Chapitre 5 : Tout effort mérite récompense

La semaine continua comme elle avait commencé. Akaashi se prenait les remarques les plus mauvaises et empoisonnées de tous ses camarades qui, pour beaucoup, trouvaient un malin plaisir à faire la compétition de qui arriverait à briser le masque de glace du fameux passeur. En réalité, il y avait plusieurs types de personnes : celles qui lui faisaient des remarques, celles (les plus nombreuses) qui ne disaient rien mais n'oubliaient pas de lui envoyer un regard dégoûté en coin lorsqu'il les croisait, et celles qui ne disaient rien parce que l'affaire n'avait pas plus d'importance que ça à leur yeux (comme Honda, la déléguée). Le brun essayait de ne plus sortir de cours, mais parfois, il en sentait l'urgente nécessité, tant la pression que les autres exerçaient sur lui menaçait de le briser. Il avait parfois envie de leur hurler d'arrêter. Mais il savait que ce seraient déjà donner une victoire au clan de "ceux qui lui faisaient des remarques", mais aussi, même si la situation s'arrangerait, les autres ne le regarderaient plus de la même façon pour le restant de ses jours. Il passerait pour un fou qui sort de ses gonds dès la moindre remarque. C'est dans ce contexte que son plan allait rentrer en œuvre.

Toute la semaine, il essaya aussi de dire aux autres qui était le coupable : Kozu. Mais personne ne le croyait. Ils disaient tous : "Tu accuses un nouveau exprès. Ça peut être n'importe qui ! Si quelqu'un veut entrer dans le lycée, c'est assez facile l'après-midi ! Après, il fallait juste demander à quelqu'un d'assez stupide pour afficher les feuilles partout". Ou d'autres remarques comme : "Kozu ? Tu plaisantes là ? Ce garçon est on ne peut plus gentil ! Regarde-le ! Tu penses vraiment qu'il ferait quelque chose comme ça ? Il est de bonne famille en plus". En somme, cela ne servait à rien d'insister, ils étaient tous bornés... et tellement influençables. Il devait admettre que Kozu jouait parfaitement le jeu. Mais il ne pourrait pas cacher sa face d'ange longtemps. Et Akaashi savait comment lui faire tomber le masque, c'est ce qu'il avait expliqué à Bokuto.

o.O.o

Cela faisait donc une semaine que tout ce remue-ménage avait commencé. Bokuto avait beau essayer de lui remonter le moral, il le voyait se refermer sur lui-même de jour en jour. Sa condition physique n'était déjà pas à un niveau élevé, alors sa forme morale... Cela faisait aussi environ une semaine qu'Akaashi leur avait parlé du "plan de vengeance". Au début, le passeur était juste embêté par les remarques des autres. C'était dans cette optique qu'il en avait eu l'idée. Mais au fur et à mesure que les jours passaient, son embêtement s'était presque transformé en psychose. La simple idée d'aller en cours le faisait trembler de tout son corps. La déprime d'Akaashi était telle qu'il avait annoncé à Bokuto qu'il ne voulait plus faire ce qu'il leur avait dit, qu'il n'y gagnerait que plus de mépris de la part des autres. Bokuto lui avait alors dit :

- Non mais tu plaisantes ?! Moi je pense que ça aura justement tout l'effet inverse ! J'ai pas souvent de bonne intuitions, contrairement à toi, mais là, je suis persuadé que ça va marcher, je te le promets ! Et dis-toi bien que Kozu est seul. Nous, nous sommes une équipe entière contre lui.

Sur ce point-là, il savait qu'il avait raison. De plus, Bokuto s'était dit qu'il fallait à tout prix mettre en place ce qu'ils avaient prévu sans perdre de temps. Il en avait parlé aux autres, pas à Akaashi. Il pensait que c'était le meilleur moment pour le faire. C'était un peu rude de sa part de dire ça, mais plus Akaashi serait mal, plus l'effet serait fort. Ils préparèrent tout en secret, ou du moins, ils rassemblèrent le matériel nécessaire. Ils prévinrent Akaashi qu'ils commençaient, mais le brun était trop abattu pour avoir la moindre préoccupation à ce sujet.

Dans l'après-midi, Akaashi croisa "par hasard" l'ex-futur passeur de Fukurodani. Il continuait de rôder autour du gymnase. Il se dirigea vers lui, toujours assis dans son fauteuil roulant.

- Tu cherches encore des choses à montrer aux autres ? demanda calmement Akaashi mais sur le ton le plus froid qu'il pouvait faire.

- Hein ? Moi, qui crois-tu que je sois ? demanda-t-il innocemment.

- Arrête de faire semblant, on sait que c'est toi qui a posté la vidéo, on a trouvé ton pseudo.

- Héhé, toujours aussi perspicace à ce que je vois... Tu m'en veux ? Son ton était plein de sarcasmes.

