« Espèce d'enflure ! »

Le poing tremblant du guerrier doré s'écrasa contre l'écorce d'un arbre. Entre le tronc et son large corps, Sieg Jäger l'observait d'un air implacable. Le calme apparent du plus vieux renforçait sa sourde colère. Son cœur semblait battre dans sa gorge, et il pouvait entendre ses veines palpiter dans ses oreilles. Tout son corps tremblait de retenue, tandis que ses dents semblaient aussi serrées que son myocarde.

« Berthold est mort, Reiner. Mets tes émotions de côté et prépare-toi à rentrer.

- Eren nous a délibérément menti ! Et toi aussi !

- Reiner, calme-toi, exigea Annie en posant sa main sur son épaule. Ne fais pas quelque chose que tu pourrais regretter. Garde tes envies meurtrières pour ceux qui l'ont bouffé. »

Un grognement de frustration passa la barrière de ses lèvres. Il frappa une fois encore le conifère, faisant cligner des yeux son supérieur face à son geste vigoureux. Puis, Braun s'éloigna et vint s'asseoir entre Peak et Porco, qui l'observaient de manière silencieuse.

« Alors, pourquoi l'avoir laissé partir ? De quoi avez-vous parlé ? Demanda la guerrière à la chevelure de corbeau.

- Il m'a donné des informations sur leurs pertes. Ils partiront dans deux jours. Nous avons échoué à éliminer le caporal Levi, Peak, mais il est suffisamment en mauvais état pour ne pas pouvoir bouger avant un petit moment. Leur effectif est inférieur à dix. Mais je pense qu'il est plus sage de rentrer, à présent. Nous devons revoir notre stratégie, maintenant qu'ils connaissent la vérité sur notre monde.

- Je ne comprends pas, l'interrompit le roux. Pourquoi il nous donne ces informations ? Qu'est-ce que ça lui apporte ?

- C'est peut-être un piège, murmura Peak.

- Nous avons trouvé un terrain d'entente. »

Le barbu avait peur que la sagacité de la brune ne pose un problème. Ils avaient parlé pendant des heures, seuls dans la forêt, de Mahr et de leurs désirs. Eren savait que son frère possédait du sang royal- par le biais du récit de leur père. Il avait semblé totalement d'accord avec les désirs de son aîné... Les Eldiens, par leur passé sombre et sanguinolent, avaient engendré massacres et haine constante. La seule solution qu'ils avaient, transmise par le mentor du guerrier, était simple et indolore. Ils utiliseraient le pouvoir de l'originel, ensemble.

Eren lui avait fait de telles confidences, sur ses amis d'enfance. Ce dernier refusait qu'ils ne souffrent davantage. Alors leur plan était la meilleure chose à faire, pour protéger Armin et Mikasa. Le blond s'était pris d'affection pour ce frère qui partageait ses mêmes ambitions. Il avait même été surpris qu'il soit le premier à parler de cette solution, si ouvertement. Ils partageaient davantage que le même père : leurs espoirs s'entremêlaient en une mélodie dissonante.

Mais les guerriers ne devaient pas savoir. Il avait dissimulé son statut pendant des années, et ils n'avaient pas le même recul que l'aîné Jäger... Ils voudraient l'en empêcher. Sieg viendrait en bateau, chaque nuit de pleine lune, pour réaliser leur plan et se tenir au courant de leurs avancées. Ils voulaient réaliser vite leur rêve commun. Ainsi était le sombre fardeau du capitaine et de son frère à l'allure si mature.

Parce qu'ils n'avaient jamais choisi de naître dans ce monde.

« Reposez-vous, et soyez prêts à lever le camp. »

Le haut gradé s'éloigna du petit groupe, dont la frustration et la tristesse semblaient être les compagnons d'infortune. Néanmoins, Peak se mit à quatre pattes et commença à marcher en direction du capitaine. Sa quadrupédie titanesque était trop accommodante ; et parfois, elle se sentait plus à l'aise dans ces mouvements animaux que sur ses deux jambes.

