CHAPITRE 8

ENFANT DU BOUT DU MONDE


En peu de temps, les barreaux d'une cellule se refermèrent sur Nott pour l'isoler du monde.

Sans doute espérait-on que cette solitude et son environnement — un trou, sombre, sale et exigu — l'affaibliraient, mais Nott n'avait pas eu un moment pour se pauser depuis leur départ catastrophe. Depuis, rien ne s'arrangeait, les événements s'enchaînaient à toute vitesse sans qu'il puisse réfléchir et, plus que tout, se calmer. Munro, l'effacement de la mémoire de ce sorcier du ministère, la finale de Quidditch, les Inviolables de Cygnus Black, Saba, Cantankerus Nott et les elfes de maison... Tout disparaissait dans le brouillard. Impossible de démêler le principal de l'accessoire, séparer les traces des Ombres et les conséquences inattendues de leur voyage.

Après un sommeil de plomb, l'esprit de Nott avait retrouvé assez de calme et de recul pour éloigner la panique et élaborer un plan. D'abord, découvrir les informations de l'Auror Crickerly qui n'était certainement pas idiot. Leur visite avait fourni le parfait prétexte pour une arrestation, mais ne constituait pas l'essentiel de ce contretemps. Cygnus Black pouvait en être l'auteur. Bien sûr, les Inviolables lui interdisaient une trahison personnelle, mais ce morveux était bien assez malin pour trouver un moyen de contourner le problème. Munro, également. Ce n'est pas l'envie de le laisser pourrir dans un trou qui faisait défaut à cette brute. Après tout, son partenaire avait été limpide sur son mécontentement. Il avait dû s'imaginer qu'il n'aurait qu'à éliminer le sorcier que Nott lui pointerait du doigt avant de couler des jours paisibles dans sa nouvelle vie en 1980. La réalité du terrain et les débuts décevants de l'enquête l'auraient poussé à accélérer le processus. Presque malin, pour un tireur de baguette... Nott avait du mal à y croire. Munro, même imbécile, avait sacrifié sa vie pour cette mission et son aversion pour lui ne justifiait pas une mesure si extrême. En plus, le mode opératoire ne lui ressemblait pas. Il l'aurait plus étrangler à mains nues dans une chambre d'hôtel avant de faire disparaître le corps. Saba, elle, pouvait être le maitre d'une ruse pareille. Peut-être les avait-elle vendu pour échapper à une descente de police magique... Ou faisait-elle partie d'une unité en infiltration pour mettre à jour un réseau de prostitution. En l'énonçant, Nott gloussa du ridicule de cette hypothèse. Même au vingt-et-unième siècle, tout le monde se contrefichait des filles sur le trottoir.


Peu de sorciers s'aventuraient à demander une faveur à Mr Bulstrode, un homme loin de toute forme d'indulgence avec ce qu'il considérait comme de la faiblesse. Par bonheur, Cygnus Black n'avait jamais été un lâche. Même plus jeune lorsque la moindre émotion le faisait trébucher sur chaque mot. Même à Poudlard, et alors qu'on se moquait constamment de lui, il avait invité Violetta Bulstrode — à laquelle le titre de plus-belle-fille-de-Serpentard ne rendait pas justice — au bal de Noël. Même plus tard, face à son père qui l'avait toujours méprisé, Cygnus avait défendu son désir de faire carrière. Bien sûr, Violetta Bulstrode n'avait jamais été sa partenaire, son bal avait eu lieu sur les bancs, seul, mais son père ne s'était pas opposé et Mr Bulstrode ne le ferait pas non plus.

— Oui, Mr Black ?
— Sans vouloir vous importuner, Monsieur, articula-t-il soigneusement, je viens vous requérir d'une faveur.

Cygnus devait se concentrer pour parler. Un comble pour un enfant à qui les mots ne manquaient jamais. Des torrents et torrents qu'il déversait sans réfléchir à sa mère à propos du temps, son frère, son nouveau balai, le chat, la couleur du soleil, le travail de papa. Toute pensée, avant même d'être complètement assimilée par son esprit, fuyait par sa bouche. Un jour, alors qu'il babillait à n'importe quel sujet sans la moindre importance, Phineas Black, ce père qui reconnaissait son existence par l'espace d'air que son fils occupait, l'avait apostrophé avec agacement. « Est-ce vraiment tout ce à quoi tu peux penser ? »Puis, face au silence soudain, « Je ne tolèrerai pas un idiot. » La douleur, la honte et l'humiliation, Cygnus les revivaient chaque fois qu'il bégayait. Loin d'être bête, major de toutes ses promotions... Mais l'émotion lui faisait perdre les mots. A Poudlard, il bafouillait quasi quotidiennement, enragé par le fait d'être moqué, sous-estimé. Cygnus avait depuis appris à ignorer l'opinion des autres, étouffer sa colère.

— Mmpf, marmonna Mr Bulstrode avec un certain embarras. Vous savez bien, malgré toute l'estime que je porte à un gentilhomme de votre qualité, que je ne peux intervenir. Les épousailles étant une affaire féminine, mon épouse en a la charge.
— J-je...

Cygnus s'empourpra.

— Je ne viens pas à ce s-sujet, assura-t-il en affermissant la voix. Deux hommes ont été arrêté hier et j'aurais aimé pouvoir leur parler. Peut-être les libérer, hasarda-t-il encore à moitié rouge.

Violetta Bulstrode, à la fois poison et antidote de son existence. Un fait relativement connu de tous. En dehors du bal de l'école, Cygnus avait déjà demandé sa main à trois reprises, propositions que la jeune femme n'avait même pas daigné refuser en personne. Depuis peu, celle-ci était fiancée à un autre, Charles Potter. Que Mr Bulstrode évoque ce sujet le mortifiait.

— Oh, s'exclama le vieil homme, surpris. Bien, je serai honoré de glisser un mot en votre nom à Williams.

Aider Théodore Nott et Cecil Bárdarson n'était pas complètement étranger à cette histoire non plus. Il y avait le Serment. Et, après avoir recherché leur nom, la chambre de la Mort, le gouffre du Passé, une légende à ce sujet — sans succès —, Cygnus était plus que curieux. Un tel saut dans le temps... Comment leur magie avait réagi ? Pourquoi venir ici, maintenant ? Pourquoi abandonner leurs vies ? Et, plus que tout, que pouvaient-ils faire pour lui permettre de posséder Violetta sans son accord et celui de sa famille ?

— Soyez assuré de ma gratitude et mon amitié, remercia Cygnus en serrant la main du père de sa promise sans une once de remords.


Mot d'auteure : petit chapitre où vous en apprenez plus sur notre petit (*ahem*) Cygnus Black et où notre petit Nott prend un repos bien mérité. Je poste un peu à la va-vite car j'essaie de relancer l'envie (qui fait défaut car j'ai l'impression d'écrire n'importe quoi). BISOUS.