Bonjour à tous! Voici le premier chapitre de ma nouvelle Kylux (et encore merci à tous ceux qui ont laissé des commentaires sur mes histoires précédentes!). C'est une Ben Solo!AU à savoir Ben n'est jamais devenu Kylo Ren mais un Jedi. Ce sera une fic assez longue je pense et j'espère qu'elle vous plaira. Si c'est le cas, n'hésitez pas à me le dire! Sinon pour l'instant elle est tout public mais si vous connaissez mes autres fics, vous savez que sur le long terme, ça ne restera pas le cas. Voilà, voilà... Bonne lecture!
"***"
Le souffle rendu court par le sac passé sur sa tête, le Général Hux tentait de suivre le pas rapide de ses assaillants. Encore étourdi par la brutalité de la bataille qui venait de se conclure par sa capture, il avait du mal à contenir ses tremblements et ses jambes flageolaient dangereusement. Mais il était hors de question qu'il s'écroule maintenant, qu'il montre le moindre signe de faiblesse. Hux s'était battu toute sa vie pour arriver là où il en était et ce n'était certainement pas ces mécréants de la Résistance qui allaient le lui retirer et l'humilier.
Techniquement il n'était pas certain qu'il s'agisse de la Résistance. Mais les hommes qui les avaient attaqués étaient trop bien coordonnés et trop bien entraînés pour n'être que de simples malfrats.
Hux tenta de tirer sur les menottes qui entravaient ses poignets dans son dos. Elles le serraient au point qu'il devinait déjà les marques qui se formaient sur sa peau. Mais elles étaient parfaitement closes. Et tout ce qu'il y gagna fut que les brutes qui l'encerclaient renforcèrent leur emprise.
Le Général se mordit les lèvres jusqu'au sang lorsqu'il butta sur un corps étendu à terre. Les mains puissantes qui enserraient ses bras empêchèrent sa chute mais il entraperçut par la mince ouverture qui laissait passer un air chargé de l'odeur cuivrée du sang le corps d'un Stormtrooper. Un de ses hommes. Et qui avait donné sa vie pour le sauver. Un beau gâchis, pensa Hux alors qu'un coup dans son dos le força à presser davantage le pas.
Il perdit rapidement tout sens de l'orientation alors qu'on le faisait tourner dans de multiples couloirs. La navette dans laquelle il se trouvait lors de l'attaque avait été bien plus petite. Un simple appareil le ramenant sur le Finalizer après un voyage à titre privé. Ils devaient donc être passés dans le vaisseau ennemi.
En désespoir de cause, Hux se força à retenir le nombre de pas mais il était sur le point de vomir et son cerveau qui manquait d'air s'embrouilla rapidement. Cela ne lui ressemblait pas. Mais cela ne lui ressemblait pas non plus de tomber aux mains de l'ennemi, pas plus que cela ne lui ressemblait de devoir lutter contre une vague de nausée due au stress. Car même s'il n'était pas sûr de l'identité de ses ravisseurs, il était certain que les prochains jours n'allaient pas être pour lui une partie de plaisir.
Il se força à respirer calmement l'oxygène vicié par les brûlures des tirs de blasters. Vomir dans son sac rendrait les choses pires encore.
Il avait été entraîné à ce type de situation. Même s'il n'aurait jamais imaginé que cela lui arriverait à lui, il connaissait les procédures et se savait suffisamment fort pour les appliquer. La Résistance pouvait bien le torturer autant qu'ils le voulaient, jamais il ne parlerait. Il serra les dents et les poings pour s'en convaincre.
Autour de lui, les éclats de voix se faisaient plus nombreux. Mais entre le sang qui bouillonnait dans ses oreilles, le sac qui lui couvrait la tête, le bruit sifflant de sa respiration et les battements affolés de son propre cœur, il avait du mal à comprendre ce qu'il se disait.
Il connaissait cependant suffisamment bien les procédures militaires et les procédures de vol pour en déduire qu'ils étaient sur le point de repartir.
Quelque part au fond de son esprit, Hux avait espéré qu'il lui restait encore quelques hommes debout et qu'ils trouveraient les ressources pour le tirer des griffes de ses ravisseurs. Mais cet espoir venait d'être annihilé. A moins d'un envoi de renforts de la part du Premier Ordre, il ne pouvait plus compter que sur lui-même. Cela lui donna la rage suffisante pour continuer à avancer au rythme soutenu qu'on lui imposait.
Les cris épars s'éloignèrent alors qu'on le menait sans ménagement dans un dernier couloir. Leurs pas résonnaient sur le métal du sol et la cadence régulière aida Hux à se calmer quelque peu, à éclaircir ses idées.
Il se redressa autant qu'il le pouvait quand ils stoppèrent. Même s'il n'était pas physiquement impressionnant, il était grand et il comptait bien mettre ce maigre avantage à profit.