« Sieg, cela aurait été plus simple de juste repartir à Revelio avec Eren... Pourquoi ne pas l'avoir emmené, de gré ou de force ? Qu'est-ce que tu as en tête ?

- Eren peut nous être utile. Je peux le manipuler de manière à lui faire changer de camp...

- Je te demande ce que toi, tu as vraiment en tête, et je sais que ça n'a rien à voir avec les désirs des Mahr. Notre mission était de récupérer l'originel, et tu viens de le laisser partir sans même essayer de le ramener. »

Le blond s'accroupit en face de la guerrière au regard perçant. Un petit sourire illuminait son visage tiré par les regrets, et sa large main vint ébouriffer la chevelure de jais de la jeune femme.

« Aucun élan fraternel n'est apparu en moi, si c'est cela qui t'inquiète.

- Ce n'est pas ce que tu as dit, quand on a laissé Berthold derrière nous. Tu veux le sauver, et tu te projettes sur lui vis-à-vis de ton père...

- Ne m'analyse pas.

- Je suis bien obligée, vu que tu nous caches des choses...

- Peak. Repose-toi. Je veux juste faire en sorte de ne plus jamais devoir nous battre ici. D'accord ? »

La combattante détailla son regard azur pendant quelques secondes, puis soupira. Elle n'obtiendrait rien de son capitaine, malgré les mystères qui dansaient dans son aura... Pourtant, elle sentait que quelque chose clochait. Si seulement elle savait ce qu'ils s'étaient dit... La brune aurait dû écouter Porco, qui l'avait presque soudoyée pour aller les écouter discrètement. De plus, la guerrière ignorait les véritables desseins d'Eren... Elle était certaine qu'il cherchait à les piéger. Mais dans quel but ? Sieg le sous-estimait trop.

L'obscurité de la nuit ne suffisait pas à la plonger dans un sommeil réparateur. Ses onyx noires détaillaient la large silhouette de Reiner. Dos contre l'herbe humide, il fixait les étoiles d'un air vide. Peak savait que le guerrier doré arriverait à contenir ses émotions pour survivre... Mais elle avait peur qu'il ne craque. Sans Berthold, elle ne le reconnaissait plus. Le ronflement de Galliard la fit sourire. Annie, comme à son habitude, dormait paisiblement, et ses cheveux commençaient déjà à s'emmêler en des formes ridicules.

Il ne manquait que les positions étranges de Hoover dans son sommeil pour que le tableau soit complet, et cette absence lui tordit le cœur. La jeune femme murmura ses souhaits au tombeau d'étoiles qui semblait les recouvrir, et les astres tapissèrent ses songes de météores sémillants.


Lorsque Levi ouvrit les yeux, l'aube n'avait pas encore teinté le ciel de lumières bigarrées. Ses plaies brûlaient moins que la veille, mais le militaire sentait qu'il ne devait pas forcer dessus, au risque de les rouvrir. Il se redressa à la manière d'un mourant : de manière saccadée, tendue et cauteleuse. Les autres soldats dansaient encore avec leurs rêves, et les notes biscornues de leur sommeil jouaient à faire saigner ses oreilles. Il aperçut Armin, recroquevillé sur lui-même, à quelques mètres de Jean qui ronflait bruyamment. Connie utilisait les cuisses de Braus comme d'un oreiller, et le caporal aperçut miss-patates le frapper dans son sommeil, en bougeant l'un de ses bras. Néanmoins, la personne qu'il cherchait dans cette foule léthargique semblait être aussi fantomatique que les clochers détruits qui surplombaient la brume.

Où était donc cette foutue morveuse ?

Le haut gradé ne voyait aucun type faire les tours de garde pourtant ordonnés la veille, et l'angoisse vint petit à petit souffler d'amusement au sein de ses tympans. N'étaient-ils pas foutus de se réveiller les uns les autres pour assurer une surveillance ? Bordel, ils étaient encore en territoire ennemi. Les autres connards pouvaient revenir discrètement les achever... Il grogna à la fois de douleur et de colère, et lorsqu'il tourna la tête vers l'arrière de son champ de vision, il aperçut une silhouette courir sur le mur.

