Here we go again !...

Nouvelle FF, qui fait suite à la saison 3. Je ne vous en dis pas plus, et vous laisse découvrir. :D

La première FF, qui raconte le passé de Lexa, sert tout comme la série, de base à celle-ci. Je vous encourage donc, si ce n'est pas déjà fait, à la lire afin de situer davantage des paysages/faits/personnages évoqués :)

Bonne Lecture ! (et merci par avance pour vos retours, qui m'ont énormément encouragée et soutenue dans l'écriture de la première.)

"May we meet again."


Chapitre 1 « Don't we deserve better than that ? »

« Je serai toujours avec toi. »

Non ! Lexa ! Lexa ! Non !... Je tente de la retenir, mais mon corps ne veut pas bouger. Pourtant mon esprit lui crie de rester près de moi. J'essaie de tendre la main, et surtout de serrer son bras pour la retenir. De la serrer si fort contre moi pour qu'elle ne puisse pas partir. Mes yeux cherchent les siens, mais je la vois déjà s'éloigner et se ruer sur nos assaillants, telle une furie, dégageant tant de force et de rage de vaincre. Ses deux épées en l'air, elle leur saute dessus, et je veux rester là, avec elle, me battre à ses côtés s'il le faut. Je veux la supplier de rester avec moi quoi qu'il arrive, et de passer cette porte vers laquelle mon corps me pousse indépendamment de ma volonté. Je veux la supplier de venir avec moi, je ne peux que me résoudre à la laisser derrière moi. Lexa !...

Je m'entends crier son prénom, lorsque j'ouvre subitement les yeux. Derrière ma vision trouble, je vois un visage se dessiner, égayant alors tous mes sens. Je ne demande qu'à la voir à nouveau. Je cligne des yeux, je ne veux pas rêver. Mais la personne que j'ai alors de penchée sur moi, lorsque tout devient enfin clair, ne fait que me ramener à ma triste réalité. Je vois Bellamy qui me regarde, l'air inquiet. Sa main posée sur mon épaule, je sens qu'il y exerce une petite pression, tandis que je me relève subitement en me frottant le front. Ma propre sueur me colle aux doigts, et je ressens un frisson qui me parcoure le dos, surement dû à la fraicheur de la nuit. Ou peut-être est-il dû à mon rêve. Je revois cette scène, encore et encore, la seule fois où je lui ai dit que je l'aimais. La dernière fois que je l'ai vue. La dernière fois où, en quelque sorte, nos esprits ont été connectés. Je lève les yeux vers Bellamy, qui se tient à présent assis en face de moi, et dont le visage est à peine éclairé par le petit feu qui brule à nos pieds. Silencieux, je vois bien qu'il ne sait pas trop quoi dire, ni même quoi penser. Je me frictionne les bras, pour tenter de me réchauffer, et affiche un visage surement contrarié. J'inspire et me racle la gorge, tout en attrapant un bout de bois pour remuer un peu les braises incandescentes. En approchant mes mains du feu, je les regarde, et me rappelle la chaleur de sa peau. Son visage m'apparaît, et son sourire illumine mon âme. Mais un crépitement me sort de ce souvenir, et la dure réalité de la nuit ne me rattrape que bien trop vite. La dure réalité de la nuit sans elle.

« Tu faisais un cauchemar, n'est-ce pas ? » me demande Bell, brisant ainsi le silence.

Mais je n'ai pas envie de lui répondre. J'incline la tête en silence et scrute à présent le sol. Je ne sais pas ce qu'il a pu entendre, ou voir pendant que je dormais et que lui montait la garde. Ce que je sais, c'est que cela fait plus de deux semaines qu'ALIE a disparue, et que je n'ai jamais évoqué Lexa depuis. Ni à Bell, ni à personne. Pourtant, cela fait plus presque un mois que je ne vis plus, presque un mois que mon cœur saigne, et que je ne sais pas comment le suturer. Ni même s'il sera capable de cicatriser un jour. Cela fait presque un mois que chaque nuit je la vois, absolument chaque nuit. D'abord, je la revois mourir entre mes mains, je revois son sang les napper et son regard se perdre dans le mien avant de s'éteindre complètement. Certaines nuits je revis ce moment, comme si mon monde s'était écroulé ce jour-là, m'empêchant depuis d'avoir une raison de continuer. Tout, tout depuis sa perte me ramène à elle. Une raison de continuer, j'en ai. J'en ai même plus d'une, à vrai dire. Perpétuer tout ce pour quoi elle s'est battue, tout ce que nous avons fait ensemble. Unir nos peuples. Sauver le mien. Sauver le sien. Sauver les nôtres. ALIE. La menace nucléaire, selon ALIE. Des raisons j'en ai plein, mais une réelle raison de continuer à apprécier la vie, j'ai l'impression de ne plus en avoir depuis qu'elle m'a été enlevée. Lorsque j'ai fermé ses yeux, j'ai fermé mon cœur. Lorsque j'ai vu Titus, l'homme qui me l'a prise, je l'ai vu m'ôter par la même occasion une partie de moi, sans rien pouvoir faire. Depuis, je respire, mais sans avoir l'impression que mon cœur bat encore, autrement que simplement pour ma survie. « La mort n'est pas la fin»… Ce sont ses mots, Lexa croit… croyait réellement que la mort n'est pas la fin. Je n'ai jamais réellement compris comment ce peuple peut avoir de telles croyances. Personne n'est jamais revenu de la mort pour nous dire ce qu'il y a après. Personne, sauf elle, en un sens. Je me prends la tête entre les mains, comme épuisée par mes propres pensées qui m'obsèdent depuis que je l'ai perdue. J'ai envie de crier, et pourtant je ne me l'autorise pas. Je ne m'autorise pas à la pleurer, et pourtant, il est de coutume chez eux de pleurer les morts une fois la guerre terminée. La guerre est belle et bien finie, du moins celle contre ALIE, mais la mienne ne fait que commencer. Apprendre à vivre sans elle… Mon combat est loin d'être terminé, et je ne sais pas si celui-ci je pourrai le gagner un jour. En admettant déjà que l'on survive, si cette menace est bien réelle. Mais si je survis, à quoi bon si elle n'est plus là… Pourtant, je vais devoir apprendre. « Tu as raison Clarke, la vie c'est bien plus qu'uniquement de la survie… ». Je renifle en sentant mon cœur se serrer, et j'en oublie même que je ne suis pas seule.