Ignorant la question, Akaashi continua :

- Ça t'apportes quoi de faire ça ? Tu veux te débarrasser de moi ?

Kozu changea de regard.

- Tu ne peux pas comprendre toi... Tu as tout, tout au monde. J'en ai marre d'être toujours laissé de côté !

- Alors tu me pousses dans un ravin en espérant que ça va arranger les choses ?

- Tu étais censé tomber dedans ce jour-là ! Tout était censé s'écrouler, les autres n'y auraient vu que du feu ! Mais Bokuto-san tenait apparemment trop à toi... J'aurai dû l'empêcher d'aller te sauver, mais je pensais que c'en était fini de toi depuis longtemps ! Mort, tu n'aurais plus eu aucune importance ! J'aurai pris tout ce qui comptait à tes yeux ! Je serai devenu toi ! Tu possèdes tout ce que je veux ! Tu es injuste...

- Je te rappelle qu'à cause de toi, je suis bloqué dans ce fauteuil. J'ai failli ne plus pouvoir jouer au volley de ma vie par ta faute, tu as ruiné ma réputation auprès de tout le monde, et tu trouves que je suis "injuste" ?

- Tu le méritais, dit-il sur un ton presque absent, si tout le monde te déteste, ils viendront vers moi en retour, même Bokuto-san finira par revenir, j'en suis sûr...

- Ne crois pas que tout le lycée est ami avec moi. Mes vrais amis sont restés à mes côtés. Il en va de même pour Bokuto-san. Il n'ira jamais vers quelqu'un comme toi.

- Si ! (Il cria presque) Je sais qu'il finira par venir ! Il l'a fait au début, il recommencera ! Il suffit juste de lui montrer que j'ai de la valeur ! Et même si tu es entre nous ! J'ai déjà poignardé un mec dans mon ancien lycée, je peux recommencer…

Akaashi commença à reculer avec son fauteuil. Il n'aimait pas la tournure des évènements.

- Si tu me poignardes, on retrouvera ta trace, et tu ne pourras plus jamais voir personne.

- Oh mais je n'ai pas dit que j'allais te poignarder. Si ça peut te rassurer, je n'ai aucune arme sur moi. Moi ce que je veux, c'est récupérer ma place de passeur. Je sais qu'ils finiront par se rendre compte de ce que je vaux vraiment, que je suis un joueur indispensable à l'équipe ! Ils ont déjà pu le remarquer quand j'avais enfin joué à ta place.

Il se rapprocha doucement de lui. Il était immense comparé à Akaashi qui était assis. Il le regardait de haut avec l'air le plus hautain que l'on puisse prendre. Il sourit en coin, ses yeux avaient une lueur de meurtrier. Akaashi ne pouvait pas détacher son regard du sien. Il était vraiment paralysé de peur.

- Toi, je te réserve quelque chose d'encore pire que la mort...

Il lança soudain sa jambe en arrière et vint frapper de toutes ses forces dans son plâtre. Akaashi hurla. Il apprit plus tard que des élèves dans le lycée l'avaient entendu et s'étaient demandés ce qui se passait. Kozu partit tranquillement. "Ce n'est que le commencement. Tu ne sais pas encore ce qu'est la véritable souffrance. Patience...", l'avertit-il. Il disparut. Konoha se précipita vers Akaashi, Bokuto le suivait. Akaashi gémissait de douleur. Il était recroquevillé sur sa jambe. Des larmes coulaient sur ses joues.

- Akaashi ! cria Konoha.

Bokuto courra en direction d'où Kozu s'en était allé.

- Bokuto, ça ne sert à rien de le rattraper maintenant. Reste avec lui, je vais chercher un prof !

Alors que Konoha s'éloigna en courant, Bokuto s'accroupit près d'Akaashi qui était toujours les mains crispées sur sa jambe.

- Hey, Akaashi... essaye de calmer ta respiration.

- J... J'ai.. trop... AAAH !

Un pic de douleur vint le couper. Bokuto ne savait plus quoi faire. Il ne savait pas comment empêcher Akaashi de souffrir. Alors qu'il lui mettait une main dans le dos, un liquide rouge vint attirer l'attention du capitaine.

- Akaashi, il... il y a du sang qui coule de ton plâtre.

Ils regardèrent tous les deux vers le sol. Akaashi haletait mais il stoppa net sa respiration et écarquilla les yeux. Ses lèvres tremblèrent :

- Oh... oh non... oh non...

À ce moment, un professeur et Konoha revinrent vers eux.

- Il faut se dépêcher, il saigne ! s'écria Bokuto.

- Écarte-toi, Bokuto-kun.