Levi reconnaîtrait ses foulées entre mille. Mikasa était-elle en danger ? C'était peut-être son tour de garde... Était-ce juste une idiote qui faisait son footing ou avait-elle une bonne raison de courir ? Rapidement, son corps longiligne arrêta son élan effréné. Sa voix fluctuait entre souffle saccadé et notes suraiguës, teintées d'une inquiétude à peine camouflée.

« Eren n'est pas là ! Je l'ai cherché partout... Je ne sais pas quand il est parti, mais quand Connie m'a réveillée pour la garde, il n'était pas là...

- Wow, calme-toi Mikasa... Calme-toi. »

La jeune femme ne répondit pas, afin de reprendre correctement le souffle qui lui manquait tant. Les yeux onyx de son aîné vinrent analyser son environnement, et il constata que la brune avait raison. Jäger manquait à l'appel. Un bruit sec s'échappa d'entre ses lèvres, les pinçant de manière vindicative.

« Peut-être qu'ils sont revenus et qu'ils l'ont forcés à le suivre... La jeune femme prit sa tête entre ses mains pendant ses affabulations. Ou alors il les a rattrapés pour les vaincre seul, pour ne pas nous mettre en danger... Ou il s'est perdu ?

- Vous avez grandi ici ... Cela m'étonnerait qu'il se soit perdu.

- Mais il faut bien une explication ! Fit-elle dans un élan de voix désespéré.

- On va le trouver. Je suis sûr que- »

L'enfant des bas-fonds fut interrompu par le bruit des grappins associé au chant étrange du gaz nécessaire à une propulsion. À quelques mètres d'eux, une silhouette encapuchonnée vint se poser sur l'édifice centenaire. Le vent dévoila le visage éreinté du cadet Jäger, qui sembla agacé à la vue des deux soldats les plus forts de l'humanité. Sans plus attendre, Mikasa reprit ses foulées vers son frère- délaissant ainsi son amour blessé. Son cœur vint se pincer douloureusement dans sa poitrine, lorsque sa silhouette s'éloigna vers cet homme. Pourtant, il était certain de ses sentiments... Mais se sentir laissé à l'arrière, juste pour cet idiot... Cela faisait mal, et cette souffrance imbécile le frustrait davantage.

« Eren ! Où étais-tu passé ?!

- Je me changeais juste les idées. Je suis désolé de t'avoir inquiétée.

- Bordel, préviens la personne qui fait les gardes lorsque tu pars... On l'a appris à la brigade. J'ai failli réveiller tout le monde pour partir à ta recherche...

- J'ai juste oublié de le faire ! C'est bon, je ne suis pas mort !

- Tu aurais pu ! J'ai imaginé le pire !

- Hé, il y a des gens qui essaient de dormir ! Grogna Floch en se tournant dos aux deux soldats.

- Ce n'est plus la peine, Foster, l'interrompit la cheffe d'escouade Zoe. Je pense que tout le monde est réveillé. Levons le camp. »

Plusieurs grognements vinrent interrompre le silence sempiternel de la nuit. Certains s'étirèrent, d'autres tentèrent de rester quelques secondes de plus au sein de leur sac de couchage. Le soldat au crâne rasé vint secouer l'épaule de sa meilleure amie, dont le sommeil semblait traduire des désirs de viande bien enfouis.

« Hey, ma patate, si tu ne te réveilles pas tu ne pourras plus jamais manger de steaks...

- Oh putain non... C'est bon, je me lève... »

La voix endormie de la blessée fit rire doucement son camarade. Dans le cas d'une contre-offensive, ou d'une rencontre fortuite avec des consommateurs à temps partiel de chair humaine, ils avaient rechargé leurs bonbonnes de gaz avec celui des défunts, pour la plupart inutilisé. Lorsque les derniers survivants eurent levé leur camp, Hanji posa ses bras sur l'une de charrettes dont le contenu avait été inutilisé. Sa tête s'effondra contre sa peau suintante.