« Clarke… » me dit-il, d'une voix douce et compatissante.

« Quoi ? » arqué-je.

« Tu peux me parler tu sais. »

Je crispe mes mains sur mes genoux, et plonge mon regard dans le sien, avant de le baisser à nouveau, dédaigneusement. Lui parler, oui, je peux. Mais autant il y a maintenant un moment, je l'aurai fait sans aucune hésitation, autant aujourd'hui, je me sens incomplète. Et je ne sais plus si je peux réellement être entière avec lui, ni avec personne d'autre d'ailleurs. Parce que je ne le suis plus avec moi-même, alors comment l'être avec quelqu'un d'autre ? Je reproche beaucoup de choses à Bellamy, et le sujet a été évoqué, mais pas réellement abordé. Lorsque notre temps était compté avec ALIE, je n'avais pas le temps de régler mes comptes. Ma priorité était comme toujours de sauver les miens, et pour cela, j'avais besoin de lui. J'avais besoin de le récupérer auprès de moi, et lui rappeler tout ce que je lui reproche n'aurait pas été judicieux à ce moment-là. Il était tout ce qu'il me restait, sans ma mère, sans Lexa… Seuls mes amis restaient, et j'avais besoin d'eux.

« Tu criais son nom. Tu l'appelais. »

Lorsqu'il me dit cela, je lui fais à nouveau face. Je sens mon cœur s'accélérer, mon corps se raidir, et je tente d'inspirer profondément, comme pour contenir toutes les émotions qui essaient indépendamment de ma volonté de refaire surface. Tout ce que j'essaie d'enfouir chaque jour, en espérant qu'avec le temps la douleur finisse par disparaître.

« Tu appelais Lexa, Clarke. »

« Peu importe. » nié-je.

« Ne dis pas cela. Je t'ai vue te réveiller lorsque je t'ai touché l'épaule, parce que justement tu criais son prénom, et ton visage paraissait torturé. Elle te hante, Clarke. »

Je me lève subitement, et fais quelques pas sur le côté en observant la profondeur de la nuit au travers des bois qui nous entourent, juste avant de me retourner violemment vers lui :

« Nous devons trouver Luna. »

« Clarke… » me répond t'il en se levant à son tour, et en tentant de s'approcher de moi. « Nous allons trouver Luna, mais peut-être que… »

« Peut-être que quoi, Bellamy ? » lui réponds-je, sèchement, en m'approchant de lui. « Peut-être que quoi, hein ? Lexa est morte, et rien ne la ramènera. Notre peuple lui, est toujours là, et il a besoin de nous. Nous devons trouver Luna, et nous devons le faire vite. »

« Je le sais ça, et nous la trouverons comme nous l'avons déjà fait la première fois. Mais peut-être que tu devrais… » tente t'il de me calmer, voyant que je commence à m'énerver, et à lui tourner les talons. « Peut-être que tu devrais enfin sortir ce que tu as sur le cœur. »

« Je ne suis plus très sure d'en avoir un… » murmuré-je à son attention, ou peut-être à moi-même, avant de commencer à m'enfoncer dans les bois.

« Clarke, où vas-tu ? » l'entends-je me demander, une pointe d'inquiétude dans la voix.

« J'ai besoin d'être seule. » lui réponds-je en me retournant et lui jetant un regard autoritaire. « Je ne risque rien, rassure-toi. »

« Les bois ne sont pas sûrs. »

« Rien n'est sûr depuis que nous sommes ici, Bellamy. Rien n'a jamais été sûr sur l'Arche. Et rien ne sera jamais sûr. » clôturé-je la discussion en reprenant mes pas, le laissant ainsi seul derrière moi auprès du feu.

Alors que je m'enfonce dans la profondeur de la forêt, je sens l'humidité de la nuit se déposer sur mon visage. Instinctivement, je me l'essuie de ma main droite, pour en fait me rendre compte que ce n'est pas la forêt qui l'a humidifié. C'est bien mon âme qui pleure. Pourtant, je ne sais pas quelle quantité d'eau il reste encore dans mon corps pour qu'il puisse toujours en évacuer autant, mais c'est là que la science a quelque chose de fascinant. Avec toutes les larmes que j'ai déjà versées secrètement, je me demande encore comment c'est possible, et pourtant… Mes pieds se posent l'un devant l'autre, sans que je ne sache réellement où ils m'amènent. Je sens les branchages et feuilles se craqueler sous mon poids, et mes mains effleurent les troncs des arbres alentours. Ces bois, je les connais bien. J'y vis depuis plusieurs mois, je les ai parcourus avec Finn, avec chaque jeune qui a été envoyé sur Terre avec moi, Octavia, Jasper, Monty, Raven, Bellamy entre autres. Avec ma mère et Kane. Avec plusieurs Grounders, dont Lincoln, Indra, et Anya… Avec Lexa. Ces bois, je ne peux pas dire que je ne les connais pas, et pourtant… pourtant ils ont toujours quelque chose d'inconnu pour moi. Ils ne sont pas mon élément, mais plutôt celui des grounders, qui eux, ont grandi ici. Je sens l'odeur de l'écorce sur le bout de mes doigts, et je pense à elle. C'est sa tribu qui vit ici, son clan, celui dont elle est issue. Cette odeur-là, elle la connaissait. Elle connaissait chaque centimètre de cette forêt, chaque son et chaque espèce y vivant, j'en suis persuadée. Je me rappelle la fois où nous avons échappé de justesse à Pauna, comme ils l'appellent. Cette fois-là, Lexa s'était blessée à l'épaule, et m'avait pourtant veillée toute la nuit, prête à me protéger de chaque menace pouvant exister dans cette forêt. Mais pour elle, il n'y en avait aucune. Elle était là, et elle connaissait ces bois mieux que quiconque. J'étais en sécurité auprès d'elle. Je sens mes lèvres trembler, et continue d'avancer malgré tout, en luttant pour étouffer à nouveau mes larmes.

