Du haut d'une des nombreuses tours de Poudlard, une femme d'âge mûr observait les calèches menées par des sombrals braver la tempête. A tour de rôle, elles s'arrêtaient devant les portes d'entrée, déversant un flot ininterrompu d'étudiants. Au loin, sur le lac, quelques lumières semblaient flotter par magie, mais Minerva Mcgonagall savait qu'elles drainaient également leur lot de petits novices. Suivant une tradition ancestrale, les premières années arrivaient en barques pour avoir la meilleure vue possible sur leur future demeure.

Durant tout l'été, elle n'avait cessé de travailler à la réorganisation nécessaire de l'école de magie qu'elle gérait à présent. Après les évènements dramatiques survenus en juin et la mort du précédent Directeur, elle s'était vue attribuer la mission difficile de recréer un environnement serein pour les élèves. Mais comment pouvait-on assurer aux parents que leurs enfants étaient en sécurité après l'intrusion des Mangemorts dans le château deux mois plus tôt ?

Au quartier général de l'Ordre du Phénix, les discussions avaient été houleuses à ce propos. Fallait-il rouvrir l'école ou se concentrer uniquement sur la guerre contre Voldemort ? Mais tous s'étaient mis d'accord sur un point : la sécurité des étudiants était une priorité et Poudlard était encore un des lieux les plus sûrs. Le Ministère avait enfin pris conscience du problème et déployait toutes ses forces pour lutter contre le mage noir et ses adeptes. Des aurors venaient également d'être affectés à la défense de l'école de magie et des liens diplomatiques se tissaient dans le monde entier pour traquer les moindres rassemblements de Mangemorts. L'Angleterre n'était pas la seule touchée, bien au contraire. La mort de Dumbledore avait ravivé les esprits brimés, et des hommes cagoulés émergeaient de tous les pays. La guerre était lancée.

Pourtant, ce soir, l'objectif principal de Mcgonagall n'était pas une lutte sans mercis. Elle devait garantir à ses élèves un minimum de stabilité. Les adieux sur le quai de la gare, quai 9 ¾, avaient été déchirants cette année. Les parents appréhendaient la séparation d'avec leurs chers enfants, sachant bien que dans tous les cas, ils ne seraient en sécurité nulle part. Les adolescents, quant à eux, s'inquiétaient de savoir s'ils reverraient un jour leurs parents sains et sauf.

En se remémorant ces scènes bouleversantes, la nouvelle Directrice commença à avancer doucement en direction de la Grande Salle où se tiendrait le banquet de la rentrée. Cette année, elle n'accueillerait pas les premières années pour les aider dans ce passage difficile, celui qui déciderait de leur avenir durant sept ans. Non, cette année, elle trônerait au centre de la table des professeurs et devrait assurer le discours de bienvenue.

Lorsqu'elle pénétra au cœur de l'assemblée, tous se levèrent sur son passage. Elle releva le menton, la tête haute et le regard serein, elle devait montrer l'exemple. Elle avait décidé de prouver que cette école pouvait fonctionner correctement malgré la guerre qui menaçait au-delà des enceintes du château. Ici, dans cet antre, elle assurait un climat studieux pour ces enfants.

La répartition débuta ainsi dans un calme relatif et une atmosphère bien moins festive que les autres années. Au fur et à mesure de la cérémonie, tous constatèrent que le nombre de premières années affectés à Serpentard semblait anecdotique. Les rangs des dernières années de cette maison s'étaient également éclaircis. Pourtant, hormis l'absence de celui surnommé modestement « le prince de Serpentard », alias Drago Malefoy, les grands noms du monde occulte étaient présents : Crabbe, Goyle, Parkinson, Bulstrode…

Perdue dans ses réflexions, Minerva Mcgonagall en fut brutalement par les applaudissements marquant la fin de la cérémonie. Il lui fallait faire son discours à présent…
Toutes les têtes plus ou moins blondes la fixèrent. Elle se leva dignement et s'éclaircit la gorge :

