Merci à Avanture et à hpemilia pour vos reviews sur le chapitre précédent :)

Merci également à tout ceux qui s'abonnent ou m'ajoutent en favoris !

Vous allez voir que ce chapitre est très riche en révélation sur le passé d'Hermione, j'espère que cela vous plaira ;)

Bonne lecture !

Réponse à Aventure : tu vas en savoir plus sur le pourquoi de l'indisposition d'Hermione dans ce chapitre ;)


Chapitre 5 - Novembre et Décembre

« J'ai décidé d'être heureux parce que c'est bon pour la santé. »
Voltaire


Hermione

J'ouvre péniblement les yeux et jette un coup d'œil à la pièce autour de moi. Le soleil, déjà haut à l'extérieur, éclaire les murs blancs et le sol de carrelage. Ce n'est pas mon appartement. Rapidement, les souvenirs me reviennent. La grosse charge de travail à l'approche de l'échéance de mes mémoires, les repas sautés par manque de temps, ma santé déjà fragile qui vacille un peu plus, ... Et le malaise.

Je me suis effondrée dans le bureau du Professeur Dunn, en pleine faculté magique. Parfait.

Avant que la honte ne me submerge complètement, je me redresse dans le lit et attrape le verre d'eau sur la desserte qui se trouve à ma droite. Alors que je le termine, une infirmière entre dans la pièce et m'adresse un sourire rayonnant :

« Vous êtes réveillée ! Parfait ! Je m'appelle Milly et c'est moi qui vais m'occuper de vous pendant quelques jours, Madame. Comment allez-vous ? Vertiges, nausées, migraines ? »

L'infirmière semble être une véritable pile électrique et je me demande un instant combien de café elle boit par jour. Puis, je fais rapidement le point sur mon corps.

« J'ai un petit peu mal à la tête, mais pas de douleurs ailleurs. Sauf au genou gauche.

Vous vous êtes cognée à un meuble en tombant d'après ce qu'on m'a dit. Bon, tout ce qu'il vous faut, c'est du repos. Vu vos antécédents médicaux, je vais faire venir le Médicomage pour qu'il vous examine.

Cela ne sera pas nécessaire, je vais déjà beaucoup mieux. Il me reste du travail et...

Les décisions médicales ne sont pas discutable, Madame. Et le repos est non-négociable. »

Avec un sourire aimable malgré son ton tranchant, l'infirmière quitte la pièce aussi vite qu'elle y est entrée. Je fixe un instant la porte clause avant de me résoudre : je n'ai d'autres choix que d'accepter. Plus vite ils seront convaincus que je vais bien, plus vite je sortirai d'ici.

Peu de temps après le passage de l'infirmière, un Médicomage entre dans la chambre. Je ne l'ai jamais vu mais il m'offre à son tour un sourire chaleureux et s'approche du bout du lit où se trouve mon dossier médical. Il le parcourt rapidement des yeux et me demande :

« A quand remonte l'accouchement ? »

Ma gorge se serre immédiatement et ma vue se brouille. Jamais aucun de mes proches n'a reparlé de cet évènement avec moi. Je le leur ai fait promettre. La voix tremblante, je répond cependant :

« Janvier 2003. Le 10. »

Une larme roule silencieusement sur ma joue. Le 10 janvier 2003. Cette date restera à jamais gravé au fer rouge dans mon cœur. Bien plus douloureuse que les mots que Bellatrix Lestrange a gravé dans mon bras. Bien plus douloureuse que la mort de mes parents. Bien plus douloureuse que mon divorce avec lui.

« Je vois qu'il y a eu de nombreuses complications. Je vais faire une prise de sang, pour être sur que ce n'est pas une rechute de votre système immunitaire. »

J'hoche la tête, déconnectée, tandis que les mots du Médicomage tournent en boucle dans mon esprit. Nombreuses complications. Nombreuses complications. Nombreuses complications.

Je sens à peine sa baguette se poser sur mon bras tandis qu'il me prélève un petit échantillon de sang.