Le grincement d'une serrure se fit entendre et il devina le changement de pièce à la différence de température. Il faisait plus froid désormais et il lutta pour retenir un frisson. Surtout ne pas montrer le moindre signe de faiblesse.
Une lourde main le fit s'assoir sur une surface dure et il résista par principe. Il savait qu'il n'avait aucune chance et que son corps saturé d'adrénaline avait besoin de ce maigre répit pour qu'il puisse évaluer ses possibilités. N'empêche qu'il n'allait pas se laisser manipuler aussi facilement.
Ses poignets et ses chevilles furent attachés et il se mordit la langue pour ne pas grogner lorsque les liens comprimèrent ses chairs. Il avait toujours en bouche le goût du sang depuis qu'il s'était mordu les lèvres et il se mêlait de manière désagréable au goût de la bile qu'il avait retenue au dernier moment.
_ Vous feriez mieux de me tuer maintenant, déclara-t-il lorsqu'il sentit que sa voix aurait la puissance nécessaire.
Un petit gloussement lui répondit mais il n'eut le droit à guère plus de réaction.
_ Je ne vous dirai rien, brava-t-il de nouveau. Autant en finir.
Cette fois, il n'y eut que le silence.
_ Si vous ne voulez pas me tuer, poursuivit-il, peut-être pourriez-vous au moins retirer le sac, que je puisse respirer ? Si je meurs d'asphyxie pendant le transfert, vous…
Le claquement de la lourde porte de métal lui indiqua qu'on venait de l'enfermer.
Il tendit l'oreille de longues secondes pour s'assurer qu'il était bien seul. Mais il ne parvint à percevoir que le bruit de sa propre respiration, un peu aiguë mais globalement sous contrôle.
Là seulement, il s'autorisa à abandonner son attitude de défi et à laisser la colère et le désespoir le saisir.
Il retint de justesse un cri furieux mais un grognement rauque lui échappa tout de même et il cligna des paupières pour chasser les larmes de rage qui menaçaient d'apparaître aux coins de ses yeux. Il n'allait pas craquer. Même s'il était probablement seul, il n'allait pas craquer.
Il secoua la tête dans l'espoir de faire tomber le sac mais ce dernier était trop profond et tout ce que Hux gagna fut un léger tournis. Il arrêta avant qu'une nouvelle vague de nausée ne le prenne.
Il ferma les yeux et se laissa retomber contre le mur dans son dos. Ce n'était pas la position la plus confortable. Le mur était glacial et ses bras et ses poignets étaient étrangement contorsionnés. Hux n'était pas un homme souple mais il résista à l'envie de tirer sur ses liens. Ceux qui l'avaient enlevé savaient de toute évidence ce qu'ils faisaient et il ne parviendrait sûrement pas à se détacher.
Les vibrations autour de lui s'accentuèrent et il sut que le vaisseau venait de passer en hyperespace. Ses chances d'être sauvé venaient de passer à quasiment zéro.
Même si le Premier Ordre se lançait à leur poursuite, il était plus probable qu'ils abattent le vaisseau plutôt que de courir le moindre risque que Hux partage des informations confidentielles. En tout cas, Hux savait que personnellement, c'était ce qu'il ferait. Certains secrets devaient le rester alors qu'un homme, quel que soit son grade, était remplaçable. Même lui, aussi pénible qu'il lui soit de l'admettre. Il n'avait pas obtenu ses galons de Général depuis assez longtemps pour avoir sécurisé sa position à la tête de l'Ordre.
Tout ce qu'il lui restait dès lors comme espoir, c'était l'évasion. Il prit une nouvelle longue inspiration et décida qu'il était temps de réfléchir, d'évaluer ses chances et de mettre en place une stratégie. Dans l'absolu, il était dans une situation qui pouvait être qualifiée de catastrophique mais il était un homme intelligent et si quelqu'un avait les capacités de s'en sortir, c'était bien lui.
Physiquement, il n'allait pas si mal que cela. Il avait été choqué par l'attaque, sa vitesse et sa violence mais il n'avait pas été blessé. Alors oui, ses tempes cognaient, sa respiration était toujours courte et sa lèvre saignait légèrement mais sinon, il allait bien. Il avait juste soif et sa vessie commençait à se manifester. Il espérait que le voyage ne serait pas trop long.
A part ça, il était plutôt en bonne condition physique, il savait manier un blaster et se défendait correctement au corps à corps.
Mentalement, il allait bien. Il était juste furieux contre lui-même d'avoir été capturé. Et furieux contre son équipage qui n'avait pas été capable de repérer à l'avance le vaisseau qui s'était soudain matérialisé devant eux. Mais cela n'avait plus d'importance désormais puisqu'ils étaient tous morts. Maintenant qu'il était là, il devait transformer cette colère en motivation et la canaliser pour se pousser à survivre.