- Chers élèves,
Tout d'abord, je vous souhaite la bienvenue à tous et je dois vous exprimer la fierté que j'éprouve de vous voir si nombreux en ces temps de troubles. Voilà pourquoi les cours reprendront dès demain, comme si de rien n'était, et je compte sur vous pour réussir brillamment tous les défis que vous rencontrerez cette année.
Néanmoins, au vu des évènements de l'année dernière et de l'état de crise dans lequel se trouve le monde de la magie, de nouvelles règles ont été fixées. Plus personne ne sort de l'enceinte de l'école. Et pas de « ho » s'il vous plait ! Les entraînements de Quidditch seront également annulés.
Silence ! Imposa-t-elle pour faire taire les murmures d'indignation se levant de toutes les maisons.

L'assistance semblait se réveiller de sa torpeur et Ron était atterré.

- Ils seront remplacés par l'organisation de nombreux duels afin de perfectionner vos acquis en DCFM !
J'ai également mis au point un nouveau système d'alerte. Dès que vous entendrez ces sirènes… poursuivit-elle, un doigt pointé vers le plafond, alors qu'un vacarme infâme retentissait dans le château.

D'un réflexe commun, tous calèrent leurs mains sur leurs oreilles pour barrer un peu les ondes.

- …vous vous rendrez immédiatement dans vos dortoirs respectifs ou bien dans cette salle si vous en êtes trop loin, reprit-elle fermement. Je compte sur vous.
Comme toutes les années, la liste des objets interdit est disponible dans le bureau de Monsieur Rusard et je précise que nous avons ajouté une close pour réduire le nombre de parchemins utilisés et ainsi militer contre l'abattage abusif des arbres : tout objet provenant de la boutique des Weasley est interdit d'office.

De nombreux ricanements se firent entendre de toute part alors que Ron déprimait un peu plus. Lui qui avait fait tout un stock, y laissant son argent de poche !

- Après toutes ces recommandations, je vous souhaite de passer une année aussi studieuse que possible et bon appétit à tous.

De vagues applaudissements manquant cruellement de convictions clôturèrent ce discours alors que les discussions reprirent bon train à toutes les tables.

- Ça va être mortel ! S'exclama Ron en calant son front dans la paume de sa main, signe de dépit.
- Au moins tu pourras étudier Ron ! Lui répondit Hermione d'un ton suffisant.
- Ça doit t'aller comme un gant toi cette situation, aucune distraction possible pour les examens finaux…
- Oui tout à fait ! Lui répondit-elle aussi sec, un peu vexée d'être systématiquement considérée comme la rabat-joie de service, mais assumant son image.

Les compères tentaient de retrouver un dialogue normal, mais avec tous les évènements et surtout l'absence d'Harry, la situation leur semblait particulièrement étrange. Ginny ne pipait mot, bien trop inquiète pour celui qu'elle aimait.

Le mariage de Bill et Fleur avait été le seul instant de répit pour eux, rendant leur séparation plus douloureuse encore. Mais Harry voulait absolument se consacrer à la lutte contre Voldemort. Les feux de la guerre consumeraient toute relation naissante, il le savait. Les études aussi lui semblaient secondaires actuellement. Il pourrait les reprendre plus tard, voire même présenter ses examens finaux en candidat libre, mais pour l'instant, son esprit se focalisait sur ses propres démons.
Cependant, le lit dans le dortoir d'Harry n'avait pas été ré-affecté. L'Ordre avait jugé bon de lui permettre de revenir à Poudlard lorsqu'il le jugerait utile. En effet, s'il ne suivait plus les cours, il lui serait toutefois nécessaire de faire des recherches à la bibliothèque ou même de revoir ses anciens camarades, simplement. Tout « Héros » proclamé du monde sorcier qu'il était, Harry n'en restait pas moins un adolescent.

-Allez Ginny, sourit un peu ! Lui murmura Ron particulièrement inquiet pour sa petite sœur.
Cette dernière lui fit un sourire timide en guise de réponse, mais ses yeux trahissaient l'ampleur de la mélancolie qui la rongeait. Elle fixa alors son regard sur la table des Serpentards, à moitié vide.

