Ch. 9 - La clef

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La fouine et l'hermine, le duo devenus presque inséparables sans vraiment s'en être rendu compte, quittèrent ensemble le dortoir et traversèrent la salle commune des verts, sous les regards ahuris des quelques Serpentard présents. Voir ces deux-là traîner ensemble, ça ils en avaient tous pris l'habitude, en revanche c'était la première fois qu'ils les voyaient exhiber leur complicité en entrelaçant leurs doigts, et ce d'une façon si naturelle, comme s'ils avaient toujours agis ainsi devant tout le monde.

Mais Hermione et Drago s'en moquaient, ils ne remarquaient même plus les regards sur eux.

Blaise était tranquillement en train de déguster un assortiment de pâtisseries qu'un elfe avait gentiment accepté de lui préparer, lorsque les portes s'ouvrirent et qu'il vit ses amis entrer.

- Vous en avez mis du temps, s'exclama-t-il le sourire jusqu'aux oreilles, quand ils vinrent le rejoindre à une table.

- La dernière fois, j'avais un peu bâclé alors... il fallait bien que je me rattrape, rétorqua Drago en adressant un clin d'oeil à Hermione qui rougit instantanément.

- Comment ça 'la dernière fois'? Vous vous êtes déjà envoyé en l'air avant? s'étrangla Blaise avec une bouchée de muffin. C'était en France? Pourquoi ne m'en as-tu pas parlé, espèce de vil faisan! gronda-t-il en adressant un regard inquisiteur à son ami blond. Je croyais qu'on se racontait toutDrac' !

- C'était... le premier soir... avoua Hermione, un peu gênée. Tu sais quand on s'est croisés dans le Hall et que tu m'as invité à vous rejoindre aux cachots...

- How... acquiesça Blaise qui se remémorait cette fameuse soirée, celle où leur amitié était née. Donc c'est un peu grâce à moi si je comprends bien, ajouta-t-il avec un sourire satisfait.

- On peut dire ça oui, confirma Drago en opinant mollement, échangeant un regard entendu avec son acolyte de toujours.

Un étrange silence s'installa dans la cuisine. Seuls quelques elfes étaient encore là pour finir de nettoyer et ranger la vaisselle, les autres ayant d'autres tâches à accomplir dans le château. Hermione se leva, alla garnir un plateau puis glissa quelques mots à l'oreille d'un des elfes avant de revenir s'asseoir à la table.

- Qu'est-ce que tu lui as dit, demanda Blaise avec curiosité.

- Elle lui a dit qu'elle rangerait elle-même ce qu'elle a pris et que ce n'est pas la peine qu'ils se préoccupent de nous... répondit Drago.

- Comment le sais-tu, s'étonna Hermione en plissant les yeux, un rictus au coin de la bouche.

Le blond haussa les épaules avec un petit sourire vainqueur tout en jetant un bref regard amusé à Blaise avant de le reporter sur la Gryffondor.

- Je savais que ce séjour en France vous avait beaucoup rapproché, mais apparemment j'étais encore loin du compte... constata Blaise en jouant des sourcils.

- Ah oui, tu trouves? Qu'est-ce qui te fait dire ça, s'enquit Hermione, s'attendant à une remarque pleine d'ironie.

Mais Blaise, bien que souriant, était très sérieux.

- Et bien... ça me paraît évident. Un peu d'hydromel, proposa Blaise en levant une bouteille.

- Volontiers, accepta Hermione en tendant son gobelet en étain, imitée par Drago. Tu as raison Blaise... Cette année en France a changé beaucoup de choses, reconnut Hermione après une bonne rasade d'alcool sucré.

Drago acquiesça silencieusement, hasardant son regard vague sur les quelques mets disposés sous leurs yeux.

- Tu as l'air pensif Drac'... remarqua son ami. Nostalgique?

Le blond acquiesça de nouveau, les yeux soudain brillants.

- Qu'est-ce qui t'arrive, lui demanda Hermione qui commençait à bien connaître ce regard triste.

Il haussa les épaules sans rien dire, la gorge nouée. Hermione et Blaise s'échangèrent un regard plein de compassion pour Drago. Tous deux savaient que ce dernier vivait très mal le fait de ne plus avoir de chez lui. Malgré ses efforts pour cacher son mal-être, il était parfois en proie à la déprime.

