Lucius déglutit péniblement en s'apercevant que Dumbledore le fixait. Le regard du directeur n'avait plus rien de bienveillant et le Serpentard comprit brusquement pourquoi il effrayait les plus grands mages noirs.

« Mais quelle idée moisie j'ai eu ! » pensa t-il une énième fois.

Cependant, il ne servait plus à rien de se maudire, le mal était fait. Lucius se contraignit donc à regarder le directeur en face et trouva même le courage (ou la témérité) de lui répondre sur un ton limite provoquant :

- Qu'avez-vous donc à me dire, Monsieur ?

- Si j'étais toi, Lucius, j'éviterais pour commencer d'aggraver mon cas en faisant preuve d'arrogance. Car tu es dans une très mauvaise posture. Entrer dans une salle commune qui n'était pas la tienne, usurper l'identité d'un camarade plus jeune afin de lui faire porter le chapeau, en ingérant un potion totalement interdite, et jeter des sorts de magie noire en plein Poudlard… Il y a largement de quoi te retrouver à Azkaban pour plusieurs années puisque tu es majeur. Et je ne parle même pas des motivations avec lesquelles tu as agi.

- Vous me tutoyez ! Protesta le jeune homme.

- Je ne m'adresse plus en effet à l'orgueil de Monsieur Malefoy junior, mais à ce qui peut te rester de bon sens ou d'instinct de survie Lucius. Jusqu'à il y a une heure, je me trouvais dans une situation fort embarrassante pour moi : une bagarre en pleine nuit au beau milieu de la bibliothèque, entre deux groupes qui n'avaient bien sûr rien à y faire. Là dessus, rajoutons un blessé et des sorts de magie noire. Il y avait là de quoi renvoyer chacun des protagonistes, ou pire.

- Et ? Demanda Lucius qui ne voyait pas où Albus Dumbledore voulait en venir.

- A présent, de par tes actes, j'ai largement de quoi faire preuve de clémence vis à vis d'un des camps, ce qui m'arrange bien je te le dis. Lucius, tu as tenté une nouvelle fois d'agresser Narcissa Black, au sein de l'école et de manière totalement gratuite. Un élève t'a vu sortir ta baguette dans la tour de Gryffondor avant même que tu n'en aies besoin pour te défendre, ce qui signifie bien que tu étais là pour régler un compte, et tu t'es battu en jetant des serpents dans toute la pièce. Il y avait là largement de quoi tuer quelqu'un. Tu as acheté une potion interdite, et je sais à qui. Cette personne vient d'être arrêtée par les aurors et en ce moment même elle est interrogée. Les actes que tu as commis vont avoir des conséquences Lucius, et le statut de ton père ne suffiras pas à te protéger car l'affaire que nous sommes en train de soulever va bien au-delà de tes actes.

- Qu'est-ce que vous racontez ? Répliqua le jeune homme dans une tentative désespérée de ne pas céder à la panique.

- Je vais être franc Lucius, répondit Dumbledore. J'enquête à ton sujet depuis que j'ai appris dans quel contexte Narcissa Black avait du s'enfuir de chez elle. Je l'ai fait au départ pour protéger cette élève, et à vrai dire tu n'étais pas le seul que j'aie en ligne de mire, surtout après ce qui s'était passé à la gare de Kings Cross. Cependant tu es rapidement devenu indissociable d'un certain nombre d'autres troubles et mon inquiétude pour toi s'est accrue.

- Votre inquiétude pour moi ? Répliqua Lucius en retrouvant une partie de son dédain.

- Oui Lucius, pour toi. Car mon enquête a porté ses fruits et je sais que tu es devenu mangemort juste avant les événements des vacances de février. Mon seul regret est de ne pas m'être penché plus rapidement sur ton cas, ainsi que sur celui de Mr McNair.

Lucius était à présent devenu livide, comment Dumbledore pouvait-il savoir une telle chose ? De quelle manière aurait-il pu l'apprendre ? Est-ce qu'il bluffait ?

