Bonjour à tous !

Voici une nouvelle histoire qui a suivi un drôle de cheminement. Débutée comme un simple POV inspiré de la chanson de Claude-Michel Schönberg, Le Premier Pas, elle a pris de l'ampleur et a trouvé une fin à travers le texte Non Merci de Michel Sardou.

Disclaimer : tout appartient à J. K. Rowlings

Pairing : HP/DM

« L'originalité n'est qu'une judicieuse imitation. » Voltaire


Chapitre I : Prise de conscience

Vendredi 1er Septembre 2017

Avachi dans un fauteuil, les jambes allongées devant lui, un homme blond scrutait avec attention son verre de Whisky pur-feu, qu'il faisait tourner dans sa main, perdu dans ses conjectures.

De temps en temps, son regard revenait vers une impressionnante pile de dossiers posée sur le plateau du bureau. Dans ces moments-là, une expression perplexe se peignait sur ses traits aristocratiques.

Avec un soupir, il secouait alors la tête et dégustait une gorgée d'alcool avant de s'abîmer encore davantage dans ses réflexions.

POV de Draco

Obsédé !

A 37 ans, je le reconnais enfin, je suis obsédé ! Eh oui, moi, Draco Lucius Malefoy, Lord du monde Sorcier, je suis irrémédiablement obsédé. Par qui me demanderez-vous ? Par nul autre que le Garçon-qui-a-survécu, le Garçon-qui-a-vaincu, le Survivant, l'Elu, Saint-Potter, le Balafré, ... en un mot comme en cent, Harry Potter !

Ce matin, j'ai conduit Scorpius à King's Cross pour sa première rentrée et bien sûr, je l'y ai vu, accompagné de sa famille. Nous nous sommes contenté de nous saluer de loin, tout comme nous le faisons depuis la défaite de Celui-dont-on-ne-devait-pas-prononcer-le-Nom.

Et avec cette rencontre, tous les souvenirs enfouis, ou du moins espérais-je qu'ils l'étaient, étaient remontés à la surface.

La haine qui nous animait dans les couloirs de Poudlard avait fait place à une indifférence blasée. Un simple hochement de tête suffisait pour faire comprendre que nous avons conscience de la présence de l'autre. Un désintérêt mutuel semblait désormais guider notre conduite. Mais pourtant, la réalité était bien différente de ce que vous pourriez imaginer.

Parce que malgré toutes les apparences, et malgré toute ma volonté, je n'ai jamais pu oublier Harry Potter.

La première fois que je l'ai vu, j'étais perché sur le tabouret de mesures dans la boutique de Madame Guipure. Il était frêle et me semblait minuscule, les cheveux ébouriffés comme si un hippogriffe avait tenté d'y faire son nid. J'avais été fasciné par la couleur intense de ses yeux, un vert émeraude si brillant que l'on aurait presque pu croire qu'il s'agissait d'une véritable pierre précieuse. Malheureusement, cet éclat était gâché par les plus horribles lunettes que j'avais jamais vues.

Il était entré dans la pièce avec un mélange de prudence et d'inquiétude qui le rendait absolument adorable. Sa fragilité apparente vous donnait envie de le prendre par la main et de le guider. Ou mieux, de le prendre dans vos bras pour le réconforter.

Oui, je sais, je n'avais que 11 ans à cette époque, mais avec le nombre des années passées, je peux – ou je dois enfin – être honnête envers moi-même, c'est cette impression qu'il a éveillée en moi. Je voulais le protéger, l'aider. Notre discussion n'a pas duré très longtemps. Je crois que je me suis montré assez méprisant en voulant lui parler. Toute ma vie, on m'a seriné que les Malefoy étaient supérieurs aux autres et j'ai été bien trop conditionné pour pouvoir agir autrement. Comme le disent les moldus, « Chassez le naturel et il revient au galop ». Et c'est ce que j'ai fait le jour de notre première rencontre. Le pire, c'est que je ne connaissais même pas son nom.

La situation s'est encore détériorée dans le Poudlard Express le 1er Septembre 1991 durant le voyage marquant notre première rentrée à Poudlard. Je savais qu'Harry Potter devait intégrer Poudlard cette année-là et je l'ai cherché dans tout le train. En tant que Malefoy, il était vital que je me présente à lui comme guide pour son entrée dans le Monde Magique. Quand j'ai enfin fini par retrouver le Garçon-qui-a-survécu, il était en compagnie de Ronald Wesley, la belette-sangsue. Et il s'est avéré que mon inconnu et celui qui avait défait le Seigneur des Ténèbres n'était qu'une seule et même personne.

Je déteste le rouquin. Pas que je le connaissais à cette époque, du moins personnellement, mais l'inimitié entre nos deux familles est telle que nous ne pouvons pas nous voir en peinture – et quand on sait que les peintures sorcières peuvent interagir avec les vivants, je vous laisse imaginer ce que cela peut signifier. Ne me demandez pas non plus les raisons de cette situation, les racines de ces vieilles querelles ont depuis longtemps disparu de nos mémoires.

Toujours est-il que j'ai tout de suite eu un mauvais pressentiment en le trouvant en compagnie de celui que je considérais à l'époque comme un traître à son sang, et malheureusement, celui-ci s'est renforcé dès les premiers mots échangés. Une lueur de doute et de suspicion luisait dans son regard tandis qu'il m'observait avec circonspection.

