frissonner, mollir puis durcir sous la caresse de ses doigts et de ses lèvres, l'entendre gémir, supplier et crier de plaisir entre ses mains...

Mais il voulait aussi le voir fondre sous son regard brûlant, le voir s'offrir à lui, se mettre à nu sans réserve, sans pudeur …Le supplier de le prendre… Il voulait faire voler en éclat son orgueil…Briser sa fierté…

Il voulait le marquer de son empreinte, s'enfoncer en lui, toujours plus profondément et sauvagement. Le faire hurler et pleurer de douleur et de jouissance mêlées…

Il voulait le soumettre. Il voulait vaincre sa résistance, le voir lever vers lui un regard d'adoration, de vénération. Et de crainte…

Il voulait le posséder, tout entier et pour toujours.

Et quand Tom voulait quelque chose -ou quelqu'un-, il était sûr de l'obtenir.

0o0o0o0

Où Rogue était-il donc fourré? Il lui avait pourtant donné rendez-vous à trois heures, dans l'église…

Harry regarda autour de lui, décontenancé. Bon, il allait s'asseoir, en attendant que le pasteur daigne se présenter.

Le garçon se savait en retard de quelques minutes. Avec son caractère de cochon, Rogue était peut-être reparti, furieux. A moins qu'il n'eût été retenu à la cure par un de ses paroissiens…

Il avait pourtant dit à Harry qu'il avait quelque chose "d'important à lui remettre "…Mais pourquoi, dans ce cas, l'avoir convoqué à l'église, et pas au presbytère?

Et de quoi s'agissait-il ? Un livre, un document quelconque...? Un message à transmettre à une connaissance, à Londres?

Le garçon avança dans l'allée centrale et s'assit sur un des bancs.

A cet instant, il entendit la soufflerie de l'orgue se mettre en route. Et presque aussitôt, le son de l'instrument s'éleva, emplissant l'église, tournoyant sous les voûtes.

Étrange…pourquoi Rogue l'accueillait-il par un morceau d'orgue? Voulait-il lui faire entendre une de ses improvisations, ou …

Harry sentit son cœur s'arrêter, puis bondir. Cette musique…mon Dieu…où l'avait-il déjà entendue?

Le garçon se mit à trembler d'émotion et d'excitation. C'était beau…saisissant. Il connaissait cette oeuvre…il la connaissait même incroyablement bien…intimement…

Non, ce n'était pas possible!

Il savait, à présent. Cette œuvre, il en était lui-même l'auteur. S'il ne l'avait pas immédiatement reconnue, c'était parce qu'elle n'était pas destinée à l'orgue…

Son quatuor…celui qu'il avait commencé dans la voiture, assis en face de Croupton, et avait continué d'écrire alors qu'il était enfermé dans la chambre secrète, à Manderley… Le quatuor disparu, abandonné avec ses autres affaires au poste de police de Wick…!

…Harry avait définitivement renoncé à lui, le croyant perdu à jamais…

Comment Rogue était-il entré en sa possession?

Harry se leva, comme dans un rêve, et avança vers le fond de l'église. La ligne de chant du violon, pure et suppliante, entrait en lui comme une douce consolation… Mais il manquait une voix…l'alto, ou le second violon…Bien sûr, Rogue ne disposait que d'une main pour jouer!

Il devait l'aider. Le garçon monta quatre à quatre l'escalier en vrille, le cœur battant d'anticipation, comme il le faisait autrefois, du temps où il prenait ses cours d'orgue et rejoignait son professeur sur la tribune.

Il atteignit la plate-forme. Le vicaire jouait toujours, et il ne lui jeta pas un seul coup d'œil tandis que Harry s'asseyait à sa gauche et posait ses mains sur le clavier…

Les quatre voix s'élevaient maintenant, et Harry se sentait exulter. Ce qu'il avait écrit était beau. Une incroyable fierté gonflait sa poitrine et rougissait ses joues brûlantes.

Rogue ne l'avait toujours pas regardé. Harry ne pouvait faire autrement que de se coller à lui, quand les lignes mélodiques se croisaient et que leurs doigts se mêlaient sur les touches, et que leurs pieds se rencontraient sur le pédalier. Le banc n'était pas très large…

Il s'aperçut avec effroi que ce contact était légèrement troublant et excitant.

Pourtant, ce n'était pas la première fois que son corps touchait celui du pasteur. Quand il était enfant, cela s'était souvent produit, sur ce même banc, pendant ses leçons, sans qu'il en ressentît la moindre gêne.

Puis, quand Harry avait grandi, Rogue l'avait écarté, refusant de lui donner plus de cours sous prétexte qu'il n'avait plus de temps à consacrer à ça. Selon lui, le garçon en avait suffisamment appris et devait concentrer ses efforts sur l'étude du violon.

Enfin, tout récemment, il y avait eu ce moment terrible, dans la grotte, où leurs deux corps s'étaient pressés l'un contre l'autre, sous la poussée du Lord… Leurs odeurs, leurs souffles s'étaient alors mélangés…

Non, cet épisode là, Harry ne voulait plus s'en souvenir.

Et maintenant… Ils étaient assis là, côte à côte, donnant ensemble vie à son œuvre, et le pasteur ne le repoussait pas, au contraire…C'était même lui qui l'avait mystérieusement convoqué, pour lui faire la surprise de ce magnifique présent…

Le dernier accord du premier mouvement s'acheva, résonnant longuement dans l'église.