« Je vous tiens au courant des résultats dès que possible. »

Je ne l'entend pas, plongée à nouveau dans des souvenirs que j'aurais préféré occulter.


La journée passe sans que je ne m'en rende compte. Je ne reprends pied avec mon environnement que lorsque je vois une tornade rouge me prendre dans ses bras. Les cheveux longs de Ginny me chatouille les bras tandis qu'elle me serre contre elle.

« J'ai eu si peur lorsque j'ai reçu le hiboux du médecin ! Comment vas-tu ? »

Elle se recule alors et m'observe sous toutes les coutures, un air profondément inquiet vissé sur le visage. Harry apparaît alors derrière elle et me sourit tendrement. Il s'approche à son tour du lit et me prend la main pour y dessiner des petits cercles avec son pouce.

Je suis immédiatement soulagée. Quand Harry et Ginny sont prêt de moi, j'ai la sensation puérile que rien de mal ne peut plus m'arriver. Je sais pertinemment qu'ils seront toujours là.

« Je vais bien, c'est juste du surmenage. Le Médicomage m'a tout de même fait une prise de sang des fois que cela soit lié à ma septicémie, mais il y a peu de chances. »

L'air inquiet qui prend place sur le visage de mes amis me fait me crisper à mon tour. Mais cette inquiétude disparaît aussi vite qu'elle est apparut quand Harry dit :

« Il y a peu de chance que cela soit lié. Cela va faire deux ans.

Oui. Les résultats ne devraient pas tarder maintenant. »

A peine ai-je terminé ma phrase que le Médicomage entre dans la chambre. Il salue Harry et Ginny et me tend une feuille de résultat.

« C'est négatif, Madame Granger. Il s'agit bien d'un surmenage. Je prescris trois jours de repos total, puis vous pourrez sortir.

Très bien, merci. »

Le Médicomage m'offre un simple signe de tête et sort le pièce aussi vite qu'il y est entré.

La conversation devient plus banale maintenant que nous sommes tous les trois rassurés sur mon état de santé. Un simple surmenage, pas une rechute. Tout va bien. C'est ce que je me répète en boucle. Tandis que Harry nous raconte avec entrain sa dernière mission en tant qu'Auror, Ginny caresse doucement son ventre rond sous mon regard attendri.

Elle entre dans son huitième mois de grossesse et je sais que bientôt je vais enfin avoir l'occasion de faire la connaissance de mon petit neveu. J'approche ma main du ventre de Ginny pour le caresser doucement à mon tour tandis qu'elle me sourit, radieuse.

Soudain, sous ma main, je sens un petit coup signe que le bébé s'agite dans le ventre de sa mère. Ginny grimace et dit d'une voix amusée :

Bien joué, James, ça c'était ma rate.

J'éclate de rire, tout comme Harry, tandis que Ginny caresse un peu plus son ventre arrondi. Nous reprenons alors notre discussion, tout en s'amusant des grimaces de Ginny qui ponctue ses phrases, signe que le bébé est bien en forme et qu'il prend le ventre de sa mère pour sa nouvelle salle de jeu.

Je pense qu'il va vous donner du fil à retorde !

Je pense aussi, soupire Ginny, déjà épuisée d'avance.

Pas du tout, ce sera un bébé adorable et très sage, vous verrez, dit Harry, tentant apparemment de se convaincre lui-même.

Ginny lève les yeux au ciel puis ils finissent pas prendre congé, me laissant seule dans ma chambre blanche et aseptisée. Cette petite visite m'a remonté le moral plus que je ne l'aurais cru.

Apaisée, je me laisse aller contre les oreillers moelleux dans mon dos et je tente d'appliquer au mieux les consignes du médecin : me reposer et me détendre. J'écarte de mes pensées les réflexions sur mes mémoires, je fais taire mes angoisses et je ferme les yeux pour prendre un peu de repos et recharger les batteries.


Cela fait deux jours que je suis à l'hôpital et je frôle la crise de nerfs. Me reposer durant la première journée avait été agréable, j'avais commencé à tourner en rond dès le matin-même. Après près de quarante-huit heures sans autres consignes que celle de me reposer je suis au bord de l'implosion.