J'ai été profondément blessé par sa méfiance évidente et comme je le fais toujours dans ce genre de situation, j'ai attaqué de front. Et en faisant cela, j'ai confirmé la mauvaise opinion qu'il commençait à se forger à mon égard. Si je le connaissais – de par son nom et la réputation qu'il avait dans le monde Sorcier -, lui ne savait rien de nous ou du moins, les seules informations qu'il avait reçues avaient sûrement été biaisées par les points de vue de Hagrid, qui l'avait accompagné sur le Chemin de Traverse, et ensuite de Weasley qui ne m'appréciait pas non plus et ne s'en cachait pas.

Cette deuxième rencontre a déterminé le reste de nos rapports en tant qu'étudiants. Je n'ai pas pu m'empêcher de l'asticoter à chaque fois que nous nous croisions. Je me suis fait un plaisir d'insulter ses amis pour voir ses yeux flamboyer et ses joues rosir sous l'effet de la colère. J'ai tout fait pour lui pourrir la vie, allant jusqu'à saboter ses potions dans l'espoir que Severus le colle en retenue.

Il est vrai que j'ai pu compter sur mon parrain pour me venger de ma frustration. De toute façon, Severus avait reporté sur Harry toute la haine qu'il avait éprouvée à l'encontre du père de ce dernier et il se faisait un plaisir de faire payer au fils les méfaits du géniteur. Encore aujourd'hui, je me demande comment un adulte avait pu haïr à ce point un orphelin pour les actes d'un père qu'il n'avait jamais connu. Il faut reconnaître que les Serpentard ont la rancune tenace et aveugle.

Et pourtant, même si j'ai semblé le détester, je ne pouvais passer une seule journée sans l'apercevoir au moins une fois. Je lui ai tendu des pièges invraisemblables pour tenter de le faire punir ou renvoyer – ce que j'ai risqué moi-même également, je m'en rends compte maintenant.

La découverte de son don pour le Fourchelangue en seconde année a été une surprise énorme pour toute l'école. Il était reconnu de tous que cette capacité était spécifique aux Mages Noirs. De là à faire courir les rumeurs selon lesquelles il était le commanditaire des agressions, il n'y avait qu'un pas. Et tous ont cru à cette histoire. Fallait-il être stupide pour seulement imaginer que Potter, dont la mère était une née-moldue, élevé par des moldus, et meilleur ami de Granger, aurait pu lancer de telles attaques ?

L'année suivante, j'ai utilisé ses réactions excessives à la présence des Détraqueurs. Le voir tourner de l'œil face à la menace de ses créatures était tout simplement réjouissant. J'ai cependant vite déchanté face à sa riposte lors du match de Quidditch. Sa maîtrise du Patronus en avait étonné plus d'un, même Severus avait dû en convenir. Et je peux vous dire que mes retenues n'ont rien eu à envier à celle que mon parrain infligeait à ses « cornichons » comme il les appelait. J'ai passé le reste de l'année à nettoyer des chaudrons et le sol des cachots.

Le pire fut l'année du Tournoi des Trois Sorciers. Je n'ai jamais été aussi inquiet que cette année-là.

Comme tous les autres, j'ai hué Potter lors de sa nomination, je l'ai traité de menteur et de tricheur. Mon plus beau coup a été les fameux badges deux-faces et je m'en suis donné à cœur joie. Cependant, il faut bien reconnaître que ce n'était pas du tout le genre de Harry de se mettre ainsi en avant. Au contraire, j'avais déjà pu remarquer à plusieurs reprises qu'il n'appréciait pas du tout la célébrité qui le poursuivait. Je me suis délecté de pouvoir étayer les articles de Skeeter durant ce Tournoi. Le fait que cette journaliste soit un animagus non déclaré lui permettait de facilement obtenir toutes les informations voulues.

Le jour de la première tâche me fit m'interroger sur la santé mentale des organisateurs. Lorsque j'ai compris le déroulement de l'épreuve en voyant Delacour dans l'arène, je n'ai pu m'empêcher de plaindre Harry. Même s'il avait réellement mis son nom dans la Coupe, jamais le Directeur n'aurait dû autoriser sa participation. Je sais pertinemment qui si cela avait dû m'arriver à moi, mon père aurait saisi tous les tribunaux pour casser le contrat. Je me suis d'ailleurs demandé pourquoi ses tuteurs avaient permis cette folie. Cela m'a semblé à la limite de la légalité de faire signer un contrat magique à un sorcier mineur.

La virtuosité dont il fit preuve me stupéfia. Je savais qu'il était très doué, j'en avais été la victime, mais là, c'était tout simplement inimaginable. Si je n'avais pas été un Malefoy, je me serais rongé les ongles jusqu'au sang. J'ai donc gardé une parfaite façade d'impassibilité, contraint et forcé par mon éducation. C'est avec un soulagement des plus intenses que je l'ai vu revenir sain et sauf après une course-poursuite avec ce fichu dragon.

Les semaines suivantes se sont écoulées dans un calme relatif, l'excitation se concentrant sur le futur Bal de Noël. De nombreuses questions circulaient quant au contenu de la Seconde tâche, mais les préoccupations les plus pressantes étaient l'identité des cavaliers ou cavalières des Champions.

