Disclaimers :

Les noms des personnages principaux, tout comme leur apparence physique, et certains noms de lieux ne m'appartiennent pas. Ils sont tirés d'une série télé bien connue de la plupart d'entre vous : The 100.

Outre ces éléments, leur personnalité, leur histoire et l'univers dans lequel ces personnages évoluent sont complètement différents et fictifs, bien que certains lieux et certains événements soient fortement inspirés de la réalité.

Ce récit raconte l'histoire de deux jeunes femmes que les aléas de la vie vont rapprocher. Issues de milieux bien différents, elles vont pourtant devoir apprendre à cohabiter. La vie n'épargne personne, et c'est parfois grâce à des rencontres inattendues que l'on trouve les réponses à nos questions, même les plus difficiles :

Clarke, une jeune femme de 22 ans, débarque sur le campus de l'Université de Colombie Britannique quelques semaines après le début la rentrée. Fuyant un passé douloureux, elle se retrouve à partager sa chambre avec une jeune femme aussi intrigante que déroutante. Et si derrière cette mystérieuse colocataire se trouvait l'espoir auquel elle ne voulait plus croire ? Et si finalement, la personne qui pensait aider l'autre était celle qui avait le plus besoin d'aide ?

NB : Ce récit est une fanfiction Clexa. L'action se déroule dans notre monde, à notre époque, il n'y a donc ni cerf à deux têtes, ni gorille géant et pas nom plus d'IA sur-développée, cependant il est possible que quelques scènes à caractère érotique puisse troubler l'esprit des plus sensible. Il ne sera pas non plus question de fin du monde et de meurtres de masse, mais simplement d'une romance entre deux femmes.

L'histoire se découpe en plusieurs parties, elles-même découpées en différents chapitres qui seront publiés de façon régulière. Afin de lancer l'histoire, je publierais un chapitre par semaine durant tout le mois d'août, avant de prendre un rythme de croisière un peu plus lent à partir de début septembre d'un chapitre tous les 15 jours.

Je tiens à remercier l'amie qui m'a pousser à publier cette histoire sur laquelle elle m'a vu travailler depuis plus d'un an déjà. Ses encouragements et ses conseils m'ont été précieux. Je remercie aussi ma beta-reader pour son super travail de relecture!

J'espère que vous prendrez autant de plaisir à lire cette histoire que j'en ai pris à l'écrire, alors bonne lecture !


I

Inspirer profondément, expirer lentement. Enfin je respire ! J'ai l'impression de ne pas avoir respiré depuis une éternité. Je déteste les endroits confinés, encore plus lorsqu'ils sont bondés de monde, et après près de 19h de vol, quand je sors enfin de l'aéroport, j'ai l'impression de respirer pour la toute première fois.

L'air est doux. Il sent à la fois la forêt de sapins mais aussi quelque part l'océan, même si d'où je suis je ne peux voir ni l'un ni l'autre. Je ferme les yeux et reprends une grande bouffée d'oxygène. Une nouvelle vie commence, loin de tout, de ma famille, de mes amis. Je suis seule, dans une ville que je ne connais pas, mais pour la première fois depuis longtemps je me sens enfin libre, comme déchargée de toute cette oppression constante qui m'entourait là-bas.

Depuis la vitre de mon taxi, j'observe et mémorise chaque détail de ce qui m'entoure. Vancouver est une jolie ville, la verdure est partout et les gens qui marchent dans la rue semblent tous heureux d'être là. En ce début de mois de septembre il fait beau et même si le soleil commence à descendre dans le ciel, il fait encore très bon.

Le taxi traverse une zone résidentielle paisible avant d'atteindre une zone commerciale un peu plus vivante. Il bifurque sur la gauche et après quelques intersections j'aperçois enfin l'océan sur ma droite. Des gens sont installés sur la plage, certains jouant au volley, d'autre profitant simplement du doux soleil de cette fin de journée et d'autre encore se baignant. La plage semble interminable. Progressivement les bâtiments de l'autre côté de la route se font de moins en moins nombreux, laissant place à une magnifique forêt de conifères.

Les fenêtres ouvertes, je ferme les yeux une nouvelle fois pour profiter de ce mélange d'odeurs si agréable. Lorsque je les rouvre, la plage a disparu et j'aperçois un peu plus loin de grands bâtiments. Le taxi s'arrête devant l'un d'eux. Le chauffeur descend en premier et récupère mon sac dans le coffre avant de repartir, me laissant là, au pied de cette fontaine sur laquelle des lettres semblent flotter, m'indiquant ma destination finale : Université de Colombie Britannique.