-Regardez les Serpentards, ils sont perdus sans Malefoy, indiqua-t-elle d'un signe de tête pour détourner la conversation.
-C'est étrange qu'il n'ait pas fait parler de lui cet été. Maintenant qu'il fait partie des Mangemorts, et surtout que le tribunal l'a jugé innocent pour le crime de Dumbledore, je m'attendais à le voir s'en vanter à corps et à cris, précisa Ron.
-Je ne sais pas, rappelez vous ce qu'à dit Harry, il avait baissé sa baguette et semblait croire en Dumbledore… Il est effectivement innocent sur ce point, même si ce sont ses actes qui ont permis aux Mangemorts de s'introduire ici…
-Ca va Hermione, tu ne vas pas l'excuser non plus ! aboya son voisin de table.
-Mais non Ron, ce que je veux dire, c'est que tout n'est jamais tout noir ou tout blanc dans la vie.

Les trois compères poursuivirent leur discussion jusque tard dans la nuit, trop inquiets au sujet d'Harry pour pouvoir dormir. Le premier cours fut donc une véritable torture : Histoire de la Magie après une nuit blanche, cela n'était pas humain !

Tout se passait donc relativement bien dans le meilleur des mondes jusqu'à 10 heures du matin… Les différents cours venaient de se terminer, les élèves déferlaient dans les couloirs, certains courant aux toilettes alors que d'autres allaient profiter un peu du soleil magnifique, contrastant avec l'orage de la veille… Dix minutes de pause avant la reprise permettraient aux Gryffondors de se dégourdir les jambes et accessoirement de se réveiller.

Minerva Mcgonagall était dans son bureau. Cette année, une Auror stagiaire la remplacerait pour une partie de ses cours. Il lui fallait absolument des heures de décharges pour faire face à ses nouvelles obligations, administratives essentiellement. Plongée dans ses comptes, elle cherchait en vain à occulter la présence de l'ancien propriétaire de ce bureau. Dumbledore lui manquait cruellement. Il était son ami le plus cher et certainement même la famille qui lui avait fait si cruellement défaut. Elle se sentait seule et fatiguée, mais prête à tout donner pour apaiser le monde de la magie qu'elle affectionnait tant.

Plongée dans ses pensées, une vague de frissons l'obligea à relever la tête. D'instinct, elle vérifia d'un regard que la porte d'entrée était bien fermée, puis se tourna vers la fenêtre. Aucun courant d'air n'avait de sens dans un espace clos et pourtant, un froid saisissant l'obligea à refermer le châle posé sur ses épaules. Ce rafraîchissement brutal la mit mal à l'aise et elle se leva pour en chercher la cause exacte. Devant la fenêtre, elle constata que le soleil s'était voilé, sans raison particulière, faisant chuter la température d'au moins dix degrés. Dans la cour de l'école tous les élèves, habillés légèrement en ce début septembre, furent saisis d'une vague de frissons. Mais les échanges autour des premières heures de cours et des emplois du temps complètement injustes focalisaient les attentions bien loin d'une quelconque variation climatique, aussi importante soit-elle.

La première personne à s'en inquiéter fut donc la Directrice. Les yeux rivés sur l'extérieur, elle porta une intention particulière à d'énormes cumulus gris noirs s'agglomérant à une vitesse folle. Ils semblaient former une prison morbide pour les rayons solaires. De plus en plus mal à l'aise, Minerva fronça malgré elle les sourcils, rajoutant une intensité particulière à l'austérité naturelle de ses traits.
Une variation climatique de cette ampleur n'annonçait rien de bon. Avec Voldemort, on pouvait s'attendre à tout et elle se tenait aux aguets, prête à réagir. Mais ce n'est que 10 minutes plus tard qu'elle comprit avec effroi ce qu'il se passait. Leur ennemi de toujours avait de puissants pouvoirs, mais il ne pouvait tout de même pas commander aux éléments. A cet instant précis, son cœur s'emballa sans qu'elle ne puisse en contrôler le rythme.