« Dire qu'on n'a pas utilisé mes petits bébés...

- C'était mieux si on ne voulait pas détruire la ville, rouspéta Levi en se hissant sur un chariot à l'aide de ses bras.

- Mais je les avais préparés exprès ! »

L'aube teintait l'horizon de promesses rougeoyantes, qui semblaient déchirées par les nuages d'une blancheur candide. Les derniers chevaux finissaient de brouter l'herbe aux alentours. Derrière le mur, les cendres des cadavres sanguinolents propageaient une odeur infâme de chair brûlée. Levi plongea dans ce souvenir encore flamboyant du corps de son ami, qui fondait sous les flammes impavides. Il espéra, au fond de lui, qu'il avait réussi à trouver les réponses à ses éternelles interrogations, dans ce ciel immense.

Le regard de Jean se perdit sur le champ d'escarbilles qui camouflait l'herbe encore sanguinolente. Dire qu'il aurait dû faire partie de cette masse impersonnelle de morts déplorables... Un frisson de culpabilité secoua sa colonne vertébrale. Pourquoi lui, et pas les autres ? Dire qu'il aurait fini comme Marco...

La main d'Eren vint se poser sur son épaule, ce qui le fit sursauter. Les deux hommes s'observèrent en un soutien silencieux, et le détenteur du titan colossal se déroba sous la poigne de son semblable, rejetant la pitié qu'il arborait. Il était un survivant. Mais à quel prix ? Kirschtein ne se sentait pas vraiment légitime face à cette deuxième chance... Le jeune homme se fustigea. Il devait se reprendre. Se lamenter n'améliorerait pas sa position... Il devait faire avec sa malédiction, à présent.

S'il ne pouvait plus réaliser son rêve d'une famille paisible, aux côtés d'une certaine femme aux cheveux de jais au sein de la capitale, il ferait de son mieux pour permettre à d'autres de vivre cette utopie. Il ressentit, comme un souvenir enfoui, tout son corps s'embraser d'un coup, et Jean eut l'impression que sa peau se détachait de lui-même.

Mikasa attela Levi et Sasha sur le seul chariot survivant aux météores, entre des bombes, des restes de fumigènes, et des rations de combat. Le brun argumentait sur ses capacités à poser, seul, son cul sur ce maudit bout de bois, mais la jeune femme ignorait ses râles de fierté avec l'application d'une déesse sourde aux prières. Lorsque l'aube trancha l'éternelle obscurité de la nuit placide, les chevaux se mirent à trottiner vers l'humanité que les soldats avaient laissé en retrait. Leur course victorieuse fut bercée par le vent du Nord, Borée, et la brise glaciale porta jusqu'à une statue silencieuse les exploits du bataillon d'exploration.

Malgré l'allégresse tacite d'une gloire mise à genoux, quelqu'un ne se réjouissait pas. Épuisée, l'enfant se laissa tomber dans le sable des espoirs sempiternels, et Borée lui conta les conséquences d'une bataille erratique. Le dernier souffle scella ses efforts surhumains, et elle s'allongea contre les plaines sableuses.

Elle était passée à deux doigts de la catastrophe. Dans la tempête d'étoiles derrière elle, les effluves d'une destinée abandonnée tourbillonnaient avec le spectre des possibles. Des scènes apocalyptiques se jouaient dans l'ouragan, dans lesquelles ses espoirs étaient écrasés par la précipitation. Quelqu'un avait fait tout son possible pour retarder l'échéance, et le sursis qu'elle avait obtenu était la seule lueur qui teintait ses ténèbres...

Quelqu'un avait attendu si longtemps. Elle pouvait attendre encore deux années. Encore un peu, et elle n'aurait plus à observer silencieusement ce monde se tordre de douleur, dans le sillage de son existence.


Les oiseaux chantaient avec engouement leurs sérénades alliciantes. L'environnement avait connu transformations et métamorphoses, si bien que certains lapins, en gambadant entre les forêts, croyaient s'être perdus entre rêve et réalité. Pourtant, d'autres êtres vivants admiraient les changements de ces labyrinthes sylvestres qui avaient recueilli hurlements et sanglots, et oscillaient entre sourires à demi-mots et rires à demi-morts.