Il ne savait pas grand-chose de ses agresseurs. Mais il était quasiment certain d'avoir affaire à la Résistance. Il serra les dents. Même s'il ne s'en sortait pas vivant, il se ferait un plaisir d'en emporter un maximum dans sa chute !
Cela lui posait cependant un gros problème. Il était sûr de pouvoir s'en tirer face à une bande de trafiquants ou de pirates de l'espace. La Résistance était une autre paire de manches. Ils étaient nombreux, relativement organisés et surtout, ils connaissaient la valeur de Hux et risquaient de le garder constamment sous haute surveillance. Il ne devait donc laisser de côté aucun détail.
Il s'en voulait déjà de ne pas avoir été capable de dresser mentalement une carte du vaisseau dans lequel il se trouvait. Il l'évaluait d'assez petite taille. Comme un cargo. Rien à voir avec le Finalizer de toute façon.
Il avait été installé à l'arrière de sa propre navette lorsque l'attaque avait commencé. Il n'avait donc eu aucun visuel direct. Mais il était logique que pour des questions de maniabilité et de vitesse, ses assaillants aient choisi un engin de taille moyenne. Ou alors c'était vraiment des imbéciles, option que Hux n'écartait pas. Imbéciles qui avaient tout de même réussi à éliminer son équipage et à l'enfermer avec un sac sur la tête. C'était décidément très humiliant.
Il voulut serrer les poings mais ils étaient engourdis par le manque de sang. Il se concentra de nouveau sur le problème en cours.
Actuellement, il n'avait que très peu d'informations sur son lieu de détention mais il se doutait qu'il ne serait que provisoire. On devait l'emmener sur un genre de vaisseau mère ou une base pour l'interroger. Il espérait bien qu'il rencontrerait des grands pontes de la Résistance, comme le Général Organa. Ca lui donnerait l'occasion de leur cracher en face tout le mal qu'il pensait de leur action et de leur inefficacité politique. Et puis, il fallait l'avouer, ça remonterait un peu son ego que des gens importants se déplacent pour lui, car Hux envisageait qu'il ne resterait bientôt plus grand-chose de sa dignité.
Puisqu'il ne parlerait pas, les tortures à venir seraient longues et douloureuses. C'était pourquoi, il devait se concentrer sur le moment présent et fuir à tout prix !
Il força ses doigts à agripper la barre métallique à laquelle il était enchainé et tira. Elle était solidement fixée. Un nouveau test lui apprit qu'il en allait de même avec ses chevilles. Il grimaça.
Ces chiens de la Résistance n'avaient apparemment rien laissé au hasard et avaient parfaitement sécurisé la pièce où il se trouvait. Hux savait que s'il retirait le sac qui entravait sa vue et sa respiration, il ne découvrirait qu'une pièce nue de laquelle il ne pouvait improviser aucune arme potentielle. La porte devait être épaisse et il y avait probablement même un garde derrière. Et dans l'hypothèse où il parviendrait à se détacher, à trouver une arme, à ouvrir la porte et à assommer le garde, que ferait-il ensuite ? Un homme seul ne pouvait détourner un vaisseau de cette taille. Après, il était toujours possible de se cracher et tuer tout le monde à bord. Ce serait une façon glorieuse de partir.
Il secoua la tête. Sa langue était pâteuse dans sa bouche et une goutte de sueur roula sur son visage jusqu'à la pointe de son menton. Il soupira, son propre souffle humide renvoyé par le tissu rêche qui frottait son front et son nez et devait ruiner ses cheveux.
Non, il y avait mieux à faire. Puisqu'il était inutile pour lui d'envisager une évasion maintenant, mieux valait attendre qu'ils soient à destination. Et là, avec un peu d'observation et de patience, et si physiquement il n'était pas trop abimé, peut-être parviendrait-il à voler un véhicule. Et si cela s'avérait impossible, il aurait éventuellement la chance d'emporter dans la mort de vrais dirigeants et pas juste les trouffions envoyés pour le capturer. Il ne devait pas céder à la panique et considérer le temps comme son allié. Même si dans sa position, c'était une ligne de pensée difficile, tout son corps tendu lui hurlant de fuir.
L'ouverture brusque du verrou de la porte le fit sursauter. Son dos était si raide qu'il lui faisait presque plus mal encore que ses poignets ou ses chevilles.
Il entendit des pas qui s'approchaient de lui et ferma les yeux, analysant la situation et attendant les premiers coups ou les premières questions. Il paria rapidement sur un combo des deux.
Il compta au moins trois paires de bottes. C'était beaucoup. Ils se méfiaient de lui. C'était gratifiant. Ou alors chacun voulait y aller de sa petite beigne au Général dont le visage s'était affiché sur tous les canaux gérés par le Premier Ordre. A peine trente ans et déjà Général, plutôt belle gueule et ambitieux, ça avait dû beaucoup faire jaser. Hux, lui, savait qu'il n'était là que grâce à ses compétences et ses projets pour l'Ordre. Dont la plupart étaient classés. Mais il n'était pas naïf et savait que sa carrière éclair avait fait des jaloux et des envieux. Et que tout ce qu'il représentait était le cauchemar de la Résistance. Pas étonnant qu'ils aient tous envie de le claquer.