Après avoir récupéré mon emploi du temps, un plan du campus et les clefs de ma chambre, j'arrive enfin devant le bâtiment des chambres universitaires. Je m'arrête devant la porte portant le numéro 207 et je vérifie une dernière fois sur mes clefs qu'il s'agisse bien de la bonne chambre. Je frappe à la porte mais n'obtiens aucune réponse alors je déverrouille la serrure et pousse la porte.

La chambre est vide. En face de moi se trouve une grande fenêtre dont la vue semble porter au bout du monde. D'ici, on peut voir l'océan et même deviner une plage en contrebas cachée par une courte bande de forêt. Au loin, le soleil donne l'impression de flotter paisiblement sur l'océan, offrant un spectacle saisissant. J'ouvre la fenêtre pour faire entrer cet air si parfumé et en profiter le plus longtemps possible, comme s'il pouvait disparaître à tout moment. En cet instant précis, je ne regrette pas une seule seconde d'avoir quitté mon ancienne vie pour venir prendre un nouveau départ ici.

Je me retourne vers l'intérieur de la chambre. Sur ma droite, la chambre semble habitée ou presque. Le lit, dont la tête est appuyée contre le mur à côté de la porte d'entrée, est fait. Trois bougies sont installées sur la table de nuit et des livres de cours sont soigneusement rangés sur le bureau juste à côté de moi. Ce sont les seules traces de vie. Tout le reste semble terriblement neutre et dépourvu d'âme. Aucun objet personnel ne semble trouver sa place ici, pas même une photo, des vêtements ou une paire de chaussures. A croire que personne ne vit réellement. Je reporte mon attention sur la seconde partie de la pièce qui se trouve à ma gauche. Elle ressemble à l'autre moitié de la chambre comme son image dans un miroir. . Un petit lit pour une personne au bout duquel se trouve un bureau vide et à mi-chemin entre le lit et le bureau, une armoire en bois blanc. La seule différence notable est l'absence de draps sur le lit, de bougies sur la table de nuit et de livres sur le bureau.

Malgré le côté très épuré de cette chambre et la grande fenêtre ouverte juste derrière moi, j'ai vraiment besoin de sortir prendre l'air. Je laisse donc ma valise au pied de mon lit et j'attrape juste mon sac à dos qui contient tout ce dont j'ai besoin pour le moment : un paquet de cookies, mon carnet de croquis et mes crayons.

Avant de sortir de la chambre, je dépose mon téléphone dans le tiroir de mon bureau et je jette un coup d'œil à la montre à mon poignet. J'hésite un instant avant de la détacher et de la poser dans le tiroir à côté de mon téléphone. De toute façon elle ne donne plus l'heure depuis quelques mois maintenant. Par réflexe je passe mes doigts sur mon poignet là où se trouvait la montre il y a encore quelques secondes, comme pour gommer le souvenir de sa présence. C'est peine perdue, surtout quand je vois la marque de bronzage qu'elle m'a laissé.

Je referme le tiroir et attrape le plan du campus que j'ai récupéré un peu plus tôt. Je le range dans la poche de ma veste. On ne sait jamais, ça pourrait bien m'être utile étant donné mes capacités d'orientation plus que médiocres et la taille du campus !


Ça doit bien faire une heure maintenant que je suis installée sur la plage à admirer et retranscrire sur papier le coucher de soleil. Maintenant qu'il a complètement disparu au fond de l'océan, l'humidité et la fraîcheur commencent à se faire sentir. Je donne un dernier coup de crayon avant de ranger mon carnet de croquis dans mon sac. Il est temps de remonter sur le campus et de regagner ma chambre. Demain les cours commencent tôt et je dois encore ranger et préparer mes affaires. Sans compter qu'il va certainement falloir que je gravisse les quelques trois cents marches que j'ai dû descendre plus tôt pour atteindre cette plage, et si je ne veux pas me retrouver perdue dans la nuit noire sans repères ni téléphone, il serait temps d'y aller.