Je déambule dans les bois, sans même me soucier d'un danger existant, sans même savoir où je vais. Mon corps me porte, et mon esprit lui, se laisse porter. Il ne lutte pas, ma raison est désormais trop faible pour prendre le dessus, et me faire faire demi-tour. Que peut-il m'arriver de pire ? La seule chose qui me tient encore debout est de ne pas savoir comment je fais. D'ignorer pourquoi. D'arrêter de chercher une raison à tout, parce que dans l'absolu, je n'en trouve aucune. Je ne trouve aucune raison à sa mort. Aucune raison valable. Je ne peux pas m'empêcher à cet instant de penser à Octavia, et à son regard lorsqu'elle a tué Pike devant nous, vengeant ainsi la mort de Lincoln. Depuis qu'elle a quitté Polis, nous n'avons eu aucune nouvelle, nous ne savons pas où elle est, ni même si elle est en vie. C'est d'ailleurs la principale préoccupation de Bellamy, qui n'arrive toujours pas à la laisser grandir et à accepter ses choix. Et qui n'arrive pas non plus à déculpabiliser, et à raison. Octavia n'est pas prête de lui pardonner sa part de responsabilité dans la mort de celui qui était toute sa vie à présent. Au fond de moi, j'espère retrouver O. lorsqu'on retrouvera Luna, j'espère qu'elle sera auprès d'elle, et qu'ainsi Bellamy aura une réelle chance de cette fois s'excuser. Mais si elle n'y est pas, alors c'est que, comme moi, elle ne veut pas être retrouvée. Elle ne le sera que si un jour elle est prête à l'être. Et Bellamy doit accepter cela. C'est la moindre des choses qu'il puisse faire pour sa sœur.

J'enjambe un tronc tombé à terre, et perçois le petit son d'un ruisseau qui doit se trouver un peu plus loin sur la droite. Je me dirige vers lui, et manque d'immerger totalement ma chaussure dedans pas inattention lorsque nos chemins se croisent. De toute façon, cela n'aurait eu que peu d'importance. Quoi de pus facile que de faire sécher sa chaussure, ou même de continuer d'avancer le pied mouillé ? Je me penche et caresse délicatement l'eau glaciale. Elément pur, dont nous ne prenons malheureusement pas assez soin. Je lève mes yeux vers l'immensité du ciel, caché en grande partie par la cime des arbres que je perçois à peine dans la nuit noire. Les bruits de la forêt ne me rassurent guère, mais elle, au moins, respire. Je prends à mon tour une grande bouffée d'air frais, mais le nœud que j'ai dans le ventre depuis plusieurs semaines m'empêche de ressentir cette sensation de vie se déverser dans mon bassin. Je décide donc de poursuivre mon chemin, sans réfléchir. Je remonte le ruisseau, et passe plusieurs longues minutes à avancer. Sans savoir où je vais. Sans même savoir pourquoi. Les images de mon rêve, la vision de son visage me hantent à chaque seconde. Je cligne des yeux comme pour essayer de les chasser, mais sans y parvenir. Au fond, en ai-je vraiment envie ? Ai-je envie de la tenir loin de moi ? Mon cœur se serre, et je touche mon visage. En fermant les yeux, j'arrive à peine à percevoir encore toute l'intensité de son toucher, et la douceur de sa peau contre la mienne. Pourtant les images de cette nuit n'étaient pas réelles. Lexa était là, dans la Cité des Lumières, mais c'était plutôt son esprit qui était matérialisé, tout comme le mien, dans cet univers alternatif. Quand je l'ai revue, je n'y croyais pas. Je n'y croyais plus. J'étais sur le point d'abandonner, à bout de force, totalement désespérée, et elle est apparue. En une seconde, elle a été ma bouffée d'oxygène, ma raison de me relever et de continuer ce combat, malgré toute cette douleur qui s'emparait de moi, crispant chacun de mes muscles. Je n'arrivais pas à croire qu'elle était là, bien debout, toujours plus belle et bien vivante. Vivante. Qu'importe finalement la réalité du monde dans lequel on se trouvait à ce moment-là, elle était ma réalité. L'espace d'un instant lorsqu'elle était en face de moi, je me suis même surprise à émettre l'hypothèse que rester là n'était peut-être pas si mal. Puis elle a décidé de me quitter… encore. Elle aurait pu passer cette porte avec moi, mais au lieu de cela, elle s'est jetée à corps perdu au milieu de dizaines de personnes contrôlées par ALIE. Parce que c'est ce que son devoir lui dictait de faire, et j'ai passé cette porte, sans elle, parce que c'est ce que moi, je devais faire. Mais aujourd'hui, je suis sûre que mon cœur lui, n'a jamais passé cette porte. Et mon esprit n'arrive toujours pas à réellement revenir de la Cité des Lumières, comme toujours piégé là-bas, alors que justement c'est ce contre quoi je me battais. Pour que chacun de nous puisse garder son libre-arbitre, et sa liberté. Ai-je réellement conservé la mienne, ou l'ai-je perdue en perdant Lexa ? Depuis que je suis sur Terre, je n'ai fait qu'enchainer les mauvais choix, j'ai tué bien plus que jamais je n'aurai pu imaginer, même dans mes pires cauchemars. Et aujourd'hui, je n'arrive même plus à me regarder dans une glace. Aucun regard ne me fait oublier tout le sang que j'ai sur les mains. Aucun, sauf le sien. Lorsqu'elle me regardait, je me suis même surprise un jour, pour la première fois, à oublier la personne horrible que je suis devenue.

