Coquille vide

Rating : M

Pairing : SS/HP

Disclamer : Rien à moi

Avertissement : Slash (relation homosexuelle entre deux hommes) donc homophobes, s'abstenir. De plus, cette histoire contiendra une scène de sexe dans la deuxième partie donc âmes sensibles s'abstenir aussi.

Résumé : Harry aurait dû mourir après avoir porté le coup fatal à Voldemort. Ses blessures étaient bien trop graves. Mais Severus Snape ne pouvait se contenter de le regarder alors qu'il avait le moyen de le sauver. Même si ce ne serait sûrement pas au goût de son jeune élève... (SS-Vampire/HP-Calice)

Note de l'auteur : Voilà un Two-Shot sur un thème Vampire/Calice, ça faisait longtemps que je voulais en écrire un. Je sais que j'ai d'autres fics en cours mais j'arrivais pas à me sortir cette histoire de la tête. Et celle-ci est assez courte. Donc je poste déjà la première partie et la deuxième devrait suivre assez vite, elle est presque terminée. Après, je me remets aux autres fics ! Bonne lecture à tous.

- - -

Première partie

J'avais souvent imaginé comment ça se passerait. La dernière bataille. Ce dernier combat entre le bien et le mal, entre l'ombre et la lumière, entre Voldemort et moi.

Depuis que j'ai appris pour la prophétie, je n'ai cessé d'y penser. Je me voyais dans le parc de Poudlard, l'armée des ténèbres avançant vers le château après avoir brisé d'une manière ou d'une autre les protections. Je voyais l'effet des détraqueurs sur nous, je nous voyais en sous-nombre, je voyais l'espoir s'envoler et les regards effrayés se tourner vers Lui.

Mais surtout je nous voyais... Lui et moi... Entamer ce duel qui déciderait de tout.

Dans d'autres scénarios, ça se passait au cimetière où Cédric est mort. Ou encore devant le Square Grimmault. Ou même à Pré-Au-Lard ou sur le Chemin de Traverse. Etrangement, je n'avais jamais pensé à Privet Drive. Sûrement parce que dans mon inconscient, ma vie moldue et ma vie de sorciers ne sont pas compatibles. J'ai toujours eu la sensation de jongler entre deux mondes différents, deux plans ou dimensions qui ne peuvent logiquement se rencontrer.

La simple idée de voir les Dursley mêlés à cette guerre m'était toujours apparue comme le summum du ridicule. J'étais bien naïf. J'entends presque la voix de Snape me lancer une remarque sarcastique sur combien je suis stupide et Maugrey un regard critique signifiant : Vigilance constante, Potter, Vigilance constante.

Et maintenant, ils sont là. Ils ont encerclé la maison et je suis seul avec trois moldus à la limite de l'apoplexie. Ça non plus, je n'y avais pas pensé. Me retrouver tout seul en face de Lui. Tout le monde n'a cessé de me répéter que je ne serai pas seul malgré ce que disait la prophétie et Hermione et Ron m'avaient même promis d'être présents le moment venu. Pas que je leur en veuille pour leur absence. Au contraire, je préfère leur épargner ça.

En tout cas, je me sens étonnemment calme, je crois que je me suis fait à l'idée d'en finir avec eux depuis longtemps. Je ne parle pas des Dursley – même si l'idée est parfois tentante – ni de mes amis mais des mangemorts et de leur maître.

Baguette en main, je me souviens des cours de défense que quelques membres de l'Ordre m'ont fait suivre cette année. S'éloigner des fenêtres, barricader les entrées et attendre les secours. Cependant, j'imagine que Voldemort n'est pas venu sans prendre certaines précautions. Je ne sais pas quel agent était censé surveiller la maison cette nuit mais je ne me fais pas d'illusions. Un mort de plus pour me protéger.

Prêt à me battre jusqu'à mes dernières forces, je me place devant les Dursley – qui pour une fois ne m'insultent pas parce que je m'approche d'eux – quand la porte-fenêtre du salon finit par céder. J'ai réussi à gagner un petit quart d'heure mais si le signal d'urgence n'a pas été envoyé à l'Ordre, les renforts ne risquent pas d'arriver.

Les premières silhouettes tout de noir vêtues pénètrent dans la maison et commencent à nous encercler tout en gardant leurs distances. Ils sont huit plus Voldemort lui-même qui se place en face de moi avec un rictus malfaisant. Je suis un peu désolé pour mes moldus mais je crois bien qu'on est mal barrés.

« Et bien, Potter. Il semblerait que tu sois en mauvaise posture. Pas de Dumbledore pour te cacher, pas de phénix pour te sauver, pas de sang de bourbe pour réfléchir à ta place... Oh et j'oubliais, pas de parrain pour se sacrifier. »

Des ricanements s'échappent des masques mais je m'empêche de lui répondre. Ça lui ferait trop plaisir. Par contre, à la remarque sur Sirius, ma main s'est crispée encore d'avantage sur ma baguette et je suis à deux doigts de lui jeter un sort.

Du calme, Potter. Perdre le contrôle ne t'aidera en rien.

Je prends une profonde inspiration et j'attends. J'espère que ma mort sera rapide et sans douleur. Un Avada net et sans bavure, si possible. Mais avec la chance que j'ai et le goût du spectacle de ce cher Voldemort, ça risque plutôt d'être très long et très douloureux. D'ailleurs, je ne donne pas cher de la peau des Dursley non plus...