La porte de la chambre n'est pas verrouillée et de la lumière filtre en-dessous. Sans savoir pourquoi, j'entre sans même prendre la peine de frapper pour m'annoncer. Ça ne me ressemble pas, mais j'ai croisé tellement peu de monde sur le campus et sur la plage depuis mon arrivée que j'ai presque l'impression d'être seule ici et je ne pense pas une seconde que je peux déranger quelqu'un. Evidemment la présence de ma colocataire arrêtée juste derrière la porte me rappelle vite à l'ordre : il y a bien quelqu'un qui partage cette chambre avec moi.

Je ne sais pas ce qu'elle fait plantée là juste derrière la porte, visiblement à fixer ma valise, mais mon entrée soudaine semble avoir attiré son attention. Elle se retourne brusquement vers moi, me fixant du même air étrange qu'elle adressait à ma valise quelques secondes plus tôt. Au vu de la surprise que je lis sur son visage, elle ne devait pas être au courant de mon arrivée ou peut-être avait-elle juste oublié. Quoi qu'il en soit, elle reste là à me dévisager sans prononcer un seul mot, alors je prends les devants :

- Salut, je suis Clarke, ta nouvelle colocataire.

La surprise laisse alors place à de la perplexité mais son regard ne se détache pas du mien. Quelque chose qui me semble être de l'ennui voire de la frustration passe sur son visage. Je ne pensais pas que ma simple personne pouvait être responsable d'autant d'émotions différentes en si peu de temps. Surtout que la dernière chose qu'il me semble voir passer sur son visage n'est pas franchement positive. Ça commence bien.

- Je suis nouvelle à UBC, je viens d'arriver. Je suis étudiante en médecine, tentai-je une nouvelle fois.

Toujours aucune réponse de sa part, mais son visage se détend enfin, laissant place à une expression aussi neutre que son côté de la chambre. Malgré ça, je ne peux que remarquer à quel point cette fille est jolie. Sans parler de son visage aux traits quasi parfaits, à la fois stricts et presque angéliques, elle a surtout de très jolis yeux d'un vert surprenant. C'est d'ailleurs là ce qui me met si mal à l'aise : ce regard vert qui n'a pas lâché le mien depuis que je suis entrée. Si au moins elle daignait me répondre, je me sentirais sûrement moins idiote à rester plantée là sur le palier de la porte de sa - ou plutôt de notre - chambre.

- Bonsoir, moi c'est Lexa, lâche-t-elle enfin avant de se détourner pour se diriger vers son armoire.

L'intonation qu'elle a utilisée pour prononcer ces quelques mots est aussi neutre et froide que son expression lorsqu'elle me dévisageait quelques secondes auparavant.

Elle ouvre son armoire et en sort un flacon de gel douche, une serviette de toilette et une tenue de rechange. C'est à ce moment-là que je remarque qu'elle est en tenue de sport. Elle porte des leggings de sport noirs qui lui arrivent en-dessous des genoux et une brassière assortie. Même ses baskets sont noires et le brassard qui porte son téléphone également. Ses longs cheveux bruns et ondulés sont remontés négligemment en une queue de cheval. Quelques courtes mèches s'en échappent, venant caresser les courbes de son visage, le mettant encore un peu plus en valeur. C'est vraiment une très belle fille, qui pourrait certainement l'être encore plus si elle n'était pas aussi froide.

Absolument tout chez elle semble non pas terne, mais bel et bien froid. Sa chambre n'a ni couleur ni décoration, tout est parfaitement rangé et organisé, même les affaires dans son armoire sont de couleurs sombres et parfaitement ordonnées. Rien ne semble déborder chez cette fille – si ce n'est ces quelques mèches de cheveux - tout semble parfaitement réfléchi, calculé voire millimétré. Tout jusqu'au choix de ses mots quand elle parle et ses expressions faciales. Je crois même que la surprise que j'ai lue dans ses yeux l'espace d'une seconde à mon arrivée était une erreur qu'elle s'est bien vite attachée à rectifier en affichant ce masque dépourvu d'émotion qu'elle semble maîtriser à la perfection.

Elle retire ses baskets et son brassard, jetant en même temps un coup d'œil à son téléphone avant de le poser sur son bureau. Quand elle se retourne à nouveau vers moi, je me rends compte que je ne l'ai pas quittée des yeux pendant tout ce temps. Je n'ai d'ailleurs pas bougé de l'encadrement de la porte. Si elle ne me prend pas déjà pour une folle, il serait peut-être temps que je fasse quelque chose avant qu'elle ne se pose de réelles questions sur ma santé mentale. Je reporte donc mon attention sur mon sac au pied de mon lit. Il faut que je range mes affaires, c'est ce que toute personne normale et saine d'esprit ferait maintenant, et non pas rester plantée au milieu de la porte à dévisager une inconnue, ce qui est plutôt malpoli. Sans un mot, j'entre complètement dans la chambre en prenant de soin de fermer la porte délicatement derrière moi et me dirige vers mon lit.

