Auteure: Mangeuse de temps

Disclaimer: non, riiien de riien... tout à l'oeuvre magnifique "Fairy Cube" de Kaori Yuki, hélas.

Note: Comme d'habitude, glauquisme et trucs simplets au rendez-vous. Je remercie donc les courageux qui prennent la peine de lire, même sans reviewer :)

1.temps

Il y avait un temps où j'étais tout seul. Le monde que je voyais n'était pas celui que j'aimais, les gens qui m'entouraient m'évitaient. Je préférais les petits êtres ailés de l'autre monde, le monde féerique… J'aurais tout donné pour en faire partie, mon père, ma vie. Tout pour posséder une paire d'ailes multicolores et s'envoler. Quand je fermais les paupières, je les sentais saillir de mon dos comme des cicatrices. Mon corps se réduisait à quelques centimètres, et je sentais le vent me pousser près des arbres. C'était un temps de rêve et de noirceur.

Puis il y eut un temps intermédiaire où rien ne se passait plus. Confusément, je savais que le monde féerique n'avait pas besoin de moi pour vivre. J'errais, chaque jour était un corridor étrange avec des portes partout qui ne s'ouvraient pas. J'avais beau observer le ciel, plus aucune fée ne me tournait autour. Une chape de cécité m'était tombée dessus, et l'effort pour la soulever était trop grand. Je touchais le monde comme un véritable aveugle, je tombais brutalement sur les autres qui m'envoyaient balader, je ne reconnaissais plus mon visage dans la glace, mais je m'en fichais. Une autre personne avait pris ma place, ce double imposé que j'appelais Tokagé. Il jouait parfaitement mon rôle, lui inculquant une touche de méchanceté dont je n'aurais pas été capable. Moi, je m'étais enfermé dans un piège de souvenirs, où chaque personne avait des ailes et un sourire qui me promettait d'être toujours là.

Mais ce temps d'indifférence prit fin, lui aussi. Mes rêves se tarirent, mes souvenirs s'effilochèrent, et l'emprise de Tokagé devint une corde de secours.

Et puis tu es arrivée. Tokagé te détestait, mais moi je n'y arrivais pas. J'avais l'impression de t'avoir déjà rêvée, « cauchemardée » disait mon double. Ton regard ouvert, franc, tes cheveux sombres, ton sourire me plaisaient. Je voyais aussi tes blessures, les coups sur tes joues, et je me disais que peut-être tu étais comme moi, une part frappée, meurtrie, une autre part sincère et directe. Sauf qu'il me manquait tes rayons de lumière. Tokagé avait enfoui les miens dans de la terre noire un jour de colère.

Et toi, tu es venue vers moi, tu as déterré mon soleil et tu l'as fusionné au tien. Tokagé a hurlé, m'a dit de ne pas te croire, que tous les soleils étaient éteints. Mais j'ai pris ta main. J'ai retrouvé ma vision perdue, toi, tu as découvert mon monde, et à travers lui tu as pu me rencontrer.

Ce fut le temps des merveilles.