Puis tout d'un coup, tout semble s'accélérer et ralentir en même temps. Voldemort s'avance et m'ordonne d'en faire autant pour un duel dans les règles. Je sais qu'il a appris la prophétie il y a plusieurs mois après qu'on ait découvert un espion dans nos rangs. Je n'avais jamais pensé qu'il était capable de fair-play mais j'imagine que pour son image de marque, il tient à me battre seul à seul.

Tant mieux. Je ne tenais pas particulièrement à assister à la torture des Dursley avant ma mise à mort. Pas que je les apprécie tellement mais je me suis découvert dernièrement un amour infini pour tous les êtres vivants. Un peu comme Hagrid d'une certaine façon... D'ailleurs, mes moldus ont un petit quelque chose des créatures qu'affectionne tant mon ami le géant. Ils sont désagréables, moches et blessants.

Bref, je me lance à l'attaque de Lord Voldemort. Les mangemorts présents – sûrement son cercle d'intimes vu le nombre restreint et le but de sa visite – restent à distance et se sont éparpillés dans le salon pour surveiller les alentours. J'imagine que leur mission est d'empêcher tout secours d'arriver jusqu'à moi. Les Dursley quant à eux, sont serrés dans un coin et j'entends à peine leurs gémissements craintifs, trop concentré à ne pas recevoir un sort.

Les maléfices s'enchaînent et aucun de nous ne cède du terrain. Mais je fatigue, je ne sais pas combien de temps je vais pouvoir tenir. Un éclair argenté me frôle bientôt et je sens la chair de mon bras se déchirer. La douleur se répand rapidement et ma main tremble quand je lance un stupéfix à mon aggresseur. Je ne sais pas grand chose sur les éclairs argentés mais j'ai de bonnes raisons de croire que ce n'était pas de la magie blanche. Surtout vu la manière dont tout mon corps brûle à présent.

Je suffoque. Je tombe à genoux. Ma vision se trouble. Mais je n'abandonne pas. Je ne peux pas, je n'en ai pas le droit. Trop de gens croient en moi. Trop se sont sacrifiés. Trop souffriraient si je mourrais sans emporter Voldemort avec moi.

Alors je me relève et je lance un autre sort. J'ignore la douleur, j'ignore l'odeur de chair calcinée, j'ignore le goût de sang dans ma bouche et j'ignore tout ce qui n'est pas Voldemort. Un éclair rouge cette fois mais je parviens à m'écarter à temps. Puis je trébuche. Je tombe. Je suis épuisé et j'ai si mal... Je parviens à peine à faire le point sur les yeux carmins et le rictus triomphant. Je n'ai même pas besoin de le voir prononcer les mots, ou de les entendre. J'ai échoué et je vais mourir. Je suis prêt.

« Avada Kedavra ! »

Un éclair vert puis tout ce noir. L'obscurité. Alors c'est ça la mort ? Etrange, je m'attendais à autre chose. J'ai encore mal partout. Je suis encore essoufflé. J'espèrais sincèrement qu'après notre mort, on ne continuait pas à ressentir la même chose qu'au moment de notre décès. Parce que vive la torture si c'est le cas...

« Sale traître ! »

Il me faut bien trois ou quatre secondes pour comprendre que je ne suis pas mort et que ce n'est pas moi qui viens de me prendre l'impardonnable. Les murmures furieux qui me parviennent m'aident à réaliser ce qui vient de se passer. Dans un état quelque peu second, je repousse la cape noire qui recouvrait ma vue et visualise la scène.

Snape

Je l'avais oublié celui-là. Evidemment qu'il était là, il fait partie des plus influents chez les mangemorts. Voldemort n'aurait jamais organisé ma mise à mort sans sa présence. Par contre, moi qui avais des doutes sur le camp de mon professeur, me voilà maintenant rassuré. Dommage qu'il ait fallu qu'il meurt en me sauvant pour que j'en ai la preuve.

Encore quelques secondes me sont nécessaires pour que je réalise que l'homme vient de se sacrifier pour moi. J'avoue être pas mal choqué mais sûrement pas autant que les mangemorts autour de moi. Pris d'une haine comme je n'en avais ressentie qu'à la mort de Sirius et profitant de la diversion que Snape m'a offerte, je me rue sur Voldemort et commence à le frapper à main nue.

Ma peau se déchire de partout, le maléfice précédent continuant à faire effet, mais je continue à cogner le sorcier que j'ai emporté à terre avec moi. Je sens à peine les coups que je reçois, tant mon corps tout entier n'est que douleur. Mes yeux sont recouverts d'un voile écarlate et je distingue tout juste la longue dague qui vient d'apparaître dans les mains du mage noir. Usant de mes dernières forces, j'attrape aussitôt son poignet et je l'empêche de me découper en petits morceaux. J'entends vaguement quelqu'un grogner et je note distraitement que ça doit être moi.

Je fatigue et la lame se rapproche. Je ne vois pas les mangemorts se resserrer autour de nous pour mieux voir la scène mais j'entends parfaitement le hurlement de douleur. Ou plutôt les hurlements de douleur. Je suis incapable d'expliquer comment mais la dague vient de me transpercer le ventre et accessoirement aussi, celui de Voldemort allongé sous moi. Sous l'effet de l'adrénaline et par pur réflexe, j'attrape sa baguette qui a roulé tout près de moi et je prononce deux mots en direction du mage. Un éclair vert lui arrive alors directement entre les deux yeux et puis plus rien. Je viens apparemment de lui lancer un sort que je ne parviens même pas à identifier.