Hermione se leva de sa chaise et vint se planter derrière celle du blond. Elle posa doucement ses mains sur les épaules affaissées de Drago, le massant quelques instants, puis elle se pencha et enroula ses bras autour de lui, l'enlaçant tendrement.

- Je crois que tu as besoin de changer d'air, de quitter un peu ces murs, lui murmura-t-elle en posant sa tête sur le crâne du jeune homme.

- Et où veux-tu que j'aille, rétorqua-t-il, la voix maussade.

- J'en sais rien... répondit Hermione en haussant les épaules. On ira où tu voudras, ajouta-t-elle en déposant un doux baiser sur la chevelure blonde du Serpentard.

- 'On'? Attend, tu... tu veux dire que tu viendrais avec moi? De ton plein gré?! s'étonna Drago dans un petit rire, les sourcils en l'air.

- Tu comptais partir sans moi peut-être, répliqua la Gryffondor en feignant la déception, sachant très bien que Drago n'avait aucune envie de s'éloigner d'elle.

- Moi en tout cas je suis tout à fait disposé à vous suivre, n'importe où, intervint Blaise. Mais ça m'arrangerait si vous alliez tous les deux au même endroit, rit-il.

- Mais quel endroit? De quoi vous parlez?

- Je t'avais dit qu'il aurait du mal à percuter, je le connais bien... marmonna Blaise en lançant un clin d'oeil à Hermione qui pouffa sans discrétion.

- Quoi, qu'est-ce que je devrais percuter?

- Drago... Je reste avec toi, susurra-t-elle à son oreille en faisant glisser une photo sur la table juste avant d'embrasser sa joue.

Le blond reconnut immédiatement cette photo. Leur virée en voiture... Celle qu'il avait précieusement gardé dans son porte-feuille et que la Gryffondor avait voulu garder.

- Je ne saisie pas. Tu... tu me proposes des vacances? C'est ça?

Hermione le lâcha et vint se planter à coté de Blaise. Tous deux fixaient le blond et arboraient des petits sourires pincés tels des conspirateurs.

- Qu'est-ce que vous complotez vous deux, s'inquiéta Drago qui souriait nerveusement.

- Et bien... si tu es d'accord, j'aimerais bien vous accompagner pour votre prochaine virée en voiture, fit Blaise. Et après tout ce que tu m'as raconté sur ce fameux 'cinéma', j'ai moi aussi très envie de regarder un film, et de découvrir tous ces trucs moldus dont tu m'as rabattu les oreilles depuis la rentrée.

- Alors c'est ça le 'on'? C'est des vacances nous troisensemble ?! comprit soudain Drago, sentant son coeur bondir de joie dans sa poitrine. Une virée tous les trois, j'y crois pas, murmura-t-il en se passant une main fébrile dans les cheveux. Oh putain, fit-il en se levant subitement de sa chaise, étouffant ses dernier mots en mordant son poing.

Drago fit quelques pas vers la porte puis resta planté devant sans bouger, tournant le dos à ses amis qui se demandaient ce qui se passait.

Était en colèreaprès eux ? Leur en voulait-il d'avoir fait des projets sans lui en parler?

- Est-ce que... est-ce que tu nous en veux, demanda Hermione, la voix pleine d'inquiétude.

Pas de réponse.

Le blond n'avait aucune réaction. Ce n'était pas du tout l'effet recherché... Pourquoi se braquait-il ainsi? N'était-ce pas ce dont il rêvait? Hermione et Blaise étaient pourtant sûrs que la nouvelle aurait fait plaisir à leur ami...

La Gryffondor approcha lentement de Drago et posa doucement une main sur sa nuque, la papouillant tendrement tout en se rapprochant de lui jusqu'à se coller à son dos. Elle enroula ensuite ses bras autour de sa taille et l'enlaça avec douceur, passant une main sous sa chemise pour caresser son abdomen du bout doigts.

- Je suis désolée... J'étais persuadée que cette idée te plairait...

Drago se retourna lentement et planta ses yeux rougis dans le regard ébahi d'Hermione. Blaise connaissait bien cette expression étrange sur le visage de son meilleur ami. Il se leva à son tour et se rapprocha d'eux.

- Je crois que tu n'as pas de soucis à te faire Hermine, sourit-il en frottant le dos de la jeune femme pour la rassurer. Drac' fait juste son sentimental, rit-il en lançant un clin d'oeil au blond qui lui répondit par un regard noir.