J'arrive dans une petite clairière, et le ciel étoilé apparaît alors d'un coup devant mes yeux. J'inspire, et stoppe durant quelques secondes mes pas pour l'observer. Puis je m'avance pour me retrouver sur une petite falaise, surplombant l'immensité de la forêt qui s'étend à mes pieds. Une brise vient soulever ma longue chevelure blonde, et caresser mon cou. Je réajuste mon manteau, que je garde précieusement depuis que j'ai quitté Polis. Mon regard se perd dans les constellations, que je ne connais que très peu finalement, tandis que ma main part à la recherche de cet objet que je cache dans mon dos depuis un long moment déjà. Jamais je ne m'en sépare, je n'y arrive pas. Il est là, et cela me rassure. Je déglutis difficilement, et viens à présent dans la poche intérieure de mon manteau, pour attraper la petite boite métallique qui s'y trouve. A la lueur de la lune, je peux voir le motif dessiné dessus, et j'en profite donc comme chaque jour pour l'ouvrir. A l'intérieur se trouve la puce, l'Esprit du Commandeur, la Flamme comme ils l'appellent. Une partie de son esprit selon Titus. Et c'est vrai, sinon je ne l'aurai pas revue dans la Cité des Lumières, lorsque j'ai l'ai mise dans ma propre nuque, juste avant d'y accéder. Scientifiquement, je n'explique pas vraiment comment son esprit peut s'y trouver, mais au fond de moi, j'ai bien espoir qu'il y soit réellement. C'est tout ce qui me reste d'elle. Cette puce. Son esprit. Je la caresse du bout du doigt, et ravale encore une fois mes larmes. Cette puce que j'ai juré de protéger de ma vie s'il le faut, cette puce qui représente encore notre plus grand espoir aujourd'hui. Titus m'a transmis sa fonction de Fleimkepa, que je prends très au sérieux. A présent gardienne de la flamme, je dois m'assurer de sa sécurité, et de son avenir. Luna… Luna reste la seule aujourd'hui, qui peut encore la recevoir. Parfois, je me dis que j'aimerai pouvoir me la remettre, peut-être dans l'espoir fou de pouvoir encore la revoir, qui sait ? Mais je ne suis pas Nightblood, je ne peux supporter la puce trop longtemps sans risquer ma vie. Et bien que par moment je ne sache plus trop pourquoi et comment je respire encore, je ne peux pas non plus faire cela aux personnes qui sont toujours là, et surtout à ma mère. Malgré nos différents, j'ai failli la perdre il y a encore peu de temps, et je ne peux pas être aussi responsable de sa mort. Pas pour uniquement revoir Lexa, elle-même ne me le pardonnerait jamais. Et puis maintenant que la Cité des Lumières et ALIE ont été détruites, je ne sais pas ce que je trouverai en mettant la puce à nouveau, à part peut-être la mort. Mais peut-être pas Lexa.

« Tu me manques tant… » murmuré-je, comme si elle pouvait m'entendre.

Mais subitement, je referme le couvercle de la boite, et la cache rapidement dans ma poche. Je passe ma main dans mon dos, et reste attentive au bruit suspect que je viens d'entendre. Quelqu'un approche, et de toute façon, je sais pertinemment que si un grounder me menace d'une lance, ou d'une flèche, je ne pourrai rien y faire. Je resserre malgré tout ma main sur l'objet caché dans mon dos, et finis par me retourner doucement, pour faire face à mon adversaire. Là, une silhouette se dessine à l'orée du bois, et apparaît dans la pénombre. Je plisse les yeux, ne parvenant pas à savoir si je suis menacée ou non. Silencieusement, je lui fais à présent face, et comprends que derrière moi, il n'y a aucune issue. Je ne suis pas la meilleure au corps à corps, mais j'espère malgré tout ne pas avoir à me battre. Depuis plusieurs semaines et malgré les recommandations de ma mère ou de Bellamy, je refuse de prendre une arme à feu avec moi. Si je dois essayer de sauver ma propre vie, cela se fera donc difficilement, mais je n'abandonnerai pas sans avoir essayé. La silhouette se dessine de mieux en mieux, parce que la personne s'avance doucement vers moi. Lorsque je la vois, je ne peux qu'être surprise, et se mêlent alors en moi plusieurs sentiments. De la confusion, de la surprise, du soulagement. Je fais un pas en avant, comme pour être sûre que mes yeux ne me trompent pas, dans la faible luminosité qui m'entoure.

Je relâche la pression de ma main, alors qu'elle continue de s'avancer, se trouvant à présent à seulement quelques mètres de moi. Je redresse la tête, et adoucis un peu mon regard, bien que toujours sur la défensive. Lorsque je vois de manière nette la forme de ses cheveux se dessiner, je m'avance à mon tour vers elle. Luna se tient là, en face de moi, fière et indomptable. C'est l'impression qu'elle me donne. Imprévisible, elle me laisse depuis notre première rencontre un gout amer dans la bouche, mais j'éprouve pour elle malgré tout beaucoup de respect. Son charisme ne me laisse pas indifférente. Je la cherche, et elle apparaît. Quelque chose chez elle me rappelle Lexa, alors que pourtant, elle n'a pas l'air de la porter dans son cœur.

« Tu me cherches, Clarke ? » brise t'elle le silence, d'une voix douce, mais assurée.

« Luna… » lui réponds-je, en guise de salutations. « Oui, je te cherche. Mais comment le sais-tu ? »

« Mes hommes vous ont vus il y a maintenant deux jours dans la forêt, et vous ont observés depuis. »

« Observés ? Donc tu nous suis depuis deux jours, sans même te montrer ? » lui demandé-je, en lui faisant désormais face, à seulement quelques centimètres d'elle. « Pourquoi ? Pourquoi continuer à te cacher puisque tu sais que je te cherche, et que tu es la raison de ma présence ici ? »

Le ton de ma voix a changé, et je lui notifie bien mon agacement de son comportement. Mais pour toute réponse, je n'ai dans un premier temps qu'un regard appuyé d'un sourire en coin, quelque peu provocateur. Puis elle incline légèrement la tête, et me répond :

« Je suis venue dès que l'on m'a prévenue de ta présence ici. Je sais très bien que tu ne viendrais pas jusqu'ici, et surtout vers moi, si ce n'était pas pour me voir. Alors, quelle est la raison de ta visite, cette fois-ci ? »

« J'ai…. »

Mais je n'ai pas le temps de finir ma phrase que Bellamy surgit furieusement des bois en braquant son arme vers elle, et en appelant mon prénom.

