MY TEACHER IS ENJOYING

I. Un incroyable sourire

PDV Emma.

La cloche sonne... et c'est la dernière fois que je l'entends pour deux longs mois. Alors ne devrais-je pas être heureuse, épanouie, avoir des projets ? Apparemment, quelque chose ne tourne pas rond chez moi. Tout le lycée de Storybrooke ne tient plus en place, même si nos examens ne sont pas encore passés. Mais ma vie ne m'enchante pas vraiment. Cette sonnerie annonce le début de toute une vie sans jamais revoir Regina. Et elle semble ne pas se rendre compte que j'existe. Ou du moins le sait-elle parfaitement, mais elle ignore tout de mes sentiments. Et je devrais me lever et partir ? Mais après tout, c'est mon professeur de sciences, et je ne suis... que moi, Emma.

Le premier jour de la rentrée, la voyant arriver, elle, éblouissante, j'étais loin de m'imaginer qu'elle me donnerait de l'espoir, l'espoir infime qu'une année pleine de réjouissances se déroulerait, sans encombres et sans soucis. De quelle naïveté ai-je fait preuve... Puis en un rien de temps, toute une année s'est écoulée, elle m'appréciant comme l'on peut le faire avec une élève, et moi la regardant, la contemplant tout au long de mes cours. Mais cela ne suffisait pas. J'ai commencé par venir au quatrième étage du bâtiment des sciences plusieurs fois pas jour, et sans aucune raison, juste espérant la croiser. Puis j'ai totalement arrêté de manger au lycée, et je passais dès lors toutes mes pauses déjeuners dans ce même couloir. Et cela, je l'ai encore fait aujourd'hui, mais je me retrouve à me lever, me préparant à la quitter à tout jamais. Je n'ai jamais été fleur bleue, je suis même carrément sinistre, je l'oublierai... ou pas.

Du haut de mes seize ans, après avoir laissé sortir l'intégralité de la classe (dans laquelle je n'aurai même pas du être, puisque je suis en Première Économique et sociale, mais que Regina m'avait laissé assister au cours de la classe de Sciences dans laquelle j'étais en début d'année, uniquement pour la voir plus. Alors vous voyez, pour elle, je me suis rajoutée 5 heures de cours dans mon emploi du temps déjà trop chargé. C'est pour dire...), je me suis avancée doucement en essayant d'adopter un air désinvolte, et non pas accablée telle que je l'étais. J'ignore de quoi j'ai eu l'air, mais Regina m'a fait son plus beau sourire, et m'a dit que vu ce que j'avais donné cette année, je le méritais. J'ignorais tout de ce que je méritais ou non, mais elle m'a prise tendrement dans ses bras, non pas de manière si affective, mais une seconde, j'ai pensé que j'allais fondre en larmes, car jamais mon souhait ne deviendrait réel. J'ai voulu écourter l'étreinte, pour que jamais elle ne voit ma faiblesse, mais au dernier moment, elle m'a reprise pas le bras, a fait glisser sa main le long de ce dernier et m'a déposée un papier dans le creux de la main, tout en s'approchant de mon oreille, en me disant du chuchotement le plus sexy jamais entendu :

« Appelle moi. »

Mon corps s'est pétrifié sur place, c'est une certitude, mais aucune parole ne pourrait définir la manière dont mon cœur a raté un battement, dont ma poitrine s'est serrée et comment ma gorge était opprimée par l'excitation. Elle s'est écartée, m'a jetée un petit sourire et je suis partie, complètement freinée par cette poussée d'adrénaline, et freinée parce que jamais un tel frisson ne m'avait parcouru l'échine, quand elle m'avait soufflé son murmure délicat à l'oreille.

Ces mots résonnaient en moi durant toute la descente des escaliers, sur lesquels mes talons claquaient mais dont je ne percevais qu'un bruit sourd. Puis mes sensations sont revenues, j'ai cru le réveiller d'une transe étrange, et, déjà arrivée à l'entrée de l'établissement, j'ai voulu ouvrir la main, mais pour une raison qui m'est inconnue, je ne l'ai pas fait. Jamais si belle chose ne pouvait m'arriver. Jamais quelque chose que j'ai voulu une année entière ne pouvait se produire. C'est donc d'une étrange béatitude que j'ai entamé ma marche lente en contradiction avec mon souffle haletant vers la gare et que j'ai laissé mes yeux flirter avec les couleurs vives du début d'été durant tout le trajet de bus.