D'un même mouvement, ils retirèrent leurs mains du clavier, et Rogue tourna enfin les yeux vers lui.

Il ne souriait pas, mais ses yeux sombres brillaient d'un éclat que Harry ne leur connaissait pas.

Le garçon entrouvrit les lèvres pour parler, mais sa gorge refusait de lui obéir. L'émotion était trop forte.

-Vous connaissez cette musique, Potter?, murmura le pasteur, et ses lèvres s'étirèrent imperceptiblement.

-Co…comment avez-vous…, balbutia le garçon, incapable de formuler une phrase correcte.

-Vous aimeriez savoir de quelle manière j'ai récupéré ce manuscrit?, traduisit l'homme avec cette fois un véritable sourire qui troubla Harry plus encore, car il y avait des années que Rogue ne lui en avait pas adressé.

-Oui…, souffla-t-il.

Le pasteur détourna le regard, le posant sur le clavier devant lui.

-Là encore, c'est une longue histoire, soupira-t-il. Voulez vous venir avec moi au presbytère? Il y fera plus chaud qu'ici, et je vous raconterai tout cela devant une tasse de thé.

Harry acquiesça, toujours aussi ému.

-Mais avant, expliquez moi ce passage, reprit l'homme en posant à nouveau sa main sur le clavier. Comment vous est venue l'idée de cette modulation… pour le moins inattendue?

Rogue chercha un instant dans la partition, puis rejoua quelques mesures, celles qui correspondaient au début du développement. C'était un passage en mineur, triste, haletant et douloureux, dont Harry était particulièrement satisfait.

-Vous n'aimez pas?, demanda-t-il, légèrement inquiet.

-Au contraire. Je trouve ça très surprenant, et tout à fait intéressant.

Harry posa à son tour les mains sur les touches, et décomposa le passage pour le pasteur, s'arrêtant sur les accords et expliquant les différentes marches harmoniques qu'il avait imaginées.

-Remarquable, grogna l'homme. Je n'aurais jamais osé écrire une chose pareille, mais dans votre système, c'est cohérent, et l'effet en est saisissant. Vous…m'impressionnez, Potter. Bien, allons-y, à présent.

L'homme rassembla les manuscrits sur le pupitre, et les lui tendit.

-Ceci vous appartient. C'est un travail splendide, vous pouvez être fier de vous.

Sans regarder le garçon qui, étourdi, digérait lentement cet incroyable compliment, il se leva et se tourna vers le jeune sacristain qui attendait de nouvelles instructions.

-C'est bon, William. Vous êtes libre jusqu'à ce soir, six heures. Occupez votre temps intelligemment.

Sans demander son reste, le gamin fila prestement. Rogue précéda Harry dans l'escalier et le conduisit sans mot dire jusqu'à la cure, attenant à l'église.

0o0o0

« Ma chère Narcissa,

Je vous écris de Bristol, où je me trouve actuellement pour deux jours. Je vais enfin pouvoir ramener Drago au Manoir, il était temps, cette situation ridicule avait assez duré.

Je me devais de mettre un terme à l'emprisonnement de notre fils, injustice criante, absolument honteuse et indigne de nous. Dans quelle sinistre dérive la police de notre grande nation est-elle engagée? Comment ose-t-on faire subir à des personnes de notre rang de pareils traitements ? Tout ceci parce que votre oncle a été accusé par un de ses hommes de main d'avoir commis des méfaits plus ou moins répréhensibles! Comment est-il possible qu'on ait prêté l'oreille aux allégations insensées d'une brute aussi inculte que grossière?

Quoiqu'il en soit, lord Voldemort bénéficiera de tout mon soutien, il peut compter sur moi, d'autant plus que nous avions en commun des projets grandioses auxquels je n'ai nullement l'intention de renoncer, croyez moi!

Figurez vous, ma chère, que j'ai eu la surprise de rencontrer ici même un de nos fermiers à Wardour, un certain Maugrey Foloeil. Cet homme, ancien héros de guerre, m'a appris une nouvelle quelque peu inattendue (il en sait plus sur vous que votre époux, ce qui est pour le moins vexant). J'ai donc appris de sa bouche que vous aviez entrepris de demander une audience au procureur du roi. A cette occasion, il semble que vous ayez déclaré avoir porté vous-même le coup de couteau sur la personne d'Everett Parkinson. C'était donc la raison de votre fuite précipitée dans la capitale!

Vous m'avez bien abusé, ma chère! Je ne sais quelle mouche vous a piquée… Sans doute ne supportiez vous pas l'idée qu'on accuse votre petit protégé, le jeune Harry Potter? Quel héroïsme, quelle noblesse d'âme! Vous devez être fière de vous…Toujours est-il que j'ai feint comme j'ai pu d'être au courant de vos agissements, afin de ne pas paraître trop idiot aux yeux de ce vieux briscard de Foloeil, mais sachez que votre comportement dépasse l'entendement, et m'a mis dans une rage folle.