A sa grande surprise, on le détacha. Ils étaient pourtant toujours en hyperespace. Une fois debout, des mains se posèrent sur son corps et il retint un mouvement de recul. On venait le fouiller, vérifier qu'il ne portait pas sur lui d'émetteur. C'était généralement une procédure qu'on réalisait sur un prisonnier avant de l'embarquer mais dans les affres du combat, cela n'avait pas été fait. Ou la Résistance n'était qu'un ramassis d'incapables. Toujours était-il qu'on le fouilla sous toutes les coutures, manuellement et avec un détecteur. Hux se laissa faire. Il n'avait rien à cacher. La seule puce avait été implantée dans la navette qu'ils avaient abandonnée derrière eux.
Mais lorsque son geôlier se redressa et qu'il en sentit la chaleur tout près de lui, il lança sa tête en avant. Il n'aurait pu expliquer pourquoi il l'avait fait. Un dernier réflexe de défense, un inutile sursaut d'orgueil peut-être, ou encore la volonté de leur prouver qu'ils n'avaient pas encore gagné et que Hux ne capitulerait jamais. Son front rencontra une surface molle et il y eut un craquement et un cri.
_ Saloperie de petite fouine ! cria un homme et un poing s'écrasa sur la joue de Hux.
Il tomba au sol, sonné par le coup rudement porté.
_ Tu vas bien ? s'enquit une voix féminine.
Hux se doutait que ce n'était pas à lui qu'on s'adressait. S'appuyant sur ses poignets douloureux, il essayait de se remettre debout mais trop étourdi, ses jambes ne faisaient que glisser sur le sol froid sans parvenir à le soutenir.
_ Il m'a cassé le nez, se plaignit l'homme d'une voix nasillarde qui fit sourire Hux malgré la douleur.
Ca en avait valu la peine. Ca en avait vraiment valu la peine. Et tant pis pour les conséquences.
_ On le rattache ! ordonna la femme.
Hux fut jeté sans ménagement sur son siège et on lui repassa ses liens en les serrant encore plus fort. Il n'aurait pas cru cela possible. Une partie de son esprit lui suggéra qu'on devrait peut-être l'amputer une fois à destination. Il sentait aussi un filet de sang couler sur sa joue là où il s'était pris le coup. Il pensa vaguement qu'il allait tacher son uniforme. Qui devait de toute façon se trouver dans un état lamentable. Cela ne l'empêcha pas de continuer à sourire.
Il recula autant que possible lorsqu'il entendit un bruit de tissu tout près de lui. Il était certain qu'il allait de nouveau être frappé. Au lieu de cela, la femme lui parla d'une voix impatiente mais maîtrisée.
_ Vous n'aviez pas besoin de faire ça, le sermonna-t-elle.
Hux ne répondit pas. Elle soupira.
_ Tenez, ajouta-t-elle.
Ce qui laissa Hux perplexe l'espace d'un instant.
Puis le sac fut relevé pour juste découvrir sa bouche. Il sentit le métal froid d'une gourde se presser contre ses lèvres.
_ Dépêchez-vous, insista la femme, c'est tout ce que vous aurez avant la fin du voyage.
L'eau était tiède mais c'était mieux que rien. Hux but mais raisonnablement. Il n'avait pas envie d'aggraver son problème de vessie et après son coup d'éclat, il était improbable qu'on le détache pour qu'il se soulage. Tant pis, se répéta-t-il une fois de plus, ça en avait valu la peine.
Puis les pas s'éloignèrent et la porte claqua. Hux était de nouveau seul.
Il rejeta la tête en arrière et la laissa rouler sur son épaule. Elle était désormais très douloureuse. Trop pour qu'il puisse encore réfléchir à son évasion.
« *** »
Hux aurait aimé s'endormir, faire passer plus vite un voyage dont il ne parvenait à évaluer la durée. Sa joue lui faisait mal, sa lèvre lui faisait mal, sa tête, ses poignets, ses chevilles lui faisaient mal et malgré cela son estomac commençait à réclamer.
Alors il laissa son esprit divaguer. Quelle déchéance pour lui après la gloire éphémère qu'il avait connu. Une ascension vertigineuse grâce à un travail ininterrompu depuis l'enfance, la reconnaissance de son père, décédé peu avant qu'il ne reçoive ses galons de Général, la rencontre avec le Leader Suprême, impressionné par le projet titanesque que Hux lui avait soumis. C'était grâce à cela qu'il avait obtenu son grade. Et le commandement du Finalizer. Au final, il n'en aurait eu la charge que deux petits mois.
