Cette histoire n'existerait pas sans Ellana-Watson, à qui je l'ai volée sans aucune gêne (love sur toi).

J'ai bien conscience qu'elle est un crossover entre plusieurs fandoms ET la mythologie grecque ET Wonder Woman, ce qui commence à faire beaucoup. Elle a donc été catégorisée en the 100, parceque Clexa en est le groupe principal (et aussi probablement le meilleur ship qui soit) Certains persos sembleront OOC et c'est voulu !


Themyscira était à feu et à sang.

D'ici et là, d'épais nuages de fumée noire montaient vers les cieux et le rougeoiement des flammes qui dévoraient la palissade de bois à l'entrée des terres sacrées ternissait d'une couleur pourpre le ciel d'ordinaire si bleu.

Le sol sacré des Amazones avait été envahi, et alors que les soldats Bithyniens du roi Nicomède, ravis d'avoir pris la ville par surprise, continuaient d'enflammer les baraquements et les tentes qu'ils trouvaient sur leur chemin, les trompettes sonnaient désespérément le rassemblement de la grande armée.

Les guerrières courraient dans tous les sens, cédant à la panique alors que leurs supérieures tentaient de ramener de l'ordre et que les trompettes encourageant au combat couvraient le bruit de leurs cris. Déjà les enfants en bas âge et les amazones trop âgées ou faibles pour se battre avaient été placées en lieu sûr, les portes des maisons fermées en urgence et les accès sensibles barricadés.

L'ennemi était entré dans la ville, et si elles ne réagissaient pas rapidement, les troupes Bithyniennes attendraient bientôt le palais. Il était inconcevable de perdre plus de terrain que ce qu'elles avaient concédé, encore moins de les laisser saccager les terres sacrées.

Toutes les Amazones de tout âge et de tout rang social en condition de se battre s'étaient précipité la tête la première sur le champ de bataille, venant en aide à la grande armée qui peinait un peu face à l'immense troupe de soldats Bithyniens qui venait de débarquer sur leur plage.

Une seule cependant manquait à l'appel - leur reine, clouée au sol de son palais par les douleurs de l'enfantement.

Regina était seule dans la salle du trône, accompagnée de l'unique amazone guérisseuse en laquelle elle avait assez confiance pour cette mission délicate de l'aider à mettre au monde son enfant, et serra les dents de toutes ses forces pour étouffer un nouveau cri de douleur. Elle venait juste de terminer son conseil de guerre d'urgence quand les contractions avaient commencé, et si elle ne s'en était pas souciée au début, trop occupée à préparer ses troupes, elle avait bien été forcée d'interrompre son geste alors même qu'elle était en train d'enfiler son armure. La douleur des contractions la pliait en deux, l'empêchant d'enfiler sa cuirasse, mais Regina ne s'en était pas laissé abattre. Elle mènerait ses troupes à la victoire, protections ou non, enceinte jusqu'au cou ou pas.

Cependant, elle avait à peine esquissé le geste de monter son cheval qu'Abigail était arrivé en courant, et le lui avait aussitôt interdit. Elle tuerait son enfant si elle partait, la guérisseuse le lui avait assuré.

Regina était restée à contrecœur, et avait sommé Thalestris de tout faire pour repousser l'ennemi. Sa sœur avait juré qu'elle protégerait les terres sacrées jusqu'à son dernier souffle et était partie la bride abattue à la tête de son armée affronter les troupes du roi Nicomède, Emma sur les talons.

Regina les avait toutes regardées partir avec cette étrange angoisse qu'elle ne les reverrait plus. Dehors, les trompettes sonnaient si fort qu'elle s'entendait à peine crier, et les appels de ralliement avaient laissé place aux hurlements hargneux d'une bataille acharnée, à laquelle Regina rageait de ne pouvoir participer.

« Où est Emma ? » hurla la reine entre deux grincements de dents

« Emma va bien » la rassura Abigail « Elle est avec Thalestris. Elles mènent notre armée à la victoire Regina, crois-moi ! Arès veille sur elles ! »

Abigail n'en savait rien bien sûr, mais savoir sa femme morte ou blessée aurait déstabilisé la reine au point de mettre en danger le nouveau-né, et il fallait absolument que celle-ci naisse saine et sauve. Regina hocha de la tête, des larmes aux yeux, bien qu'elle n'en croyait pas un mot.

Avant de partir en courant rejoindre l'armée, Emma lui avait fait promettre de rester en sécurité pour l'enfant, pour leur enfant, et elle lui avait donné sa parole. Regina aurait donné n'importe quoi pour aller se battre aussi, avec Emma, avec Thalestris et son peuple mais délivrer le bébé, l'héritière de son trône, primait sur tout. Même sur la vie de la femme qu'elle aimait, et du peuple auquel elle avait juré fidélité.

Les contractions étaient maintenant de plus en plus rapprochées, et Regina, qui souffrait le martyr, du presque se mordre la langue pour s'empêcher d'hurler devant Abigail, qui était son amie mais restait sa sujette.