Lorsque j'ai appris qu'il s'y rendait avec une des sœurs Patil - aujourd'hui encore, je ne suis pas sûr de laquelle il s'agissait et franchement je m'en fiche - j'ai été soulagé. Comme beaucoup, j'ai cru qu'il se présenterait au bras de cette affreuse belette rousse. Pourquoi me suis-je inquiété du choix de sa cavalière, me demanderez-vous, alors que j'abhorrais Potter à l'époque ? Je n'en sais rien ! Tout ce que je savais, c'est que je ne voulais pas qu'il sorte avec la Weasley !

Je n'ai pas longtemps côtoyés les aînés, hormis Percy et les jumeaux, mais les deux cadets ne font vraiment pas honneur à leur famille. Selon mon opinion, ils ne sont bons à rien d'autre qu'à profiter honteusement de leur entourage. Heureusement, il semble que Granger ait pu transmettre son intelligence à ses rejetons.

Quand il a franchi les portes de la Grande Salle et entamé la valse sorcière traditionnelle, j'ai pensé un instant revoir le petit garçon emprunté que j'avais rencontré chez Madame Guipure. Il était un peu plus grand, mais toujours aussi fragile et perdu, sans compter qu'il était franchement maladroit. Et ses yeux recelaient toujours cette étincelle de vie si fascinante.

Le Lac Noir était le dernier endroit auquel j'aurais pensé pour une épreuve. Pendant une heure, je suis resté agrippé à la rambarde, à tel point que je me suis retrouvé avec plusieurs échardes plantées dans les paumes. Et bien sûr, il a fallu qu'il soit le dernier à remonter, persuadé qu'il ne fallait pas laisser les otages sans surveillance. Grande force morale, avaient justifié les juges au moment d'attribuer les points. Manque total d'instinct de survie selon moi.

Et les choses ne se sont pas arrangées par la suite. L'épreuve du Labyrinthe fut un calvaire. Pour lui bien sûr, mais pour moi aussi. Les spectateurs ne savaient rien de ce qui se déroulait derrière les haies. Nous avons entendu des bruits étranges, des cris, mais nous n'avons rien vu. Parfois, les juges nous informaient que tel champion avait affronté tel obstacle ou telle bestiole. Delacour a déclaré forfait après avoir été presque "avalée" par des lianes.

A un moment, une clameur de victoire a retenti mais juste après les visages de juges arborèrent des mines très inquiètes. De longues minutes sont passées, l'atmosphère se faisant de plus en plus anxieuse et pesante.

Enfin, Harry est apparu en plein cœur de l'arène, allongé sur le corps inerte de Diggory et tenant la Coupe dans sa main. L'information de la mort d'un des Champions a provoqué un mouvement de panique et au milieu des cris, peu d'entre nous ont pu entendre Harry répéter comme une litanie "Il est revenu ! Il est revenu !".

Comme tous les enfants de Mangemorts, je me suis discrètement réjoui de l'annonce du retour du Seigneur des Ténèbres. Enfin, il était revenu ! Il allait rendre leur suprématie aux Sang-Purs et remettre ces infâmes Sang-de-Bourbe à leur vraie place, c'est-à-dire loin du monde Sorcier ou même mieux, à nos pieds.

Comment puis-je dire de telles horreurs, me demanderez-vous ? Je vous rappelle que j'ai été élevé par nul autre que Lucius Abraxas Malefoy, partisan plus que convaincu de Celui-dont-on-ne-devait-pas-prononcer-Nom. Et comme tous les enfants Sang-Purs, mon enfance a été bercée des histoires racontant que la venue des enfants sorciers né-moldu ne faisait que dénaturer non seulement notre culture, mais aussi la Magie elle-même.

Etonnamment, pas un seul instant je n'ai pensé que son retour signifierait la mort pour Harry Potter. A cette époque, je ne voyais qu'une seule chose en lui, ma Némésis personnelle.

Durant les vacances qui ont suivi, j'ai commencé à voir mon père d'un œil différent. Alors que je n'avais eu de lui que l'image d'un homme plus que fier et arrogant, j'ai aperçu de temps en temps une lueur de peur dans ses pupilles. Plus perturbant encore, il y avait cette impression de servilité ou même de soumission qui émanait de lui quand il parlait de celui qu'il appelait son Maître. J'étais pourtant bien loin de revoir mes convictions à ce moment-là.

La cinquième année a été la plus jouissive de toutes celles que j'ai passées à Poudlard. L'arrivée de Dolorès Ombrage et la création de sa Brigade Inquisitoriale m'ont permis de pister Potter à travers toute l'école pour lui soutirer des points et lui infliger des retenues. Et puis quelle joie de pouvoir l'insulter sans limite, sachant qu'il ne pouvait me répondre.

Je me suis souvent demandé pourquoi personne n'avait jamais réagi quant à la nature des punitions infligées par Ombrage. Personne ne savait donc que les Plumes de Sang étaient des artéfacts de magie noire, alors que ceux-ci auraient dû être interdits dans l'enceinte de Poudlard ? Si encore il ne s'agissait que d'enfants d'origine moldue, cela aurait pu se comprendre, mais il y avait également des sorciers de souche, à l'instar des jumeaux Weasley, et tout le monde connaissait la puissance des Beuglantes de la mère des rouquins. Pire encore, le Sauveur, l'Elu était la cible principale de la femme-crapaud. De plus, aucun de nos professeurs ne s'était jamais insurgé non plus, même pas notre vénérable directeur.