Il n'aurait jamais dû quitter le croiseur. Ca avait été son erreur. Mais la perspective de passer quelques jours en compagnie de sa famille avec laquelle il n'avait pas encore fêté sa promotion avait été la plus forte. Boire un verre sur la tombe de son père en lui assurant qu'il poursuivait ses idéaux… leurs idéaux… avait également été une vraie motivation.
C'était sur le trajet du retour, bien moins sécurisé qu'un déplacement officiel, qu'il s'était fait attaquer.
Il soupira.
Il supposait qu'il n'avait pas été ciblé au hasard. Le Premier Ordre comptait un nombre conséquent de Généraux mais c'était lui entre eux tous qui avait été visé.
La Résistance aurait pu l'attaquer pour le symbole, car son nom résonnait encore sur toutes les lèvres influentes de la galaxie. Auquel cas, il aurait été abattu de suite. Le message aurait été d'autant plus fort. Ou elle aurait aussi pu voir en lui, en raison de son jeune âge, une proie facile à qui il serait aisé de soutirer des informations. Le type au nez cassé pouvait témoigner du fait que ça ne serait pas aussi simple. La dernière hypothèse, la bonne d'après Hux si les Résistants avaient un peu de jugeote, était qu'ils avaient compris que le Général avait une mission de la plus haute importance à remplir. Que cela les inquiétait et que c'était pour en découvrir plus qu'ils lui avaient mis la main dessus.
Hux serra les mâchoires et cilla sous la douleur. Jamais il ne dévoilerait quoique ce soit de l'arme dont il avait dessiné les plans et entamé la construction quelques semaines auparavant. C'était son grand projet, sa destinée et il mourrait probablement avant de la voir achevée. Mais il ne la vendrait pas à la Résistance, même s'ils lui coupaient les orteils et les doigts un à un avec un pince rouillée.
Il sentit une haine brûlante lui remonter dans les entrailles et il en toussa. Sa respiration était toujours entravée par le sac et un filet de bave coula sur son menton. Il eut beau se contorsionner, il ne parvint pas à l'essuyer.
Il jura. Ce n'était que le début. Il ne devait pas s'agacer pour des choses aussi bénignes alors que les vraies épreuves n'avaient pas encore commencé.
Dès qu'il sortirait de cette pièce, il devait tout faire pour accumuler un maximum d'informations sur la position et les ressources de la Résistance, s'enfuir et ramener tous ces détails au Leader Suprême pour l'assurer de sa fidélité au Premier Ordre.
Comment en aurait-il pu être autrement ? Hux était né dans l'Empire, avait grandi dans le chaos et vivait désormais pour l'Ordre.
La décélération du cargo quittant l'hyperespace lui provoqua un haut le cœur et il ravala avec dégoût le flot de bile qui était remonté dans sa bouche. Il avait passé la plus grande période de sa vie à bord de vaisseaux et jamais encore cela ne lui était arrivé. Il mit cet incident sur le compte du stress. Il aurait aimé avoir un peu d'eau pour atténuer le goût acide.
Il inspira profondément pour aider son corps à se détendre. Ils étaient certainement bientôt arrivés à destination. Cette fois-ci, Hux ne devait pas paniquer et compter les couloirs et les tournants par lesquels on le mènerait. Il savait qu'on ne lui retirerait pas le sac avant qu'il ne soit sécurisé dans une cellule ou une salle d'interrogation. Il devait donc se reporter sur ses autres sens que la vue pour récolter la moindre parcelle d'information.
Forçant son cerveau à rester attentif malgré la douleur, il écouta le bruit des moteurs qui ralentissaient, la légère secousse de l'entrée dans l'atmosphère, le freinage délicat à l'approche d'une piste d'atterrissage. Il crut déceler les signes d'autres navettes autour d'eux et supposa qu'ils étaient escortés jusqu'à la base où on le menait.
Il supposait qu'il n'allait pas tarder à entendre le bruit des pas de ses ravisseurs qui viendraient le détacher. Hux se demanda si le type au nez cassé serait là. Et s'il aurait l'occasion de lui mettre un second coup de boule, juste comme ça, pour le plaisir. Avec un peu de chance, il se ferait cogner l'autre pommette, histoire de remettre un peu de symétrie dans son visage.
La secousse de l'appareil touchant le sol lui arracha un grognement de douleur. Ses poignets allaient être rouges pendant des jours. Enfin, s'il n'était pas pelé vivant pour ses secrets d'ici là.
Il n'eut pas longtemps à attendre avant que la lourde porte ne s'ouvre. De nouveau, il compta trois personnes. Mais aucun ne lui adressa la parole, il était donc incapable de déterminer s'il avait affaire aux mêmes individus. Il ne tenta pas plus d'engager la conversation. Son attention était déjà entièrement focalisée sur le chemin par lequel on allait le guider.