C'est quarante minutes après cette folie que je suis arrivée chez moi, excitée, et effondrée par avance, car qui sait si ce n'était pas qu'une mauvaise blague. J'avais perdu tout espoir cette année, donc au final, je n'avais même pas émis d'hypothèse quand à la nature de ce mot. J'ai pris tout mon temps pour ranger mes affaires, m'installer sur mon lit, et me morfondre encore un peu. Mais plus rien ne pouvait m'accaparer à la place de ce bout de... je l'ai reconnu, c'est un morceau du journal dans lequel elle inscrit nos notes et appréciations. C'est sans importance, mais j'aime les détails. Et avoir eu l'intelligence de trouver d'où venait cette feuille rendrait ma déception moindre. Étendue sur le dos, je fixais le plafond terne de ma chambre, et j'hésitais. Mais n'ayant plus rien à perdre. Je l'ai défroissé, plis par plis, aplati de la paume de ma main, en prenant soin de ne pas appercevoir son contenu. Une fois jugé présentable, je l'ai levé au ciel, devant mes yeux et je n'ai pu m'empêcher de me redresser brutalement, dans un sursaut d'une énergie qui m'était jusque lors inconnue. J'étais ébahie. Oui, sur ce minuscule bout de papier était écrit : son numéro de téléphone !

Je ne peux même pas sauter de joie, ni me réjouir, ni au contraire m'effrayer. Qu'est-il honorable de faire lorsque votre professeur de sciences vous donne son numéro personnel ? Si je l'appelle dès maintenant, elle regrettera et pensera que je n'attendais que cela. Si j'attends trop, elle oubliera et croira que ce qu'elle a à dire ne me préoccupe pas. J'ai donc décidé de l'appeler le lendemain matin. Mais jamais je ne trouverai le sommeil si moi même je suis dans un trouble pareil. Si seulement...

Je me suis réveillée aux aurores ce matin, comme à mon habitude, et la première chose que j'ai faite à été de me mouvoir très lentement jusqu'à la cuisine et de me préparer un chocolat chaud saupoudré de cannelle, et ce, même si l'on est en été, car c'est mon unique carburant pour ne pas aller le recoucher. C'est donc pour cela qu'en seulement deux ou trois gorgées, le souvenir de ce qu'il s'était passé hier est revenue, et j'ai foncé tout droit dans mon repère et ai allumé mon téléphone. C'est une fois devant mon clavier que mes palpitations se sont accrues et que j'ai commencé à paniquer. Or je ne panique jamais, car je ne me soucie de rien. Absolument rien. Mais voyant que ma panique ne résolvait rien à ma tête au réveil, sur laquelle j'avais malheureusement une vue depuis mon lit, j'ai composé le numéro. Contrairement aux clichés habituels, le temps de sonnerie ne m'a pas paru interminable du tout. À croire que toute la population de Storybrooke était à côté du téléphone à neuf heures du matin. Avant même que je ne m'en rende compte, elle avait décrochée, et sa voix a eu l'effet d'un anxiolytique. Il ne m'a fallu qu'une seconde pour que ce son ne m'apaise.

Allô ?

Bonjour Re... Madame... C'est Emma.

Oh ! C'était plutôt un étonnement soulagé je dois dire. Comment vas-tu ?

Bien, je crois. Et... vous ?

Bien. Écoute... Un peu que j'écoutais, je ne sentais même plus mon propre pouls. J'aurais aimé te parler, si bien sûr tu es d'accord pour que l'on se rencontre, et que tes examens ne te prennent pas trop de...

Oui, pas de soucis ! ai-je répondu beaucoup trop vite, avec trop d'empressement et j'étais accroché à mon cellulaire comme si ma vie en dépendait, ce que j'ai aussitôt regretté. Mais j'avais enfin une discussion, une vraie, avec celle que je chérissais en secret depuis un an, et c'était devenu insoutenable de garder cela pour moi.

Elle a alors rigolé, non pas pour se moquer, mais d'un adorable contentement et a continué.

Ok, tu veux que je te rejoigne quelque part ?

En réalité, à force d'être assise au milieu du couloir, j'avais entendu les histoires de chaque enseignant et je savais parfaitement qu'elle habitait en retrait de la commune. J'ai alors proposé de m'y rendre moi même.

Mais tu ne sais même pas où j'habite.

Je me suis sentie m'empourprer à cause de la gêne. Qu'allait-elle penser ? Que je l'avais espionnée toute cette année ? Mais mon existence se résume à un amoncellement de honte. Et pour ne pas commencer à lui mentir à elle, j'ai avoué que les bruits de couloirs m'avaient été favorables. Ça a donc été à son tour d'être gênée, ou étonnée que sa vie ne soit plus si secrète, mais un blanc tendu s'est installé, avant que sa voix gracieuse et si harmonieuse ne me calme de nouveau.

Et bien... à quelle heure tu pourrais venir ?

Le seul train qui rejoigne votre gare arrive à 18 heures.

C'est parfait alors à...

À tout à l'heure !

Et j'ai raccroché, avant même qu'elle ne termine sa phrase, pour la simple et bonne raison que cela faisait depuis le début de l'appel que je retenais mon souffle et l'idée de ce rendez-vous m'aurait fait exploser de joie. Mais je n'arrive pas à exprimer mes émotions. Alors je suis roulée en boule, la gorge nouée par l'excitation, et le bonheur d'avoir une rencontre prévue avec... ELLE. Et aujourd'hui. Plus jamais mon cœur ne se calmera.