Je ne sais quelles seront les conséquences de votre démarche, mais une chose est certaine: je ne veux pas de scandale. Restez à Londres aussi longtemps que nécessaire, réglez cette histoire de votre côté sans nous impliquer d'aucune manière, Drago et moi (on m'a dit que, fort heureusement, vous ne risquez pas de sanction particulière). Et surtout, arrangez vous pour étouffer cette sordide affaire. Je ne tiens pas à avoir une Emma Parkinson déchaînée sur le dos…

Maintenant que je connais vos secrets les plus honteux, je vous prie de me tenir un peu mieux informé dorénavant, et de cesser de tirer vos ficelles dans mon dos… et à mes frais…

Bien à vous

Lucius Malefoy »

Avec un soupir, je replie la lettre de mon époux. Il sait tout à présent… C'est finalement mieux ainsi. Sa réaction n'est pas démesurée, je m'en félicite. Et je suis ravie qu'il me recommande de rester à Londres le plus longtemps possible…

Je lève la tête, et souris mollement à Gilderoy qui garde les yeux posés sur moi. Pourtant, j'ai l'impression qu'il ne me voit pas. C'est plutôt sa propre image qu'il contemple à travers moi.

Je ne le connais que depuis quelques jours…Deux fois déjà, nous avons couché ensemble. Au début, j'étais très enthousiaste, très éprise, mais à présent, il me déçoit. C'est un homme certes physiquement séduisant, mais incroyablement fat et imbu de lui-même. Je ne resterai pas longtemps avec lui, je suis déjà lassée de sa personne égoïste et puérile. Je pense que s'il aime se pavaner à mes côtés, c'est parce que je présente bien et que cela le met en valeur. Mais il n'éprouve rien à mon égard, même pas du désir…

Hélas, il ne vaut pas mieux que tous les autres… Et Dieu sait que j'en ai connu beaucoup…

Mes pensées reviennent à Harry. Rien à faire, je songe souvent à lui. Malgré sa jeunesse, ce garçon est plus mûr, plus réfléchi et intelligent que l'imbécile qui, assis près de moi, est en train de contempler son propre reflet dans le miroir en arrangeant sa perruque poudrée et pommadée. Il n'est même pas discret, ce goujat!

Le garçon va-t-il arriver prochainement à Londres? Je suis si impatiente de le revoir!

Aura-t-il changé? Pas trop, j'espère…

Sera-t-il heureux de me retrouver? Ému…? Intimidé…? Reconnaissant…?

Ou rancunier?

Aura-t-il envie, comme moi, de reprendre notre relation là où nous l'avions laissée, avant que cette brute de Parkinson ne vienne tout gâcher?

0o0o0

-Mary, préparez-nous un thé, s'il vous plaît.

-Tout de suite, mon révérend.

La vieille femme s'inclina, puis courut à la cuisine. Comme Severus l'y invitait d'un geste, Harry Potter s'assit à la table, posant les manuscrits près de lui, et leva les yeux vers le pasteur. Visiblement, il attendait impatiemment son récit.

Ses joues étaient toujours adorablement rouges, et ses pupilles scintillaient d'un regard mille fois plus vivant que celui, terne et indifférent, que Severus lui avait vu la veille encore, dans le salon des Weasley.

L'homme était ému plus que de raison. Il avait obtenu bien mieux que le résultat escompté. Enthousiasmé, le garçon était monté le rejoindre à la tribune et s'était tout naturellement assis à ses côtés pour lui apporter son concours dans l'interprétation du quatuor. Dans le feu de l'action, il s'était appuyé contre lui, leurs doigts s'étaient effleurés, et Severus en avait été délicieusement troublé, au point de perdre sa concentration et de manquer jouer de travers.

En cet instant, il sentait qu'il avait tout pouvoir sur Harry. Dans sa reconnaissance, le garçon se serait jeté à ses pieds…Mais Severus ne devait pas profiter de cette situation. Certes, le garçon se sentait fortement redevable. Et hélas, oui, le pasteur aimait cela, il adorait voir ce candide étonnement dans son regard pur et exalté.

Jamais il n'eût osé espérer lire de l'admiration et de la gratitude dans les yeux de Harry Potter…

Mais il devait garder le contrôle, ne rien tenter pour étendre son ascendant sur le jeune homme, encore fragile et vulnérable.

Il n'était pas lord Voldemort, que diable!

Pourtant, il n'avait plus la force de se montrer dur avec l'adolescent. Et il sentait bien que ses remparts craquaient et branlaient dangereusement sur leurs fondations. C'était une impression grisante, mais ô combien répréhensible...

Il s'assit en face de lui, et, dominant son trouble, il fixa ses yeux incroyablement lumineux. Il allait devoir faire un effort pour ne pas enjoliver son récit.

-C'est en allant enquêter au poste de police de Wick, commença-t-il d'un ton posé, que j'ai récupéré ce manuscrit, Potter. Votre sac avait été fouillé. Un factionnaire m'a donné les feuillets, tout simplement. Ces graffitis indéchiffrables n'intéressaient pas le shérif, aussi en ai-je profité pour m'en emparer, conscient qu'ils avaient pour vous une certaine valeur…

Le garçon déglutit. A l'évidence, il n'en revenait pas.

-Vous êtes allé…je veux dire, vous avez …heu…enquêté à Wick?

Severus feignit l'agacement.

-Mais oui, Potter. J'avais promis aux Weasley de vous ramener sain et sauf à Wardour. Quand nous avons appris, Collins et moi, que vous aviez été emprisonné à Wick, puis délivré par une bande de brigands sanguinaires, je suis venu faire un tour sur place, histoire de découvrir des traces, des indices sur l'identité de vos ravisseurs. Et en guise d'indice, eh bien… j'ai rapporté ces précieux manuscrits.