L'ennui m'assaille de tous les côtés, cet ennuie que je fuis depuis plus d'un an maintenant. Cet ennuie qui m'effraye encore plus que tout ce que j'ai vécu dans ma vie.

Tremblotante, j'attrape le verre d'eau qui se trouve à ma droite et le vide d'une seule traite. Je dois tout faire pour chasser mes vieux démons de mon esprit.

Alors, j'attrape un livre et je me plonge avec application dans la lecture. C'est un roman de gare moldu. Le style est catastrophique et l'histoire d'une incroyable banalité : une femme retrouve un homme de son passé et tombe follement amoureuse de lui alors qu'il est marié.

Petit à petit, la nullité affligeante du roman me permet néanmoins de faire passer la crise d'angoisse qui menaçait de m'ensevelir et je peux retrouver une certaine sérénité. Plus qu'une nuit dans cette chambre trop blanche et je pourrais retrouver mon petit appartement miteux et poussiéreux. Vivement.


Pour la première fois depuis trois jours, je ne suis pas vêtue d'une blouse d'hôpital mais de mes propres habits. Un simple jean clair et un pull beige pelucheux que je possède depuis près de 10 ans, ce qui explique son état désastreux. Mes cheveux, qui ont connus des jours meilleurs, sont attachés dans un semblant de chignon dont s'échappe des mèches crépues.

J'adore mes origines métisses et mes cheveux crépues. Réellement. J'ai toujours été très fière de ma peau brune et de mes héritages ethniques. En revanche, après trois jours de shampoing de l'hôpital et d'absence de soin, je rêve de la chevelure soyeuse de Ginny ou de Luna.

Je rassemble rapidement le peu d'affaires qui sont à moi dans la pièce : quelques livres, ma brosse à dent, une paire de chaussette et un bracelet que Harry m'a offert à Noël dernier. Il est l'heure de rentrer chez moi.

J'ai promis au Médicomage que je ne reprendrai le travail que le lendemain, y compris la rédaction de mes mémoires. En fait, je n'ai pas tellement eu le choix car il refusait de me laisser partir dans le cas contraire.

Il ne me reste donc qu'à trouver quoi faire pour occuper le reste de ma journée. La réponse semble venir à moi sous la forme de quelques coups hésitants frappés à la porte de ma chambre d'hôpital. Une visite ? Je vérifie rapidement que je porte bien un pantalon (sait-on jamais) avant de dire énergiquement :

« Entrez ! »

La porte s'ouvre avec hésitation et la carrure de Charlie Weasley se dessine dans la porte. Il semble gêné d'être ici et passe une main mal assurée dans ses cheveux mi-long, aujourd'hui détachés. Il me sourit d'un air timide et me dit :

« Bonjour Hermione, j'espère que je ne te dérange pas... »

Sa présence, bien que très surprenante à mes yeux, n'en est pas moins plaisante. La gêne que je ressentais en sa présence en septembre s'est peu à peu dissipée au fur et à mesure où j'arrivais à le dissocier de l'image de son frère. Ils sont bien deux personnes distinctes.

Maintenant que ce fait est ancré dans mon esprit, la présence de Charlie ne m'est plus aussi inconfortable qu'en septembre. Au contraire, même ! J'apprécie toujours de discuter avec lui. Il a beaucoup d'esprit et une vision très terre-à-terre du Monde, qui se rapproche de la mienne.

Voyant qu'il attend une réponse, je lui adresse un sourire rassurant tout en entassant mes affaires dans mon petit sac :

« Au contraire, cela me fait plaisir de te voir. Comment vas-tu ? »

Il sourit, franchement amusé cette fois-ci, et me demande malicieusement :

« Ce ne serait pas à moi de te poser cette question, normalement ?

Si, surement. Mais comme tu le vois, je suis sur le point de quitter les lieux, c'est donc que cela va beaucoup mieux. »

Il hoche la tête pour confirmer mes propos, tandis que le silence revient entre nous le temps que je boucle une bonne fois pour toute mes bagages.