- Quoi! Comment ça, interrogea la Gryffondor.

- Ce gros bébé se cache pour verser sa larmichette, pouffa Blaise. Il se la joue p'tit dur mais c'est un grand sensible au fond, se moqua-t-il en lui filant un petit coup de coude complice.

- Et toi t'es un grand couillon immature, rétorqua Drago, légèrement vexé.

- C'est vraiça ? Tu voulais juste qu'on ne voit pas que tu es ému? Oh Drago... souffla Hermione en resserrant davantage ses bras autour de lui, un doux sourire illuminant son visage.

- Alors, on... on part quand? demanda-t-il timidement.

- En fait, on en a longuement discuté avec Blaise et... on s'est renseigné, il n'est pas nécessaire d'avoir ses ASPIC pour devenir professeur de vol ou entraîneur de Quidditch...

- Je ne comprends pas, où est-ce que tu veux en venir au juste, s'enquit Drago, perplexe.

- Et bien, on s'est dit que deux semaines de vacances ce serait cool... répondit Blaise avec lenteur en se frottant la mâchoire d'un air énigmatique.

- Mais une année tous les trois en France, ce serait fantastique! termina Hermione en sautillant sur place, excitée comme une puce.

- Toute une année, vous êtes sérieux?! fit Drago, ahuri par la nouvelle, n'osant pas y croire.

- On ne peut plus sérieux mon pote, lui assura Blaise en lui lançant un petit coup de poing amical dans le bras.

- On retourne à la maison Drago... murmura Hermione à son oreille en déposant un petit objet dans sa main.

Il baissa les yeux et reconnut illico la clef de la maison qu'ils avaient habité ensemble, celle dans laquelle il avait vu sa vie de Mangemort se métamorphoser en une incroyable aventure qu'il lui avait rendu toute son humanité. Ému, il releva ses grands yeux humides et trouva le regard bienveillant de sa Gryffondor.

- Tu... Ce n'est pas une blague? On y retourne vraiment? s'enquit-il, des trémolos dans la voix. Je t'en prie, dis-moi que je ne rêve pas... Est-ce que tout ça arrive réellement? C'est pour de vrai?

- De vrai, de vrai... confirma-t-elle dans un murmure juste avant de l'embrasser au coin des lèvres.

- On a déjà tout réglé avec McGonagall, annonça Blaise, enthousiaste. Tu te souviens certainement que Poudlard va accueillir des élèves de Beauxbâtonsjusqu'aux fêtes de fin d'année ?

Drago opina et attendit la suite.

- Et bien ils arrivent ce soir, termina le métis.

- Heu... Ouai, et alors?

- Madame Maxime, la directrice de Beauxbâtons, a accepté de nous laisser voyager dans son carrosse pour rejoindre son académie, en France! précisa Hermione dont la voix montait dans les aiguës.

- Tu parles de cet énorme carrosse tiré par des pégases, demanda Drago, les yeux écarquillés.

- Celui-là même!

- Ô Salazar... soupira-t-il en réalisant doucement ce qu'on lui annonçait.

- On décolle ce soir mon vieux, intervint Blaise, aussi enjoué que la jeune femme. Si tu savais comme j'ai hâte de découvrir cette fameuse maison!

- Ce soir! Alors c'est vrai... Putain, je pensais que jamais tu n'accepterais de retourner là-bas... avec moi...

Il serra Hermione dans ses bras et sourit à son meilleur ami, les yeux larmoyants de bonheur.

- Je reste avec toi Drago... susurra-t-elle une nouvelle fois en enfouissant son visage dans le cou du jeune homme ému.

Quelques heures plus tard, les élèves de Beauxbâtons firent une arrivée spectaculaire dans le parc de Poudlard où s'était rassemblée les élèves, les professeurs, et même les elfes! Les jeunes sorciers français furent accueillis par une foule de petits curieux en liesse qui les acclamaient comme des vedettes. Notre trio insolite était sur le départ. Ils prirent le temps de dire au revoir à tout ceux qui venaient leur souhaiter bonne chance.

- Et qui va me sauver la mise en potion maintenant, dit Neville à l'oreille d'Hermione lorsqu'il l'enlaça, un sourire triste ornant son visage toujours aussi jovial.