- Non ! s'affola-t-elle. Cela n'est pas possible ! Tout mais pas eux, pas maintenant…

Elle avait beau tourner et retourner le problème dans tous les sens, elle ne voyait qu'une seule solution à ce changement climatique brutal et malsain. Eux seuls pouvaient le faire.

Ses craintes les plus profondes furent confirmées par les premiers bruits de tambours au loin… très loin… Le sol tremblait faiblement par intermittence, mais personne ne devait encore le sentir. Elle se replongea alors dans ses souvenirs… cette situation, elle l'avait déjà vécue, lors de sa première année d'enseignement. Non, pitié, faites que ce ne soit pas eux…

Pas ceux dont la venue avait rendu impuissant Albus Dumbledore lui-même.

Minerva McGonagall était désormais plus blanche que le baron sanglant. Elle donna l'alerte, sans hésiter une seule seconde de plus, mais elle savait que cela ne servirait à rien.

- Merlin, protégez-nous… murmura-t-elle dans un souffle de terreur.

Alors que les sirènes retentissaient dans l'ensemble du château, les élèves, paniqués, crurent à une attaque de Voldemort et se précipitèrent dans leurs dortoirs, guidés par leurs professeurs tout aussi apeurés. Devant la Tour de Gryffondor, Ron se tourna vers Hermione :

-Ginny ! Paniqua-t-il, elle n'est pas dans le rang de sa classe…
-Elle est à l'infirmerie, leur cria une petite voix.
-Je vais la chercher, lança Ron, inquiet.
-Je viens avec toi, lui répondit Hermione, plus déterminée que jamais.
-Non, c'est trop dangereux.

Mais le regard de la courageuse Gryffondor ne lui laissa pas le choix. Ils coururent aussi vite qu'ils le purent en direction des étages inférieurs. Leur progression fut stoppée par les vibrations émanant du plancher. Le sol commençait à trembler de plus en plus, toujours par intermittence, au rythme des sons de tambours s'intensifiant. Ils se lancèrent un regard terrifié, puis reprirent leur course jusqu'à ce qu'une voix appelle à l'aide…

-Au secours, à l'aide, je suis coincée dans les toilettes…
-Vas-y Ron, va chercher Ginny, moi je m'occupe d'elle.
-Non. On ne se sépare pas.
-Ne discute pas, on n'a plus le temps.

Ron partit alors en courant pendant qu'Hermione portait assistance à une élève de première année piégée par Peeves, l'esprit frappeur de l'école.

Dans la Grande Salle, la Directrice avait rejoint les élèves amassés, et à présent terrifiés par ce climat oppressant. Tous la regardèrent, attendant les consignes, mais elle n'en avait aucune. Elle savait pertinemment qu'il était inutile de lutter pour limiter les pertes. Résister ne provoquerait que des morts supplémentaires. Minerva connaissait l'ennemi et son objectif. Il leur suffirait d'attendre que le carnage se déroule et de compter les disparues ensuite. Pour la toute première fois de son existence, elle ne parvint à soutenir les regards en déroute se tournant vers elle, cherchant à avoir des explications. Comment leur avouer ce qui allait se dérouler ?

D'un coup d'œil, elle regarda par la fenêtre et vit des ombres pénétrer sournoisement dans l'enceinte du château. Merlin, les serres… les élèves dans les serres seraient les premières touchées et vu la distance, elles n'avaient pu rejoindre ni le dortoir ni la Grande Salle…

-C'est Voldemort qui attaque Madame la Directrice ? lui demanda le Rubeus Hagrid, encore essoufflé de la course qu'il venait de faire à l'audition de l'alerte.

McGonagall se tourna vers lui, le regard en déroute.

-Non Hagrid, non ! J'aurais préféré, murmura-t-elle, comme si elle se parlait à elle-même.
-Quoi ? Mais comment ça ? Comment peut-on préférer…

Les tambours résonnaient maintenant dans tout le château pour devenir assourdissant et oppressant. Les élèves amassés dans la Grande Salle tremblaient de peur : cela n'était pas humain, ces sons n'étaient pas humains. On aurait dit des battements de cœurs, mais en plus fort et plus sombre à la fois. Ils se serraient tous les uns contre les autres pour se réchauffer tant bien que mal face au froid qui les enveloppait. Ce vacarme ne cessait pas, il augmentait, encore et encore… puis, d'un seul coup, plus rien. Le silence le plus complet.