« Je devrais te laisser, si tu étais sur le point de partir... »

Je relève alors les yeux et constate que Charlie semble toujours gêné. J'hésite alors un instant avec de lui proposer de m'accompagner déjeuner : qu'est-ce que cette invitation pourrait signifier pour lui, et pour moi ?

Pour moi, simplement convier un collègue que j'apprécie à un déjeuner qui me permettrait de passer le temps en attendant de pouvoir reprendre le travail le lendemain. Je préfère encore passer un déjeuner en compagnie de Charlie que de tourner en rond dans mon appartement pour les seize prochaines heures, et de loin.

Pour lui, une invitation à déjeuner de l'ex-femme de son petit frère. Pourtant, il n'avait jamais semblé me considérer en tant que tel. Il ne m'avait jamais ignoré à Poudlard et avait toujours tout fait pour me mettre à l'aise lorsque je ne l'étais pas.

Décidé, je lui propose d'une voix légère :

« Tu peux m'accompagner si tu veux, j'allais justement déjeuner. »

Même s'il semble surpris, il ne semble pas réticent. C'est en tout cas l'impression que j'ai alors que je lui jette un coup d'œil discret tout en attachant les sangles de mon sac.

« Avec plaisir ! »

Rassurée, je lui offre un grand sourire. Alors que je vais passer mon sac en bandoulière, il s'en saisit d'un geste habile et le passe sur sa propre épaule. Je lève les yeux au ciel, légèrement agacé par cette galanterie soudaine légèrement en contradiction avec mes convictions profondément féministes :

« Je peux le porter toute seule, je ne suis pas en sucre. »

Charlie me jette un regard moqueur, alors qu'il me dépasse d'une bonne tête et qu'il doit avoir trente kilos de muscles en plus que moi.

« Je n'en doute pas. Je te laisserai porter le miens lorsque je sortirai de Saint Mangouste. »

Je lève à nouveau les yeux au ciel mais ne le contredit pas. Pour cette fois. Nous prenons tous les deux la direction de la sortie tandis que je lui explique rapidement ce que je pensais faire de mon après-midi.

« On va passer chez moi que je nourrisse Pantenrond et qu'on pose le sac. Puis on pourra aller dans une petite brasserie de mon quartier pour manger, ils font un super saumon. »

Charlie hoche la tête. Il semble plutôt satisfait du programme, et m'emboîte le pas jusqu'à la zone de transplannage. Contrairement à ce que je pensais, je n'hésite pas une seconde avant de le faire transplanner jusqu'à chez moi. Si j'avais encore quelques doutes quant au fait que je ne le dissociais pas de son frère, ils sont maintenant envolés.

Nous arrivons tous la ruelle qui me sert à transplanner près de mon appartement. Charlie balaye l'endroit des yeux, semblant légèrement surpris par l'insalubrité des lieux.

« Tu habites dans le Londres moldu ?

Oui, je préfère. »

Il en répond rien et me suit en silence, balayant les rues des yeux. Des poubelles s'y entassent entre quelques groupes de punk sans âge. Je salue d'un sourire Johnny, un punk à la crête verte qui deal en bas de mon bâtiment. Il me rend un sourire resplendissant et un clin d'œil complice, tout en disant d'une voix joyeuse :

« Comment va la vie, Miss Hermione ?

Plutôt bien, Johnny. Et toi ?

Toujours bien que je vous vois. »

Je lui adresse un nouveau sourire qu'il me rend avant de se détourner pour effectuer une transaction avec de nouveaux clients. Charlie, qui a assisté à la scène avec un haussement de sourcil circonspect, se retient néanmoins de faire le moindre commentaire.

Nous entrons dans mon immeuble, le hall est jonché de vieux journaux et de bouteilles vides. Tout en les ignorant, comme d'habitude, je me dirige vers ma boîte aux lettres et prélève mon courrier moldu. Puis, enjambant un cadavre de bouteille de Wishky, j'entame l'ascension des six étages qui me séparent de mon appartement.

