Chapitre 1

La télévision

Le ciel était bleu et le temps chaud. Les fenêtres avaient été ouvertes dans le but inespéré de créer un courant d'air pour rafraîchir l'appartement. Harry était descendu en bas remercier les déménageurs de leur aide pendant que je commençais à défaire nos cartons.

C'était notre premier lieu de vie commune, bien plus pratique que le Terrier où l'un de mes imbéciles de frère ne perdait pas une occasion pour nous déranger… Enfin, sauf Ron qui était lui aussi bien occupé dans ces moments-là avec Hermione. La plupart des cartons contenaient mes affaires, celles de Harry étant relativement peu nombreuses. Les choses de son côté seront donc plus faciles, et il valait mieux se mettre aux miennes tout de suite.

Alors que je sortais plusieurs de mes livres et les rangeais dans l'une des étagères du salon, j'entendis la porte d'entrée s'ouvrir. Harry était de retour. Je reposai les livres que je tenais dans les mains et me retournai pour accueillir mon fiancé. Quelle ne fut pas ma surprise de constater que mon père se tenait derrière son gendre, un immense carton dans les bras.

« Bonjour Ginny ! déclara-t-il d'un air jovial. Je suis venu voir comment c'était chez vous. Ta mère s'inquiète sur l'éventuelle présence d'une cheminée. Je pourrai la rassurer sur ce cas.

— Bonjour papa, répondis-je en serrant mon père dans mes bras. Merci d'être venu. Mais tu aurais pu prévenir, tu ne crois pas ?

— Excuse-moi pour ce coup de tête. Mais je suis très occupé ces derniers temps au boulot. Harry peut te confirmer que le Ministère croule sous le travail. Entre les réformes de Kingsley, celles de Poudlard et ces Mangemorts dans la nature, on ne sait plus où donner de la tête. Sans oublier que les Moldus sont encore sous le choc des dernières années. Il faudra du temps pour leur faire oublier ça. »

J'opinai de la tête. La guerre contre Voldemort avait fait de nombreuses victimes et laissé des cicatrices profondes dans le pays. Harry contourna papa et posa l'immense carton près d'un mur, face à notre canapé.

« Qu'est-ce que c'est ? demandai-je.

— Ah ça ! C'est un petit cadeau pour votre premier aménagement. Bon et bien je m'en vais. A bientôt Ginny. Harry, je te revois au Ministère.

— Au revoir Mr Weasley. »

Mon père sortit de l'appartement. Harry ouvrit le carton à l'aide d'un sortilège de découpe et en sortit un panneau noir munit d'un miroir d'un côté. Sauf que le miroir était tout aussi noir que la structure. Harry fit apparaître une petite table sur laquelle il posa l'étrange panneau. Il y fixa un socle et baissa sa baguette. Le panneau tint seul sur la tranche.

« Je me doute que c'est un cadeau puisque ça ne ressemble à aucun des cartons que nous avons préparé. Je réitère donc ma question : qu'est-ce que c'est ?

— Une télévision, répondit Harry.

— Une téléquoi ?

— Télévision. C'est un objet Moldu.

— Pourquoi aurai-je besoin d'un objet Moldu chez moi ?

— C'est l'objet qu'on retrouve le plus souvent dans les maisons Moldues, expliqua Harry. Comme nous vivons au milieu de Moldus, il vaut mieux qu'on s'équipe comme eux pour passer inaperçus. On va attirer les questions si nos voisins n'entendent pas la télé.

— Ah parce que ce truc tout étroit fait du bruit ? A quoi ça sert ?

— À regarder la télévision, répondit Harry comme si c'était une évidence.

— Tu utilises une télévizion pour regarder la télévizion… Ça semble totalement logique ! m'exclamai-je.

— Je me suis mal exprimé. Cette télévision permet de regarder des programmes Moldus sous forme de vidéo. Un peu comme le cinéma, mais sur un écran bien plus petit.

— Le cinéma…

— Ce que nous sommes allés faire avec ton père la semaine dernière.

— Ah ! Tu veux dire les photos Moldus avec du son ?

— C'est ça. La télévision utilise le même principe. Les Moldus la regardent toute la journée. Dudley connaissait tout ce qui y passait une semaine à l'avance. Bon, je te laisse, je dois retourner au travail. Je n'en ai pas pour longtemps. Je serai rentré avant ton entraînement. »

Harry m'embrassa affectueusement. Puis il s'éclipsa. Je me retrouvai seule devant des dizaines de cartons. Je terminai de ranger mes affaires, la baguette rendant la chose beaucoup plus aisée. Il fallut cependant que j'intervienne avec les mains pour ranger mes vêtements et arranger quelques bibelots.

Après une heure de travail, seuls les cartons de Harry restent à ranger. Je regarde l'horloge. Mon entrainement de Quidditch commence dans trois heures. Ce qui fait que j'ai deux heures à moi. Je regarde la télévizion posée sur la petite table. Visiblement, elle devait marcher avec l'électricité, comme la plupart des objets Moldus. Harry avait fait raccorder notre appartement pour que nous ayons la lumière. Il disait que c'était plus sûr que d'utiliser des chandelles.

Je m'approchai du carton et regarda à l'intérieur. Comme je m'y attendais, il y avait de nombreux fils rangés dans des sacs transparents – du plastik d'après Harry – ainsi qu'un livre. Je sortis tout et posai sur la table à côté de la télévizion.