« Clarke ? » me dit-il, sur un ton inquiet.

« Baisse ton arme, Bellamy » m'empressé-je de lui répondre, tandis que Luna se tient à côté de moi, et lui fait à présent face. « Baisse ton arme, s'il-te-plait. »

Luna lève silencieusement son bras, et je comprends alors qu'elle n'est pas seule. Mon cœur s'accélère et je me retourne vers elle, surprise qu'elle soit prête à nous menacer, avec certainement des archers dans les arbres qui n'attendent que son signal. Elle qui, peu de temps auparavant, a refusé de prendre la puce parce qu'elle ne se sentait pas concernée par notre combat contre ALIE. Parce qu'elle refuse le chemin du Blood must have Blood que leur tradition leur impose depuis des générations jusqu'à ce que Lexa ne change cela. Elle qui, visiblement, éprouve une grande rancœur envers cette dernière, et qui n'approuvait pas sa manière de les diriger selon leurs propres traditions. Elle qui a choisi un chemin dénué de toute violence, guerre ou haine. Mais elle qui pourtant, est une excellente guerrière, comme nous avons pu le constater lorsqu'à elle seule, elle a tué plusieurs hommes sans même essuyer la moindre blessure. Je sens que la tension monte, et tant que Bellamy n'abaisse pas son arme, Luna ne lève pas la menace à notre encontre. Je détourne mon regard vers lui, et lui fais signe de baisser son arme immédiatement.

« Bellamy, baisse ton arme ! »

« Je croyais que tu étais pacifique Luna ? » lui demande t'il, en la regardant toujours à travers son viseur.

Ne le voyant pas bouger, je m'interpose entre lui et Luna, le surprenant. A présent droite face à la trajectoire de son tir, je ne bouge pas et le regarde fermement, en le défiant de tirer sur moi.

« Qu'est-ce que tu fais ? »

« Si tu tires, nous sommes morts tous les deux. Luna n'est pas une menace. Baisse ce foutu flingue, Bellamy ! Tu as déjà fait bien assez de ravages comme ça, non ? » commencé-je à hausser le ton, l'amenant ainsi à se confronter à ses envies meurtrières et son manque de discernement.

Il finit par abaisser son arme, mais Luna n'abaisse pas pour autant son bras. Je m'avance vers lui et lui tends la main pour qu'il y dépose son fusil. Voyant son hésitation, j'insiste et lorsqu'il se résigne enfin à le sortir de son épaule et me le remettre, je me retourne, et lance un regard à Luna. Elle abaisse alors son bras, et témoigne ainsi d'une sorte de confiance qu'elle me porte. Je dépose le fusil un peu plus loin, et même si je sais que Bellamy a un revolver caché à sa ceinture derrière son dos, il comprend très bien qu'il n'a pas intérêt à le sortir.

« Nous ne sommes plus en guerre, Bellamy. »

« Mais eux, si. » me répond t'il, non convaincu et peu serein de la situation.

Je rejoins Luna, pour reprendre là où nous en étions juste avant cette malencontreuse démonstration de force. Je peux lire dans son regard qu'elle est à nouveau ouverte à la discussion, alors j'en profite.

« Nous avons besoin de toi, Luna. » tenté-je une nouvelle fois, avec une impression de déjà-vu qui me laisse perplexe quant à sa réponse.

« Et pourquoi donc ? »

« Pour la même raison que la première fois. » s'empresse de répondre Bellamy.

Luna fait demi-tour dans un geste vif, et s'éloigne en direction de la falaise. Je foudroie Bell du regard, et lui signifie de me laisser lui parler sans intervenir. J'ai fait l'erreur la première fois de mal lui présenter les choses, et je veux tenter une nouvelle approche, en espérant que ce manque de diplomatie de la part de Bell n'ait pas éliminé toutes nos chances de maintenir ce dialogue ouvert. Tandis qu'elle scrute l'horizon étoilé, je la rejoins.

« Je t'ai déjà donné ma réponse, Clarke. »

« Je sais que tu ne veux pas de la Flamme, Luna. Mais tu es la dernière Nightblood, et donc la seule à pouvoir la prendre. »

« Etre Natblida n'est une raison suffisante pour la porter, il faut vouloir le faire. Il faut vouloir devenir Heda, et je ne veux pas. Ce n'est pas ma voie, ce n'est pas ce que j'ai choisi. »

« Je peux comprendre cela, mais ton peuple a besoin de toi. » tenté-je de la convaincre.

« Mon peuple m'a déjà. »

« Je parle de tout ton peuple… »

Lorsque je lui dis cela, elle me fait face, et plonge son regard dans le mien. Je ne comprends pas pourquoi Luna refuse à ce point de considérer cette éventualité, même si je peux comprendre son choix de vie. Il y a bien d'autres moyens de les diriger, Lexa en était la preuve vivante. Mais…

« Je ne suis pas Heda, et je ne veux pas l'être. Je ne suis pas celle qu'il faut pour cela. »

Elle n'est pas Lexa. Je le sais mieux que quiconque. Mon cœur se serre, et je ravale.

« Je n'ai pas voulu de ce rôle il y a des années Clarke, ce n'est pas pour le prendre maintenant. Je ne prendrai pas la Flamme, et je les dirigerai pas. »

« Pourquoi refuses-tu à ce point ? » lui demandé-je, la gorge nouée, et encline à un sentiment de colère et d'incompréhension.

« J'ai mes raisons. »

« Nous avons tous nos raisons de faire ce que nous faisons, Luna. Mais tu es la seule qui peut encore réussir à les fédérer. »

« La grande WanHeda. Pourquoi ne le fais-tu pas toi alors ? » me demande t'elle, provocatrice.