Tout ce que je sais, c'est qu'il y a des cris autour de moi. Que je ne vois plus rien. Que j'entends vaguement une voix qui me parle mais je suis trop fatigué pour la reconnaître ou la comprendre. J'ai mal. Mon monde n'est plus que ça, douleur et fatigue. Alors je ferme les yeux et je tombe. J'ai tout de même une dernière pensée pour les Dursley. J'espère qu'ils ne sont pas morts, je les verrais bien dans un enclos derrière la cabane d'Hagrid...

Puis tout est noir. La dernière chose dont je me souvienne, c'est d'un liquide chaud qui coule au fond de ma gorge.

- - -

C'est tout de même un phénomène étrange, la mort. J'avais imaginé que tout serait blanc mais non, tout est noir. Je pensais que tout m'apparaîtrait enfin clairement mais non, tout me semble plus nébuleux que jamais. Je croyais que je ne ressentirais plus rien mais non, je... En fait si, ça c'est le cas. Je ne ressens rien, j'ai l'impression de flotter dans du coton, d'être dans une sorte de torpeur dérangeante et jamais je ne me suis senti aussi fatigué.

Le pire, c'est que j'angoisse. Ce silence, cette obscurité, cette solitude... Je me surprends à penser que je ne devrais pas être seul, qu'il me manque quelque chose. Ou quelqu'un. C'est assez flou.

Puis, je les vois. Dans la pénombre, je ne distingue que ça. Acérés. Hypnotisants. Et étrangement rassurants.

Deux yeux rouges me fixent sans ciller.

« Lumos »

Je crois que ce sont les yeux qui viennent de parler. Ou plutôt leur propriétaire. Je ne suis pas sûr, je suis un peu confus et j'ai du mal à réfléchir. Tout ce que je sais, c'est que je me détends en entendant cette voix et que la présence de ces yeux m'apaise. Et puis il y a quelque chose de familier dans ce timbre de voix... C'est difficile à expliquer mais je me sens... protégé...

La baguette ne projette qu'une très faible lumière, sûrement une délicatesse du sorcier pour ne pas blesser mes yeux après tout ce noir. Je lui suis reconnaissant pour ça. Mais du coup, j'ai du mal à distinguer la silhouette face à moi. D'ailleurs, où sont passées mes lunettes ?

« Ici »

Un peu perdu, je soulève difficilement une main et saisit les lunettes que me tend l'inconnu. Je note à peine que ce ne sont pas les miennes et les pose sur mon nez sans réfléchir. Au moins, elles sont à ma vue.

Puis je reconnais peu à peu ce qui m'entoure. Je suis à l'infirmerie de Poudlard. Il fait nuit et mon lit est le seul qui est occupé. Logique puisque ce sont les vacances d'été. Mais alors, je ne suis pas mort ?

Un renifflement sarcastique que je connais très bien se fait entendre tout près de moi et – un peu au ralenti je l'admets, mais je ne suis pas en grande forme – je tourne deux yeux écarquillés vers l'homme qui a abaissé sa baguette pour ne pas m'aveugler. Je n'en reviens pas. C'est impossible.

« Snape ? »

« Professeur Snape. », me répond la voix froide de mon Maître de Potions.

Je dois rêver. Ou sinon, j'hallucine. Il est censé être mort. Je veux dire, je l'ai vu. Il s'est pris un Avada Kedavra et il était allongé par terre devant moi sans respirer, les yeux grands ouverts. Noirs les yeux, d'ailleurs. Pas rouges, noirs.

« Co-comment ? »

C'est tout ce que j'arrive à balbutier mais non seulement mes derniers neurones ont déclaré forfait, mais en plus ma gorge me fait atrocement mal. Si seulement je pouvais boire un peu pour la soulager...

A peine me suis-je fait cette remarque que Snape me tend un verre d'eau. Je reste un moment à le fixer bêtement mais finis par accepter l'offrande en hochant la tête avec reconnaissance. Il m'aide à boire et je reste perplexe par son comportement. Mais mis à part ses yeux rouges, ses traits sont toujours les mêmes, impassibles et glacés, donc aucun doute sur son idendité.

En plus, il ne m'a pas répondu. Tentons autre chose.

« Est-ce que je suis mort ? »

Un sourcil finement taillé se hausse avec sarcasme mais moi je ne vois que le regard écarlate. C'est tout simplement fascinant.

« Non, Potter. Vous êtes parfaitement vivant et le serez encore très longtemps. »

L'insistance qu'il a mise sur le 'très' passe totalement inaperçue auprès de mon pauvre cerveau fatigué. Tout ce que j'enregistre, c'est que j'ai vraiment survécu. Et que les pupilles rouges de mon professeur ont un petit quelque chose d'hypnotique.

« Et les Dursley ? »

« Vivants. Ils sont en ce moment à Ste Mangouste auprès de psychomages dans l'espoir qu'ils se remettront du choc. »

J'hésite à dire qu'Hagrid pourrait très bien s'occuper d'eux mais je me contente d'un vague sourire. Je sens la fatigue revenir à grand pas et je lutte pour garder les yeux ouverts. Je ne veux pas perdre le regard écarlate de vue. Je ne peux pas. Il ne faut pas...