Deux grosses paires de mains lui agrippèrent solidement les bras pendant qu'un autre type le détachait, d'abord au niveau des poignets, puis des chevilles. Les gestes étaient sûrs et précis. Rapides aussi. Ils se méfiaient de lui et de ses réflexes violents. Cela l'amusa.
Quand on le poussa sans ménagement hors de la pièce, il compta ses pas, et mémorisa chaque tournant. Il était peu probable qu'il se retrouve de nouveau dans le même vaisseau mais dans sa position, le moindre détail pouvait avoir son importance.
Il fut surpris quand ses pieds rencontrèrent la surface inclinée d'une rampe. Il avait eu l'impression d'avoir marché bien plus longtemps lorsqu'il avait été amené à l'intérieur. Probablement un effet de la panique.
On le fit descendre lentement. Il sentit une brise douce qui agitait délicatement le sac sur son visage et inspira profondément l'air frais qui embaumait la forêt.
C'était déjà une indication. Ils étaient dans une base, dissimulée en pleine nature. Il faisait également jour. Il ne voyait rien si ce n'était une lumière apaisante qui passait à travers les fibres.
Il baissa les yeux. Il tiqua lorsqu'il aperçut par la mince ouverture ses propres pieds. Les liens qui l'avaient si longuement entravé avaient abimé le cuir de ses bottes. Au-delà, il ne voyait qu'un sol bitumé et au-dessus de sa tête résonnait un ballet incessant de navettes. Il était donc sur une grosse structure, avec de nombreux pilotes et vaisseaux.
Et pourtant, il n'entendait nulle voix humaine. Il pouvait aisément se les imaginer, tous ces chiens de Résistants, formant une haie d'honneur autour de lui, l'observant, le jugeant. Il se força à se redresser autant qu'il le pouvait. Jamais il ne se laisserait humilier et il n'avait pas à avoir honte de qui il était.
Le rythme auquel on le guidait était bien plus lent que précédemment et Hux s'attendait à se prendre un projectile à tout instant, depuis un caillou jusqu'à un tir de blaster. Sinon, comment expliquer qu'on le parade ainsi sur le tarmac ?
Mais rien ne vint. Et pourtant, la balade fut longue, mettant à mal son crâne douloureux, ses chevilles enflées et sa vessie pleine. Pas une seconde il ne relâcha la droiture de sa posture.
_ Attention, le prévint la même voix féminine que celle qu'il avait entendue sur le cargo.
Tout autour de lui s'assombrit et il baissa les yeux pour découvrir une salve d'escaliers qui s'enfonçait sous terre. Les Résistants se cachaient donc tels des animaux dans un terrier.
Il ne put retenir un reniflement méprisant et l'un des gardes qui enserraient toujours ses bras menottés raffermit son emprise. Hux sut qu'il était tenté de le jeter en bas des marches. C'était un sentiment qu'il connaissait bien.
Les tunnels s'enfonçaient bien plus loin que ce qu'il s'était imaginé. Ils avaient d'abord traversé ce qu'il avait deviné être une salle de commande. Sous le sac, il avait perçu des lumières bleutées clignotantes et le bip sonore de radars et de matériel de communication. C'était là que ses geôliers avaient de nouveau pressé le pas, le poussant dans le dos pour le faire avancer plus vite. Ca n'avait pas empêché Hux de songer aux dégâts qu'il pourrait faire s'il parvenait à pénétrer ici, armé d'un blaster ou mieux, d'explosifs !
A pas rapides, ils avaient longé de nombreux couloirs dont Hux avait déterminé le métrage et noté chaque tournant. Ici, la lumière était un peu plus présente que dans la salle de contrôle, notamment grâce à la présence de néons incrustés dans les murs. Il supposa qu'il était désormais dans les espaces de vie.
On le guida toujours plus loin, jusqu'aux confins du complexe souterrain. S'il voulait s'échapper, il allait devoir parcourir un sacré bout de chemin avant de retrouver l'air libre. Voilà qui allait lui demander une préparation minutieuse. Cela ne lui faisait pas peur.
Il fut stoppé brusquement et son souffle court se bloqua dans sa poitrine. Il ne se souvenait même plus de ce que cela faisait de respirer sans un sac sur le crâne. Et il ne parvenait pas à déterminer si ce qui lui coulait sur la joue était de la sueur ou le sang de sa blessure qui s'était rouverte.
Il entendit une porte grincer sur ses gonds et fronça le nez. La Résistance n'était même pas capable d'entretenir son matériel ! Et cela ne l'aiderait pas à rester discret s'il trouvait un moyen de sortir… Mais ça, supposait-il, c'était un problème pour plus tard.
On le fit entrer dans une salle dont il pensa qu'elle serait sa cellule. De ce qu'il pouvait voir, elle était étonnamment bien éclairée. Les pièces dans lesquelles on confinait les prisonniers sur le Finalizer étaient minuscules et plongées dans une pénombre presque totale.