« Je ne peux pas. »

« Tu ne peux pas Clarke, mais voudrais-tu le faire ? Voudrais-tu les unir, les fédérer, et les mener sur le seul chemin qu'ils connaissent et respectent ? Celui de la violence. »

Je détourne la tête un instant, et m'abstiens de lui répondre. Bien sur que non je ne le voudrai pas. Je n'en serai pas capable. WanHeda, c'est pourtant le nom qu'ils m'ont donné. Le commander de la mort. Ils me respectent parce que contre mon gré, j'ai semé la mort sur mon passage. Je ne suis que cela à leurs yeux, et c'est effectivement parce qu'ils ne respectent que la violence. Les mener sur un autre chemin aurait été possible, mais je ne me sens pas capable de le faire seule, je n'ai aucune légitimité pour gagner leur respect. Lexa les a pourtant menés sur la voie du Blood must not have blood. Il est donc possible de le faire. J'inspire profondément, et lui fais à nouveau face, déterminée dans mes paroles.

« Ils peuvent apprendre un autre chemin. Lexa a fait bien plus que simplement les mener à travers cette voie que tu renies tant. Elle a insufflé un changement… Il faut simplement quelqu'un pour le perpétuer à l'avenir. Alors oui, Luna, je me tourne à nouveau vers toi, parce qu'il n'y a que toi qui puisse les unir, et porter cette Flamme avec l'Esprit des Commanders, pour continuer ce qu'elle a commencé. Je sais que tu ne me fais pas totalement confiance, que pour toi je ne suis que WanHeda, et que tu as fui tout ce qui se passait à Polis bien avant ALIE. Que même de cela tu te pensais à l'abri, et à tort, excuse-moi de te le dire. »

« TU as amené cette menace sur la plateforme ! » me rétorque t'elle, menaçante.

Je peux voir Bellamy du coin de l'œil faire un pas en avant, mais je ne bouge pas, et même me rapproche un peu plus d'elle. Malgré le fait que je ne laisse rien paraître, elle m'impressionne. Elle dégage tellement de force, et je suis convaincue que c'est elle qui doit les mener. Je suis même prête à l'aider, dans l'intérêt de tous.

« Je n'ai rien amené du tout. La menace était déjà là, au dessus de nos têtes, à tous. Et c'est encore le cas aujourd'hui. » lui réponds-je en serrant les dents à mon tour, ce qui suscite tout son intérêt.

« Que veux-tu dire ? »

« Il y a une autre menace qui plane au dessus de nous, et nous sommes tous concernés Luna. Mais nous ne pourrons jamais espérer trouver une solution pour tous survivre à quelque chose que nous ne pourrons surement pas arrêter si les Treize clans passent leur temps à se battre. Il n'y a plus de Heda, Polis est complètement en sang et dévastée, tout ce que Lexa a construit est tombé en lambeaux, la Coalition ne signifie presque plus rien pour les quelques clans qui ne pensent qu'à prendre un pouvoir, qui actuellement, ne signifie presque plus rien non plus sans la Flamme et quelqu'un pour la porter. Si personne n'agit, ce monde ne sera plus que guerre, et si personne ne les fédère à nouveau, nous allons tous nous entretuer. Et nous ne pouvons même pas espérer trouver une quelconque solution si nous nous entretuons nous-mêmes. Notre espoir, Luna, c'est de réussir à survivre ensemble. C'était possible, Lexa avait créé cette Coalition pour cela, et elle a peut-être utilisé la violence pour le faire ou les maintenir, mais elle leur a appris à vivre ensemble, et à se respecter mutuellement. Elle a réussi avec le temps à leur faire accepter que la violence n'était pas la seule et unique voie, en laissant vivre mon peuple après qu'il ait massacré le sien. Parce qu'elle savait qu'ensemble nous sommes plus forts. Il est encore possible de perpétuer cela. TU peux encore le faire. »

« Les miens ne comprennent que la violence. Cela a toujours été le cas Clarke, tu ne nous connais que peu, tu sais simplement de nous ce que Lexa t'a montré. »

« C'est faux ! » m'emporté-je, ce qui la surprend. « Lexa m'a montré justement tout ce que vous étiez capables de faire. Dis-moi si je me trompe, mais la Coalition était déjà ce que personne n'espérait. Titus lui-même me l'a dit ! Alors je ne sais pas ce que tu as contre Lexa, et je peux comprendre tes réticences, mais ne fais pas la même erreur concernant ton peuple que ce qu'a fait le mien. Ne les sous-estime pas. Ne renie pas le bien que tu peux trouver chez chacun d'eux, sous prétexte que tu n'es pas en accord avec vos traditions. Lexa n'a jamais rien renié, et… »

Je ravale, et déglutis difficilement, ce qui cette fois, ne passe pas inaperçu. Luna radoucit à présent les traits de son visage, pourtant si doux de naturel, mais qui était devenu si rude.

« Elle risquait sa vie pour faire ce que personne ne pouvait faire à sa place, mener les siens sur un autre chemin, et excuse-moi de te dire cela Luna, mais tu n'étais pas là pour voir ce qu'elle faisait. Pour voir tout ce pour quoi elle se battait chaque jour. Tu n'étais pas là pour voir qu'elle se battait pour la même chose que toi. Tu n'y étais pas, mais moi oui. Peu de temps… » Je sens mon cœur se déchirer, et reprends mon souffle tant bien que mal. « Trop peu de temps mais… »

« Je connais Lexa, Clarke. Je la connais bien plus que tu ne peux le penser. »

« Alors pourquoi Luna ? Pourquoi refuses-tu à ce point de continuer ce qu'elle a commencé ? Nous avons besoin d'un peuple uni, nous avons besoin d'être une seule voix pour pouvoir ne serait-ce qu'espérer trouver une solution. » tenté-je de me contenir.