« Et vous ? Vous devriez être mort... »

Mes paupières se ferment sans mon accord et mon esprit s'embrume à nouveau. Je sens vaguement une main froide sur mon front, c'est si agréable, si normal. Je me détends aussitôt et je me laisse emporter par le sommeil. Sommeil hanté par deux yeux rouges, si différents de ceux de Voldemort, si rassurants... Je n'entends même pas la réponse de mon professeur et m'endors profondément.

« Je le suis, Mr Potter. Je le suis depuis longtemps. »

- - -

« ...mment va-t-il ? »

« Il s'est réveillé vers 4h ce matin. »

« Et ? »

« Et il a demandé s'il était mort. Ce à quoi j'ai répondu non. Si sa famille était vivante. Ce à quoi j'ai répondu oui. Je lui ai donné à boire et il s'est rendormi. »

« Est-ce que vous lui avez dit... »

« Il m'a demandé pourquoi je n'étais pas mort alors que j'avais reçu l'Avada Kedavra mais s'est endormi avant que je ne puisse lui répondre. »

« Je vois. J'avoue que je ne sais qu'en penser. »

« Je n'avais pas vraiment le choix, c'était ça ou il devenait un martyre. J'imagine parfaitement son épitathe : Harry Potter, héros de 17 ans, qui s'est sacrifié pour sauver le monde de Lord Voldemort. »

« Je sais, Severus, et sachez que je ne vous en veux pas. Au contraire. C'est juste que... »

« Je sais. Et ne croyez pas que ça soit facile pour moi non plus. Non seulement parce que c'est Potter, mais vous savez quelle décision j'avais prise quand ça m'est arrivé. »

« Oui. Merci pour ça aussi, Severus. »

« Laissez tomber. De toute façon, c'est trop tard. »

« En effet. Bien, je dois me rendre au Ministère, c'est un peu la folie ce matin. J'imagine que vous resterez à l'infirmerie jusqu'à ce qu'il se réveille ? »

« Comme si j'avais le choix... »

« A plus tard, Severus. »

« C'est ça. »

Des pas qui s'éloignent. Je suis partagé entre continuer à faire semblant de dormir ou demander des explications sur la conversation que je viens d'entendre. Je ne suis pas certain de vouloir savoir, en fait. Je crois que je vais plutôt essayer de me rendormir.

« Inutile de faire semblant, Potter, je sais que vous êtes réveillé. »

Ok, autant pour moi. Il semblerait que je me sois fait repéré. Prudemment, j'ouvre un oeil pour repérer les lieux mais je le referme aussitôt dans un grognement. Il fait trop jour, ça me brûle. Pour être honnête tout mon corps me brûle. C'est moins douloureux qu'avec Voldemort mais ça fait mal.

« Buvez ça, ça calmera la douleur. »

Je retente d'ouvrir les yeux et je remarque que les rideaux autour de mon lit ont été tirés pour m'épargner une partie de la luminosité. Mais je n'en fais pas grand cas et je me redresse avec une grimace pour atteindre le gobelet que me présente Snape. Encore lui. Il m'aide une nouvelle fois à boire et je sens bientôt la potion faire son effet. Je soupire de soulagement.

« Merci. »

Il ne répond pas mais m'aide à me rallonger. Un peu anesthésié, je laisse mes yeux retrouver ceux qui me fixent avec intensité. Ils sont toujours aussi rouges.

« Expliquez-moi. »

Je ne sais pas vraiment ce que je veux qu'il m'explique mais je sens que lui en a une vague idée. Alors je le regarde se masser le front d'un air ennuyé – normalement, Snape n'a jamais l'air ennuyé – et j'attend qu'il réponde. Ce à quoi il consent après avoir croisé les bras et en me fixant avec une expression que je ne lui connais pas. Et que je ne reconnais pas.

« Je me suis interposé et j'ai bien reçu l'Avada Kedavra qui vous était destiné. »

« Oh... Merci. »

Il me fixe bizarrement et je me sens rougir en comprenant combien mon commentaire était ridicule. Je crois que je vais continuer à l'écouter sans rien dire, ce sera plus sage.

« En effet. Bref, le temps que je m'en remette, vous êtiez en train d'envoyer le même impardonnable à mon cher et regretté Maître. »

« Regretté ? »

Rebelotte. Le voilà qui me fixe encore comme s'il m'était poussé une deuxième tête. Qu'est-ce que j'ai dit ? Une lueur de compréhension traverse heureusement les pupilles rouges et il semble chercher les bons mots pour m'expliquer. Ça commence à m'inquiéter.

« Il est mort. »

« Mort ? »

« Vous l'avez tué. »

« Tué ? »

« Oui, vous avez... accompli la prophétie. »

« Oh »

Oui, Oh... C'est vrai que maintenant que j'y repense, j'ai peut-être fait ça... Mais c'est flou, j'ai du mal à me souvenir. Et j'ai si mal à la tête...

« Vous êtes en état de choc et épuisé, votre mémoire reviendra plus clairement quand vous serez rétabli. »

« Bien. »

Un étrange silence s'interpose entre nous mais il n'a rien de pesant. Lui me regarde d'un air contemplatif et moi, j'essaie d'enregistrer, de réaliser, d'accepter ce qu'il vient de me dire. J'ai tué Voldemort. J'ai tué un homme. Et je ne ressens absolument rien.