Jamais sur aucun champ de bataille elle n'avait autant souffert. Ce ne serait pas en vain. Son enfant allait vivre, elle l'avait promis à Emma.

« Je vois la tête ! Ta fille sera bientôt là, ma reine »

Regina serra les dents, et supplia intérieurement Héra, déesse des femmes en couches, de lui donner une fille.

Quand elles étaient allées voir l'oracle, Emma et elle avaient espéré avoir une réponse plus ou moins précise sur le sexe de l'enfant à venir. Comme d'habitude, l'oracle ne leur avait pas annoncé ce qu'elles voulaient savoir, mais avait jeté son énigme dans une réponse floue, qui au lieu de les rassurer les avaient plongés dans une grande angoisse.

« Les enfants que tu porteras naitront dans le sang et les larmes, ma reine. »

Regina avait eu beau insister, elle n'aurait pas le droit à une autre prophétie avant que l'enfant n'ait eu dix ans, si il les atteignait un jour.

Et pour cela, l'enfant devait être une fille.

Si c'était le cas, elle était assurée de naître à Themyscira et ainsi d'être immortelle, comme le voulait la tradition.

Si c'était un garçon, son sort était scellé d'avance. L'immortalité offerte par Arès aux descendantes de Penthesilea n'honorait pas les mâles, et il en serait dépourvu. Il serait abandonné là, nu et sans défense, jeté à même le champ de bataille, aussitôt oublié par sa mère et ses comparses et promis à une mort rapide dans l'ignorance de tous. Tel était le destin des enfants mâles à naître d'une mère Amazones, beaucoup ne le savaient que trop bien.

Sa mère elle-même avait eu un garçon, à qui elle n'avait jamais pu donner un prénom. Son fils était mort étranglé avant d'avoir pu prendre ses premières respirations, dès qu'on se soit rendu compte qu'il était né du mauvais sexe. Regina avait vingt ans, et avait juré que ça ne lui arriverait jamais.

Maintenant qu'elle était reine, elle aurait une fille, elle en avait supplié Arès son aïeul et Hera, Demeter, et toutes les déesses qui étaient des mères.

Son enfant serait une fille, elle n'en avait pas le choix. De son genre dépendrait sa survie.

« Regina, c'est le moment. Encore un dernier moment de souffrance, et tout vaudra le coup amplement, je te l'assure. »

Abigail lui jeta un dernier regard confiant, et disparut sous le drap dont elle avait pudiquement couvert les jambes de sa reine pour accomplir son travail de sage-femme improvisée.

Le cri d'agonie que poussa Regina au moment de la délivrance résonna en écho dans tout le palais vide, et se fit entendre jusqu'au champ de bataille, revigorant d'avantage les Amazones dans leur combat.

« Le bébé est là ! »

Abigail brandit enfin dans ses bras un bébé couvert de sang, dont les premiers vagissements emplirent le palais vide à l'image de la femme qui venait de la mettre au monde. Dans un dernier effort épuisé, Regina ignora la douleur qui lui dévorait les flancs pour se redresser vers Abigail dans l'espoir d'entendre la seule qu'elle voulait savoir.

« C'est une fille, Regina ! C'est une fille ! »

La reine se laissa retomber sur le dos, soulagée, et accepta le bébé que lui tendait Abigail pour la poser sur sa poitrine, et l'admirer pleinement.

Abigail venait de finir les soins nécessaires à la mère et au bébé quand la jeune Néphélé, une servante du palais d'à peine douze ans, entra au courant dans la salle, prenant à peine le temps de saluer correctement la reine pour se précipiter à ses côtés.

« Ma reine ! Ma reine ! »

Néphélé parlait si vite qu'elle dut prendre une grande inspiration forcée pour se calmer un instant, et délivrer correctement son message.

« Nous avons repoussé l'ennemi jusqu'à leurs navires ma reine ! Les Bithyniens battent en retraite ! Leur flotte est en train de prendre le départ ! »

Regina aurait pu en pleurer de joie.

« Emma ? Et Thalestris ? » respira la reine entre deux respirations entrecoupées

« La Générale est aux premières lignes sur le front, c'est elle qui va négocier les conditions de sa défaite avec le roi Nicomède ! Et notre reine consort s'occupe des blessées. Nous n'avons pas essuyé trop de pertes lourdes ma reine, le pire est évité ! »

La jeune Néphélé sembla s'apercevoir seulement maintenant du tout jeune fardeau que sa reine portait contre elle, et abaissa respectueusement la tête. Une question cependant lui brûlait les lèvres.

« Comment s'appelle la princesse, ma reine ? »

Regina baissa les yeux vers sa fille, encore couverte de sang, qui exprimait son mécontentement à pleins poumons.

Elle était à peine née que l'enfant était déjà une guerrière, dont la naissance elle en était sûre venait de sauver son peuple. Elle serait la protectrice des femmes d'ici, des amazones de Themyscira.

« Son nom sera Alexandra. »