Les plaines étaient à présent éventrées par des rails, tiraillées par des routes, écartelées par les activités humaines. La sueur et les courbatures rythmaient la vie des anciens combattants. Zéphyr, transportant la brise printanière au-delà de l'odeur maritime, vint rafraîchir les travailleurs fatigués.

« Armin, passe-moi le marteau, l'intima Eren. »

Les mèches mi-longues du jeune homme tombaient devant ses yeux. Le blond, qui avait les cheveux plus courts qu'à son habitude, lui passa l'instrument alors que ses yeux se perdaient sur le torse dénudé d'un certain soldat. Kirschtein transportait des planches de bois sur ses épaules halées, à côté d'une mangeuse de patates qui transportait des seaux.

Un dernier coup de marteau, et l'infrastructure fut achevée sous les efforts des jeunes ouvriers. Connie s'allongea dans l'herbe fraîche, un long soupir franchissant ses lèvres pincées. Mikasa, reculant pour admirer leur œuvre commune, faillit l'écraser sous ses lourdes foulées- et le soldat roula dans la terre en rouspétant.

« Hey, Mikasa, fais attention où tu marches !

- Oh, pardon Connie. Je t'imaginais plus grand que ça.

- Ton humour n'a toujours pas évolué depuis tout ce temps, gamine ? L'interrompit Levi, derrière elle.

- Vous sentiriez-vous visé, caporal-chef ? »

L'aube d'un sourire passa sur les lèvres de l'asiatique, et elle ricana mentalement quand elle vit son supérieur hiérarchique lever les yeux vers le ciel. Leur joute verbale fut avortée par l'enthousiasme de la 14e commandante du bataillon d'exploration. Le visage satisfait d'Hanji était barré d'un bandeau noir, qui lui offrait des traits beaucoup plus sérieux qu'ils ne l'étaient vraiment.

« Bon travail, les gars ! Nous allons pouvoir renforcer nos relations commerciales, et aussi accélérer tous les transports liés à la logistique nationale ! Bien joué !

- J'espère qu'on aura des permissions plus longues ! Soupira Jean. Il y a tant à faire maintenant, à l'intérieur du mur Sina...

- Demande-le à notre reine ! »

Derrière la militaire, Historia surplombait la scène. Elle n'était pas parée de ses attributs royaux : seulement d'une tenue de travail, ainsi que d'un chignon qui partait dans tous les sens. Elle fit un petit sourire à son ami, et ses iris céruléens croisèrent deux prunelles opalines.

« Vous le méritez.

- Tu es la meilleure, Histo ! S'écria Sasha en levant son poing vers le ciel.

- Hey, si on allait se rafraîchir ? Proposa Armin en pointant du doigts la dune de sable. »

Tous les travailleurs s'observèrent en silence, dans l'attente d'une impulsion collective pour se jeter à l'eau. Ce fut Springer qui se redressa d'un coup, abandonnant sur le sol d'argile son haut trempé de sueur.

« Le dernier dans l'eau paiera le repas de Sasha ! »

Ils s'élancèrent presque tous vers l'étendue d'eau salée qu'ils surplombaient. Dans leur course, certains soldats se débarrassaient de leurs bas à la hâte, et tombaient tête la première sur la plage. D'autres plongeaient dans les vagues la tête la première, avalant au passage la houle effrénée qui les ramenait sur le rivage. De son côté, la souveraine fixait ses pieds s'enfoncer dans les dunes humides, et l'océan venait caresser ses chevilles à la manière d'une amante du passé.

Les deux Ackerman observaient, plus haut, leurs camarades qui s'éclaboussaient en grimaçant ; et c'était pour apprécier un vrai sourire qu'ils avançaient tous avec ces masques sur leurs visages. Mikasa glissa sa main sur la hanche de Levi, et rapprocha son corps plus petit contre le sien. Leurs deux regards s'accrochèrent, et la jeune femme fit exprès de ne pas baisser la tête vers lui, de manière à le surplomber.