J'ai à peine le temps de déposer mon sac à dos sur mon bureau que ma nouvelle colocataire est déjà sortie de la chambre. La porte se referme, et je relâche tout l'air que mes poumons avaient retenu jusque là. Je ne m'étais pas rendue compte que j'avais arrêté de respirer. Visiblement, je ne suis pas tombée sur la colocataire la plus sociable de l'université.


Je sors mon carnet de croquis de mon sac et observe le dessin du coucher de soleil que j'ai passé la soirée à réaliser. Ça faisait trop longtemps que je n'avais pas vraiment pris le temps de dessiner, et retrouver la sensation de la mine du crayon qui gratte le papier m'a fait un bien fou.

Je dépose le carnet sur ma table de chevet et entreprends de défaire ma valise pour ranger mes affaires. Je termine en un rien de temps. Volontairement je n'ai pris que le strict minimum quand je suis partie de chez moi. Je ne voulais pas que des souvenirs de mon ancienne vie viennent entacher le début de la nouvelle. Une fois mon lit fait et mes affaires pour le lendemain prêtes, je récupère le plan du campus dans la poche de ma veste pour essayer de le mémoriser et trouver l'amphithéâtre dans lequel je devrai me rendre demain matin.

C'est un vrai labyrinthe ! Le campus est immense et j'ai beau retourner la carte dans tous les sens, je suis incapable de mettre le doigt sur le bâtiment dans lequel j'ai cours demain.

La porte qui s'ouvre à côté de moi attire mon attention. Ma colocataire fait son entrée, toujours sans un mot. Pendant un instant je me demande même si je ne suis pas devenue invisible car elle passe juste à côté de moi avant de s'activer à ranger ses affaires sans me prêter la moindre attention. Décidément soit cette fille à un problème avec moi en particulier, soit elle a juste de gros problèmes de sociabilité en règle générale.

Je me reconcentre sur le plan du campus, avant de laisser tomber et de reposer le bout de papier sur ma table de chevet en soupirant. Demain j'irai demander à l'accueil, ça ira certainement plus vite.

Je ne sais pas si c'est que mon exaspération est tellement évidente qu'elle se ressent jusque de l'autre côté de la pièce, mais visiblement j'ai attiré l'attention de la personne qui partage cette chambre avec moi. Je ne suis peut être pas invisible finalement ?

- Tu cherches quelque chose ?

Légèrement surprise d'entendre le son de sa voix, je ne réponds pas immédiatement. Elle est assise à son bureau, un livre ouvert devant elle et un stylo à la main. Elle me regarde comme si elle attendait quelque chose de ma part. Quand ses sourcils se froncent d'un air perplexe, je me rends compte que je la dévisage encore et que je ne lui ai même pas répondu.

- Oh, euh je cherchais l'amphithéâtre 63B dans lequel j'ai cours demain, mais visiblement il n'est pas indiqué sur le plan du campus qu'on m'a donné. J'irai demander à l'accueil demain matin, ce n'est pas grave.

Elle semble réfléchir un instant comme si elle jaugeait la situation.

- J'ai cours dans le bâtiment C qui est juste en face. Si tu veux, tu pourras venir avec moi demain matin, je te montrerai ton bâtiment.

Je suis presque surprise. Déjà parce que c'est la première fois que je l'entends prononcer plus de quatre mots à la suite, et puis parce que j'ai presque l'impression que cet élan de courtoisie lui demande un effort considérable. Je crois même qu'elle s'est rendue compte de sa proposition en même temps qu'elle me parlait et qu'elle l'a regrettée presque aussitôt. Je ferais peut être mieux de refuser, ça lui rendrait sûrement service.

Je n'ai pas le temps de lui répondre que son téléphone sonne. Elle regarde l'écran et la légère frustration qui assombrissait son visage quelques minutes plus tôt refait son apparition. Non, à ce niveau-là je pense qu'on ne parle même plus de frustration mais bien d'agacement. Pourtant elle décroche quand même et sort de la chambre en prenant soin de bien refermer la porte derrière elle.