Le garçon ne savait apparemment pas comment réagir. Ce fut Mary, entrant avec un plateau, qui fit diversion et le tira momentanément d'embarras.

Quand elle les eut servis et se fut retirée, Harry réussit enfin à parler.

-Je…n'aurais jamais pensé…, murmura-t-il maladroitement en tournant sa petite cuiller dans sa tasse de thé, que vous feriez tout ça pour…me venir en aide. Je ne sais comment vous remercier…

Me remercier? Rien de plus simple, mon garçon. Tu n'as qu'à venir ici, t'asseoir sur mes genoux, et me laisser t'enlacer et t'embrasser à pleine bouche… songea Severus avec un ricanement intérieur, avant de se morigéner sévèrement.

-Ne prenez pas la peine de vous empêtrer dans des remerciements inutiles, dit-il d'un ton ferme. Ce qui me récompensera de mes efforts sera de vous voir reprendre la composition de ce quatuor et d'en écrire le dernier mouvement. Il vous faut aussi retravailler le menuet, qui comporte quelques imperfections, vous en êtes conscient, sans doute…

-Oh…vous l'avez lu jusqu'au bout?

-Évidemment. Comme je vous l'ai déjà dit, c'est un travail tout à fait intéressant. Novateur. Et je vous encourage vivement à l'achever.

Le garçon rougit à nouveau, et baissa les yeux. Mon Dieu…ces cheveux épais et soyeux …ces lèvres tendres, entrouvertes…Le garçon était infiniment trop attirant pour le bien de Severus. Était-ce Dieu, ou le démon, qui s'amusait ainsi à l'éprouver?

Il fallait à tout prix mettre un terme à ce tête à tête, avant que la situation ne dérape. Pourtant, il s'entendit insister:

-J'avoue avoir été surpris de découvrir que vous aviez profité de votre séjour là-bas pour écrire cette musique. Dans quelles conditions l'avez-vous composée?

Harry le regarda, embarrassé.

-J'ai commencé… dans la voiture qui m'emmenait à Manderley. J'étais triste d'avoir quitté les Weasley, et cette tristesse m'a… inspiré, en quelque sorte.

-Je vois…et ensuite?

Le garçon baissa à nouveau les paupières. Il était face à la fenêtre, et ses longs cils noirs jetaient une ombre sur ses pommettes lisses. D'une main tremblante, Severus leva sa tasse jusqu'à ses lèvres, incapable de détourner le regard de ce visage d'une beauté poignante.

-Eh bien…j'ai été enfermé de longues journées, à Manderley, pendant que les policiers faisaient leurs recherches. J'ai eu tout le temps d'avancer dans la composition.

-Vous étiez enfermé? Où donc?

-C'était…vous savez, il y avait une chambre secrète, attenant à celle du Lord.

Bien sûr…attenant à celle du Lord…L'homme devait y avoir ses entrées, et en profiter pour prendre des privautés sur son protégé…

-Oh…je vois, dit sèchement Severus. Les policiers ne l'ont pas trouvée?

-Non. C'était très astucieux, très discret.

-Vous aviez peur d'être découvert?

-Oui.

-Combien de temps cela a-t-il duré?

-Plusieurs jours…

-Vous ne voyiez personne?

-Non…heu… à part le Lord…parfois. Il m'apportait à manger.

Évidemment…On doit tout à celui qui nous nourrit, n'est-ce pas? Severus serra plus fort l'anse de sa tasse de porcelaine, au risque de la briser.

-Avez-vous souffert de la solitude?

-Oui. Et du froid. Il n'y avait pas de cheminée. Mais bon…j'ai composé. C'était l'occasion rêvée, et bizarrement, les idées se bousculaient dans ma tête.

-Et quand les policiers sont partis, vous avez pu sortir de cette cachette?

-..Heu…en fait, non, car les nièces du Lord sont arrivées juste après. Mais cela correspond au moment où je me suis enfui.

Severus hésita un court instant.

-Pourquoi avoir agi ainsi?, murmura-t-il. Le Lord vous offrait une protection, non?

Une fois de plus, Harry se troubla. Severus était bien conscient de lui avoir posé une question à laquelle il ne pouvait répondre, mais le pasteur ressentait comme un besoin avide et passablement cruel d'amener le garçon à décrire ce que l'aristocrate lui avait fait subir.

-C'est vrai…, souffla le garçon, mais j'avais l'impression d'être…disons, d'étouffer. Je ne supportais plus l'enfermement.

Il y eut un silence pesant.

-Pourtant, dans la grotte, grinça soudain Severus, lord Voldemort a affirmé que vous l'aimiez et ne vouliez pas le quitter. Disait-il la vérité?

Les mots étaient sortis de sa bouche avant qu'il eût pu les retenir. Le garçon parut surpris, puis son regard se voila légèrement, et il fronça les sourcils.

-Je dois beaucoup au Lord…, protesta-t-il d'une voix enrouée. Mais…

-Vous lui devez, entre autre, d'être orphelin de vos deux parents, ricana durement le pasteur.

Une fois de plus, le garçon resta interdit. Alors, Severus avança une main, et, mû par une force inconnue, il la posa sur celle de son vis-à-vis qui reposait sur la table, près de la tasse.

-Pardonnez moi d'être si brutal avec vous, souffla-t-il doucement. Mais je veux que vous voyiez la réalité en face. Cet homme est une brute impitoyable qui vous a atrocement abusé.