« Tu me nargues encore avec ta taille, là ?

- Pas du tout, caporal-chef. La jeune femme appuya sur son statut avec l'aube d'un sourire sur ses lèvres.

- Je vais te jeter à l'eau.

- Tu n'auras même pas pied. »

Quelques ricanements, similaires à des croassements de corbeau, furent emportés par les vents marins. L'homme aux cheveux de jais passa sa main dans les cheveux de la soldate, amusée par sa témérité atavique. Puis, Levi se mit sur la pointe des pieds, collant sa bouche contre l'oreille de la militaire. Ses murmures, calmes et sarcastiques, firent frissonner l'asiatique quand ils caressèrent avec douceur sa peau.

« Je m'accrocherai à toi jusqu'à ce que tu plonges avec moi.

- Alors, qu'est-ce que tu attends pour te jeter à l'eau ? Aurais-tu peur de te noyer ?

- J'ai jamais eu confiance en cette merde.

- La dernière fois, personne n'a été malade.

- Coup de chance.

- Allez idiot, viens ! »

La combattante commença à le tirer vers les vagues, pendant qu'il contestait de manière virulente. Voyant le combat factice des deux bruns, Hanji se précipita derrière le couple le plus fort de l'humanité, et souleva sans difficulté Levi pour le faire décoller du sol. Celui-ci se débattait en insultant les deux femmes, qui, par leur aura diabolique, amusaient les soldats qui les observaient.

« Ça fait du bien de voir Mika se détendre, constata son ami d'enfance avec un sourire sur ses lèvres.

- Oui, c'est vrai. Elle a vraiment changé... »

Eren fixait d'un air neutre sa sœur, dont les jambes s'enfonçaient dans l'eau glacée. Entre les bras de son amante et ceux de son éternelle amie, le caporal-chef proférait des malédictions à en faire pâlir un sourd. La contemplation abyssale vint interloquer le blond, qui posa sa main sur son épaule.

« Eren ? Tout va bien ?

- Oui... Tout va bien. »

Mais le détenteur de l'originel savait. Il savait que ce n'étaient que les derniers moments d'allégresse avant que l'enfer ne se déchaîne sur ce monde ravagé.

Car dans la pénombre, Eren Jäger croisa deux prunelles semblables aux siennes, et il sut que l'univers venait de basculer dans une destinée inéluctable, faite de routes de sang et de barrages d'os.


[Plusieurs annonces, merci de lire jusqu'au bout !]

Déjà, je tenais à remercier Suu-kuni et Nevermind555 : merci pour vos reviews qui m'encouragent toujours dans mon processus d'écriture ! Toutes vos remarques adorables me poussent à me surpasser, alors merci !

Petit message pour vous dire que ce chapitre clôt l'arc de l'anime (jusqu'à la saison 3), ce qui signifie que les prochains chapitres contiendront probablement des spoils sur le manga. Bien sûr, comme vous l'avez vu, je modifie toujours un peu les événements ; mais j'ai peur que vous ne deviniez les événements de l'oeuvre originale à partir de mes créations. Du coup, si vous ne voulez pas être spoilé.e.s ; gardez au chaud cette histoire dans vos listes de lecture et revenez la lire quand vous aurez vu la saison 4 ! (Ou vous pouvez lire le manga aussi, ce sera plus court-)

Autre remarque importante : j'en profite pour mettre en pause cette fanfiction. J'ai tout écrit jusqu'au chapitre 37, mais je ne suis absolument pas satisfaite de la fin et de l'arc que j'ai construit, alors j'ai besoin de plus de temps pour tout mettre en place.

Je vais donc vous demander de mettre dans votre suivre cette histoire, voire de me suivre tout court, pour avoir les notifications lorsque je reprendrai la publication des chapitres. Promis, je compte débloquer tout ça rapidement : vous aurez la fin, soyez en certain.e.s !

Bonne journée et prenez soin de vous,

Acchlys.