L'adulte se dirigea vers Akaashi. Ce dernier était en état de choc, et il avait mal, tellement mal. Ses doigts étaient si crispés sur sa jambe, que ses ongles lui entaillaient la peau. D'occasionnels nouveaux pics de douleurs le faisaient gémir plus fort. Le professeur regarda sa blessure. Quelques gouttes de sang perlaient de l'extrémité de son plâtre. Le brun serrait les dents, il devait sûrement penser que sa fracture s'était ouverte.

- Bon, je t'emmène à l'hôpital. On y va.

o.O.o

Son plâtre fut refait. Akaashi ne parla plus à partir de ce moment. Il était seul en compagnie de son professeur. Bokuto avait voulu venir, mais leur professeur avait refusé. Akaashi avait l'impression de ne plus être là, que son esprit s'était envolé à mille lieues d'ici. Il était livré à lui-même et avait fini par se perdre. Il écoutait vaguement ce que lui disait le médecin. À quoi bon...

Il fut ramené chez lui, dans le silence, dans le froid. Il faisait chaud dehors, l'après-midi n'était pas finie, mais il avait extrêmement froid. Son protecteur n'était pas avec lui. Il était seul. Sa mère quitta le travail pour l'accueillir chez lui. Il s'allongea sur le canapé du salon, ses larmes étaient sèches et un voile s'était déposé sur ses yeux. Il ne dormit pas. Il se contenta de fixer le plafond, les yeux mi-ouverts. Son professeur avait tout expliqué à sa mère. Akaashi en était incapable. Elle resta à ses côtés et lit un livre.

On frappa à la porte. Sa mère se leva. Une voix se fit entendre.

- Suis-moi, il est dans le salon.

Bokuto entra dans la pièce. Akaashi le vit dans son champ de vision, mais ne bougea pas. Le capitaine s'approcha de son passeur et s'assit sur le bord du canapé.

- Keiji, tu as de la visite, mon chéri. C'est ton ami Bokuto-kun.

Même si Bokuto était assis à côté de lui, Akaashi ne sembla se réveiller que lorsque sa mère lui parla, le voile sur ses yeux se dissipa un peu. Sa mère partit plus loin et les laissa tous les deux. Elle savait qu'il ne parlerait pas en sa présence. Il dit du bout des lèvres :

- Bokuto... -san...

- Alors, comment te sens-tu ? Est-ce que tu vas mieux ?

- ...Pour l'instant la morphine fait que je ne sens rien... La douleur devrait revenir dans les douze prochaines heures...

- Et... et le médecin ? Qu'est-ce qu'il t'a dit ?

Akaashi le regarda et se redressa.

- Kozu a.… fait sauté mes points de suture... la blessure s'est rouverte, d'où le sang... Mais les broches n'ont pas été brisées, donc ça va... La douleur était... juste due au choc...

- Ooouuuf ! Je suis teeellement rassuré que tu n'aies rien de trop grave ! J'ai cru que ta jambe était foutue ! On aurait sacrément été dans- (il s'interrompit) ça ne va pas ?

Akaashi redevint soudain silencieux. Il fixait le vide, totalement ailleurs. Il ne parlait plus, il ne bougeait plus. Bokuto le secoua un peu, aucune réaction. L'argenté eut une idée. Il embrassa ses lèvres. Une fois. Deux fois. Deux larmes roulèrent sur les joues du brun, mais il resta impassible.

- Bats-toi, Akaashi ! On y est presque ! Il ne manque plus que toi ! On a tous les éléments en main, il faut le faire demain.

Akaashi ne disait toujours rien. Bokuto le serra dans ses bras.

- Je t'en prie, Akaashi... Dis quelque chose... N'abandonne pas.

Le brun bougea juste la tête pour la blottir dans le cou de Bokuto. Il prit une grande inspiration et dit tout bas :

- ... D'accord... c'est d'accord... juste...

- Qu'est-ce qu'il y a ?

- ... Me... me laisse plus seul... je t'en prie... je... je ne veux plus me retrouver seul... reste... reste avec moi...

- C'est promis. Je resterai avec jusqu'à quand il faudra, je te le promets. Jamais plus tu ne revivras ça.

o.O.o

Bokuto resta dormir la nuit chez Akaashi. Sa mère lui avait installé un futon près de son lit. Il aurait bien été avec lui, mais c'était difficile avec son plâtre. Le brun, lui, ne dormit presque pas de la nuit. Dès qu'il fermait l'oeil, des cauchemars l'assaillaient et il se réveillait en sueur. Ce manège dura toute la nuit. Le matin, quand Bokuto sortit de son sommeil, il trouva Akaashi allongé à ses côtés. Il était descendu du lit seul pendant la nuit. Il s'était fait mal d'ailleurs. L'effet de la morphine avait disparu depuis longtemps déjà. Quelques gouttes de sueur perlaient sur son front. Bokuto partit lui chercher un verre d'eau avec un antidouleur. Il lui donna quand il se réveilla. Il l'observa boire son verre. Des cernes lui entouraient les yeux et ses mains tremblaient quand il tenait le verre. "Ce sont malheureusement les conditions parfaites" se surprit à penser Bokuto.