Je ne sais pas qui peut l'embêter à ce point. En tout cas ça devait être suffisamment important pour qu'elle décroche malgré tout. Si je devais parier, je dirais qu'il s'agit peut-être d'un petit ami trop présent ? Vu la plastique de cette fille, elle ne doit pas être seule, et si j'étais sa copine moi aussi je serais sûrement un peu trop possessive.

Je me lève de mon lit et vais chercher mon téléphone toujours dans le tiroir de mon bureau. Je jette un coup d'œil à l'heure. Il n'est pas très tard mais avec le trajet en avion et le décalage horaire, je suis épuisée. J'hésite un instant à envoyer un message à ma mère pour lui signifier que je suis bien installée mais je me ravise rapidement. Si elle veut de mes nouvelles, elle n'a qu'à m'en demander. Je repose mon téléphone et décide d'aller prendre ma douche pour me décrasser de cette longue journée avant d'aller dormir.

Je rassemble mes affaires de toilette et sors de la chambre pour me diriger vers la salle de bain commune au fond du couloir. Je m'attendais à voir ma colocataire de l'autre côté de la porte mais visiblement elle n'est pas là. J'hésite un instant à fermer la porte à clef mais je ne suis pas sûre que ma coloc ait pris les siennes avant de sortir. Je ne suis pas sûre non plus qu'elle apprécie de rester coincée à la porte de chez elle et devoir m'attendre pour rentrer. De toute façon je ne serai pas partie longtemps et le couloir est désert, il y a peu de chances qu'on vienne nous voler nos affaires. Je jette un dernier coup d'œil dans le couloir autour de moi avant de fermer la porte et de me diriger vers la salle de bain.


Quand je reviens dans la chambre Lexa n'est toujours pas rentrée, ou alors elle est déjà repartie. Je range rapidement mes affaires et m'installe sur mon lit. Je récupère mon carnet de croquis posé sur la petite table à côté de moi et quelques crayons. J'entreprends de mettre un peu de couleur au dessin réalisé quelques heures plus tôt sur la plage. Colorier m'a toujours détendue et c'est exactement ce dont j'ai besoin là tout de suite avant d'aller dormir.

Quand la porte s'ouvre de nouveau, je n'ai pas besoin de me retourner pour sentir le regard de Lexa qui pèse sur moi. J'essaie de focaliser toute mon attention sur mon dessin et non pas sur la fille qui se tient juste à côté de moi. Je ne suis définitivement plus invisible et je ne suis pas sûre de savoir si ça me plaît ou si j'aurais préféré le rester encore un peu. Quoi qu'il en soit, elle reprend rapidement ses esprits et poursuit sa route vers son bureau, qu'elle range de façon rapide et efficace. Tout retrouve sa place initiale en un rien de temps comme si elle n'y avait jamais touché.

Je ne sais vraiment pas quoi penser de cette fille. Un instant elle est froide comme la glace et l'instant d'après elle me propose son aide. Un instant je semble invisible à ses yeux et l'instant d'après j'attire suffisamment son attention pour qu'elle s'arrête quelques secondes et me regarde. Non vraiment, je n'arrive pas à la cerner. Pourtant je me rappelle sa proposition. Je pensais décliner l'offre poliment mais finalement je vais accepter. De toute façon, je n'ai aucune idée d'où je dois aller demain matin et que ça soit elle ou la femme de l'accueil, je vais avoir besoin que quelqu'un me guide jusqu'à mon amphithéâtre.

- Au fait, merci pour ta proposition de tout à l'heure, ça serait avec plaisir.

Depuis son lit elle se retourne vers moi et quand je vois l'expression confuse sur son visage, je me dépêche d'ajouter :

- Pour venir avec toi demain matin jusqu'à mon amphithéâtre.

Elle hoche la tête en signe d'acquiescement sans dire un mot et en éteignant la petite lampe sur sa table de chevet, elle ajoute :

- Je pars à 7h50.

Elle ne me regarde pas, alors je ne réponds pas. De toute façon ce n'était clairement pas une question de sa part, simplement une information sonnant presque comme une mise en garde. Visiblement la ponctualité est une notion qui lui tient très à cœur.


On quitte la chambre à 7h50 comme prévu. Elle n'a pas dit un mot depuis que je me suis levée et visiblement elle ne compte pas en dire davantage sur le trajet. On traverse le campus, moi concentrée à enregistrer chaque bâtiment pour ne plus avoir besoin d'un guide la prochaine fois que je chercherai ma salle et elle, perdue dans ses pensée ou bien extrêmement concentrée sur quelque chose que je ne peux ni voir ni entendre.