- Toi aussi tu vas me manquer Neville, sourit-elle en le serrant encore plus fort dans ses bras, puis elle le relâcha à contre-coeur et le regarda tendre la main à Drago.

- Je sais qu'elle t'aura à l'oeil, fit Neville en lui serrant la main avec force tout en fixant son regard sérieux dans celui du Serpentard. Mais toi, t'as plutôt intérêt à prendre soin d'elle.

- Je vais te dire un truc Londubat... répondit le blond sur le ton de la confidence en se penchant légèrement sur son interlocuteur, sans cesser de lui serrer la main. Elle sera bien plus heureuse avec moi qu'avec n'importe quel Gryffondor, héros de guerre ou pas.

- Je n'en attends pas moins de toi Malefoy, sourit alors Neville en lui frappant doucement l'épaule.

- Je veillerai à ce qu'il la traite comme une princesse, intervint Blaise en serrant à son tour la main de Neville. Mais tu n'as pas à te faire du mauvais sang pour Hermione, avec deux Serpentard autour d'elle, elle ne risque absolument rien.

- Je ne sais pas si ça doit me rassurer ou m'inquiéter, pouffa le Gryffondor, ce qui fit rire Blaise et Drago.

McGonagall vint dire au revoir à ses trois élèves qui étaient sur le point de quitter le nid et prendre leur envol. Elle était émue, et elle céda aux larmes lorsque son élève préférée l'enlaça chaleureusement.

- Je ne saurais jamais vous remercier à la mesure de tout ce que vous avez fait pour moi, pour nous, ajouta Hermione en tournant brièvement la tête vers ses deux compagnons qui – bizarrement, et pour son plus grand bonheur – semblaient en pleine conversation civilisée avec Neville.

- Promettez-moi de revenir nous rendre visite bientôt Miss Granger. Je serais plus qu'heureuse de recevoir de vos nouvelles, fit la voix chevrotante de la directrice aux yeux bleus larmoyants. Et sachez mon enfant que si vous changez d'avis, vous aurez toujours votre place parmi nous à Poudlard.

- Je vous promets de vous envoyer régulièrement de nos nouvelles professeur McGonagall, acquiesça la jeune Gryffondor. En encore merci pour tout, vraiment, sourit-elle, cédant à son tour aux larmes.

La directrice serra une dernière fois Hermione dans ses bras avant d'aller adresser les mêmes encouragement maternels aux deux Serpentard qui accompagneraient sa petite protégée.

Des rumeurs circulaient dans le château à leur sujet. McGonagall n'avait pas pour habitude de prêter attention aux bruits de couloirs, surtout lorsque cela concernait des élèves, mais à plusieurs reprises elle avait surpris des petits détails qui tendaient à confirmer ces rumeurs...

Des regards, des messes basses, des sourires, des effleurements, des mains qui se cherchaient, s'effleuraient et parfois s'entrelaçaient quelques secondes avant de s'éloigner... Des éclats de rire, de brèves étreintes... Sans compter qu'ils passaient tous leurs repas sans exceptions tous les trois à l'écart des autres, ils vivaient presque en autarcie. À eux trois ils se suffisaient et semblaient heureux ainsi. Minerva McGonagall avait même surpris le jeune Malefoy embrassant amoureusement sa précieuse élève, un soir, juste devant le tableau de la Grosse Dame. Elle avait été si troublée par cette marque d'amour entre un Serpentard et une Gryffondor – et qui plus est entre ces deux ennemis de toujours – qu'elle n'avait pas eu le coeur à intervenir. Elle avait donc simplement rebroussé chemin en silence, un sourire bienheureux aux lèvres.

Ces rumeurs ne concernaient pas uniquement cette relation, certains prétendaient que Miss Granger serait également devenue très (trop ?) proche de Mr Zabini, mais la directrice n'en avait cure. L'idée d'un triangle amoureux impliquant la sorcière la plus prometteuse qu'elle eut croisé dans toute sa carrière lui paraissait juste inconcevable.

Si elle savait...

Après avoir dit au revoir à McGonagall, Hermione aperçut Harry, Ron et Ginny se tenant un peu plus loin à l'écart. Elle se dirigea vers eux, sous le regard protecteur de Drago, et elle vint se planter devant ses anciens meilleurs amis, partagée entre le bonheur de prendre son indépendance avec ceux qui étaient devenus ses proches, et l'immense gêne provoquée par les regards troubles de ceux qu'elle considérait désormais comme de simples connaissances, du moins en théorie.