Mon Enfer a débuté à la fin du mois de juin, après l'escapade de Potter au Ministère. Je n'ai pas très bien compris les tenants et aboutissants de cette affaire, tout ce que j'en ai retenu, c'est que mon père a été envoyé à Azkaban ce jour-là. Et à partir de ce moment, mes yeux ont commencé à se déciller et mes illusions ont volé en éclat.

Bien sûr, je n'imaginais pas que le Seigneur des Ténèbres allait mettre en place un monde où sorciers, créatures magiques et moldus vivraient en bonne entente. Pour moi, il relèguerait simplement ces inférieurs à leur place, mais jamais je n'avais appréhendé celle qu'il réservait en réalité à ses fidèles.

Si le nom des Malefoy a énormément perdu de sa notoriété, il en a été de même de leur fortune. Mais pire que tout, ils ont perdu leur place de privilégiés auprès du Lord. Et j'ai été tout désigné pour redorer notre blason. J'ai été marqué, cet ignoble tatouage me cataloguant à vie. Et j'ai subi le traitement de faveur réservé à ses suivants. Doloris, tortures - tant physiques que mentales – insultes et autres. Lord Voldemort ne voyait pas ses alliés différemment de ses ennemis, la seule différence résidait dans l'intérêt qu'il pouvait en retirer, et encore. Les Sang-pur n'étaient finalement que des vaches à lait financières, des prête-noms ou simplement de la chair à canon.

C'est ainsi que j'ai entamé ma sixième année, avec une mission en deux volets qui me paraissait irréalisable : faire entrer les Mangemorts dans l'école et tuer Dumbledore. Chaque tentative avortée me valait une séance de torture. Et durant tout ce temps, j'ai senti Harry me surveiller plus attentivement qu'un dragon enragé. D'ailleurs, j'ai bien cru que notre confrontation dans les toilettes signerait ma fin. J'ai vu l'horreur s'inscrire dans ses prunelles lorsqu'il a pris conscience de son geste, mais pourtant je ne pouvais penser qu'une seule chose : il m'avait délivré de mon esclavage. C'était sans compter sur l'intervention de Severus qui me soigna.

J'ai finalement réussi à faire entrer Bellatrix et Fenrir, ainsi que quelques autres, mais je n'ai pu me résoudre à lancer l'Avada sur le directeur. Ses paroles faisaient résonner quelque chose en moi, tentaient de me faire prendre conscience qu'il me restait tout de même un choix. Rogue ne m'a pas laissé le temps de m'appesantir. Il a commis le geste à ma place et nous avons quitté Poudlard en catastrophe. Potter a bien tenté de nous arrêter, mais j'ignore pourquoi, mon parrain s'est contenté de le bloquer, sans le tuer. L'excuse selon laquelle Potter était la cible réservée de Voldemort me semblait bancale. Ce n'est qu'un an plus tard que j'ai compris. Severus avait toujours protégé Harry à sa manière, en mémoire de l'amour qu'il portait à sa mère, Lily Evans. Avant sa mort lors de la bataille finale, je n'avais pas su qu'il était un espion pour le compte de la Lumière.

J'ai payé très cher mon échec. Voldemort avait en effet investi le manoir Malefoy et y régnait en maître. Mon père n'était plus que l'ombre de lui-même, ma mère sursautait à chaque mouvement un peu trop vif et moi, je sentais le regard de serpent du Lord me détailler avec une insistance malsaine. Heureusement pour moi, ses yeux n'étaient pas le seul attribut serpentin qu'il avait récupéré lors de la création de son nouveau corps. Mais ses Doloris restaient extrêmement ... douloureux et mes parents et moi avons régulièrement essuyé sa frustration face à l'incompétence des hommes qui l'entouraient.

Je ne sais pas à qui j'en ai le plus voulu à l'époque. Mon père, sorcier accompli qui avait été défait par une bande d'adolescents, provoquant ainsi notre déchéance ? Harry Potter pour être encore et toujours la source de tous mes malheurs ?

Voldemort qui n'était finalement qu'un mégalomane bien loin de vouloir le bien-être des Sang-Purs ?

Il était devenu de plus en plus évident que seul son propre intérêt le guidait, du moins pour moi. Pour les autres fidèles, ils semblaient tous persuadés que bientôt, la gloire, la puissance, le pouvoir et l'argent allaient rejaillir sur eux. Aucun d'entre eux ne voyait l'égocentrisme et l'égoïsme monstrueux qui animaient leur Maître.

La Septième année a été très étrange. D'abord, l'école était désormais sous la coupe du Lord et ce dernier avait imposé de nouveaux cours, de nouveaux profs et de nouvelles règles. Ensuite, Harry Potter avait disparu, avec ses deux acolytes de toujours. Personne ne savait où ils étaient ou ce qu'ils faisaient. J'avais également perdu mon statut de Prince de Serpentard auprès de mes condisciples. Heureusement pour mon ego, personne ne m'avait vraiment remplacé et de plus ma Maison régnait désormais en maître sur l'école.

A chaque retour au Manoir, je retrouvais cette ambiance lugubre. Les gens se déplaçaient furtivement le long des couloirs, des cris résonnaient dans les salles de réunion, des lamentations et des pleurs émanaient des cachots. Une chose semblait changer pourtant. Voldemort était de plus en plus irritable, et même dirais-je, de plus en plus instable.

