Voilà le dernier chapitre... merci à tous ceux et celles qui ont suivi et laissé de comm' ! bisous !


Chapitre 14 : Les histoires d'amour finissent mal en général

Minos partit tôt ce matin. Il passa néanmoins par la chambre d'Albafica et déposa un doux baiser sur sa joue alors qu'il était endormi. Alors qu'il cheminait jusqu'au Tribunal Silencieux, son cœur lançait des appels de détresse. Il avait été sot d'agir de la sorte !... oui mais entre l'admettre et le reconnaître, il y avait une marge pour un Spectre de l'envergure de Minos !... Il serra les poings. Au moins, la surcharge de travail lui libèrerait les pensées. Son coeur de Spectre bondissait malgré tout à l'idée du retour le soir venu, découvrant une Ingrid en pleurs sur un Poisson envolé !... Minos ébouriffa sa chevelure. Ah ! tout était décidément plus simple sans ce foutu Poisson !... pourquoi cette histoire était-elle aussi compliquée ? pourquoi Minos ne pouvait-il pas, comme Rhadamanthys, noyer sa frustration dans du scotch ?... d'ailleurs, en parlant de la Wyverne... ce dernier descendait les marches.

"Que fais-tu ici ?" questionna Minos.

"Il court le bruit que le premier Tribunal est surchargé. Et que tu peines à remplir tes fonctions."

Le Griffon bisqua. "QUI a dit cela ?"

"Personne en particulier. Cela se note aux faibles flux des autres Tribunaux. Il y a engorgement ici. Je suis venu y mettre bon ordre."

Minos croisa les bras. "Je n'ai pas besoin d'aide, Rhadamanthys !..."

"A d'autres. Tu as vu ta mine ? elle est à faire peur. La prochaine fois, réfléchis à deux fois avant d'ôter la vie à ton Procureur." en tapotant la joue du Griffon avant de reprendre sa montée des marches.

Minos fulminait mais oublia bien vite, ravi d'avoir de la compagnie. Certes, Rhadamanthys n'était pas du genre bavard mais il semblait plus droit que le Garuda qu'il fallait sans cesse tenir à l'œil. Et puis Rhadamanthys aussi avait une histoire compliquée avec Pandora !...

Le flux se rétablit lentement.


Albafica s'était levé du pied gauche ce matin. Vraiment, il ne manquait plus que... oh non !...

"Mon très cher Or..."

Albafica pinça ses lèvres. Oui. Il ne manquait plus qu'un Garuda feulant dans les pattes...

"Si vous cherchez Minos, il est..."

"Pas du tout. C'est toi que je souhaitais voir."

Albafica soupira intérieurement. Vraiment, la journée allait être mauvaise...

Le Garuda s'isola un moment avec l'Or.

"Je pense que tu as raison de quitter ce lieu. Vois-tu, les Enfers sont soumis à un équilibre et il semble que ta présence l'ait rompu."

Albafica baissa le regard. C'est qu'il avait mille fois raisons, cet oiseau de malheur !...

"Je ne saurai dire ce qui s'est passé dans la tête de Minos lors de son assaut en Grèce... ta beauté semble lui avoir fait perdre toute notion de bon-sens." disant cela, la main du Juge remonta sur la hanche du Poisson.

Le regard du Poisson cherchait où se dérober.

"S'enticher d'une Rose empoisonnée, vraiment..." en humant ses cheveux comme un animal.

La main du Garuda jouait, se posant un moment avant de repartir pour se poser ailleurs. Les mouvements étaient hypnotiques.

"Je vous demande de..."

"Oui ?"

Ne pas le regarder... surtout éviter...

"Ta place n'est pas ici, Poisson. Elle ne l'a jamais été. Je veux retrouver mon frère tel qu'il était avant son assaut contre le Sanctuaire et tu vas... me le restituer." en montant la main jusqu'au cou qu'il empoigna avant de serrer, feu brûlant au fond des pupilles. "Je vais t'aider à prendre ta décision, Poisson."

Albafica porta ses deux mains sur celle du Garuda, cherchant à se défaire de l'emprise monumentale du Juge.