- Je... J'aurais aimé que ça se passe autrement... soupira-t-elle, penaude.

- Est-ce que tu es sûre du ton choix Hermione, demanda Harry.

- Oui, je suis sûre.

- Ça ne t'inquiète pas le moins du monde de partir vivre dans un autre pays avec deux Serpentard?

- Non Ron, j'ai appris à les connaître, je leur fais confiance. As-tu un problème avec ça? Serais-tu encore jaloux, s'agaça-t-elle.

- Je trouve juste ça dément que tu accordes toute ta confiance à ces deux glands que tu fréquentes depuis la rentrée.

- Tu sembles oublier que j'ai vécu toute une année avec Drago-

- Ah oui c'est vrai, la coupa-t-il en se gaussant d'un rire jaune. J'avais oublié votre grande histoire en France... Le Magenmagot fait bien les choses finalement, n'est-ce pas?!

- C'est vraiment dommage que tu le prennes comme ça Ronald. Tu ne fais même pas l'effort d'essayer de comprendre, soupira-t-elle, dépitée. J'espérais une autre réaction de la part de mes meilleurs amis, ajouta-t-elle en les regardant tous les trois tour à tour. Après tout ce que nous avons vécu ensemble... N'avez-vous donc tiré aucune leçon de cette foutue guerre? Tous ces morts... murmura-t-elle tristement. C'est là tout ce que vous avez retenu de toutes ces vies gâchées?

- Je ne vois pas le rapport-

- Le rapport, Ron, le coupa Hermione sur un ton sec. C'est que sans tout ces préjugés sur la pureté du sang, cette rivalité stupide entre les Maisons, il n'y aurait pas eu tout ces morts. Le rapport Ronald, c'est que cette mentalité arriérée à failli anéantir le monde sorcier, s'énerva-t-elle. Le rapport, mon cher ami, c'est que sans toute cette merde ton frère serait encore de ce monde!

- Je t'interdis d'utiliser la mort de Fred pour-

- Alors quoi?! Le coupa-t-elle une nouvelle fois, excédée. Sa mort était gratuite et cruelle, mais doit-elle pour autant être inutile? Penses-tu que Fred soit mort pour rien, Ron? Son sacrifice n'est donc pas suffisant pour que tu comprennes?!

- Tu n'as pas le droit... Je te défend de... murmura-t-il, la gorge serrée par un sanglot douloureux.

Ron était complètement abattu par les propos d'Hermione, touché en plein coeur. Il avait la tête basse et des larmes ruisselaient sur ses joues, tout comme Ginny qui vint s'accrocher au bras de son frère. Harry n'en menait pas large non plus, mais il tenait bon et soutenait le regard plein de colère d'Hermione tandis qu'elle continuait de vider son sac, dans l'espoir de leur faire prendre conscience de cette dangereuse doctrine qui empoisonnait encore leurs esprits malgré qu'ils avaient combattu l'origine du Mal.

- Et toi, s'adressa-t-elle à Harry qui se tendit instantanément. Un première guerre t'a pris tes parents, une deuxième a emporté Sirius, Lupin et Tonks, ajouta-t-elle, sa voix se brisant à la fin de leur noms. Sans compter Dumbledore, Rogue, Dobby, Edwige, et tant d'autres! N'est-ce pas suffisant? N'en avez-vous pas assez de perdre ceux que vous aimez, leur demanda-t-elle d'une voix tremblante mais dure. Vous n'êtes pas les seuls à avoir perdu gros dans l'histoire... Essayez juste une minute de vous mettre à la place de Drago... Essayez juste un instant d'imaginer le calvaire qu'il a vécu! Non seulement il a été utilisé comme une arme, un vulgaire pion, comme si sa vie ne valait rien, mais en plus sa famille a été réduite en lambeaux.

- Il a encore ses parents, lui, souligna le brun à lunettes.