Charlie me suit, toujours silencieux. Je ne sais pas quelles sont les pensées qui lui traversent l'esprit tandis qu'il voit le lieu où je vis, mais je préfère l'ignorer. Je monte les marches lentement, habituée, et je constate que Charlie me suit, même son souffle se fait légèrement plus court. Ah ! Les sorciers et leur maudite manie de tout faire grâce à la magie... Ils sont vite désemparés lorsqu'on la leur enlève.

Néanmoins prise de pitié lorsque je l'entends soupirer alors que nous passons le quatrième palier, je lui dis :

« J'habite au sixième, sous les toits.

Oh, ok. Je ne pensais pas que... Que tu habitais dans un endroit comme ça. »

Je ne me vexe pas à sa remarque mais j'hausse simplement les épaules tandis que nous passons le cinquième pallier.

« C'est plus pratique.

Pratique pour quoi ?

Être invisible. »

Il ne répond pas. Moi non plus. Nous atteignons le sixième et dernier pallier de l'immeuble. Ronnie, ma voisine transexuelle, est en train de sortir de chez elle. Elle m'offre un immense sourire et me salue joyeusement :

« Bonjour Hermie Jolie, comment vas-tu ma chérie ?

Très bien Ronnie, je te remercie. Et toi ?

Super bien. Je suis passée nourrir Pantenrond hier quand j'ai vu que tu n'avais pas encore relevé ton courrier.

Oh merci ! C'est vraiment adorable.

Fais moi tes délicieux muffins pour me remercier ! »

Elle me glisse cette dernière phrase avec un clin d'oeil tout en s'engouffrant dans l'escalier. Elle évalue rapidement Charlie d'un œil critique puis reporte un regard doux sur moi.

« Fais attention à toi, ma chérie.

Toujours Ronnie, tu me connais. Tu trouveras les muffins chez toi ce soir, tout chaud pour ton retour.

Tu es un amour. »

Elle disparaît en direction du cinquième pallier et j'enfonce enfin mes clés dans ma serrure. Cette dernière grince légèrement mais un coup d'épaule dans la porte me permet de rentrer dans l'appartement sans problème. A peine ai-je passé la porte que Pattenrond vient s'enrouler doucement entre mes mollets en ronronnant.

Charlie entre à son tour et balaye l'endroit d'un regard curieux. Je vis dans un petit appartement moldu composé d'une seule pièce et d'une minuscule salle de bain à l'aspect hétéroclite. J'y ai mélangé plusieurs styles de meubles que j'ai pu chiner à droite te à gauche quand je suis rentrée d'Irlande. L'aspect général fait plutôt fouillis mais je m'y sens bien. Il s'en dégage une sensation de confort et de chaleur qui me plait.

Je désigne le vieux canapé en velours bleu canard à Charlie et lui dit :

« Assied-toi, je n'en ai pas pour longtemps. »

Il ne répond pas et s'y laisse simplement tomber après avoir laissé mon sac dans l'entrée. D'un sortilège, j'envoie mes affaires se ranger dans mon armoire puis je me dirige vers la minuscule salle de bain où se trouve la litière de Pattenrond. J'y lance un simple Récurvite, puis je retourne dans la cuisine.

« Tu t'intègres étonnement bien dans ce paysage et dans ce voisinage. »

Il semble plus amusé que surpris et je lui souris doucement en agitant ma baguette pour lancer les préparatifs des muffins pour Ronnie.

« Quand j'ai quitté l'Ecosse, je n'étais pas en très grande forme. J'ai vendu le cabinet de mes parents pour couvrir mes dettes et il ne me restait pas grand chose. J'ai décidé d'acheter cet appartement mais j'étais très inquiète pour le voisinage. Ronnie m'a immédiatement pris sous son aille et m'a introduite à tout le monde. On ne m'a jamais embêtée après ça. Johnny dissuade les dealer du quartier de s'en prendre à moi, et Ronnie fait le reste. Je pense qu'ils sont devenus plus que des voisins avec le temps. »

Bien que semblant surpris par ma soudaine logorrhée, Charlie ne m'interrompt pas. Ma pâte à muffins fin prête grâce à la magie, je les enfourne dans le mini-four de ma petite cuisine tout en continuant de discuter avec Charlie.