Un jour de vacances, des Raffleurs ont amené un groupe de fuyards au Manoir. Ils étaient persuadés d'avoir capturé Potter. Bellatrix m'a enjoint de les rejoindre dans la salle de réception pour l'identifier. Mon père était également présent, bien qu'il ne soit plus que l'ombre de lui-même. Il mettait tous ses espoirs dans cette opportunité, priant Merlin sait qui, de rentrer dans les bonnes grâces du Seigneur des Ténèbres. Une dispute a même éclaté entre les Raffleurs, mon père et ma tante pour savoir qui se glorifierait de cette capture.

J'ai longtemps fixé le jeune prisonnier et ses compagnons. Son visage était horriblement rougi et bouffi, ses yeux réduits à deux fentes étroites. Je n'ai pourtant eu aucun doute, il s'agissait bien de Harry Potter. Comme toujours lorsqu'il était à proximité, je me sentais fébrile, avec un petit pincement au cœur. De toute façon, qui d'autre aurait pu être accompagné de la Belette et du Castor.

Je suis sûr qu'il savait que je l'avais reconnu. Pendant un bref instant, j'ai vu une lueur de défaite, de déception dans ses yeux et c'est cela qui m'a décidé. Avec un sursaut, je me suis rendu compte qu'il était mon seul espoir. Et j'ai menti ! J'ai menti pour tenter de me sauver ! J'ai menti en espérant qu'il pourrait enfin détruire cet être immonde qui avait réduit ma famille en esclavage.

J'ai prétendu que ça ne pouvait pas être lui, mais ni mon père ni Bellatrix n'ont voulu me croire. Ils allaient convoquer le Maître, condamnant Harry quand il fut inopinément sauvé par mon ancien elfe de maison. J'ai béni Dobby ce jour-là, chose à laquelle je ne me serai jamais abaissé auparavant et que je ne reconnaîtrai jamais de vive voix.

Je ne l'ai revu qu'au mois de mai, dans la Salle sur Demande de Poudlard. J'y avais été envoyé en mission par Voldemort avec Goyle et Crabbe. Nous devions surveiller la Salle et empêcher Potter d'y prendre quelque chose. Le Lord ne nous avait pas donné davantage de précision. La seule chose qu'il nous avait promis, c'était que si Potter réussissait à se saisir de cet objet, c'était une mort atroce. Nous nous étions donc placés en embuscade dans le couloir adjacent.

Crabbe a fait preuve de son peu de jugeote habituel. Il a lancé un Feudeymon qui a échappé à son contrôle et je n'ai dû ma survie qu'à ce que Severus raillait comme le complexe du héros de Potter. Je ne le reconnaîtrai jamais à haute voix, mais j'ai une dette de vie envers lui. S'il n'avait pas fait demi-tour et ne m'avait pas hissé sur ce vieux balai poussif, mes parents n'auraient même pas eu un os à enterrer dans le caveau familial.

Quelques heures plus tard, il sauva le Monde Sorcier en détruisant enfin Voldemort. Le Garçon-qui-a-survécu est devenu le Vainqueur ce jour-là.

Mon père s'est à nouveau retrouvé à Azkaban et nous avons dû payer un très fort dédommagement aux victimes de la guerre. Cette fois-ci, la fortune familiale a été largement entamée. Heureusement, ni ma mère ni moi n'avons connu la prison. Bien que je porte cet odieux tatouage, j'ai pu prouver que j'avais été enrôlé contraint et forcé. Le marquage ayant immédiatement suivi la déchéance de mon père, j'ai pu justifier que je n'étais pas totalement conscient des conséquences de mes gestes, même si durant quelques semaines, j'ai été très fier de ce que je considérais comme un honneur. Dumbledore avait laissé un testament, de même que Severus - ce que j'ignorais – justifiant les actes que j'avais dû commettre. Potter avait même fait le déplacement pour témoigner lors de notre procès. Il a déclaré que j'avais refusé de l'identifier lorsqu'il avait été Rafflé et précisé que ma mère avait menti au Lord lui-même en le déclarant mort. Cela nous a valu les circonstances atténuantes.

Après Poudlard, j'ai suivi un cursus en économie tandis qu'il entrait à l'Ecole des Aurors, ainsi que tout le monde l'attendait de lui. Je souhaitais reprendre les affaires familiales avant de tenter de me lancer en politique, à l'instar de mon père, tout en espérant pouvoir effacer son souvenir et blanchir une fois de plus mon nom. A trois reprises, mon père avait été soupçonné d'être mangemort. La première fois, il s'en était sorti en prétextant être sous Imperium et en payant de lourds pots-de-vin. Suite aux évènements du Ministère, il s'était retrouvé à Azkaban avant d'en être délivré par Voldemort lui-même. Et enfin, après la bataille de Poudlard, son sort avait été définitivement scellé.

Potter et moi nous croisions de temps en temps sur le Campus, et avions pris le pli de nous saluer de loin, sans échanger un mot. Un simple hochement suffisait à reconnaître la présence de l'autre. Il était continuellement flanqué de la Belette. De temps à autre, je voyais également Granger les accompagner. Les mois ont passé et nous avons tous obtenu nos diplômes, avec plus ou moins de mérite selon les cas.