Quant au sol, il était d'un blanc immaculé sur lequel se reflétait un néon au plafond. Hux songea brièvement que le rouge de son sang ressortirait particulièrement bien dans un tel environnement.
Il sentit une goutte couler sur sa joue jusqu'à la pointe de son menton. Quand elle tomba au sol, elle était translucide. Ce n'était qu'un peu de transpiration. Il en était presque déçu.
On lui fit faire quelques pas puis se retourner et une main lourde le força à s'asseoir sur une chaise de métal dont le froid lui remonta le long de la colonne. Son arrière-train était déjà endolori des heures passées dans l'inconfort du vaisseau. Ce n'était guère mieux ici et jamais il n'avait autant regretté le fauteuil de son bureau à bord du Finalizer. Dans un premier temps, il avait failli le faire remplacer, car trop confortable, trop complaisant. La charge de travail avait fait qu'il n'en avait jamais eu le temps mais il pensait désormais avec regret à son moelleux outrancier.
Comme sur le cargo, on attacha ses chevilles aux pieds de la chaise. Comme s'il avait une chance de s'enfuir maintenant, avec tous les yeux braqués sur lui et possiblement des gardes armés dans tous les coins.
Ses mains restèrent simplement menottées dans son dos. Ses épaules lui faisaient mal. S'il devait être attaché, il aurait au moins aimé ramener ses bras vers l'avant de son corps. Mais il n'allait pas leur faire le plaisir de leur demander quoique ce soit.
Il ne put cependant retenir un hoquet et une furtive grimace lorsque le sac fut retiré. C'était bien la dernière chose à laquelle il s'était attendu. Il plissa les yeux pour s'habituer à la brusque lumière qui agressait ses pupilles au point que des larmes montèrent. Il s'efforça de les contenir mais une coula tout de même, se mêlant à la trainée de sueur.
Il cligna rapidement des paupières, forçant son regard à se focaliser au plus vite sur son environnement. Ce qu'il identifia tout d'abord fut le dos d'une femme aux cheveux attachés, qui sortait de la pièce. Il supposa qu'elle était celle qui l'avait accompagné tout au long du voyage et que c'était elle qui avait pris l'initiative de retirer le sac qui masquait sa vue et entravait sa respiration.
Ses poumons aussi brûlèrent d'ailleurs quand l'oxygène y afflua de nouveau et Hux sentit sa tête tourner pendant quelques secondes. Il serra les dents, se forçant à demeurer immobile.
La lourde porte de métal se referma avec son grincement sinistre derrière la femme, sa serrure antique claquant dans le silence de la cellule.
Quand après quelques secondes, il parvint à retrouver le contrôle de son corps, Hux regarda autour de lui. Il était seul, bien évidemment. Un prisonnier de son rang n'était pas jeté dans une fosse commune avec des grouillots de bas étage. Et l'endroit où on l'avait enfermé était étonnamment propre.
Ce qui frappa tout d'abord Hux fut la blancheur des lieux. Le sol, les murs, le plafond, tout était éclatant. Même les draps de la petite couchette fixée à un mur sur sa droite paraissaient tout droit sortis de la blanchisserie. Il détesta se l'avouer mais cela lui plut. Rien n'était plus insupportable pour lui que le désordre. Et il s'était vraiment attendu à passer les prochaines semaines de sa vie au fond d'un cachot avec seulement un peu de paille pour dormir.
Les seules touches un peu colorées étaient le gris du métal qui brillait sous les lampes trop fortes. Il y avait le cadre du lit, mais aussi la chaise sur laquelle il était assis, la table qui se trouvait face à lui et de l'autre côté, un second siège entièrement identique à celui sur lequel il se trouvait. S'il tendait le cou vers la gauche, il pouvait aussi deviner un lavabo qui lui rappela à nouveau sa soif et un siège de toilettes auquel sa vessie pleine réagit avec enthousiasme. Il n'y avait évidemment pas de miroir ou quoique ce soit pouvant servir d'arme. Juste une brosse à dents, un savon et une serviette posée sur le côté. Sommaire mais bien plus que ce que Hux avait prédit.
Il tenta de se lever, son corps lui réclamant de soulager sa soif et ses envies pressantes. Mais il était solidement attaché et les pieds de la chaise étaient soudés au sol. Après un bref examen, il constata que c'était également le cas pour la table. Ils étaient vraiment très méfiants. Voyaient-ils déjà Hux tentant de fuir à travers les couloirs infinis avec simplement une table pour arme ? C'était grotesque !
Après, un pied de table bien aiguisé…
Il se nota d'explorer cette piste lorsqu'il serait détaché. Parce que forcément, on allait le détacher à un moment ou à un autre. A titre personnel, Hux préfèrerait que ce soit avant qu'il ne souille son pantalon. Mais cela faisait peut-être partie de la torture à venir.