Luna détourne le regard, et fait quelques pas en arrière pour contempler à nouveau la forêt. Je la sens pensive, et son attitude me fait clairement comprendre que je l'ai touchée. Comment, je ne sais pas précisément, son regard a changé lorsque j'ai évoqué Lexa. Elle la connaissait peut-être effectivement mieux que ce que j'imagine. Je revois Lexa me demander, après ce moment d'infinie tendresse, de parler d'autre chose que de ce huitième Natblida. En y repensant, elles ont effectivement un passé commun, et je ne suis pas sûre que cela se limite au fait d'être au Conclave ensemble. Lexa a bien épargné la vie de Luna, étant Heda, si elle avait voulu la faire tuer, elle aurait pu. Je décide de tenter le tout pour le tout…

« Elle a épargné ta vie. » lui lancé-je, déterminée.

Lorsque je dis cela, elle se retourne à nouveau dans ma direction et s'approche, de façon à n'être qu'à quelques centimètres de moi. Son regard est peiné, mais malgré tout, une grande combativité l'habite. Je peux presque voir une flamme y brûler, et la consumer de l'intérieur. Il me rappelle son regard lorsque je l'ai vue la première fois, cette rancœur qu'elle a contre Lexa est ancienne, et pour l'instant toujours un mystère pour moi. Mais je compte bien un jour obtenir des réponses.

« Je ne sais pas quelle rancœur tu as contre Lexa, mais tu lui dois bien cela. »

« Ce n'est pas à toi d'en juger. » me dit-elle, tout en commençant à tourner les talons.

A cet instant précis, je perds tout espoir de la faire changer d'avis. Je ne peux que la regarder commencer à s'éloigner pour arriver presque au niveau de Bellamy, resté en retrait, en me résignant à voir avec elle mon unique espoir de paix disparaitre avec elle. Mais, contre toute attente, je la vois se retourner une dernière fois vers moi.

« Je ne suis pas la personne qu'il te faut. Mais je connais peut-être quelqu'un qui pourra t'aider. »

Et silencieusement, elle reprend ses pas, me laissant le choix de la suivre ou non. Je me précipite à sa suite, en faisant signe à Bellamy de faire de même. Je ne laisserai pas passer cette chance, bien que je n'accorde pas toute ma confiance à Luna. Bellamy m'interroge du regard, soucieux de repartir encore avec elle, qui, comme Lexa en quelque sorte à ses yeux, nous a déjà trahis une première fois. Mais il se résigne à me suivre, après avoir quand même ramassé son arme. Qu'importe, il sait très bien qu'entre sa balle et Luna, je serai là. Tant que nous avons besoin d'elle. Et en l'occurrence, elle est notre dernier espoir.

Cela fait des heures que nous marchons dans les bois, alors que le soleil est désormais au zénith. Luna n'a pas décroché un mot depuis que nous avons quitté la falaise sur laquelle nous nous sommes rencontrés. A mes côtés, Bellamy reste silencieux, observant chaque arbre comme si un danger allait en surgir. Je le regarde, et lui demande sans un mot de tenir son arme vers le sol. Nous savons que ses hommes ne sont pas loin. Luna ne nous amène pas à la plateforme où nous l'avons vue la toute première fois il y a quelques semaines à peine, cette partie de bois m'est totalement inconnue. Soudain, nous arrivons à l'extrémité de la forêt, et devant nous s'étend un grand champ d'herbes hautes, comme jaunies par le temps. Le vent le foule, les faisant toutes plier dans un seul et même sens. Je n'ai jamais vu ce type de paysage, et le soleil qui commence à présent à décliner le baigne de toute sa lumière. Je me demande réellement où nous sommes. Luna se retourne enfin vers nous, et nous indique d'un signe de tête de la suivre au travers des herbes, vers la gauche, chose que nous faisons sans discuter. Je m'enfonce à sa suite, et suis frappée sur les mains par cette nature si sauvage. Seuls les bruits du vent qui s'engouffre dans les épis et nos pas résonnent. Au loin, je perçois néanmoins un bruit qui ne m'est pas si familier, comme de l'eau. Lorsque nous arrivons en bord de falaise, laissant le champ derrière nous, je suis subjuguée par la beauté du paysage. La mer s'étale à présent à mes pieds ou presque. C'est donc cela, le bruit que j'entends depuis quelques minutes déjà.

« Où sommes-nous ? » interroge Bellamy, en observant Luna qui regarde en contre-bas.

« Dans une partie de mes terres, jusqu'à présent protégée de toute cette violence. »

« Je croyais que la plateforme était ton lieu de vie. » rétorque Bell, surpris par ses propos.

« La plateforme est l'endroit où se réfugient tous ceux qui vivent en marge de notre monde, et de nos traditions. Venez. »

J'ai du mal à comprendre. Luna est chef de clan, mais son clan ne se limiterait pas à la plateforme pétrolière sur laquelle nous avons été ? Ce qui en un sens serait logique aussi, compte tenu de la grosseur des autres clans. Encore une chose que Lexa m'aurait surement expliquée, si nous n'avions pas passé notre temps à essayer de maintenir la paix entre mon propre clan et les autres. Je reste sceptique et curieuse, mais me contente de la suivre dans l'immédiat. Nous descendons par un petit chemin, et voyons en contrebas le village qu'elle regardait peu de temps avant, juste en bordure de l'eau. Des aménagements fluviaux y sont effectués, et la vie y a l'air bonne. Caché aux yeux de tous ceux qui ne savent pas où le trouver, la petite ville semble prospère. A cette pensée, je ne peux m'empêcher d'esquisser un sourire. Il est peut-être encore possible de vivre en paix ici-bas. Je ressens alors du respect pour Luna, qui cherche à préserver cela coute-que-coute. Je la regarde avancer, de dos, et quelque chose chez elle me rappelle vraiment Lexa. Peut-être son charisme. Son manteau traine presque par terre, et sa longue chevelure bouclée acajou lui donne des aspects de féline, avec sa démarche subtile et gracieuse. Nous arrivons à un petit croisement en patte d'oie, où le chemin de droite semble descendre vers le village, alors que celui de gauche continue à travers des bosquets.

« Tu t'arrêtes ici Bellamy. » ordonne Luna.

« Comment ça ? » lui demandé-je, avant même que Bell ne dise quoi que ce soit.