Pourtant, il n'en avait pas l'air et tout ce qu'il venait de dire était vrai. Lucius était bel et bien devenu mangemort durant les vacances. Un choix nécessaire d'après son père afin d'assurer la position de sa famille.

- Et, continua Dumbledore. Juste avant ton retour à l'école tu t'es rendu coupable de ta première exaction dans le village de Godric's Hollow. Tu as participé à la torture de cinq personnes : la famille moldue Emilianson.

Lucius restait silencieux, dire quoi que ce soit aurait été dangereux, il le savait.

- Tu ne me demandes pas comment je le sais ? S'étonna Dumbledore.

- Vous délirez… Répondit faiblement le jeune homme.

Dumbledore ne releva pas et poursuivit :

- Ces cinq personnes seraient sûrement mortes si elles n'avaient pas été secourues. Et ceux qui se sont portés à leur aide t'ont reconnu et peuvent le prouver. Tu étais si échaudé par le refus que tu avais essuyé auprès de Miss Black que tu as sérieusement manqué de prudence, tout ça pour faire du zèle…

- Cette garce m'a traîné dans la boue ! Vous n'avez pas à me dire comment je dois me comporter à son égard ! Rugit Lucius.

- Cette jeune fille a refusé une union que l'on a tenté de lui imposer, ce qui est son droit le plus strict. Rien ne peux justifier tes actes Lucius et, si je le voulais, je te ferai immédiatement déférer devant le Magenmagot et envoyer à Azkaban.

- Ah, parce que vous ne le souhaitez pas ? Ironisa Lucius.

- Pas le moins du monde, répondit Albus Dumbledore. Et je suis en mesure de te proposer une autre option, guère confortable mais à toi de voir si tu souhaite la tenter.

- Je suis toute ouïe… Répliqua le jeune homme sur un ton sarcastique.

- Être emprisonné à titre préventif dans la forteresse de Nurmengard.

- Je vous demande pardon ?

- Tu m'as bien compris. A toi de choisir si tu préfères un internement à vie à Azkaban, et une mort prématurée du fait des détraqueurs après avoir sombré dans la folie, ou une mission à Nurmengard dont tu pourrais bien sortir auréolé de gloire.

- C'est un délire total ! S'exclama Lucius. Attendez que mon père soit mis au courant de ce chantage. Il vous fera dégager de la place vite fait bien fait.

- Je n'en serais pas si sûr à ta place, répondit calmement le directeur. Mais ma seconde invitée arrive. Nous allons l'accueillir.

Disant cela, il alla ouvrir la porte du bureau et Lucius resta coi. Devant lui, Milicent Bagnold, présidente du Magenmagot, venait d'entrer dans le bureau du directeur. Mais aussi intimidante que puisse être sa présence, ce qui effrayait le plus Lucius était la mine déconfite de son père, entré derrière elle.

- Oui… En effet je crois que ce serait la meilleure solution… Disait-il sur un ton morne.

Abraxas se figea cependant à la vue de son fils. Il se recomposa une mine de circonstance, dont Lucius savait très bien qu'elle représentait toute sa capacité à faire illusion, puis se lança dans une tirade moralisatrice.

- Mon fils, par vos dérapages et débordements d'émotions vous me mettez dans un fort embarras.

Lucius était en train de comprendre le plan de Dumbledore, il faillit hurler à son père de cesser de se comporter comme un idiot mais se ravisa. Inutile de passer pour plus idiot qu'il n'en avait l'air. Déjà Abraxas Malefoy continuait à l'adresse de Milicent Bagnold :

- Ainsi, à l'issue de ces six mois de mission, vous me garantissez que mon fils pourra effectuer une seconde septième année à Poudlard ?

- Bien entendu, répondit la directrice du Magenmagot

Elle se tourna vers Dumbledore et Lucius crut voir un clin d'œil complice. Il comprit soudain une chose : Il n'avait en fait pas le choix.

Non, vraiment, il avait vraiment eu une idée moisie !