- How, tu parles de son père qui ne sortira jamais d'Azkaban, et de sa mère qui ne sortira jamais de Ste-Mangouste? Mais le résultat est le même! Mes parents aussi sont encore en vie, et pourtant je les ai définitivement perdu, et tu le sais! Drago se retrouve seul, tout comme moi, et tout comme toi Harry, asséna-t-elle en lui jetant un regard larmoyant. Et vous voulez que je vous dise? J'admire Drago. Oui je l'admire, parce qu'il a eu l'intelligence de réfléchir par lui-même et la force de se défaire de l'emprise de ses parents, des Mangemorts et du Mage Noir. Il a été au moins aussi courageux que nous, sinon plus parce que lui était seul, complètement seul! Rogue était son seul réel soutien, le seul qui oeuvrait dans son intérêt, pour le protéger, tout comme il le faisait pour toi alors que tu t'acharnais à le haïr! aboya-t-elle. Et si vous soutenez le contraire alors ça voudrait dire que nous n'avons pas vécu la même guerre, que nous n'avons pas combattu pour la même cause...

Sur ces mots, Hermione tourna les talons. La situation avec ses anciens meilleurs amis ne s'était pas arrangée, loin de là, mais au moins son coeur était plus léger à présent. Elle se sentait libérée d'un poids qui lui comprimait le coeur depuis leur dispute le soir de la rentrée. Elle marchait en direction des deux Serpentard qui n'avaient rien manqué de la conversation, quand on agrippa sa manche pour la stopper.

- H-Hermione... souffla tristement Ginny qui s'approcha prudemment.

La rouquine avait pleuré, probablement à cause de ce que venait de leur dire Hermione, elle semblait toute piteuse, et si confuse, comme un petit animal perdu. La jeune femme allait s'excuser pour la rudesse de ses mots, mais à peine eut-elle ouvert la bouche que Ginny lui sauta au cou. Elle la serrait fort entre ses bras de sportive et sanglotait, le visage enfui dans la chevelure d'Hermione.

- Ho Ginny... renifla-t-elle en retenant ses larmes. Je... Je suis... désolée que-

- Ne t'excuse pas, je comprend... Oui, je comprend tout maintenant, murmura-t-elle à son oreille. Je te souhaite d'être heureuse Hermione, tu le mérites tellement...

Elles se séparèrent et se regardèrent un moment dans les yeux. Hermione avait la gorge nouée par l'émotion et se trouva incapable de prononcer le moindre mot, alors elle embrassa la rouquine sur la joue tout en lui caressant les cheveux.

Ce geste ressemblait fort à un adieu. En était-ce vraiment un? Seul l'avenir le leur dirait.

Mais pour l'heure, il était temps de partir. Hermione monta dans l'énorme carrosse, suivie de Drago et de Blaise qui vinrent s'asseoir près d'elle, et lorsque les pégases se mirent en mouvement et commencèrent à galoper pour prendre de l'élan, Hermione contempla la foule d'élèves à travers la vitre et adressa un petit signe de la main à tout ceux qu'elle quittait. Harry et Ron étaient toujours là, ils la regardaient s'envoler et s'éloigner, peut-être définitivement, et enfin ils levèrent la main à leur tour et répondirent à son au revoir.

- Tu es sûre de ton choix Hermione, s'enquit Drago dont la voix étonnamment douce l'arracha à ses tristes songes.

- C'est drôle, Harry m'a demandé exactement la même chose, sourit-elle, une lueur de désolation dans les yeux.

- Ça ne répond pas à ma question, répliqua-t-il, soudain inquiet et plus très sûr de vouloir entendre la réponse.

Hermione se tourna alors vers lui, s'approcha, et l'embrassa avec tendresse.

- Si ça, ça répond à ta question, je ne sais pas ce qu'il te faut, déclara Blaise qui leur fit un clin d'oeil. Dites, j'espère qu'on pourra avoir un elfe de maison là-bas, parce qu'on ne peut pas dire que je sois hyper ordonné comme mec...

Hermione grimaça à cette suggestion, le sujet des elfes étant pour elle toujours aussi délicat, mais elle n'eut pas le temps de s'insurger, Drago fut plus rapide à réagir.

- 'Pas hyper ordonné'?! Tu te fous de moi, y'a pas plus bordélique que toi! Et je parle en connaissance de cause! Tu es le pire cauchemar des elfes de maison, pouffa le blond.

- Oh ça n'avait pas l'air si terrible que ça quand on l'a fait sur son lit tout à l'heure, le défendit Hermione en haussant les épaules.