Je tentai de brancher les fils mais très vite, j'avouai ma défaite. Folle de rage, je jetai les fils et me levai brusquement. Je fis un rapide tour du salon avant de m'arrêter devant cette télévizion. Pourquoi m'emporter pour quelque chose dont je ne verrai sans doute pas l'utilité ? En m'asseyant sur le canapé, je vis le livre que j'avais sortis un peu plus tôt. Je le pris et lut la couverture… Enfin, si on pouvait appeler ça une couverture.

Tout le livre, qui s'intitulait Manuel d'installation, était en papier. Je l'ouvris et vis une image – non animée, comme il convenait chez les Moldus – de la télévizion. La légende était dans une langue inconnue et je tournai les pages. Je remarquai que le manuel était en réalité en plusieurs langues. Je trouvai l'anglais et lu attentivement.

Tout était indiqué pour « brancher » le téléviseur – c'était le mot employé par le manuel – convenablement et rapidement. Je suivis scrupuleusement les indications, et utilisant un peu de ma cervelle pour comprendre quel fil prendre. C'était d'une complexité déconcertante.

Après plus d'une heure de lutte acharnée, j'avais les cheveux ébouriffés, j'étais en sueur mais le téléviseur était allumé. L'écran – il m'avait fallu dix minutes pour comprendre ce dont il s'agissait – était légèrement moins noir que lorsque Harry l'avait sorti du carton. Un texte apparu sur l'écran. Je suivis les instructions, cherchant à comprendre ce qu'elles impliquaient. Au bout d'un moment, une sorte de barre se remplis au fur et à mesure. L'opération dura cinq minutes.

Soudain, une image apparu. Il s'agissait d'une belle femme brune habillée avec des vêtements Moldus… Non, c'était une Moldue. Je m'aperçus alors que l'image bougeait, tandis que de courtes phrases parcouraient le bas de l'écran. Cependant, l'image était relativement floue et n'arrêter pas de trembler, voire de disparaître.

La porte s'ouvrit alors, laissant apparaître Harry. Il me vit, visiblement surpris. Je suivis son regard et découvris alors que le salon que j'avais si bien rangé était sans dessus dessous, avec des sacs et des fils de partout. Il y avait également des petites billes blanches formant une matière très légère qui avait entouré le téléviseur. Un sourire se dessina sur les lèvres de mon mari lorsqu'il vit le téléviseur allumé et l'image.

« Tu n'es pas encore parti ? demanda-t-il.

— Comme tu peux le voir, j'ai eu envie de voir ce dont il s'agissait. Je dois dire que je suis déçue. Tu semblais me parler de quelque chose d'extraordinaire. C'est juste banal.

— Qui ne tente rien n'a rien. Mais au risque de te décevoir, tu t'es trompée dans les branchements. Regarde. »

Il s'approcha du téléviseur, pris le manuel avec lui puis prit l'étrange boîte recouverte de boutons qui s'appelait « télécommande ». Harry appuya sur des boutons, faisant apparaître de nouveaux textes sur l'écran, qui eux étaient bien net. Il vérifia les fils derrière, en changea quelques-uns puis éteignit le téléviseur. Il vint s'asseoir à côté de moi.

« Prête pour le spectacle ?

— Tu n'as pas fait grand-chose, fis-je remarquer.

— Tu verras. »

Il pointa la télécommande vers le téléviseur et appuya sur un bouton. La Moldue réapparut à l'écran, mais l'image était bien plus nette qu'avant et ne tremblait plus. J'entendis mon mari émettre un léger rire en voyant ma réaction. La femme disparut au profit d'un homme, au milieu des rues d'une ville que je ne connaissais pas. Sans doute un pays tropical puisqu'il était en T-shirt et que nous étions en hiver.

Je m'approchai du téléviseur et regarda derrière. Il n'y avait que le mur. Je le touchai, mais je ne pus que toucher. Harry commença à rire plus bruyamment, pris dans un véritable fou rire. L'homme semblait à l'intérieur du téléviseur, mais de toute évidence il ne pouvait s'y trouver… Ou du moins, je ne pouvais le rejoindre. Je regardai à droite, à gauche, en haut, en bas, comme s'il s'agissait d'une fenêtre.

Mais toujours rien, si ce n'était Harry qui riait de plus belle.

Je ne voyais rien d'autre que l'image. C'était comme une photo chez nous, mais bien plus complexe. Le décor variait sans cesse. Je m'assis sur le canapé et me contentai de regarder les images. Harry m'avait dit qu'il y avait du son, mais je n'entendais qu'un faible murmure à peine audible. Il devait falloir de l'expérience.

Puis soudain, j'entendis la voix de l'homme, comme si on avait ouvert la fenêtre. Je reculai sous la surprise de l'agression et senti mes oreilles bourdonner violemment. Je me retournai vers Harry qui arrivait à peine à respirer.

« Et bien Ginny ? On ne tient plus debout ? Ce n'est pourtant qu'un journaliste inoffensif. »

Je lui lançai un regard noir, me levai brutalement et me dirigeai d'un pas raide vers ma chambre. Je pris mes affaires pour le Quidditch et du même pas raide, repassai devant Harry pour lancer une poignée de Poudre de Cheminette dans notre cheminée. Je donnai mon adresse et sans prêter attention aux excuses de mon mari, je disparus dans un tourbillon vert.