-Je sais…, répondit Harry, le regard perdu, sans chercher à dégager sa main. J'essaye de l'oublier…de ne plus penser à lui, ni à ce que j'ai vécu là bas.

-Je peux imaginer ce que vous avez enduré, murmura Severus en serrant un peu plus fort la main du garçon. Je suis allé dans l'atelier du peintre, Harry, et j'ai vu le saint Sébastien…

L'adolescent se raidit, et retira brusquement sa main. Il regardait Severus, les yeux agrandis d'effroi, pâle, incapable de prononcer un mot.

-J'ai bien compris que vous avez dû passer par des moments très…difficiles, ajouta le révérend d'une voix sourde.

Il y eut un long silence. Puis le garçon se leva lentement, se tenant au bord de la table. Severus se maudit intérieurement. Lui qui se contrôlait toujours si brillamment, il perdait étrangement toute maîtrise face à ce garçon. Il se leva à son tour et contourna la table. Harry ne bougeait pas.

-Vous m'aviez mis en garde…, murmura finalement le garçon avec effort, les yeux fixés sur la nappe.

-C'est vrai. Je suis méfiant et soupçonneux de nature. Mais je ne pensais pas avoir vu aussi juste en vous déconseillant de vous rendre à Bristol.

-Si je suis parti, c'était à cause de toute cette affaire, impliquant… la comtesse… et lord Parkinson…

-Vous n'avez pas eu beaucoup de chance, ces derniers temps. L'erreur originelle fut sans doute d'avoir cédé aux avances de cette femme…

-J'en suis bien conscient.

-Tout cela aurait pu très mal se terminer. Mais à présent, le pire est derrière vous.

-Je l'espère…, souffla le garçon en relevant les yeux. …Heu…Je vais y aller, maintenant…

Mais Severus ne voulait pas qu'il le quitte sur une impression aussi négative. Après tout, le garçon partait pour Londres, et il ne savait pas quand il le reverrait.

-Je n'avais pas l'intention de faire revivre en vous de mauvais souvenirs, Harry, dit-il rapidement, à voix basse. Je voudrais au contraire vous voir reprendre goût à la vie, que vous vous remettiez à la musique, au violon et à la composition. Je suis à votre disposition, si vous avez besoin d'aide, pour ceci comme pour le reste…

Un sourire incertain se dessina sur les lèvres du garçon. Sans doute venait-il de se souvenir de son quatuor retrouvé. Il l'attrapa sur la table et roula les feuillets entre ses mains.

-Je ferai tout mon possible pour vous contenter, dit-il d'un ton un peu plus assuré.

-Il ne s'agit pas de me contenter, moi, mais de vous donner les moyens d'être fier de vous. C'est votre avenir à vous qui est en jeu, Harry, pas le mien.

Le garçon haussa les épaules.

-Mon avenir…il y a longtemps que je ne le vois plus comme un conte de fées, grommela-t-il.

-Là n'est pas la question. Comme je vous l'ai déjà dit, vous avez la chance d'avoir hérité de dons précieux, inestimables. Vous allez me promettre de remonter vos manches et de vous mettre au travail, très sérieusement.

Le garçon eut un nouveau sourire, plus affirmé que le précédent.

-Je vous dois bien ça. Vous avez fait beaucoup pour m'aider, à commencer par me sauver de mon oncle Dursley, autrefois, en m'intégrant à votre manécanterie.

-Vous ne m'avez jamais donné l'occasion de le regretter…

-Pourtant, vous me l'avez fait croire plus d'une fois, jeta Harry en se rembrunissant.

Cédant à une impulsion, Severus leva une main et la posa sur son épaule.

-Même si je ne l'ai pas toujours montré, j'ai toujours eu confiance dans votre talent, Harry. Ne me décevez pas.

-J'essayerai…Mais j'aurai peut-être besoin…de votre indulgence, et de votre soutien.

La main de Severus, d'elle-même, serra l'épaule musclée du garçon.

-Vous partez demain pour Londres. Venez me voir à votre retour. Vous me montrerez le dernier mouvement de votre quatuor, même si vous ne l'avez pas terminé.

-Vous pouvez compter sur moi, murmura Harry, et une sorte de ferveur faisait vibrer sa voix. Grâce à vous, j'ai à nouveau le désir de composer, et j'ai la tête pleine d'idées pour mon dernier mouvement.

-Rien ne peut me faire plus plaisir.

Severus laissa tomber sa main, comme à regret, et le garçon s'écarta, se dirigeant vers la porte. Avant de sortir, il se retourna, et plongea son regard vert dans celui de Severus.

-Mon quatuor… je vous le dédicacerai…

Il ouvrit la porte et passa dans le couloir. Severus le suivit dans l'entrée, et lui ouvrit la porte donnant sur la rue.

-A bientôt, Harry.

Leurs regards se croisèrent à nouveau, fulgurants.

-A bientôt…

Profondément ému et troublé, Severus le suivit des yeux tandis qu'il se dirigeait de sa démarche souple vers la maison des Weasley, sans se retourner.

0o0o0

-Dès que nous serons arrivés, Harry, il nous faudra nous rendre à l'hôtel particulier des Malefoy, Harley-street, pour informer la comtesse de notre présence à Londres. Elle nous mènera elle-même chez le procureur.