-Ils sont là !

La Directrice semblait prier, elle ne cherchait pas à donner des directives ni à protéger ses élèves. Tout espoir était vain.
-Mais qui ? Qui est-ce enfin ? S'enquit Hagrid, les yeux rivés vers la porte d'entrée de la grande salle, prêt à se battre.
-Les Morgoles.

A ces mots, il blêmit comme jamais.

- Les… les… mais c'est une légende. Ils n'existent pas ?

-Ho que si ! Ils sont venus les chercher, et nous ne pourrons rien faire pour les en empêcher. Seulement prier Merlin pour qu'ils en enlèvent le moins possible.

Il tourna la tête vers les élèves réunis devant eux et laissa couler une larme. Des cris provenant des serres se faisaient déjà entendre, provoquant une incompréhension totale dans la Grande Salle. Pourquoi la directrice ne bougeait-elle pas ? Pourquoi les professeurs n'accouraient pas pour leur porter secours ? Tout ceci dura environ une éternité. Puis le son d'une corne de brume résonna sinistrement. Les tambours reprirent de plus belle, jusqu'au silence le plus complet. Le soleil réapparut et la température se réchauffa brusquement. C'était fini.

-Qui était vers les serres ce matin ? Demanda la Directrice, craignant la réponse.
-Les premières années Madame, lui répondit le gardien des lieux et des clés de Poudlard.
-Alors nous les avons toutes perdues !

Ron et Ginny, s'étaient réfugiés dans l'infirmerie avec les autres malades et Madame Pomfresh. Lorsque les tambours avaient cessés, ils avaient compris qu'ils n'auraient pas le temps de retourner dans leur dortoir. Ils avaient barricadé la porte avec deux lits à la va-vite, mais cette précaution fut totalement inefficace.

-Que se passe-t-il ? Demanda une étudiante de seconde année.
-Nous n'en savons rien, lui répondit Ron.

Mais alors qu'il voulut développer le sujet, la porte vibra.

Les quatre pensionnaires de l'infirmerie se réfugièrent dans le fond de la pièce et sortirent leurs baguettes, prêts à se défendre lorsque les portes volèrent en éclat, projetant les deux lits en arrière. Madame Pomfresh, placée devant les élèves pour les protéger, fut assommée sur le coup par une planche de bois.

Ron poussa Ginny légèrement derrière lui et se retrouva face à face avec une créature particulièrement étrange. Cette vision leur glaça le sang à tous. Il semblait humain d'apparence, mais sa maigreur et son teint cadavérique lui donnait un aspect de mort-vivant. Il ne portait aucune baguette mais son long manteau de cuir noir laissait apparaître une ceinture d'armes blanches à sa taille.

Du haut de ses deux mètres, il dévisagea chacun des trois élèves et s'attarda quelques instants sur Ginny avant de river ses yeux translucides sur la jeune Serdaigle à ses côtés. Pour l'instant ses mains squelettiques et ses longs doigts, terminés par des ongles d'au moins trois centimètres, n'avaient rien de menaçant si ce n'est leur aspect. Il ne semblait pas vouloir se saisir de ses armes mais tous se doutaient qu'il ne sortirait rien de bon de cette rencontre.

-Que voulez-vous ? Prononça haut et fort Ron cherchant vainement à l'impressionner.

Mais la créature ne daigna pas répondre. Elle inclina légèrement la tête sur le côté et leva une main, bougeant ses doigts comme si elle cherchait à attraper un objet invisible devant elle. Le corps de la jeune Serdaigle traversa alors la pièce sans qu'elle ne prononce un seul cri. Très vite, les deux Gryffondors réalisèrent qu'elle était évanouie.
Ron voulu tenter quelque chose, mais la créature anticipa son attaque et il fut projeté de plusieurs mètres en arrière, heurtant violemment l'armoire à pharmacie du fond et retombant inanimée, le corps à moitié recouvert de débris. Ginny paralysée par cette vision, ne savait quoi faire.