Pendant la journée, ils réalisèrent la partie la plus importante de leur plan. Ils modifièrent deux-trois choses et achevèrent leur oeuvre.

o.O.o

Ils avaient séché les cours ce jour-là. De toute façon, Akaashi n'était pas en mesure d'y aller après ce qui s'était passé la veille. Bokuto resta chez lui pour lui tenir compagnie comme il lui avait promis. Cela leur permi de tout finir. Le lendemain, de toutes petites languettes de papier furent distribuées à tous les élèves à l'entrée du lycée. Sur celles-ci : une adresse IP. Tout le monde s'empressa alors de la reporter sur le navigateur de leur téléphone. Ils tombèrent sur une vidéo que voici :

On y voyait Akaashi Keiji assit de face. On ne voyait que la partie supérieure de son corps. Il n'était pas dans son assiette, ça sautait aux yeux. Il était cerné, pâle et semblait avoir un peu maigri. Il commença à parler d'une voix qui se voulait la plus neutre possible mais dans laquelle on pouvait déceler, si l'on y faisait attention, une pointe d'abattement et de tristesse.

"Bonjour à tous. Je suis Akaashi Keiji, j'ai 16 ans et je suis en première au lycée de l'Académie de Fukurodani. J'apparais devant vous aujourd'hui pour vous parler de ce qu'il m'est arrivé ces dernières semaines. Si je fais ça, c'est parce que ma vie est devenue un enfer et que presque toutes les personnes autour de moi s'appliquent à la transformer en pire que ce qu'elle n'est déjà. La semaine dernière, une vidéo de moi a circulé un peu partout. J'ai été affiché et humilié publiquement dans mon propre lycée. Sur celle-ci, on me voit embrasser le capitaine de mon équipe, Bokuto Koutarou. Depuis, ce sont remarques et moqueries incessantes. Dès que je vais quelque part dans le lycée, on ne peut s'empêcher de me regarder avec un air de dégoût. (Sa voix vacille un peu) Ça me blesse profondément. J'aime les cours et j'aime étudier, mais depuis cet incident, j'ai perdu la motivation de me lever le matin, sachant que je vais retourner dans ce trou à monstres en quoi s'est transformée ma classe. J'enchaîne alors crise d'angoisse sur crise d'angoisse, mais ça n'empêche malheureusement en rien ce qu'il va se produire dans la journée. Je voulais donc clarifier cette affaire. (Il prit une inspiration) J'aime mon capitaine, mes sentiments envers lui sont réels. Cette déclaration vous choque ? Elle vous empêche de vivre ? Avant de vous préoccuper de la vie des autres, essayer d'abord de gérer la vôtre. Quelle est l'utilité de m'envoyer des remarques cinglantes ? C'est de la jalousie ? Non, vous cherchez juste à rendre intéressant une information qui ne l'est pas en réalité.

"Tout le monde s'est concentré sur cette vidéo, mais vous êtes-vous seulement posé la question de qui l'avait faite ? C'est bien joli d'exposer la vie des autres, mais il faut assumer. La personne qui a fait ça n'a pas assumé. On ne reste pas anonyme longtemps sur le net. Nous avons réussi à remonter jusqu'à la source. Je vais arrêter de faire durer le suspense. Il s'agit de Kozu Mokito, seize ans, élève de seconde à Fukurodani. Je sais que la plupart ne me croient pas et pense que j'essaie de trouver un bouc émissaire. Mais c'est bien la vérité.

Je suis passeur et vice-capitaine dans mon équipe de volley. Kozu est arrivé chez nous il y a un mois. Il s'est débrouillé pour me mettre à l'écart du groupe. Lors du camp que nous avons fait, je me suis retrouvé dans un ravin."

(La caméra dézoome. On peut voir qu'Akaashi est dans une chaise roulante, un plâtre à la jambe droite). Akaashi reprend difficilement sa respiration, comme s'il avait du mal à dire ce qui va suivre.

"Fracture du tibia et arrachement des ligaments. C'est ce qui m'est arrivé après que Koozu m'ait poussé dans la pente qui menait à un ravin. J'y ai laissé ma jambe, mais cela aurait pu tout aussi bien être ma vie. Et tout ça, juste pour s'approprier ma place.