La pression sur la gorge devenait de plus en plus forte. Albafica avait l'impression d'être aux prises avec un oiseau de proie, gorge offerte aux terribles serres !... Pas moyen de faire lâcher prise au Garuda !... le Poisson se mettait à voir trouble... sa conscience s'étiolait lentement à mesure que le cerveau était privé d'air. Soudain, deux ailes noires se découpèrent derrière le Garuda ; des ailes que le Poisson, même raison éteinte, aurait reconnues entre mille !... les ailes du Griffon.

"Tu le relâches immédiatement, Garuda." siffla une voix qui n'augurait rien de bon.

La conscience quitta totalement Albafica à cet instant.


Ingrid souriait. Elle jouait à la balle avec... un crâne. Ce dernier rebondissait entre le sol et la paume de la fillette. Albafica grimaça. Puis ses paupières papillonnèrent et elles s'ouvrirent sur un visage familier. Ce sourire...

"Ah ben il était temps ! j'ai bien failli attendre !..."

"Ma... ni..."

"Shhh ! tout va bien, tu es en sécurité ici."

Le Poisson scrutait la chambre du regard.

"Où... sont... Ingrid et... Minos ?..."

"Ton foutu Spectre t'a livré comme le dernier des sacs à patates devant la première Maison ce matin. Shion a failli devenir fou !..."

"Il a dit... quelque chose ?..."

"Que dalle."

"Je... je te demande pardon... Mani... j'ai fait du mal... dans un camp comme dans l'autre... pardon, pardon..." yeux magnifiques inondés de larmes.

"Bah, tu sais, des conneries on en fait tous !... moi le premier, demande un peu au vieux !... hahaha !"

"Oui mais... un Spectre... un Juge, qui plus est... pourquoi ?..."

"J'avoue ne pas avoir compris non plus. Mais qu'importe, tu es sauf, c'est tout ce qui compte."

"J'accepterai d'être mis à l'index, Mani... je... je le mérite. Vraiment."

"Arrête de délirer !... j'ai rien dit à personne. Et ce secret, je l'emporterai dans ma tombe, crois-moi."

"Merci mais... je ne pourrai plus prétendre au rang de Saint d'Athéna après pareille compromission. Je l'exposerai dès demain à notre déesse et j'accepterai sa sentence."

Le Cancer haussa les épaules.

"Tu fais c'que tu veux, hein !..."


"Albafica des Poissons, quel plaisir de te voir rétabli."

Albafica ploya un genou.

"Merci, ô Athéna."

Le Poisson bascula le regard sur le Pope.

"J'ai une terrible confession à vous faire. Je me dois de... vous informer que... j'ai trahi votre confiance, en tant que Saint. J'ai..." les paupières s'abaissèrent un moment, gorge serrée "... je me suis compromis avec... un Spectre de Hadès."

Sage eut un lever de sourcils surpris tandis que la déesse parut gênée.

"J'accepterai votre sentence."

"Nous allons y réfléchir afin de ne pas donner de réponse hâtive, Albafica."


Albafica tressaillit lorsqu'il reçut une convocation officielle l'invitant à se rendre séance tenante dans la salle d'audience du Grand Pope. Il ne perdit néanmoins pas une minute !...

"Albafica des Poissons."

L'Or ploya le genou.

"Athéna. Grand Pope."

"Nous avons longuement discuté du sujet qui nous préoccupe. Il serait, en effet, malvenu de te laisser dans cette situation, pour le moins inédite, il est vrai. Nos ennemis font déferler sur le monde autant de misère que de violence. Il n'est pas bon d'avoir la moindre attache avec le camp ennemi, à plus forte raison des liens aussi forts."

"Voilà pourquoi, nous souhaitons que tu te rendes dans le Nord du pays. Nous avons là un camp d'entraînement qui accueille des orphelins. Le responsable de ce camp est tombé gravement malade et nous songions à faire appel à tes connaissances et techniques en vue de le remplacer, Albafica." amena la déesse, pleine de bonté.

"C'est... trop de bonté, ô déesse Athéna."

"Ce n'est rien, Albafica. Nous souhaitons que tu puisses retrouver un certain équilibre sur place."