« Tu n'avais pas ta prime de guerre ? Je sais que R... enfin, que certains vivent encore dessus. »

J'apprécie le fait qu'il ne cite pas le nom de son frère, alors je lui réponds en tout honnêteté.

« Je l'ai entièrement reversée pour la reconstruction de Poudlard et pour l'ouverture de la cellule psychologique de Saint-Mangouste spécialisée en traumatisme de guerre, bien avant mon mariage.

Oh, je ne savais pas.

Personne ne l'a sut. »

Je lui souris doucement et il me rend ce sourire. Je poursuis donc :

« Le... Le divorce m'a coûté cher, bien que nous étions d'accord sur la majorité du partage des biens. Engager des avocats pour éviter de faire les gros titres de la presse à scandale sorcière m'a coûté l'équivalent d'un an de salaire. Puis mon exile en Ecosse m'a aussi coûté très cher puisque j'y ai vécu sur mes économie. Quand je suis rentrée, il ne me restait pas grand chose. »

Charlie hoche doucement la tête puis semble un instant incertain, tandis que je remplis la gamelle de Pattenrond de croquettes. Un simple sortilège sur le four me permet de m'assurer que mes muffins ne vont pas brûler, même lorsque nous partirons pour le restaurant.

« Pourquoi es-tu parti en Ecosse ? »

Je me tends immédiatement et il semble sentir le changement qui s'opère chez moi à la simple mention de mon départ pour l'Ecosse. C'est une partie de ma vie que seul quelques uns de mes plus proches amis connaissent, une partie de ma vie que je ne veux pas partager avec lui.

Il se rétracte aussitôt :

« Laisse tomber, ce n'est pas mes affaires. Alors, on y va dans ce super restaurant ? »

Je lui offre un sourire reconnaissant, soulagée qu'il est si habillement changé de sujet de conversation face à mon malaise. J'attrape mon sac à main et lui répond immédiatement :

« Bien sur. En route ! »

Nous quittons l'appartement aussitôt puis nous descendons les dix étages d'un pas plus énergique. Il est toujours plus facile de descendre que de monter. Charlie traverse le hall à mes côtés, puis m'ouvre galamment la porte de l'immeuble. Lorsque je sors, je remarque le regard inquisiteur de Johnny sur Charlie et je souris. Le punk me jette un regard chargé de question et je hausse doucement les épaules. Il lâche immédiatement l'affaire et retourne à ses affaires. Je sais alors que si Charlie m'avait causé le moindre soucis, il n'aurait pas quitté le quartier entier.

Je prends aussitôt la direction du restaurant et Charlie me suit en silence. Il observe les boutiques devant lesquelles nous passons, semblant particulièrement intrigué par les salons de tatouages. Je demande aussitôt :

« Tu es tatoué ?

Oui, mais ce sont des tatouages sorciers. Je peux les faire disparaître à volonté. J'ai toujours été curieux des tatouages moldus. Et toi ?

Non, je n'ai jamais osé sauter le pas. »

Charlie rit doucement en murmurant qu'il nous reconnait bien là, moi et ma raison. Légèrement vexée, je lui rétorque aussitôt :

« Je ne suis pas si raisonnable. Avant la rentrée, je me suis fait percer l'oreille sur un coup de tête. Peut-être que pour nouvel an je vais me faire tatouer les fesses ! »

Charlie éclate littéralement de rire, s'attirant de nombreux regard surpris de la part des passants. Je me renfrogne un peu plus mais décide de ne pas répondre à sa provocation. A la place, je pousse la porte du restaurant et demande une table pour deux tandis qu'il tente toujours de calmer son fou rire.

Lorsque nous nous installons tous les deux à table, il finit par se calmer et me dit :

« Si tu te fais tatouer les fesses pour nouvel an, je me fais un tatouage moldu à coup sûr.