Je sais que tout ça vous paraît fou. Vous vous demandez sûrement pourquoi il n'a pas été renvoyé du lycée. Il se trouve qu'il a une famille qui veut éviter les scandales. Soit dit en passant, M et Mme Kozu, si vous voyez cette vidéo, comprenez que ce n'est pas contre vous que je fais ça, mais parce que votre fils a dépassé les limites. Ce n'est pas la première fois que Kozu change d'établissement. La dernière fois, il a poignardé un garçon de son lycée pour une histoire de coeur. Forcément, il a été renvoyé. Mais dans mon cas, il n'y avait pas assez de preuves ; j'aurai très bien pu glisser tout seul à cause du temps. Pour cette raison, nous avons enregistré les aveux de Kozu à son insu. Je sais que ce n'est pas le meilleur moyen de procéder, mais après ce qu'il m'a fait, je me suis dit que j'allais jouer au même jeu que lui et lui retourner la pareille. Sauf qu'à sa différence, j'annonce mon identité. La vidéo que vous allez voir a été tournée par Konoha Akinori et Bokuto Koutarou. Je portais un micro sur moi. À vous de juger. Je n'ai fait qu'énoncer des faits et j'espère que tout cela vous aidera à ouvrir les yeux."

La vidéo se lança. Il s'agissait de la discussion qu'Akaashi et Kozu avaient eu la veille. Tout le monde pu donc entendre Kozu dévoiler sans aucune retenue ce qu'il prévoyait de faire à Akaashi : le tuer à petit feu. Ils virent aussi le coup qu'il lui asséna à la jambe, entendirent le hurlement de douleur d'Akaashi, et la fuite misérable de son agresseur. La caméra bougea très vite d'un coup et se rapprocha d'Akaashi. Puis ce fut le noir.

"Si j'ai fait ça, ce n'est pas que pour me défendre mais aussi pour vous mettre en garde. Ce type est dérangé, il pourrait aussi vous faire du mal, alors faites attention. C'est ce qu'il m'est arrivé à moi, mais je suis sûr que beaucoup plus de personne qu'on ne le croit sont concernées par un harcèlement de la sorte. Ne restez pas dans le silence. Appelez à l'aide, même si ça prend du temps, quelqu'un finira par vous porter secours. C'est tout ce que j'avais à dire. Merci de votre écoute."

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La vidéo fut virale. Les trois volleyeurs s'attendaient à toucher beaucoup de monde, même externe à Fukurodani, mais là, la vidéo avait été vue dans tout leur arrondissement et commençait à s'étendre aux autres. On était à Tokyo quand même, tout se diffusait extrêmement vite. De toute façon, ça avait été leur but dès le début : il fallait qu'un maximum de personnes soient au courant. Mine de rien, la vidéo de Kozu avait bien tournée aussi et avait suscité un déferlement de remarques homophobes. C'était comme ça ici, deux hommes ne pouvaient pas avoir une relation amoureuse, un point c'est tout.

Trois jours plus tard, ils mentionnèrent la vidéo d'Akaashi dans le journal. Le soir même, la vidéo passait aux informations.

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Akaashi n'était pas retourné en cours de la semaine. Ce n'est pas parce qu'il avait peur, mais parce qu'il ne se remettait toujours pas du coup qu'il avait reçu. Il n'avait pas osé regarder les commentaires laissés sur la vidéo. Bokuto-san et Konoha-san s'en occuperaient. Il avait vraiment pris sur lui-même pour parler devant la caméra, mais la fatigue, la douleur et l'épuisement avaient changé le ton de sa voix. Il ne voulait pas être pris en pitié, il voulait simplement faire comprendre aux autres qui était vraiment Kozu. Si personne ne l'arrêtait, il récidiverait. Il avait menacé Akaashi, tout le monde avait pu clairement l'entendre. Il était en danger, et si jamais il arrivait à se débarrasser de lui, il recommencerait sur d'autres « boucs émissaires ». De telles personnes existaient malheureusement : le genre qui s'acharne sans le moindre scrupule et sans la moindre hésitation. Dès qu'ils avaient leur idée, ils ne s'arrêtaient pas tant qu'ils n'avaient pas obtenu ce qu'ils désiraient. Akaashi s'en rendait compte mieux que quiconque maintenant : même s'ils ne tuaient pas, ils laissaient une cicatrice gravée sur l'âme de leur victime.

Akaashi était allongé dans son lit. Il ne se sentait pas bien, il ne savait pas à cause de quoi. Pourtant ça l'avait soulagé de tout exposer. Peut-être craignait-il une récidive... Qu'est-ce qui se passerait si Kozu trouvait où il habitait ? Comment allait se passer son retour au lycée ? Allait-il encore se faire lyncher ? Peut-être ne pourrait-il jamais y retourner. Il avait mal. Sa jambe était toujours très douloureuse. Et si en fait, il ne pouvait jamais remarcher ? Il ne pourrait pas vivre comme ça. C'était inconcevable.

- Keiji ?

Il sursauta et se retourna. Ses parents étaient dans l'embrasure de la porte. "Je crois qu'il faut que nous parlions, mon chéri".