-J'espère que tout se règlera rapidement…, soupira Harry en regardant pensivement le paysage par la fenêtre de la voiture.

-Moi aussi. Mais il faut s'attendre à un délai de quelques jours, le temps qu'ils organisent ta comparution devant une assemblée de magistrats. Eux seuls pourront statuer officiellement de ton innocence.

-Et…où allons nous loger, tout ce temps?

-La comtesse spécifiait bien dans sa lettre qu'elle nous recevrait très volontiers chez elle, mais j'ai également demandé à Albus Dumbledore s'il pouvait nous héberger dans son école. Ce serait l'occasion pour toi de faire sa connaissance, et d'établir toutes sortes de contacts musicaux qui te seront utiles par la suite… Je compte sur toi pour auditionner devant le vieux chef, et lui faire la meilleure impression.

Harry regarda son professeur avec inquiétude.

- Je ne suis pas en état, Remus, vous le savez.

-Ta blessure n'est pas encore cicatrisée?

-Elle est en bonne voie, ce n'est pas le problème. Mais… je n'ai pas travaillé sérieusement le violon depuis des lustres.

-Des lustres? Quelques semaines tout au plus. Ça revient vite, Harry. Ne t'inquiète pas pour ça. Deux jours d'exercice, et tu seras au mieux de ta forme, j'en suis persuadé.

-J'aimerais l'être autant que vous…

Remus se pencha vers lui et lui serra affectueusement l'avant bras. Harry lui renvoya un sourire qu'il tentait de rendre franc, sans succès. Le professeur lui fit un clin d'œil et se baissa pour sortir de son sac un ouvrage volumineux.

-Qu'est-ce que c'est que ça?

-La correspondance du vieux Bach. Elle vient de paraître, traduite en anglais.

-Wow! Ça doit être passionnant! Vous me le prêterez, quand vous aurez fini?

-Bien sûr. Mais tu sais, ce cher Jean-Sébastien avait un affreux sale caractère. Je préfère que tu ne t'identifies pas trop à lui.

-Pourquoi je ferais une chose pareille?, s'étonna Harry.

-Parce que tu as plus d'un point commun avec lui. Comme toi, il a perdu trop tôt ses parents… Plus tardivement que toi, cependant, puisqu'il avait neuf ans. Par contre, il avait la chance d'avoir un grand frère qui s'est occupé de lui avec dévouement. Mais bon, comme toi, il n'a pas eu une vie facile. Pour te donner un exemple, à l'âge de dix-neuf ans, il a parcouru des centaines de miles à pied pour rencontrer son maître Dietrich Buxtehude, dans le nord du pays…

Harry se mit à rire.

-Quel courage!

-C'était une autre époque. Et puis, écoute ceci: comme toi, il a fait partie de la manécanterie de sa ville, et il jouait de tous les instruments.

-Bah…c'est le cas de beaucoup de musiciens. Et vous-même, vous ne dérogez pas à la règle. Ce qui est sûr, c'est qu'il devait être une bête de travail, vu l'importance de son oeuvre. Mais est-ce qu'il n'a pas perdu la vue, dans ses vieux jours, à force d'écrire à la lueur de mauvaises chandelles?

-Si, en effet. Je ne te souhaite pas de lui ressembler sur ce plan là.

-Le problème, c'est que je n'ai pas de très bons yeux, moi non plus. Mais de toute façon, la principale différence entre nous, c'est que lui, c'était un génie…

-C'est peut-être un point commun entre vous, au contraire. Qui dit que tu n'en es pas un, toi aussi, mon cher Harry?

-Arrêtez de vous moquer de moi, Remus…, grogna Harry en grimaçant.

-Je ne me moque pas de toi. Je parle même très sérieusement, crois-moi bien. Mais si tu passes ton temps à te morfondre et à broyer du noir, tu ne t'en sortiras pas. Il n'y a que le travail qui soit payant, tu m'entends?

-Ouais. Ça, j'ai compris, à force. Je dois « remonter mes manches » et me mettre au boulot, pour surtout ne pas vous décevoir, les uns et les autres. J'ai déjà entendu ce refrain là plusieurs fois, depuis que je suis rentré.

-Eh bien, c'est un refrain qu'il est toujours bon de s'entendre répéter, à ton âge. Qui te l'a chanté, à part moi? …Arthur?

-Le révérend, avoua Harry du bout des lèvres.

-Ce vieux Rogue? Eh bien, pour une fois, je suis entièrement d'accord avec lui. Sais-tu qu'il m'a étonné, cet homme?

Harry frissonna imperceptiblement.

-De quelle manière?, risqua-t-il, se sentant inexplicablement rougir.

-Eh bien…tout ce qu'il a fait pour te venir en aide…Vois-tu, je t'avais affirmé qu'il t'estimait, mais je ne croyais pas être aussi près de la vérité. Non seulement il te respecte, mais je crois qu'il ressent vraiment de l'affection pour toi, malgré son côté sévère et rébarbatif.

-Je…oui, je m'en suis rendu compte, murmura Harry, troublé.