Comme prévu, j'ai repris la gestion des différentes entreprises familiales et ai fait prospérer notre fortune. Aujourd'hui, j'ai un bureau au Ministère. Comme mon père l'avait fait, j'investis dans le monde sorcier et moldu. Ces derniers parlent de lobbying pour définir mes activités.

La Gazette a alors annoncé les fiançailles de Potter et son mariage à grand renfort de gros titres, articles racoleurs et photos-montage. J'ai d'ailleurs été très étonné de lire le nom de Skeeter au bas de chacun des textes. Je savais qu'il exécrait la journaliste animagus.

La photo officielle de son mariage m'a laissé un goût amer. Il avait une prestance étonnante, si l'on exceptait le nid d'oiseau qui lui servait encore et toujours de chevelure, entouré d'une marée de roux. On pouvait déjà voir que la belette femelle serait bientôt tout le portrait de sa mère. Je l'imaginais bien engoncée dans un tailleur, la coupe au carré et des talons plats, le portrait-type de la bourgeoise endimanchée. J'ai d'ailleurs failli rire en la voyant sur le Quai ce matin. Je devrais peut-être voir à me recycler dans la Divination.

Il n'a pas fallu très longtemps pour que l'on annonce l'arrivée imminente d'un héritier. C'est cette année-là que j'ai pris la résolution de me marier. Encore aujourd'hui, je me demande pourquoi j'ai pris cette décision juste après avoir lu cet article. Jusqu'à ce moment-là, je n'avais eu que des aventures discrètes, même si les journalistes se plaisaient à me dépeindre comme un coureur de jupons. Le fait d'être accompagné lors de soirées ne signifiait pas pour autant que les jeunes femmes que j'escortais finissaient dans mon lit, mais cette idée faisait vendre plus de tabloïds. Mes invitées savaient pertinemment que je ne tolérerais aucun écart, quand bien même je laissais croire que nous couchions ensemble. Heureusement, ils ne savaient pas que mes préférences me poussaient tout à fait ailleurs.

J'ai soigneusement choisi ma future épouse : Astoria Greengrass. Elevée comme une véritable Sang-Pur, elle connaissait parfaitement son rôle. Tenir ma maison, m'accompagner en société et me donner un héritier. Trois points qui faisaient la trame des mariages des Sang-Pur depuis des siècles. Scorpius est né un an après la cérémonie, quelques jours avant le second fils de Potter. Nous nous sommes croisés dans les couloirs de Saint-Mangouste. J'étais venu ramener ma famille à la maison et lui se promenait avec son cadet.

Le nourrisson était emmailloté, ne laissant que son visage libre. Il avait des mèches de cheveux noirs sur le crâne qui promettaient de devenir une chevelure aussi ébouriffée que celle de son père. Il entrouvrit un instant les paupières et, si comme tous les nouveau-nés, il avait les yeux bleus foncés, des reflets émeraude y étaient déjà visibles.

Potter a relevé la tête. Sur ses lèvres s'étirait un doux sourire et ses traits avaient une expression que je ne lui avais jamais vue. Comme d'habitude, nous nous sommes contentés de notre hochement de tête poli et courtois. Et sans que je ne le comprenne, ma vie a changé une nouvelle fois.

Je me suis réveillé gémissant et poisseux la nuit qui a suivi notre rencontre, tel un adolescent commandé par ses hormones. C'est en pestant que je me suis précipité pour prendre une douche glaciale. Je me tançais encore en me glissant dans mes draps.

La même situation s'est reproduite plusieurs fois sans que je ne puisse l'empêcher. Il était inutile que j'aille solliciter Astoria. Non seulement, elle avait rempli son devoir en me donnant mon fils, mais je savais que je ne pourrais parvenir à un coït satisfaisant avec elle. J'avais déjà dû déployer des trésors d'imagination pour parvenir à la mettre enceinte.

Je me suis donc résigné à trouver des amants occasionnels - j'ai béni l'inventeur de l'oubliette. Si j'avais été plus attentif, ou peut-être moins aveugle, j'aurais remarqué qu'ils étaient tous minces, relativement petits, les yeux clairs, de préférence verts, et les cheveux sombres. Évident, me direz-vous ? Oui, sûrement, sauf quand on s'accroche à ses œillères.

Désormais, chaque fois que je le croisais, mon cœur battait la chamade et je retenais inconsciemment mon souffle le temps que nous nous saluions de loin.

J'ai continué à suivre le déroulement de sa vie. J'ai appris la naissance de sa fille, ses promotions, les succès de ses missions d'Auror, l'entrée de son aîné à Poudlard, évidemment envoyé à Gryffondor.

Et ce matin, j'ignore pourquoi, tout a de nouveau basculé. En voyant nos deux enfants sur ce quai, je nous ai revus à onze ans et les souvenirs m'ont envahi. Je suis ici, dans mon bureau, un verre de whisky à la main, et je contemple une pile de dossiers.

Ces dossiers, je les constitue depuis des années. Malgré tous ses travers, mon père m'a appris que la connaissance était la plus puissante des armes. J'ai donc compilé toutes les informations existantes sur toutes les personnes influentes qui pourraient un jour m'être utiles, et bien sûr, ma Némésis figure parmi celles-ci.