Rapidement, la créature fit demi tour et la laissa seule, au milieu de ce désordre, avec les deux corps inertes de l'infirmière et de son frère. La Serdaigle suivit son ravisseur en lévitant, rejoignant un groupe de filles, gisant également dans les airs, à l'entrée de l'infirmerie. Ginny resta quelques secondes encore immobile, sans pouvoir se remettre de cette rencontre effroyable, avant de se ressaisir et de se précipiter vers son frère encore inconscient.

Une trentaine de minutes plus tard, ils allèrent rejoindre les autres dans la Grande Salle. Les élèves arrivant de leurs dortoirs n'avaient absolument rien vu. Un silence mortuaire s'installa avant de céder la place aux rumeurs les plus folles.
Une fois réunis dans la grande salle, Ron tenta de repérer Hermione, en vain…

Mais il était encore très loin de se douter du sort qui attendait l'élue de son coeur. Dans un autre monde, elle se réveillait douloureusement. Un mal terrible lui martelait la tête et elle mit un certain temps à ouvrir les yeux. Après quelques minutes, elle parvint à mouvoir les paupières… Le flou céda peu à peu la place à une vision d'épouvante. Elle était dans une cellule sombre et particulièrement froide, avec pour seule compagne une humidité putride ruisselant par gouttes sur les pierres des parois. Aucune fenêtre ne pouvait l'aider à se situer et la seule issue était une porte massive en bois, solidement rivée au mur.

D'un premier réflexe, elle se recroquevilla sur elle-même à cause du froid, ou peut-être de la peur, pour tenter de rassembler ses esprits. Elle se souvenait des tambours, de l'attaque, de la créature dans le couloir et puis… et puis plus rien.
Soudain, ses pensées furent interrompues par les cris d'une jeune fille au loin. Elle se leva d'un bond et chancela d'étourdissement jusqu'à la porte de la cellule pour écouter. Quelqu'un semblait emmener une prisonnière ailleurs et sans aucun ménagement. Hermione entendit un vague : « ne m'abonne pas ! Laissez-moi, laissez moi… » puis la voix se termina par un hurlement à en déchirer même le cœur de Rogue.

Elle avait reconnue la même petite voix qui l'avait appelé à l'aide dans les toilettes de Poudlard. Sans même s'en rendre compte la courageuse Gryffondor fit quelques pas en arrière pour se tapir loin de cette issue maudite, mais son pied gauche heurta quelque chose. Littéralement tétanisé, tout son corps sursauta. Une main vint alors aussitôt se poser sur sa bouche pour l'empêcher de crier.

Elle tenta alors de se débattre, mais un homme la ceinturait fermement par la taille lui faisant presque mal. Elle redoubla d'efforts pour se libérer de cet emprisonnement jusqu'à ce que la voix de son assaillant ne la fige de surprise :

-Granger ! Arrête bon sang, tu vas nous faire repérer !

Pétrifiée, la Gryffondor écarquilla les yeux de stupeur et stoppa tous ses efforts pour se dégager, elle avait reconnu cette voix méprisante et si détestable. La surprise la paralysa.

-Bon, je te lâche, mais tu promets de ne pas crier, sinon on est morts tous les deux, d'accord ?

Elle fit oui de la tête, pressée de comprendre ce qui lui arrivait.

-Pas de blague Granger, on n'est pas dans un jeu c'est bien compris ?

Cette fois la jeune femme s'impatienta et lui mordit la main ce qui eut l'effet escompté : la libérer. Pourtant l'homme ne hurla pas, il se recula simplement en secouant le bras et en lui lançant un regard mauvais, les lèvres pincées et l'air menaçant. Elle put d'ailleurs lire dans son regard quelque chose comme « si tu n'étais pas une fille » ou encore « si je n'avais pas besoin de toi » voir même « si seulement j'avais le courage ».

-Malefoy, mais qu'est-ce que tu fais là ? Bredouilla-t-elle.