Disclaimer : Tous les personnages cités dans cette fanfiction (Deadpool, Spider-Man, Iron Man, etc) sont la propriété de Marvel Comics.
Music : The Neighbourhood — Daddy Issues

Note auteure : À ceux qui m'ont lu jusqu'ici, merci et bravo ! Je tire ma révérence.


« . »

Tout se résume à la physique. Je l'ai dit un jour, sans vraiment m'attarder sur les détails. Je n'ai cessé de le répéter depuis, parce que je pensais y trouver la clef ou un sens profond caché. Tout ce temps, j'ai essayé d'y croire et, plus que tout, j'ai essayé de m'y tenir. Je me suis même affamé pour me donner raison. Mais cela n'a jamais suffi. Cela ne lui a jamais suffi.

Elle n'avait pas faim physiquement. Elle ne me rendait pas fou ; elle était un symptôme de ma folie. Un petit de rien du tout, qui devint un tout de rien, de mots vides, de pensées absurdes, de matières grises, puis noires, puis roses.

J'aurais toujours cette voix dans ma tête : grande, puissante, immuable. C'est trop tard pour en changer. Dès la seconde où elle s'est mise à parler, elle me possédait. Ou plutôt, je la possédais. Il ne tient qu'à moi de ne pas l'écouter et d'espérer. Espérer qu'à l'aube du jour, mon esprit n'aura pas complètement dérivé, qu'elle ne m'aura pas à nouveau emporté.

J'aimerais la comprendre, l'avoir en pitié, mais ce n'est pas le cas. Elle a parfois le dessus, dans des moments de faiblesse qui me font vaguement l'envier, mais pour le reste, je la déteste. Je ne veux pas avoir affaire à elle. Je ne veux pas me mettre à douter. Je veux la voir crever. Je veux manger. Je veux beaucoup, sûrement trop.

Tony fut celui à me proposer quelque chose pour combler ce manque, durant l'entraînement, lundi. D'abord réticent à l'idée d'être suivi de près par un milliardaire excentrique, j'ai finalement admis en avoir besoin. Je suis, par conséquent, venu m'installer dans un de ses nombreux quartiers le week-end suivant. En outre, le déménagement fut expéditif, tout comme les dernières embrassades. Tante May ne m'en a pas plus voulu que ce que je pensais. Au fond d'elle, elle doit être soulagée que je sois pris en main par un professionnel — selon la version officielle. Je regrette néanmoins de ne pas l'appeler aussi souvent que je lui avais promis.

Gwen fait aussi partie de ses adieux que j'ai dû encaisser malgré moi. On a rompu dans les couloirs de l'Université, ce qui fut loin d'être le lieu propice à une séparation. Mis à part ce manque de classe, le pire fut sa réponse : elle m'a souhaité le meilleur, sans plus, sans une larme. Je n'ai pu qu'acquiescer, comprenant aussitôt qu'elle avait accepté mon départ bien avant qu'il ne se produise. J'ai eu le sentiment d'avoir manqué le coche dans notre relation. Si j'avais été plus présent, elle ne m'aurait pas déjà considéré comme un amour passé, mais c'est un « si » d'un autre monde.

Je ne suis plus rongé par le doute dorénavant. J'ai Wade. Il m'aide, il est là. Il reste, aussi. Je ne sais pas quoi lui répondre, alors je me tais. Je l'écoute lui, lui et ses voix qui me faisaient tellement peur, parce qu'ils sont capables de faire taire la mienne. Ils sont capables de m'offrir leur silence, juste en m'adressant un sourire.

Alors, je lui souris en retour, heureux d'avoir eu le courage de revenir sur le toit de son baiser échoué. Accoudés à l'épais rebord de l'immeuble, mes bras encadrent son corps avachi en avant (il n'a évidemment pas pu résister à s'asseoir à califourchon sur le muret), prêts à le rattraper au moindre glissement. Il pique tout naturellement du nez, une joue fourrée dans le logo Hello Kitty, tandis que je le laisse divaguer jusqu'à avoir la bouche sèche.

Le regard ancré sur le mouvement de ses lèvres, j'ai encore du mal à réaliser notre nouvelle proximité et l'aisance avec laquelle on tue le temps. Il me comprend, c'est l'une des raisons qui nous poussent et nous gardent l'un vers l'autre. Il m'empêche de sombrer. Je suis une bombe à retardement et pourtant, il trouve toujours le moyen de me désarçonner. Il est la clef.

Lorsque sa main s'accroche à mon t-shirt et me tire à lui, je ne me fatigue plus à le repousser. Je préfère utiliser cette énergie à d'autres fins.

C'est bon. C'est simple.

Quand je relève enfin la tête, la beauté sculpturale de l'église retient encore un instant mon souffle. Après plus d'un mois et demi sans lui rendre visite, elle compte parmi les rares choses qui n'ont pas bougé d'un pouce dans ma vie. Elle porte en elle un brin de certitude. Elle me fait croire à un avenir sans rechute.

Wade ne met pas longtemps avant de s'endormir, bien que la moitié de son corps pende aux côtés du vide. De nous deux, je suis le seul à être conscient du danger auquel il s'expose sans sourciller, mais pour cette fois, cela ne me dérange pas d'être celui qui s'inquiète.

Et si je suis toujours affamé, cela n'a plus autant d'importance.

« Merci. »