En fait, son dossier est même le plus complet que l'on puisse trouver sur la vie de Harry Potter. Je vous l'ai dit, il est mon sujet de prédilection. Mon obsession.

J'ai commencé par reconstituer ce que j'avais toujours imaginé comme une vie d'enfant pourri gâté et vénéré par sa famille. J'ai déchanté quand j'ai découvert la vérité. Comment de tels êtres humains - s'ils avaient jamais mérités ce titre - pouvaient-ils exister ? Et surtout, comment Dumbledore avait-il pu leur confier l'Espoir du monde Sorcier ? A la place de Harry, je les aurais anéantis, mais nous parlons ici du brave petit Gryffondor.

Les informations sur Poudlard m'étaient déjà connues, bien que biaisées par mon point de vue de l'époque. Son parcours à l'école des Aurors fut très facile à documenter. J'ai pu obtenir l'ensemble de son dossier. Ses notes et évaluations étaient excellentes, les commentaires de ses professeurs élogieux. Il est d'ailleurs sorti major de sa promotion. Loin de son image d'élève moyen à Poudlard, il s'était totalement investi dans ses études à l'Académie.

Il a rapidement trouvé un poste au Ministère et démarré sa carrière brillamment, toujours flanqué de son éternel boulet roux.

Le dossier de ce dernier est bien loin d'être à son avantage. Et ce n'est pas parce que j'en suis l'auteur. A l'exception de son mariage avec Granger, rien dans sa vie ne mérite de louanges. Et encore, j'en suis presque à plaindre le Castor devant son manque de clairvoyance. L'acceptation de Weasley à l'école des Aurors ne lui a été accordée qu'en raison du rôle qu'il a joué auprès de Harry durant la Guerre. Ses résultats étaient médiocres, comme à Poudlard, et les enseignants estimaient qu'il était un fainéant, se prélassant sur les lauriers d'une célébrité indue, ou plutôt usurpée sur celle d'un autre. Et sa carrière est du même acabit. Mais qui aurait osé confondre le Meilleur Ami de Harry Potter et le mettre face à la réalité ?

Je n'ai jamais eu de complaisance envers les Weasley, je les déteste, je l'ai déjà dit. Mais autant je me débarrasserais avec joie des deux derniers, autant je dois reconnaître que les aînés ont su mener leur vie.

Bill est un des rares sorciers travaillant chez Gringott's et en plus, il a su surmonter le handicap que représentait les conséquences de l'attaque de Greyback, le loup-garou au service de Voldemort. Charlie est un dresseur de dragons renommé. Percy évolue très bien au sein du Ministère, même s'il reste ce personnage coincé et prétentieux qu'il était à Poudlard.

Et les jumeaux ! Je n'avais jamais vu des gens aussi ... cinglés faire preuve d'un tel sens des affaires. Après une enquête minutieuse, j'ai appris que leur financement de départ était en réalité le prix du Tournoi des Trois sorciers. Harry avait refusé de le garder et le leur avait purement et simplement donné. Aujourd'hui, après le décès de Fred lors de la grande Bataille, George poursuit les activités de la boutique avec le même succès.

Par contre, les deux plus jeunes ont sûrement dû être croisé avec des sangsues parce que pires profiteurs qu'eux, je crois que je n'en ai jamais vu. Il ne s'agit peut-être que de mon point de vue, mais si les gens savaient ce que je sais, je ne crois pas qu'ils en sortiraient grandis.

Weasley profite allègrement de la popularité de Harry pour obtenir l'indulgence de tous autour de lui. J'ai un jour été moi-même témoin d'une tentative qu'il avait faite pour amadouer les Gobelins. Il essayait d'obtenir un prêt pour l'achat d'une maison en mettant en avant les liens étroits qui l'unissait au Vainqueur. D'ailleurs, insistait-il, il serait bientôt son beau-frère.

J'ignore ce qui lui a répondu le Gobelins en charge de l'affaire, il n'a pas voulu me le dire, mais quand Weasley est sorti de la banque, ses oreilles étaient plus rouges que la bannière des Gryffondor. Pendant une seconde, je me suis demandé ce que Granger pouvait bien trouver à cet homme avant de balayer la pensée loin de moi. Elle était censée être la sorcière la plus intelligente de notre génération et se fourvoyait aux côtés d'un minable.

La belette femelle ne vaut pas mieux que son frère. Après l'obtention de son diplôme, c'est en faisant reconnaître des liens hypothétiques avec le grand Harry Potter, plus jeune attrapeur de son temps, qu'elle a réussi à se faire engager par les Harpies de Hollyhead. Je peux reconnaître qu'elle a un petit talent au Quidditch, mais l'entraîneur a lui-même admis par la suite qu'il y avait de bien meilleurs candidats et que le propriétaire avait compté sur la notoriété de celui qu'elle présentait déjà comme son fiancé pour attirer les foules.

Ce n'est qu'un an plus tard pourtant que les fiançailles, réelles cette fois, ont été annoncées. Dès lors, elle n'a plus fait que caprices sur caprices, se comportant comme une diva. Les informations déclarant qu'elle arrêtait la compétition pour se consacrer à sa famille n'étaient qu'un mensonge diplomatique visant à ne pas embarrasser Harry Potter suite à la conduite de sa femme.