Ses parents avaient été très surpris par la fameuse vidéo, qu'ils venaient juste de découvrir en partie aux informations. Ils n'étaient pas au courant que leur fils souffrait autant. Ils s'en voulaient. Le brun les rassura en leur disant que ce n'était pas leur faute et qu'ils n'auraient rien pu faire de toute façon. Il ne parlait pas beaucoup de ses problèmes avec ses parents. Ils savaient très bien ce qui s'était passé pour sa jambe, que Kozu l'avait délibérément poussé. Ils avaient porté plainte, mais elle avait été annulée. En revanche, ils n'étaient pas au courant pour tout ce qu'il s'était passé au lycée, avec la première vidéo. Ils eurent une longue discussion avec leur fils. C'étaient des gens intelligents et ouverts d'esprit. Ils furent très compréhensifs :

- On s'inquiète beaucoup pour toi, Keiji. Il ne faut pas que tu gardes ça seulement pour toi. Bokuto-kun t'aide déjà, mais nous sommes tes parents, et quoi que tu fasses, on se sera toujours là pour te soutenir. Dis-nous la prochaine fois que tu te fais embêter. On ne peut pas te laisser broyer du noir tout seul dans ton coin. De même, si tu veux que Bokuto-kun passe à la maison, il n'y a aucun problème avec ça. Si ça peut t'aider à aller mieux, on fera tout ce qui est en notre pouvoir pour aller dans ce sens.

Il avait remercié ses parents. Il était chanceux de les avoir, c'était ce qu'il se répétait tous les jours. Il avait juste eu peur au début qu'ils ne consentent pas à sa relation avec Bokuto-san. Mais ça avait apparemment été une erreur de jugement.

Bokuto l'appela dans la soirée pour lui demander des nouvelles. Ils ne s'étaient pas vu depuis la veille. Il avait dû retourner au lycée. Akaashi était excusé, mais pas lui. Ça l'embêtait de laisser son cher et tendre seul, mais il n'avait pas le choix.

- Akaashi ! Comment vas-tu aujourd'hui ?!

- Pas besoin de crier, Bokuto-san, je t'entends très bien. Je vais bien, si on peut appeler ça "bien". Ma jambe me fait toujours aussi mal, mais même en prenant des médicaments, ça ne change rien...

- Hey ! Interdiction de déprimer, hein ! Tu me l'as promis hier ! Toutes les choses finissent par s'arranger, ne t'en fais pas. Tiens, d'ailleurs, en parlant de bonnes choses, Kozu s'est fait embarquer par les flics ! Je ne reviens toujours pas de l'effet qu'a eu la vidéo ! Les profs ont aidé aussi. Ils ont tous appris ce qu'il t'était arrivé hier et on fait forcing pour que le principal arrête d'ignorer le cas de Kozu !

- ... Et le reste du lycée, il dit quoi ?

- Franchement, la majorité a changé de bord. Il y en a même qui m'ont demandé quand tu revenais pour qu'ils puissent s'excuser en personne ! Vraiment Akaashi, t'as eu une idée fameuse !

- Et la minorité ?

- ... Ah... et bien... eux se sont encore plus "radicalisés" je dirai...

- Ils disent quoi ?

- Heu... je ne pense pas que ce soit bien que tu l'entendes...

- T'en as déjà trop dit. Si tu ne me dis rien, ça sera encore pire. Accouche.

- ... Ils disent... que tu es un lâche et que dès que tu reviendras ils s'occuperont de toi...

- ... Il n'y pas de quoi être si anxieux, Bokuto-san, dit Akaashi en essayant de garder son calme. Ils ne mettront jamais leurs menaces à exécution, non ?

- Ce sont les petites brutes du lycée, ils appartiennent à des gangs bizarres... Mais, c'est pas tout... tu vois le mur en face du lycée ? Celui qui nous sépare du square ? Des gens ont marqué, sûrement ces types : "Akaashi tu t'en tireras pas comme ça". En grosse lettres rouges.

- ...

- Akaashi ?!

Il entendit un bruit sourd, comme si son portable tombait. Ce fut comme un déclic dans la tête du capitaine. Il prit sa veste et courut hors de chez lui. Heureusement, il habitait assez près de chez Akaashi. Il courut à en perdre haleine et arriva chez le brun en moins de cinq minutes. Il sonna comme un fou. On vint lui ouvrir.

- Bokuto-kun ? Qu'est-ce que tu fais ici à une heure pareille ?

- Keiji..., dit-il haletant. Je dois voir Keiji... j'étais en conversation avec lui et... et il a soudain...

Il ne put finir sa phrase, on le laissa entrer. Il se dirigea aussitôt vers sa chambre.

- Akaashi !