Il faillit parler du quatuor, mais se tut. Pour une raison inconnue, il préférait garder cet élément secret, comme un lien entre lui et le révérend, un lien mystérieux, et plein de promesses…

Quand il avait quitté le pasteur, la veille, il était dans tous ses états. L'homme avait réussi à lui communiquer une folle envie d'écrire. Et ses encouragements l'avaient bouleversé plus qu'ils n'auraient dû…

La tristesse qui alourdissait son cœur depuis qu'il était séparé du Lord avait fait place à un sentiment tout autre, qui ressemblait curieusement à de l'allégresse…

Il pouvait sans doute expliquer son émotion par le fait que l'homme avait toujours été avare en compliments. Dur, ingrat, persifleur et injuste, voilà comment il s'était montré ces dernières années à son égard. Son revirement était d'autant plus étonnant… et perturbant.

Mais il y avait autre chose. Quand il s'était assis aux côtés du révérend, sur le banc, à la tribune de l'orgue, et que leurs corps s'étaient touchés, pendant que leurs doigts se croisaient sur le clavier, Harry avait ressenti un réel émoi, quelque chose de physique, qu'il ne s'expliquait pas et qui lui faisait honte. Comment pouvait-il être ainsi troublé par cet homme, de cette manière inappropriée et inconvenante?

Était-ce là aussi la conséquence de ce qu'il avait vécu à Manderley? Ses expériences avec le Lord l'avaient-elles à ce point détraqué que le moindre rapprochement physique l'affolait, le jetant dans les pires affres, lui qui n'avait jamais rien éprouvé de tel pour un homme auparavant?

Ou y avait-il là quelque chose d'autre, quelque chose de particulier, propre à ses rapports ambigus avec le révérend, l'homme qui l'avait choisi parmi les autres enfants afin de l'initier à la musique, avant de le rejeter cruellement, le traitant avec ingratitude, comme pour l'écarter à dessein de lui…?

Harry avait-il inconsciemment souhaité depuis longtemps un rapprochement, tout en étouffant ses tendres aspirations, de crainte d'essuyer une rebuffade et d'en souffrir trop durement?

Il songea avec stupeur que, confronté à Ginny lors de leurs récentes retrouvailles, il n'avait pas ressenti le moindre début de commencement de désir pour elle…

Pourtant, la jeune fille était belle et attirante. Il savait qu'elle l'aimait, depuis longtemps.

Bien, c'était donc qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas, avec lui.

Le Lord l'avait rendu fou. Quant à Mulciber, il l'avait sali.

Son âme, comme son corps, étaient irrémédiablement souillés.

Le garçon était définitivement perverti. Hélas, il ne pouvait rien faire pour revenir en arrière, effacer ce qu'il avait vécu, retrouver son innocence perdue…

Harry imagina un instant les mains de Rogue, ses belles mains souples et nerveuses de musicien, le touchant intimement, comme l'avaient touché les mains du Lord. Une brusque chaleur lui monta au visage, et il se détourna, craignant que Remus s'aperçût de son état.

Mais le violoniste était plongé dans sa lecture, à mille lieues d'imaginer les tourments de son malheureux compagnon de voyage…

Le révérend était un homme d'église. Il eût certainement été horrifié de connaître les pensées secrètes de son ancien élève…

Toutefois… Lord Voldemort n'avait-il pas sournoisement insinué que le révérend était attiré par Harry? …Et si c'était vrai, au fond…?

Le garçon ressentit une fois encore cette inconfortable bouffée de chaleur, et pas seulement au visage. Son corps réagissait beaucoup trop vivement à toutes ces pensées malvenues. Bon sang, pourvu que Remus ne lui prête pas attention, juste maintenant!

Bien heureusement, la correspondance du cantor de Leipzig devait être passionnante… Harry avait une raison supplémentaire de remercier le génial compositeur.

Le garçon grimaça un sourire dans sa barbe. Il venait de pointer une nouvelle différence entre Bach et lui-même, une différence de taille celle-ci : ce bon Jean-Sébastien n'avait pas l'esprit corrompu, et contrairement à Harry, il ne devait certainement pas se débattre contre des pensées honteuses …

Enfin, après tout, qu'en savait-on? Si c'était le cas, il ne devait pas le crier sur les toits…

Sa musique si émouvante trouvait peut-être son inspiration dans un terrible combat intérieur?

L'idée que Bach s'était peut-être coltiné, lui aussi, son lot de désirs inavouables était, tout compte fait, plutôt réconfortante.

Harry se contraignit à respirer calmement, profondément…

Enfin apaisé, il attrapa son sac et en sortit du papier à musique et une plume. Il était temps qu'il se mît à écrire le quatrième mouvement de son quatuor…

Il avait un nouveau défi à relever: celui de tout mettre en œuvre pour voir renaître, dans les yeux noirs du révérend Severus Rogue, cet éclat particulier, fait de fierté, d'admiration, et d'autre chose encore …

FIN

0o0o0o0o0

Désormais, je répondrai aux reviewers non-inscrits sur ce forum : http: // fanfiction . net/topic/70174/21647358/1/#21647400 (supprimer les espaces) Vous y trouverez également des sujets de discussion à propos des fics et de HP en général.

Eh oui, notre petit violoniste est légèrement perturbé…

Hein? Qu'est ce que j'entends? Comment ça, c'est pas une fin? Je vous vois venir, avec vos réclamations et vos revendications!!

Je vous remercie d'avoir suivi cette histoire jusqu'à son terme. Et ma gratitude va tout spécialement à ceux qui m'ont soutenue par leurs reviews si sympathiques et intelligentes.