- Ah non mais là, c'était rangé! Alors imagine le chaos si je ne passais pas derrière lui pour ramasser ses slips qu'il laisse traîner sur le plancher, s'écria-t-il avec consternation. Et je n'ose même pas aborder le sujet des chaussettes d'après Quidditch... marmonna-t-il en grimaçant. C'est Blaise et son linge sale qui m'ont endurci tu sais, lança-t-il à Hermione avec un rictus taquin. Ma résistance à la torture, je la dois entièrement aux chaussettes puantes de Blaise, se gaussa-t-il.

- Oh arrête Drac', t'en fait toujours des tonnes! Ce n'est pas si bordéli- Attendez... s'interrompit-il subitement.

Hermione et Drago s'échangèrent un regard gêné assorti d'un petit sourire pincé.

- Aurais-je mal entendu? Vous avez forniqué dans MON lit?! Et pendant que je n'y étais pas en plus! S'égosilla-t-il, sous le choc. Vu vos tronches de coupables, ça ne fait aucun doute que j'ai bien entendu... ronchonna-t-il en croisant les bras sur sa poitrine d'un air boudeur.

Un éclat de rire retentit soudain dans tout le carrosse, Hermione et Drago se marraient que deux gosses qu'on chatouillait. Mais Blaise ne riait pas, il fixait ses deux amis qui se bidonnaient sans retenue. Après quelques minutes de fou rire, Hermione essuya ses yeux trempés et s'adressa à Blaise qui semblait encore renfrogné.

- Dis-moi... tu es vraiment fâché qu'on soit allé sur ton lit?

- Je-ne-suis-pas-fâché, rétorqua-t-il abruptement.

- Oh, à d'autres! Je vois bien que tu l'as mauvaise... dit-elle en changeant de banquette, venant s'asseoir tout près de lui pour poser sa joue contre l'épaule du métis en minaudant un peu pour l'attendrir.

- Tu peux remballer ton regard de chaton miséreux Hermine... Je sais ce que tu essais de faire et ça ne prendra pas cette fois, affirma-t-il en fronçant les sourcils.

Drago observait le petit manège de la Gryffondor en souriant, il savait déjà qui allait remporter ce duel.

- Je te promets de ne plus jamais faire de galipettes sur ton lit, ça te va?

- Mais je n'ai rien contre le fait que tu t'aventures sur mon territoire... se radoucit-il, arquant un sourcil malicieux.

- Alors quel est le problème?

- C'est très simple : MON lit, MES galipettes, c'est tout...

- How! Je vois, opina-t-elle en gloussant. La prochaine fois, je m'assurerai que tu sois bien dans ton lit avant de me vautrer dedans, promit-elle avec un clin d'oeil, ce qui rendit instantanément le sourire à Blaise.

Drago pouffa en secouant la tête, il en était sûr. Une fois de plus, elle prenait l'avantage sur le Serpentard et elle obtenait ce qu'elle voulait! Elle était forte, très forte... Impossible de lui résister, et il était bien placé pour le savoir.

Après une vingtaine de minutes dans le silence complet, le blond décrocha son regard de la fenêtre et constata que ses deux amis avaient sombré dans le sommeil. Blaise s'était calé au bout de la banquette, adossé à la paroi, la tête posée contre la fenêtre, abritant entre ses bras une Gryffondor confortablement recroquevillée contre son torse, dormant elle aussi à poings fermés.

Drago sentit son coeur se ramollir en les voyant ainsi. Tout ce qui comptait vraiment dans sa vie était réuni là, devant ses yeux. Il pourrait les contempler des heures durant, louant la grande Morgane de lui avoir offert cette miraculeuse opportunité: une année.

Il en avait fait du chemin depuis un an! La meilleure année de sa vie, du moins... pour l'instant. Il sortit la fameuse clef de sa poche, celle de cette maison qu'il avait tant détesté au début, tout comme il détestait Hermione. Et aujourd'hui il n'arrivait pas à concevoir un avenir sans elle tant elle était devenue importante pour lui, indispensable. Et cette maison – celle qui avait vu mourir leur haine et naître leurs sentiments – allait de nouveau les accueillir, les protéger, les voir mûrir encore un peu plus.

Son ami, son amour et lui-même, tous les trois sous le même toit... l'équation lui semblait parfaite, et son bonheur était à son apogée.

Que demander de plus?

Encore une année... murmura-t-il pour lui-même en contemplant ses deux complices avec un sourire triomphant, serrant la précieuse clef entre ses doigts.

oOFIN?Oo