"Merci."

"J'enverrai mon disciple te rendre des visites régulières, Albafica."

"Je ne sais que dire, Grand Pope, Athéna. Merci."


Les mois s'écoulaient. Albafica s'épanouissait totalement au sein de la multitude bruyante et turbulente des enfants. Il notait que la teneur en poison contenu dans son sang diminuait, aussi pouvait-il approcher les enfants sans crainte. Une de ses pensionnaires, ressemblant fortement à Ingrid, lui avait même un jour offert un beau bouquet, disant qu'elle souhaitait de marier avec lui plus tard !... Albafica rayonnait. Il venait enfin de tourner une page cruelle de son histoire. Plus d'idées noires. Plus de tiraillements incessants. Il revivait. Minos et son emprise quittaient progressivement son esprit.

Les visites de Manigoldo étaient toujours sources de joie.


Albafica ramenait une couverture sur un enfant dont le lit était défait.

La lune était pleine, baignant de ses reflets le dortoir.

Son tour d'inspection terminé, Albafica vint prendre le frais et admirer la clarté de la lune.

Un craquement mit ses sens aux aguets.

"Qui va là ?" se levant prestement, en position de combat.

"Est-ce ainsi que tu m'accueilles, mon magnifique Poisson ?..."

Cette voix... oh, par Athéna, qu'aurait-il donné pour ne plus jamais l'entendre ?...

Un certain Spectre encapuchonné se présenta à lui.

"Mi... nos..."

"Oui." rabattant le capuchon, présentant sa merveilleuse chevelure argentée.

"Que viens-tu faire ici ?..."

"J'ai eu du mal à te trouver. Notamment depuis que mon surplis m'a fait défaut."

"Pardon ?..."

"Comme toi, j'ai été chassé du Royaume des Morts. Tu as devant toi un humble vagabond, condamné à errer sur la Terre."

"C'est... à cause de nous que..."

"Non. Pas directement. Mon affrontement avec le Garuda n'a pas été du goût de mon Maître, hélas. La sentence a été radicale."

"Nous sommes donc, pour ainsi dire, sur un pied d'égalité ?..."

"Ton sort est plus enviable que le mien. Nous ne servons pas le même camp."

"Pourquoi être venu jusqu'ici, Minos ?..."

"Je tenais à te revoir une dernière fois. M'assurer que... tu aies recouvré la santé. Me voici rassuré." osant un revers de doigts sur la joue rosissante du Poisson. Le geste anima sitôt une tension.

Le Spectre reprit son bâton en main, souriant.

"Je ne compte pas t'importuner plus longuement." reprenant son sac sur l'épaule.

"Minos... ne veux-tu pas demeurer un moment ?... avant de... reprendre ton chemin ?..."

"Ma présence te sera rapidement intolérable, Albafica. Je le sais."

"N... non !... reste. Reste, je t'en prie. Donne-moi des nouvelles d'Ingrid..."

"Tu lui as beaucoup manqué."

"J'espère qu'Aiacos va la laisser en paix. Elle le craignait beaucoup."

"Aiacos a été envoyé en offensive contre les tiens. Il aurait lamentablement échoué et la sentence ne se serait pas faite attendre : il a immédiatement été destitué. Aujourd'hui, il erre sur Terre sous son véritable nom. Notre Maître n'est pas aussi généreux que le tien." amer. "Sur ces bons mots..." se retournant pour reprendre sa route.

"Attends !..." accroché à la cape usée.

"Diable, c'est la deuxième fois que tu cherches à me retenir, Albafica... à la troisième, je jurerai qu'il te reste encore quelques sentiments à mon égard."

Albafica lâcha immédiatement l'homme.

"Pardon. Je... il s'agissait sans doute d'un réflexe..."

"Cela m'est préférable. Il me reste encore tant de souvenirs, Albafica..." glissant néanmoins une main dans le dos du Poisson pour l'approcher de lui, se permettant de humer discrètement les éternelles effluves de rose qui se dégageaient autant de sa peau diaphane que de sa chevelure azurée. "... tant de souvenirs..."

"Reste... Minos..."

FIN.