Une main glisse soudain sur mes joues et je me retrouve plongé dans deux pupilles écarlates un peu troubles. Il me faut quelques secondes pour comprendre que c'est moi qui vois trouble et que je me suis mis à pleurer. Je frémis et ferme les yeux, laissant ces doigts apaisants effacer mes larmes.

« Alors c'est fini ? »

Je reconnais à peine ma voix qui se brise en un sanglot. Ce ne sont plus de simples frissons maintenant, mais de vrais tremblements qui parcourent mon corps blessé. Quelque part au fond de moi, je me dis que c'est normal, que j'ai besoin de craquer un bon coup parce que je suis en effet en état de choc.

« Plus ou moins. »

Je ne comprends pas très bien ce qu'il entend par là mais ça m'est égal. Seule la sensation de sa main sur mon visage m'importe. Je crois que je devrais m'inquiéter de réagir ainsi à son contact et à sa présence depuis mon réveil mais ça me semble simplement... normal... logique, d'une certaine façon...

Puis, un éclair de lucidité me fait oublier Voldemort un instant et je rouvre les yeux pour les replonger dans ceux qui semblent ne m'avoir jamais quitté.

« Vous avez dit que vous aviez reçu l'Avada, alors comment ... ? »

Ok, j'aurais peut-être dû réagir avant et commencer par là mais je suis un peu embrouillé par toute cette histoire. Mais maintenant, ça me semble primordial de savoir, presque vital. D'ailleurs, j'en suis tout à fait convaincu quand son visage se glace complètement et qu'il éloigne sa main comme si je venais de le brûler. Je suis soulagé de voir qu'il ne s'éloigne pas pour autant et ne détourne pas ses yeux fascinants.

« Je vous préviens, ça risque de ne pas vous plaire. »

Au point où j'en suis...

« Allez-y. »

Au lieu de me répondre, il retrousse simplement ses lèvres. Pendant un court instant de naïveté, j'ai pensé qu'il allait sourire mais je reviens bien vite à la réalité. Là, devant moi, deux canines aiguisées et luisantes de salive. Je reste hébété un moment puis remonte les lignes de son visage pour retrouver les pupilles ensanglantées. Un vampire. Mon professeur de potions est un vampire.

Dès que je réalise ça, il referme la bouche et fronce des sourcils.

« En effet. Mais ce n'est pas tout. »

Je ne comprend pas très bien ce qu'il me raconte. Est-ce que j'ai parlé à voix haute ? Et si ce n'est pas tout alors quoi ? C'est un démon aussi ? Un loup-garou ? Un vella sous un charme glamour peut-être ?

« Avant que vous ne hurliez au meurtre, Potter, je tiens à préciser que vous étiez mourant. Si je ne l'avais pas fait, vous seriez mort et je suis sûr que ce n'était pas ce que vous vouliez. »

Alors là, je suis paumé. J'ai dû louper un épisode en route. Je le vois qui se passe une main fébrile dans ses cheveux gras et il s'éloigne pour faire les cent-pas au pied de mon lit. Sans mes lunettes – il a du me les enlever quand je dormais – j'ai du mal à le voir. Un grognement de Snape plus tard et le voilà qui me tend mes lunettes.

« Est-ce que vous lisez dans mes pensées ? Non parce que, vous ne me regardiez pas donc ça peut pas être la légilimencie mais depuis tout à l'heure... »

Mon coeur bat la chamade quand je le vois qui hésite et qui sert les poings avec nervosité. Ou colère. Difficile à dire, avec cet homme.

« Ca fait partie du lien. Je ne lis pas vos pensées mais je ressens vos... besoins... »

Quoi ? Quel lien ?

« Quoi ? Quel lien ? »

Il se rapproche et me fixe à nouveau de ses yeux si hypnotiques. J'ai beau savoir qu'il est un vampire et qu'ils ont des dons pour charmer les gens, je n'arrive pas à détourner mon regard.

« Je vous ai fait mon calice, Potter. Je vous ai fait boire mon sang. C'était le seul moyen pour que vous surviviez. »

- - -

Il m'a redonné une potion pour dormir, prétextant que nous aurons tout notre temps pour parler de ça et que j'ai besoin de sommeil. A mon avis, il cherche surtout une excuse pour repousser la conversation. Je n'ai d'ailleurs pas discuté, je suis trop choqué pour arriver à lui tenir tête.

Alors me voilà qui émerge à nouveau, la nuit est retombée et la douleur s'est réveillée. Je me demande quel sortilège Voldemort m'a envoyé, c'était plutôt vicieux. Mais au moins, j'ai l'esprit moins embrumé, j'ai retrouvé une partie de mes forces. Et j'ai mal.

Je n'ai même pas besoin d'ouvrir les yeux, je sais qu'il est là. Et il doit savoir que je suis réveillé. Mais j'ai besoin de réfléchir un peu avant de m'entretenir avec lui. Maintenant que mes neurones reprennent du service, je peux enfin faire le point.

Voldemort est mort. Je l'ai tué. La prophétie est accomplie. La guerre est terminée. Je suis libre maintenant, on n'attend plus rien de moi.

J'imagine que je devrais être plus heureux que ça à cette idée, mais ça me laisse plutôt... vide... Je ne pensais pas vraiment survivre, je me demande bien ce que va être ma vie maintenant. Je ne sais même pas ce que je veux faire après Poudlard. Où j'irai après Poudlard. Suis-je même capable de m'éloigner de cet endroit que je considère comme ma maison ? Qui me protège de la réalité du monde extérieur, loin des journalistes, des fans, de tous ces gens qui ne connaissent rien de moi et qui me jugeront par ce qu'ils auront lu dans les livres d'histoire...