Elle a beau être habillée de façon classique pour une étudiante – bien que son style soit savamment pensé et étudié pour ne pas faire ni trop habillé ni trop décontracté – elle dégage une telle prestance que je ne me sens pas vraiment à ma place à ses côté. Malgré toute cette froideur qu'elle semble s'attacher à se donner, il émane de sa personne quelque chose qui force le respect, une sorte de force intérieure vraiment intimidante. J'ai l'impression que toutes les personnes que nous croisons sur le campus nous regardent en se demandant ce qu'une fille aussi banale que moi fait au côté d'une fille comme elle.

C'est sûrement pour cette raison que je reste à une distance peut-être un peu trop raisonnable d'elle. Juste quelques centimètres en retrait, comme si son aura m'empêchait de m'approcher davantage. Il faut dire aussi qu'elle marche vite et d'un pas décidé, ses pieds n'ayant plus besoin de sa tête pour trouver leur chemin et ses jambes fines et musclées entraînant son corps comme s'il ne pesait pas plus lourd qu'une plume. Elle dégage presque quelque chose de félin quand je la vois ainsi se déplacer : des mouvements vifs, précis, fluides et incroyablement contrôlés. Elle semble à la fois décontractée, sûre d'elle et prête à bondir à la moindre occasion. Je suis sûre qu'elle ne connaît pas la maladresse, elle semble bien trop agile pour ça.

Cette fille doit faire beaucoup de sport c'est certain. Hier soir n'était pas une exception. Elle ne fait pas partie de ces filles qui vont courir une fois par mois quand le temps est clément et qu'elles estiment avoir trop abusé des sucreries la veille. Non, elle, c'est une vrai sportive, j'en ai la certitude. D'ailleurs si le sport fait cet effet à tous le monde, je devrais peut être penser à m'y mettre ? J'ai toujours détesté le sport. Je préfère rester chez moi devant un bon film avec une pizza plutôt que d'aller transpirer et souffrir de courbatures les jours suivant. Mais si le sport peut me sculpter le même corps qu'elle et me permettre de me déplacer avec autant de grâce et d'aisance, alors je devrais peut être sérieusement revoir mes priorités.

J'essaie tant bien que mal de détourner mon attention d'elle pour me reconcentrer sur ce qui m'entoure et pouvoir faire le trajet retour sans me perdre. Je me force à relever les yeux et mon regard se fixe sur le drapeau canadien qui flotte dans l'air devant moi, camouflant partiellement les montagnes en arrière-plan. Le tableau est sublime et quand Lexa s'immobilise devant moi, je manque de la percuter.

Malgré l'expression trop neutre pour être naturelle de son visage, son regard sur moi est si intense qu'il me fait reculer d'un pas pour remettre une distance raisonnable entre nous. Mal à l'aise, je détourne rapidement les yeux, me forçant à regarder autour de moi. Il faut être honnête, je n'ai aucune idée d'où nous sommes et de comment nous somme arrivées ici. Le retour s'annonce compliqué. Nous somme arrêtées devant un grand bâtiment gris qui semble à la fois ancien de par son architecture mais trop propre et trop neuf pour avoir l'âge qu'il veut nous faire croire.

- C'est ici, dit-elle en jetant un regard vers le bâtiment gris. C'est le bâtiment B. L'amphithéâtre 63 se trouve au rez-de-chaussée, sur ta droite à l'entrée.

Cette fois c'est moi qui reste sans voix, et je me contente de hocher la tête pour lui signifier que j'ai bien saisi ce qu'elle venait de me dire. Lorsqu'elle détache son attention de moi et esquisse un mouvement dans la direction opposée pour rejoindre son propre bâtiment, je retrouve l'usage de la parole.

- Merci, lançai-je avant qu'elle ne s'éloigne.

Elle se tourne de nouveau vers moi et ses yeux verts accrochent les miens. Je ne sais pas si j'ai rêvé, mais il me semble avoir aperçu une lueur de bienveillance au fond de ses iris et peut être même un début de sourire au coin de ses lèvres. Impossible de l'affirmer avec certitude cependant, car immédiatement après son visage s'est refermé, se couvrant de son habituel masque impassible avant qu'elle ne disparaisse dans le bâtiment juste en face du mien.