« Je ne laisse pas Clarke. » lui répond t'il.

Voyant Luna déterminée, je me retourne vers lui, et lui fais signe que cela va aller. Je le sens nerveux, et hésitant. Mais il comprend vite que Luna ne nous laisse pas le choix. C'est donc seule que je vais la suivre à partir d'ici.

« Nous te rejoindrons bien assez vite. » lui lance Luna, avant de m'indiquer l'autre chemin.

Tandis que Bellamy descend vers le village, en jetant des coups d'œil par dessus son épaule, je suis Luna sur le petit chemin qui devient de moins en moins bien tracé. Des bosquets m'agrippent le pantalon, visiblement ce sentier n'est plus emprunté depuis bien longtemps. En me retournant sur mes pas, je peux m'apercevoir que si nous ne savons pas qu'il existe, il est strictement impossible de le voir. Silencieusement, je continue de suivre Luna, m'en remettant complètement à elle. Seule et désarmée, je me demande l'espace d'un instant ce qu'il m'a pris d'accepter cela. Heureusement qu'une part d'elle est toujours avec moi. Je pose ma main sur ma poitrine, comme pour la toucher. Le contour de la petite boite métallique a quelque chose de rassurant, et il n'est pas rare que je cherche sa présence.

Après de longues minutes à marcher, nous arrivons sur une autre falaise. Lorsque je mets le pied dessus, je marche droit, et commence à m'avancer vers son rebord, comme hypnotisée et attirée par une force que je n'arrive pas à définir. Je passe à côté de Luna, et m'avance jusqu'à en être complètement au bord, la mer se brise en bas contre les rochers que je surplombe. Le regard droit, posé à l'horizon, je regarde l'eau sans prononcer un seul mot. Une présence, une force se dégage de ces lieux. Je sens mon ventre se nouer, mais ne comprends absolument pas pourquoi. Je m'accroupis, caresse le sol et en saisis une partie. Puis j'hume ma main qui vient juste de relâcher la terre avant de me retourner vers Luna, qui m'observe en silence.

« Viens avec moi, nous ne sommes plus très loin. »

Nous continuons de descendre un petit sentier à flan de falaise, pour arriver sur une petite crique, complètement cachée. On peut très certainement juste la voir depuis la falaise sur laquelle j'étais, mais je ne l'ai même pas remarquée. J'observe les environs, seuls ceux qui savent qu'elle est ici peuvent la trouver, c'est une certitude. Complètement dissimulée aux yeux de tous. Une fois arrivée sur la plage, Luna me fait signe de la suivre sur la gauche. Là, l'entrée d'une petite grotte se dessine, au milieu des parois rocheuses.

« Attends ici, je reviens. »

Elle a tendance à m'agacer avec ses secrets, mais je n'ai pas d'autres choix. Je me contente de regarder le soleil, commençant à vraiment bien décliner, qui baigne de sa superbe lumière l'eau foulant le sable à quelques dizaines de mètres de là. La mer est haute, et la plage tellement paisible.

D'un coup, une silhouette sort de la grotte, et s'approche de moi, complètement cachée sous une grande toge. Sa tête inclinée, il m'est impossible de voir son visage, totalement recouvert de sa capuche, mais elle tient dans ses mains une coupe d'eau, et me la tend. Je la saisis après une vague hésitation, mais ne compte pas boire quoi que ce soit. Lorsqu'elle a les mains libres, elle relève la tête, et me dit d'une voix extrêmement douce, presque apaisante.

« Bienvenue… Clarke. »

« Qui êtes-vous ? » lui demandé-je, en me penchant comme pour tenter de voir ses traits sous sa capuche.

« Tu ne me connais pas, mais moi si. J'ai beaucoup entendu parlé de toi. » me dit-elle en découvrant enfin son visage.

Je reste sans voix, et le souffle presque coupé, lorsque mes yeux croisent enfin les siens. Mon cœur fait un bon dans ma poitrine. Ma bouche entre-ouverte de surprise, elle esquisse un petit sourire, presque malicieux. Je crois rêver. Devant moi se tient une femme d'une cinquantaine d'années, les cheveux longs presque grisonnants, un regard bleu ciel, qui dans cette luminosité, tire sur le vert. Ses traits me paraissent si familiers, la forme de son visage, le contour de ses lèvres. Son expression. Sa voix. Tout, tout chez elle me rappelle Lexa. Je m'apprête à lui poser la question de savoir qui elle est, et comment elle me connaît, lorsque Luna ressort de la grotte, et m'interpelle. Je détourne mon regard vers elle, tandis que la femme qui se tient à mes côtés me pose une main sur le bras, pour m'indiquer de la rejoindre. Je ne peux m'empêcher de lui accorder un regard avant de partir. Toujours aussi surprise, j'ai envie de la supplier de ne pas disparaître, j'ai tellement de questions à lui poser après avoir vu Luna. Pourquoi lui ressemble t'elle à ce point ? Qui est-elle ?

Je m'avance vers Luna qui se tient juste devant l'entrée de la grotte silencieusement. A présent face à la pénombre de la pierre, je la regarde, sans comprendre ce qu'elle me veut, alors que je n'ai qu'une hâte : retourner auprès de cette femme. Les mains liées devant elle, elle incline les yeux, tandis que j'entends des bruits de pas s'avancer dans le noir. Je détourne le regard pour en percevoir l'origine, en fronçant les sourcils. En quelques secondes à peine, la lumière laisse apparaître des pieds, qui s'avancent dans ma direction, puis des mollets, puis des hanches, puis un buste… Je relève les yeux, et sens alors mon souffle se couper. Je tente de crier pour me dégager les poumons et retrouver de l'air, mais sans y parvenir. Mes forces me quittent et ma main lâche mon verre, qui vient battre le sol dans un bruit qui résonne jusque dans mes entrailles. Plus rien ne bouge autour de moi. Plus rien ne vit. J'ai mal, j'étouffe. Je n'entends même plus mon cœur battre. Je crois qu'il vient juste de s'arrêter.