Tiens toi prêt à prendre rendez-vous, Weasley.

Ne me provoque pas, Granger. »

Amusée malgré moi, je lui tire la langue. Nous choisissons rapidement nos plats et passons commande au serveur. Les discussions s'enchaînent plutôt naturellement entre nous et je me surprends à réellement me détendre et à réellement oublier la masse de travail qui m'attend à la maison.

La compagnie de Charlie est agréable. Nous ne tombons pas à court de sujet de conversation malgré l'heure que nous passons devant nos assiettes remplies à ras bord de frites et d'un immense hamburger.

Nous parlons de son travail en Roumanie, de mes études, de Poudlard, du flirt entre deux élèves de sixième années que nous avons tous les deux remarqué, de son FanClub, du miens, de Madame Pince et de Rusard, de la Guerre et des lutins de Cornouailles.

Lorsque je rentre chez moi, en début d'après-midi, après que Charlie ait transplanné dans la petite ruelle, je me sens étonnement détendue et heureuse. Tandis que j'emballe les muffins dans un torchon propre pour les emporter chez Ronnie, je me rend compte de mes pensées.

Je me sens détendue. Et heureuse.

Ce n'est pas arrivé depuis janvier 2003.

Cela fait trois ans.

Depuis Rose.

La panique me submerge immédiatement et, alors que je viens de passer la porte de mon appartement, je sombre dans une crise d'anxiété comme je n'en ai plus connu depuis des mois. Dans un dernier sursaut de lucidité, j'envoie un patronus à Harry.

Après ce qui me semble être des heures de souffrance et d'angoisse, je sens ses deux bras m'entourer alors que nous nous trouvons tous les deux au sol. Il me caresse doucement les cheveux tandis que je tremble et que je pleure, tétanisé par le fait de l'avoir oublié durant autant de temps. La culpabilité me serre le cour.

« Hermione, que s'est-il passé ?

J'ai failli l'oublier. Je... Je n'y ai pas pensé aujourd'hui... Je... Je suis une personne horrible... »

Harry ressert ses bras autour de moi et me murmure des paroles rassurantes à l'oreille. Doucement, il chuchote :

« Cela fait trois ans Hermione... Aller de l'avant ne fait pas de toi une personne horrible... Ne pas y penser ne veut pas dire que tu l'oublies. Elle n'aurait pas souhaité que... »

Je lui coupe immédiatement la parole d'un ton amer :

« Elle ne peut rien souhaité puisqu'elle est morte à peine quelques heures après sa naissance. Elle ne pourra jamais rien souhaité parce que ma bêtise lui a ôté la vie que j'ai mis neuf mois à lui fabriquer. »

Harry ne répond rien. Il sait qu'il ne parviendra jamais à me faire entendre raison. Pas tout de suite du moins.

Lentement, je me calme tout en identifiant ce qui a conduit à cette situation : Charlie. Aussitôt, je me promets à moi-même de me méfier de lui. Je ne peux plus me laisser aller comme ça. Pas si je risque de l'oublier. C'est hors de question.


Trois semaines sont passées depuis ma sortie de l'hôpital et cette sombre journée riche en émotion. Bien que mes rapports avec Charlie restent cordiaux, je ne me laisse jamais autant aller que le jour de ma sortie. Je ne peux plus prendre ce risque.

Nous discutons parfois tous les deux, au détour d'un couloir, lors du dîner ou même à la bibliothèque, mais jamais plus d'une dizaine de minutes.

C'est cette constatation qui me saute à l'esprit alors que je rentre chez moi après avoir déposé le premier jet de mes deux mémoires.

Avec un sourire, je m'allonge dans mon lit et j'attrape le minuscule chausson caché sous me oreiller. Je constate que le regarder est moins douloureux. Je caresse la laine d'une main douce et je murmure :

« Les choses avancent Rose. Bientôt, je vais y arriver. »

Je ferme les yeux et je laisse le sommeil m'emporter vers les quelques heures de souvenirs que je possède de ma petite fille. Même si ce sont des souvenirs douloureux, il ne me reste plus que ça.