Son portable était par terre, il gisait sur son lit, inconscient. Il avait dû se cogner la tête sur sa table de chevet, compte tenu de comment il était allongé. Bokuto se précipita vers lui et le secoua doucement. Il reprit connaissance assez rapidement. Il n'eut pas le temps de comprendre ce qu'il se passait que Bokuto le serra dans ses bras.

- Ne me fais plus jamais peur comme ça, Akaashi..., murmura-t-il.

- Je... j'ai dû m'évanouir... désolé...

- Tu t'es fait mal ? T'es blessé ?

- Un peu mal à la tête, mais ça va, ne t'en fais pas...

- Comment veux-tu que je ne m'en fasse pas alors que des mecs dangereux te veulent du mal ?!

Il le serra plus fort contre lui. Le brun l'enlaça à son tour. Il n'avait même pas besoin de demander ce qu'il faisait là. Il était son ange-gardien, après tout.

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Akaashi revint en cours le lundi suivant, beaucoup d'élèves lui présentèrent leurs excuses. Les menaces qu'il avait entendues de Bokuto ne se firent jamais réellement connaître, même s'il y en avait certains qui gardaient une dent contre lui.

Bokuto, Konoha et lui furent convoqués chez le principal pour diverses fautes comme utiliser micro et caméra dans l'enceinte du lycée, et diffusion "propagandiste" comme il appelait ça, alors que ce n'étaient juste que des petits bouts de papier et hors de l'enceinte du lycée... Ils ne se firent pas renvoyer, mais durent faire des travaux d'intérêt général.

Pour Akaashi, ce fut un peu plus différent. C'était lui le cerveau. Certains lui demandèrent de présenter des excuses. Il refusa catégoriquement. Il ne fallait pas inverser les rôles. Il expliqua au proviseur les raisons de ses actes, qui étaient totalement légitimes. Il l'écouta avec attention. Akaashi choisit soigneusement ses mots car l'homme qu'il avait en face de lui était réputé pour être très stricte. Il lui fallait une argumentation en béton. Il y mit le ton, et apparemment, tout se passa bien. Le proviseur lui proposa même de revenir le voir s'il avait d'autres problèmes. Il l'avertit cependant qu'il ne pouvait pas le laisser partir sans aucune sanction, ce serait injuste envers ses deux camarades, et cela voudrait dire que son autorité n'était pas totale. Il ne savait pas vraiment comment gérer le problème. Akaashi était incapable de faire des travaux comme ses deux équipiers, compte tenu de son état physique. Après mûre réflexion, il lui dit que comme il était bon élève, il resterait trois semaines le soir pour aider ceux prenant des cours de rattrapages. Akaashi fut surpris de la punition (qui pour lui n'en était pas vraiment une), mais l'accepta tout de même. S'il devait se contenter de ça, tout irait bien.

o.O.o

Un mois passa. Tout redevint calme à Fukurodani. Les trois garçons remplirent leur "punition" comme ils le devaient et en furent tous les trois libérés plus vite qu'ils ne le crussent. Le temps passait vite. Akaashi ne se fit plus embêter. Certes, certains le regardaient encore avec haine (même s'il ne comprenait vraiment pas pourquoi) mais n'osaient pas s'approcher. Bokuto était toujours à ses côtés et dissuadait quiconque de s'approcher de son Akaashi.

Un autre mois passa. La jambe d'Akaashi allait de mieux en mieux. Il avait retiré ses broches et les médecins étaient optimistes. Il ne put pas jouer le tournois inter lycées qui déterminerait leur allée ou non aux nationales. Son équipe remporta avec succès le tournois. Beaucoup de spectateurs furent surpris de ne pas trouver le passeur de talent sur le terrain. Ils furent encore plus surpris, dans un moment de panique de Bokuto, lorsqu'ils virent Akaashi, en béquilles dans les gradins en train de lui crier : "Reprends-toi, Bokuto ! Tu m'as promis de nous qualifier pour les nationales !" Le gymnase s'était tu. Bokuto, non seulement surprit par son encouragement, mais aussi par l'enlèvement de l'honorifique, avait répondu : "... Tu... tu as raison, Akaashi ! Je tiendrai ma promesse ! Nous irons aux nationales !". Il avait ensuite sorti son fameux HEY HEY HEY, et s'était remis sérieusement à jouer. Le comportement de Bokuto ne tenait pas à grand-chose. Un mot pouvait le faire chavirer ou au contraire le revigorer en moins de temps qu'il ne fallait pour le dire, Akaashi le savait, c'est pour ça qu'il était le seul à pouvoir le remotiver. À la fin du match, ils s'étaient retrouvés dans un coin à l'abris des regards indiscrets.

- Félicitation pour la victoire.

- Aha ! Je ne pouvais pas perdre, voyons ! Les nationales seront la dernière chance qu'on aura de jouer sérieusement ensemble.