Et Snape dans tout ça ?

C'est un vampire. C'est pour ça qu'il n'est pas mort en recevant l'impardonnable. Techniquement, il est déjà mort. Et il a fait de moi son calice. Pour me sauver. Bizarrement, je ne lui en veux pas. J'imagine qu'il n'avait pas vraiment le choix et toute l'animosité que j'ai un jour ressentie pour lui semble avoir fondu comme neige au soleil. Après tout, je l'ai vu se sacrifier pour moi... Même s'il ne risquait pas grand chose, il a tout de même bousillé sa couverture pour me sauver.

Je perds le fil de mes réflexions sous la douleur lancinante qui s'installe dans ma tête et je soupire de soulagement en sentant une main froide se poser sur mon front. Encore. Je sais que c'est lui mais je ne veux pas rouvrir les yeux. Je ne suis pas prêt. Je commence à trembler.

« Calmez-vous, je ne vais pas vous faire de mal. »

Je le sais. Au fond de moi, je le sais. Mais je ne peux m'empêcher d'avoir peur. Pas de lui en particulier, mais de tout. De moi, des autres, de mon avenir...

« Buvez-ça, ça vous soulagera. »

Je refuse toujours d'ouvrir les yeux mais je bois docilement le contenu du verre qu'il a posé contre mes lèvres. La douleur s'atténue aussitôt et reste en sourdine. J'aimerais me rendormir mais je ne pense pas en être capable. Alors je prends une profonde inspiration, toujours sans le regarder, et je me lance.

« En quoi ça consiste ? »

La main se retire de mon front et je retiens tout juste un gémissement plaintif. Je me fais honte.

« Je croyais que vous aviez étudié les vampires en DCFM. »

« On a appris à s'en défendre, mais rien de plus. »

Il ne répond rien et ça me met mal à l'aise. Je suis à deux doigts de rouvrir les yeux.

« Le calice est le... compagnon, le partenaire... du vampire. Le lien entre un vampire et son calice est très fort et résulte de... l'échange de leur sang. Le lien est définitif mais doit être maintenu et est renforcé régulièrement quand le vampire boit le sang du calice. Au moins deux fois par semaine pour que le vampire ne perde pas le contrôle. »

Il a prononcé tout ça tel un discours, d'un ton très professoral et détâché comme s'il n'était pas concerné ou expliquait les différentes étapes de la concoction d'une potion. Après six ans de cours avec lui, je sais qu'il n'a pas terminé. Alors je ne l'interromps pas et écoute sagement la suite.

« En échange du sang, le vampire offre protection au calice. En fait, le lien fait qu'il s'y sent obligé, il doit protéger son calice. »

Ca explique son comportement depuis que je suis à l'infirmerie.

Après toutes ces révélations, un silence tendu envahit l'infirmerie et j'essaie calmement de digérer la nouvelle. Je finis néanmoins par ouvrir les yeux pour plonger immédiatement dans deux lacs écarlates qui m'observent sans ciller. C'est... déroutant...

« Quand vous dîtes partenaire... »

« Sexuel, Potter. Je parle de sexe. »

C'est bien ce qui me semblait, je voulais juste être sûr. Je ne peux pourtant pas empêcher mes joues de s'empourprer et je me sens soudain affreusement jeune, inexpérimenté. Je ne suis pas certain de vouloir devenir l'amant d'un vampire à 17 ans. Il a du ressentir ma peur parce qu'il soupire et se rapproche de moi. Son regard reste toujours aussi intense, alors que le mien est plutôt troublé.

« Comme je vous l'ai dit, le lien fait que je me sens obligé de vous protéger. Je suis incapable de vous faire du mal, même si l'envie ne m'en manquera sûrement pas. »

Je sais qu'il le pense, qu'il est sincère quand il dit qu'il aura du mal à me supporter. Et ça me fait sourire. Ça me soulage de savoir que je ne suis pas le seul à avoir quelques difficultés à me faire à l'idée. Lui en tout cas n'a pas l'air positivement rayonnant même s'il a maintenant une façon de me regarder quelque peu différente. Ça doit être le lien.

« Et j'entends par là aussi bien psychologiquement que physiquement. Tout ça pour dire que je ne vous forcerai jamais à rien, sexuellement parlant. Je sais que vous n'avez pas choisi d'être coincé avec moi pour le restant de vos jours. »

Le ton est amer. Je me sens presque désolé pour lui. J'imagine que je devrais l'être pour moi aussi mais d'une certaine façon, ça ne m'affecte pas autant que ça le devrait. Soit c'est à cause du lien, soit c'est parce que je n'ai pas encore tout à fait réalisé ce dans quoi je suis fourré.

« Vous non plus. »

Il soupire et ferme un instant les yeux avant de me fixer à nouveau. Je me demande si c'est l'effet d'avoir pris un calice qui le fait avoir les yeux rouges.

« Je m'étais promis de ne jamais prendre de calice, Potter. Mais je ne pouvais pas vous laisser mourir alors que j'avais le moyen de vous aider. »

« Je ne vous en veux pas. »

« Je vous assure que ça viendra, vous verrez. »

Je ne sais quoi lui répondre alors je ne dis rien. Je vois ses yeux descendre sur mes joues puis sur ma gorge pour s'arrêter au niveau de ma carrotide. Je frissonne et il sursaute en détournant les yeux comme pris en faute.