Elle a été engagée comme journaliste sportive par la Gazette du Sorcier. Ce poste s'est avéré totalement fictif. Oh oui, il y avait bien des articles qui paraissaient sous sa signature, mais elle n'était qu'un prête-nom. Le renom de Harry Potter avait encore servi l'un de ses proches.

Je n'ai jamais compris comment Harry avait pu ne rien voir. Ou alors ne voulait-il simplement pas savoir ? Durant les sept années suivant la naissance de son premier enfant, la rousse a parcouru le pays, allant parfois à l'étranger, pour couvrir les matchs de Quidditch. C'est du moins ce qu'elle prétendait.

En réalité, elle courait les bars et les gargotes de bas-étages, y compris chez les Moldus. L'alcool ? La drogue ? Le jeu ? Non, bien pire, du moins à mon avis. Madame Potter avait besoin de diversité sexuelle – et en a encore besoin aujourd'hui - et cela, elle estime qu'une femme mariée ne peut l'obtenir auprès de son époux. Là où je recours aux Oubliettes, elle préfère utiliser les Glamours, quand il s'agit de moldus. Pour les sorciers, elle a ses amants réguliers qui, même s'ils se flattent de cocufier le Héros de la Guerre, n'ont pas l'audace ou le courage de le crier haut et fort. Je dispose de quelques photos et vous pouvez me croire, elles sont très loin d'être ... flatteuses. Je les qualifierais plutôt d'une vulgarité crasse. Déjà qu'elle trompe son mari sans vergogne – bien que cela soit tout à fait toléré par les sang-purs – n'était pas très reluisant, mais ses « recherches et expériences » étaient pour le moins peu ragoutantes.

En réalité, elle n'a jamais cessé ses aventures, commencées dans les couloirs de Poudlard. Je crois que presque la totalité de sa promotion lui est passé dessus, sans compter les années supérieures, et même inférieures.

Un élément m'a pourtant interpelé. L'annonce de sa première grossesse m'a ... intéressé, voire inquiété. Cependant, la possibilité que l'enfant soit un bâtard m'a dérangé. Quelque part au plus profond de moi, le désir de vengeance a fait place à un sentiment indéfini. Si je gardais précieusement toutes les preuves de ses adultères sous le coude, c'était dans le but de pouvoir un jour tout dévoiler. Alors, pourquoi ne l'ai-je pas fait ? Au début, je voulais simplement pouvoir détruire le Garçon-qui-a-Survécu, par simple vengeance. J'imaginais le cataclysme que j'allais provoquer en annonçant que le Grand Harry Potter était cocufié par sa femme.

J'ai fait jouer tous mes contacts pour trouver les réponses à mes questions. Finalement, un médicomage a accepté de me rendre un service, dirons-nous. Savoir qu'il profitait de ses patientes m'a donné le levier nécessaire pour le contraindre à effectuer les examens de paternité. Il s'est avéré que Harry était bien le père.

Les années ont passé et j'ai continué à le surveiller de loin. Si la vue de son cadet m'avait rassuré quant à l'identité du géniteur – il ne pouvait y avoir aucun doute au vu des épis noirs et des reflets d'émeraude de ses yeux – ce ne fut pas le cas pour sa fille. Elle arborait une chevelure rousse, comme le reste de sa famille maternelle, bien que la couleur en soit plus chatoyante. Le même médicomage fut mis à contribution et mes interrogations furent levées.

Ce matin, sur le Quai 9 ¾, j'ai aperçu la gamine en question. En fait, elle ne ressemble pas tant que ça à sa mère. Par contre, je peux assurer qu'elle est le portrait de sa grand-mère maternelle. Comment puis-je savoir cela ? Tout simplement parce que j'ai en ma possession une photo de la jeune Lily Evans juste avant son entrée à Poudlard. Severus a fait de moi son héritier, et un jour que je parcourais ses notes de potions, une photo s'en était échappée.

Elle représentait deux enfants en robe d'écolier, le tissu encore vierge de tout écusson distinctif des maisons. Le garçon et la fillette posaient fièrement devant la vieille maison de l'Impasse du Tisseur. Au dos de la photo, quelqu'un y avait indiqué d'une écriture soignée « Severus et Lily Evans, 1er septembre 1971 ». Après quelques recherches, j'ai appris que l'enfant n'était autre que la voisine des Rogue durant l'enfance de mon parrain et qu'elle deviendrait plus tard Lily Potter, mère de Harry Potter.

Tandis que la fillette se plaignait de devoir encore attendre deux ans avant de pouvoir entrer à Poudlard, j'ai vu le fils cadet s'arrêter brusquement et faire mine de refaire ses lacets. Il semblait tendu quand son père s'est agenouillé face à lui pour prétendument l'aider. Je n'ai pas pu entendre leurs paroles, mais lorsque l'enfant s'est redressé, il semblait rasséréné.

En se relevant, Harry arborait cette même expression qui m'avait tellement touché onze ans plutôt dans les couloirs de Saint-Mangouste. Pourtant, lorsque j'ai croisé son regard, il m'a semblé y déceler une fissure, le doute et la tristesse tentant d'évincer la tendresse et le bonheur. Cela n'a duré qu'une microseconde avant qu'il ne se détourne pour retrouver sa famille.

Et ses yeux m'ont poursuivi toute la nuit, me posant sans cesse une question que je ne pouvais entendre.

Fin de POV