- Non, Bokuto-san. Ce ne sera pas la dernière, on aura d'autres occasions.

- Jouer au volley, ce n'est vraiment pas pareil sans toi, Akaashi...

- En effet, sans moi, tu t'énerves tout le temps... J'ai bien vu que les autres n'arrivaient pas à te calmer.

Bokuto s'approcha de lui et l'enlaça au niveau des hanches. "Il n'y a que toi qui me comprenne aussi bien. C'est pour ça que je t'aime, Akaashi." Le brun n'eut pas le temps de répondre que Bokuto entama un baiser des plus passionnés qu'ils s'étaient échangés jusqu'alors. Akaashi le saisit par les épaules pour mieux se cramponner à lui et gémissait de plaisir à mesure que Bokuto approfondissait le baiser. Il embrassait vraiment bien. Trop bien. Akaashi sentit ses jambes se dérober. Bokuto le rattrapa à temps, mais n'en arrêta pas pour autant le mouvement de ses lèvres. Ils durent s'arrêter quand ils entendirent quelqu'un les appeler, pour leur dire qu'ils allaient repartir chez eux. Ils se séparèrent à contrecœur et rassemblèrent leurs affaires. Prochaine étape : les nationales. Cela risquait d'être un évènement mémorable.

o.O.o

Akaashi fit de la rééducation pour sa jambe et put rapidement reprendre l'entraînement. Les nationales arrivèrent plus vite qu'ils ne le crussent. Ils retrouvèrent toutes les plus grandes équipes du Japon, dont certaines qu'ils affectionnaient tout particulièrement. Ils gagnèrent leur premier match. Le deuxième aussi. Ils n'avaient pas le temps de respirer, qu'ils devaient aussitôt enchaîner avec le suivant. Au troisième, tout se passa bien, jusqu'à ce qu'Akaashi (nda : oui, encore, je m'acharne sur lui et j'aime ça !) ressente une vive douleur dans la jambe. Il resta sur le banc les trois quarts du match. Ce n'était pas grave, mais il préférait ne pas trop forcer dessus, au cas où. Vers la fin du match, alors qu'il ne restait plus que quelques points avant la victoire, il redemanda à entrer sur le terrain. Ils réussirent à gagner deux points grâce à lui, mais ce ne fut pas suffisant pour gagner le match. Ils s'inclinèrent 26 à 28. Les gagnants les regardaient comme si les joueurs de Fukurodani étaient devenus fous. Ils avaient beau avoir perdu, ils étaient encore plus enthousiastes qu'eux. Ils s'étaient tous attroupés autour de leur passeur et étaient si heureux que l'équipe adverse ne put s'empêcher de sourire aussi en les voyant.

Akaashi était enfin revenu, c'était un miracle ! Il avait dû passer par tous les malheurs possibles avant de pouvoir rejouer au volley. Même s'ils n'avaient pas gagné les nationales, ils s'étaient amusés comme jamais. C'était la dernière fois qu'ils y accédaient avec leur équipe actuelle. Ce souvenir resterait gravé à tout jamais dans leur tête. Et surtout, ils avaient pu jouer avec leur équipe au complet. Akaashi n'était plus sur le banc de touche désormais. Ils criaient de joie dans tout le gymnase. Bokuto pleura toutes les larmes de son corps en balbutiant des "Agaaahsheee". Sa tête comique faisait bien sûr encore plus rire les autres. Après avoir salué l'équipe adverse et leurs supporters, ils quittèrent le terrain, toujours avec autant d'énergie et portèrent Akaashi jusqu'aux vestiaires.

- C'est là que l'aventure s'arrête, on dirait..., remarqua tristement Konoha.

Akaashi et Bokuto se regardèrent, et échangèrent un sourire complice. Ils ne dirent pas un mot, mais pensèrent exactement la même chose : pour eux, elle ne faisait que commencer.


Voilà, c'est fini... C'est triste de devoir se quitter pour cette fiction. En tout cas, merci de l'avoir lue ! J'espère que cette fin vous a plu ! Je sais pas si le diagnostic que j'ai donné pour la jambe d'Akaashi était cohérent, j'ai pas vraiment vérifié... Fin soft aussi, pour un rated T, je pense que c'est suffisant ;)

Je me suis rendue compte en lisant une autre fiction que Kozu pouvait être le diminutif de Kozume... Je vous rassure, il n'y a absolument rien à voir xD Il m'est venu tout à fait par hasard en tête.

Ce n'est pas la dernière fiction sur le BokuAka que j'écris. J'en ai une en cours (cf. Terreurs Nocturnes) et pleeins d'autres en attente :D Vous entendrez de nouveau parler de moi !

Merci pour votre soutient, et à bientôt !

Bises.

PS : Laissez-moi vos reviews pour que je sache comment vous avez trouvé cette fin :)