Comme vous vous en doutez, la deuxième partie ( attention, ne vous emballez pas!) sera un HP/SS (ou HP/SR, si vous préférez)… Et bien évidemment, l'ombre du Lord planera sur nos héros, une réapparition de ce cher Voldemort étant prévue au programme (ça vous rassure?).

Si vous êtes intéressés par cette fameuse suite, faites le moi savoir. Plus j'aurai de réponses favorables, plus se confirmera mon envie d'écrire.

Le titre sera sans doute : « Le pire est derrière vous, Potter… ». Je n'ai aucune idée des délais. Surveillez les sorties, ou mettez moi en "author alert", pour ceux qui sont inscits sur le site.

Note du 22 mai: ça y est, le premier chapitre de: "Le pire est derrière vous, Potter" est sorti lundi dernier. Pour le trouver, allez sur mon profile (Molly 59, pour ceux qui n'ont pas encore repéré mon pseudo^^...), puis dans "my stories" (mes histoires). A bientôt!

Choupi: Oui, tu as entièrement raison, le Lord n'aurait eu aucun remord d'avoir tué les Potter si Harry ne l'avait pas séduit. Et comme tu le dis, Rogue va aider le garçon à se remettre à la musique. Tu veux une suite? Merci de me le dire! Bisous!

Loan: Comment? Toi, Loan, espérer un happy end? Oh, mais que se passe-t-il? Te serais-tu attachée aux personnages ? * L'air innocent, Molly rougit de plaisir* Tu essayes de me soudoyer très habilement, je dois dire, et je crois que tu vas obtenir satisfaction, hé hé hé…J'ai trop d'idées pour la suite!! Et tes suggestions me stimulent incroyablement. -Bon, pour l'instant, Rogue n'a pas cédé à la tentation, il est donc encore « saint » selon les critères de la foi chrétienne. Car c'est dans la nature humaine d'être soumis à la tentation (v. St Antoine). Le problème étant de ne pas y succomber. Mais il reste toujours la miséricorde divine, n'est-ce pas? Hum…-Tu voulais que Harry soit dur avec Ginny? Oh, la pauvre petite! - Tu aimerais entendre la musique de Harry? Je l'imagine sonnant un peu comme les plus beaux quatuors de Mozart ou de Haydn (à peu près la même époque), dont je suis une grande fan. -Oui, j'ai peur que mon histoire s'étire en longueur, je sais qu'il y a beaucoup de lecteurs qui se lassent des histoires trop longues. Et je crains aussi de me répéter. -Merci à toi pour ton soutien si enthousiaste et chaleureux! Je t'embrasse!

Sophie: Ah, la tête de Harry en découvrant la surprise de Rogue? C'est au menu de ce chapitre.*_* -Harry est encore en train de digérer le fait que Voldemort soit le meurtrier de ses parents? …Oui, tu vois juste. Il n'est pas surpris, il savait que l'homme était un vrai salaud, mais ça ne l'a pas empêché de s'attacher à lui, et en fin de compte, ça ne change pas grand-chose à la situation, pour l'instant du moins. L'attachement de Harry pour le Lord est totalement irrationnel, indépendant de sa volonté, alors... -Merci pour ces commentaires intéressants, et à bientôt!

Alia: Merci pour ta compréhension. Oui, il y a encore de nombreuses pistes à exploiter. Mais je ne veux pas risquer de répéter à l'infini la même intrigue, en variant simplement quelques éléments. Je vais faire un effort pour me renouveler (ça sera dur). Bises!

Paprika star: Bienvenue sur cette fic! Oui, Harry reverra Tom, je crois pouvoir le dire sans trop en révéler.- Severus va restituer à Harry le quatuor que le garçon avait écrit chez le Lord, et qu'il avait perdu au poste de police de Wick. Il avait beaucoup souffert de cette perte. -Merci à toi pour l'intérêt que tu portes à cette histoire.

Cmoa: Tu as raison, il y a encore plein de questions en suspens… Tous les éléments sont là pour écrire une deuxième partie, j'en suis consciente, mais il existe aussi des histoires qui s'achèvent ainsi, sur des tas d'interrogations, et chaque lecteur est libre d'imaginer la suite. Je pourrais choisir cette option, non? Merci pour ta review!

Une poterienne: En fait, la première rencontre entre Harry et le Lord est vue par les yeux de Narcissa. Au début, elle ne prête pas attention à la manière dont son oncle appréhende le jeune violoniste, elle n'est pas sur ses gardes. C'est seulement lorsqu'ils font de la musique et qu'elle surprend le regard du Lord posé fixement sur le garçon, qu'elle se met en mode "alerte". Mais ça ne veut pas dire qu'il n'a pas "flashé" plus tôt sur lui...-Oui, tu as raison, Harry ne pourra pas effacer facilement ce qu'il a vécu avec Tom. Et ce dernier le sait, et compte bien en profiter.-Harry sera-t-il appelé à comparaitre comme témoin dans le procès du Lord? Cela pourrait être intéressant, mais j'hésite (je ne voudrais pas refaire "L'obsession de la vengeance", une autre de mes fics dans laquelle Harry était appelé à comparaître au cours du procès de Lucius Malefoy). Alors, on verra...-Hey, pour le film, je t'engage "tout court", sans condition, mais...tu vois, quoi!! Ca va être un peu dur à réaliser!! Merci encore, et bisous!


Alors, vous avez aimé, détesté? Lire une suite vous plairait, ou cette fin ouverte vous convient-elle ? (attention, sondage...)