« Est-ce que c'est douloureux ? »

« Ca dépend. »

C'est drôle, il n'a même pas eu besoin de me demander de quoi je parlais. C'est comme si nous étions sur la même longueur d'onde.

« De quoi ? »

« De moi. Si je veux faire mal, ce sera la pire torture. Sinon, c'est plutôt... plaisant, je crois. »

Je ne prends même pas le temps d'hésiter et je me redresse légèrement.

« Vous pouvez, si c'est ce que vous souhaitez. »

Il me fixe et ses yeux retrouvent bientôt ma gorge. Je crois qu'il hésite, même si son visage reste aussi impassible qu'à son habitude. Puis il secoue la tête comme pour retrouver ses esprits et m'adresse un regard noir. Enfin, rouge. En tout cas, ça a le même effet que d'habitude et je me renfonce dans mon lit, un peu effrayé et nerveux. Qu'est-ce qui m'a pris de proposer mon sang à un vampire... Même si je suis son calice maintenant...

J'observe mes mains aggripées au drap et je note distraitement qu'elles sont couvertes de bandages. En fait, maintenant que j'y prête attention, c'est tout mon corps qui est recouvert de bandages. Je n'avais pas réalisé dans le noir mais je comprend mieux mon manque de sensations. En tout cas, je ne dois pas être beau à voir et j'espère que je ne serai pas recouvert de cicatrices sur tout le corps. Je ne suis pas un psychopathe de l'apparence physique mais je ne tiens pas particulièrement à devenir comme Maugrey. L'éclair à mon front est amplement suffisant.

Je fixe mes mains avec inquiétude et je ne peux m'empêcher de penser que si Snape ne m'a pas encore touché, c'est parce que je ne dois ressembler à rien.

« Ne soyez pas ridicule, Potter. Dans une semaine, vous n'aurez plus rien. »

« Vous êtes sûrs que vous ne lisez pas dans mes pensées ? »

« Je n'en ai pas besoin, on lit en vous comme un livre ouvert. »

Cet homme est vexant. Et vu l'air narquois qu'il affiche, je suis sûr qu'il en a parfaitement conscience et que ça lui fait plaisir. J'hésite un moment à bouder mais je n'en ai pas la force. Alors je soupire et je le regarde s'asseoir sur une chaise au bout de mon lit.

« Ca fait combien de temps que je suis là ? »

« Presque deux jours. »

« Et vous êtes restés là tout ce temps ? »

« A votre avis, Potter. »

« Le lien. »

« C'est ça. »

« Et Mme Pomfresh ? »

« Elle s'est occupée de vous quand je vous ai amené mais est repartie chez elle pour fêter la victoire. »

J'ai peine à croire qu'elle ait abandonné un patient aussi facilement. En fait, quelque chose me dit qu'il l'a peut-être convaincue de rentrer. Protecteur et possessif, apparemment. L'idée n'est pas totalement déplaisante.

« Fudge n'a pas encore forcé les portes de l'infirmerie pour me harceler. »

« Il vaudrait mieux pour lui qu'il s'abstienne. »

Surpris par le ton haineux de Snape, je le fixe un instant sans rien dire. Ça fait drôle d'être la cause indirecte de ce regard mais de ne pas en être la cible.

« Qu'est-ce qui se passe dehors ? Je veux dire... Le Ministère, les journaux, l'Ordre, tout ça... »

« Vous avez entendu le Professeur Dumbledore ce matin, le Ministère est en pleine anarchie. Mais puisque je n'ai pas quitté l'infirmerie depuis, je crains que vous n'en sachiez autant que moi. »

- - -

Voilà plusieurs heures que nous ne disons plus rien. En fait, il n'y a pas grand chose à dire. Snape est un vampire et je suis son calice. Oh et c'est définitif bien sûr. Donc je suis plus ou moins marié à mon professeur de potions. C'est bizarre mais je commence à me faire à l'idée. Je me demande s'il accepterait de m'entretenir, comme ça je reste à Poudlard après mes ASPICs et lui continue à jouer avec ses chaudrons.

D'une certaine façon, je suis très reconnaissant à Snape de m'avoir totalement chamboulé l'esprit avec ses histoires de vampires. Ou plutôt nos histoires de vampires. Ça me permet de ne pas penser à ce qui se passe à l'extérieur de ces murs. Être choqué par ma nouvelle condition m'aide à accepter la fin de la guerre et la mort de Voldemort. En plus, je crois que ça me rassure. La liberté, l'incertitude quant à mon avenir, tout ça me faisait un peu peur. Maintenant, j'ai un repère. J'ai quelqu'un, j'ai une vie maritale qui m'attend. Même si c'est avec Snape...

C'est tout de même drôle que ce soit tombé sur lui et moi. J'imagine déjà la tête que vont faire Ron et Hermione en apprenant la nouvelle... J'espère par contre que le Ministère et la Gazette ne vont pas en faire toute une histoire. La condition de Snape ne doit pas être connue du grand public et je ne pense pas vraiment qu'il aimerait faire les gros titres. Il risquerait d'être perçu comme le méchant vampire qui a profité du pauvre Harry Potter alors qu'il ne l'a fait que pour me sauver. Sans compter la réaction des parents d'élèves s'ils apprenaient que leurs enfants côtoient un suceur de sang au quotidien.

D'ailleurs, en parlant de suceur de sang, il n'a toujours pas bougé de sa chaise. Ça fait presque trois jours maintenant qu'il est là aux petits soins pour moi. J'admets que j'apprécie et que j'ai fini par accepter d'être son calice mais je suis encore un peu gêné. Je ne sais pas ce qu'il attend de moi ou même s'il attend quoique ce soit de moi. Et son regard est toujours aussi fascinant...

« Est-ce que vos yeux vont rester rouges ? »

J'aimerais bien qu'il dise oui, j'avoue être attiré par ce regard. Je crois qu'il pourrait me faire faire n'importe quoi, seulement en me fixant avec ces prunelles couleur sang. En plus, ça a un petit quelque chose de Gryffondor... Mais je crois que je vais éviter de lui dire ça.

« Navré de vous décevoir, ce n'est pas ma couleur naturelle. »

Oui, ça je m'en doute. Et ce n'était pas ma question.

« Alors pourquoi sont-ils rouges ? Est-ce parce que vous avez pris un calice ? »

C'est drôle comme il est plus facile de parler de ça de manière impersonnelle. Lui par contre, n'a pas l'air à l'aise avec ma question et se lève de sa chaise pour faire les cent pas. Au cours des derniers jours, j'ai remarqué qu'il faisait ça dès qu'il était prêt à m'annoncer quelque chose de grave. S'il continue à garder le silence, je crois que je vais mourir sous l'effet du suspense...

« Ils ne prennent cette couleur que quand j'ai... soif... »

« Oh. Et bien, buvez. »

Il me lance un regard tellement équivoque que je me sens rougir aussitôt. Qu'est-ce que j'ai encore dit ?

« Je parle de sang, Potter. »

Cette fois, c'est à moi de rouler des yeux. Il me prend vraiment pour plus idiot que je ne suis...

« Merci, j'avais compris. Et je maintiens ce que j'ai dit, buvez. »

« Il n'y a que votre sang qui pourra étancher ma soif. »

« Et je vous ai déjà donné ma permission, si je me souviens bien. D'ailleurs, vous avez dit que c'était tous les deux ou trois jours, non ? Mais vous aviez déjà les yeux rouges quand je me suis réveillé à l'infirmerie... »

Il me fixe encore sans rien dire mais je suis certain qu'il hésite. Après tout, il doit avoir vraiment soif si ça fait trois jours qu'il est comme ça. Il se lève enfin et s'approche lentement de moi sans me quitter des yeux, tel un prédateur ne voulant effrayer sa proie. Quand son regard finit par retracer ma gorge jusqu'à ma carrotide, je me sens frissonner. Mais cette fois-ci, c'est plus par anticipation que par peur.

« Quand un vampire prend un calice, une seule goutte de sang du mortel lui suffit pour créer le lien. Mais dès que le lien est stabilisé, il prend goût à ce sang et sa soif se fait plus intense. Il n'y a que le calice qui peut lui permettre de l'étancher. »

« Vous êtes en train de me dire que vous ne m'avez pris qu'une goutte de sang et que vous vous retenez d'en boire plus depuis plus de trois jours ? »

Il ne me répond pas mais son regard ne se détache plus de mon cou. Il est à mes côtés maintenant et n'a plus qu'à se pencher pour se rassasier. Personnellement je n'attend que ça.

« Vous étiez trop faible. »

« Je ne le suis plus. »

« En effet, vous ne l'êtes plus. », susurre-t-il finalement et je suis parcouru d'un frisson incontrôlable.

J'ai à peine le temps d'enregistrer ce qui se passe et je sens déjà son nez dans mon cou. Il m'a carrément cloué sur le lit, son corps recouvrant le mien avec puissance mais délicatesse. Ses mains déboutonnent le haut de ma chemise de nuit avec une agileté déconcertante et je sens bientôt ses lèvres parcourir mon cou.

Ma respiration se fait hérratique, mes bras s'accrochent au dos de Snape et je me cambre au maximum pour lui offrir d'avantage de gorge. Je ne cherche même pas à retenir un gémissement quand il retrace ma carrotide de sa langue. Je ne sais pas si c'est le lien, si c'est parce qu'il est un vampire et qu'il a l'habitude de ces choses là, mais c'est tout simplement indescriptible. Je resserre mon étreinte pour l'encourager et il me chuchote de me détendre. Je lui obéis machinalement et il se décide enfin à mordre.

Il n'y a aucun mot pour décrire ça. La seule pensée cohérente qui me vient à l'esprit, c'est que l'adjectif 'plaisant' n'est rien à côté de ce que je ressens. Il aspire mon sang et moi, je suis à la limite de l'extase. Apparemment, il n'avait pas envie de me torturer aujourd'hui. Oh mais suis-je bête, il est incapable de me faire du mal, c'est vrai.

Il continue à boire et tout s'embrouille. J'ai l'impression d'être enveloppé dans un cocon de pure douceur. Je suis à l'abris, je suis protégé. Je suis bien. Je sens vaguement qu'il se retire et lèche ma plaie avec ce qui ressemble beaucoup à de la tendresse. J'ai à peine le temps de croiser ses yeux noirs, de me dire que ce regard sombre et profond me plaît aussi, et je sombre dans les bras de Morphée.

A suivre...