Au final, explorer la pièce du regard ne lui prit pas plus de quelques secondes. Il repéra aussi dans un coin l'objectif d'une caméra vers laquelle il regretta de ne pas pouvoir faire un geste obscène et il supposa qu'il devait également y avoir des micros dissimulés. Peut-être au cas où il débiterait ses plus gros secrets dans son sommeil. Cela le fit renifler d'amusement. Au moins ses geôliers verraient-ils qu'il n'était pas plus inquiet que cela quant à son sort. Du moins extérieurement. Intérieurement, il avait tout de même du mal à contrôler cette pointe de panique qui s'accrochait à ses tripes. Il ne craignait pas la torture ou la mort, se répétait-il, mais ne pas avoir le plein contrôle des évènements de sa vie était pour lui inhabituel. Et inquiétant.
Il sentit monter le besoin de s'enfoncer les ongles dans les paumes, tic nerveux qu'il était parvenu à bannir des années auparavant.
Alors, il fixa son regard sur la porte face à lui et régula son souffle, respiration après respiration. Au bout de ce qu'il estimait être plusieurs minutes, son corps était plus détendu et son cerveau plus clair. La sensation de faim était même de retour.
Et quand le verrou claqua de nouveau, brisant le silence étouffant de la pièce, il était prêt. Du moins, autant qu'il aurait pu l'être lorsqu'il découvrit dans l'embrasure la silhouette du Général Organa.
Pendant sa capture, Hux avait songé, voir espéré, la rencontrer un jour. Il n'aurait pas cru qu'elle serait le premier visage qu'il apercevrait. Cela le déstabilisa l'espace d'un instant. Et il eut l'impression d'être face à une de ces vidéos de propagande de la République, là où il l'avait tant vue. Il pensa furtivement qu'elle n'était pas réelle mais juste un hologramme qui n'était là que pour pervertir son esprit.
Il se souvenait encore de la manière méprisante dont son père évoquait l'ancienne princesse d'Alderaan et le rôle qu'elle avait joué dans la chute de l'Empire. Il sentit un relent de haine l'atteindre et il supposa que cela se voyait sur son visage car les traits jusqu'à présent neutres d'Organa se durcirent.
Elle s'avança vers lui, un datapad à la main, et là seulement il réalisa à quel point elle était minuscule. Mais elle émanait de cette confiance qu'ont ceux qui ont longtemps dirigé des troupes et qui sont certains de la légitimité de leurs actions. C'était le genre de stature que Hux tentait d'atteindre au quotidien. Et même lui devait bien reconnaître qu'il la trouva impressionnante lorsqu'elle s'installa avec un calme olympien sur la chaise face à la sienne.
Il n'était séparé d'elle que par la table sur laquelle elle posa ses mains et Hux supposa que s'il crachait, il pouvait certainement la toucher.
Mais il était mieux éduqué que cela. C'était le genre de réaction qu'il réservait pour le futur, au cas où l'enfermement le rendait momentanément fou.
Il ne tressaillit pas quand Organa chercha son regard et il le soutint le plus longtemps possible, le menton haut et la mine défiante. Il pouvait tenir des heures ainsi si c'était nécessaire. Mais Leia Organa, contrairement à Hux, n'avait pas des heures à tuer et elle prit la parole en premier.
_ J'aurais aimé que vous soyez détaché pour tenir cet entretien dans les conditions les plus humaines possibles, fit-elle paisiblement, mais on m'a informée que vous aviez adopté une attitude violente lors du transport.
_ Attaquer ma navette et tuer mon escorte m'est également apparu comme une attitude violente. J'ai à peine effleuré un de vos hommes, répondit-il froidement. Et il me l'a bien rendu.
Il aurait aimé que la plaie sur sa joue se rouvre à cet instant, juste pour observer la réaction d'Organa. Elle avait probablement vu bien des combats mais elle ne devait plus beaucoup aller sur le terrain et la vue du sang frais la ferait peut-être frémir.
Nullement décontenancée, elle se pencha vers Hux.
_ Vous avez cassé le nez de mon meilleur pilote, précisa-t-elle comme si cela allait faire culpabiliser Hux le moins du monde.
Il se contenta d'esquisser un sourire en coin. S'il avait eu quelqu'un d'important pour la Résistance, c'était encore mieux.
Devant son silence, Leia Organa consulta son datapad et parut y lire quelques lignes. Hux se doutait que ce n'était là que de l'esbroufe. Une femme de sa trempe devait avoir parfaitement préparé cet entretien et savait exactement où elle allait. Mais ces petits temps de pause devaient servir à semer le doute dans l'esprit du prisonnier. Là encore, une technique avec laquelle il était parfaitement familier et qui ne fonctionnerait pas sur lui.
_ Sheev Hux, dit-elle d'une voix ferme en posant son datapad à ses côtés. Un nom de dictateur.
_ Un nom d'empereur, contra-t-il, bien décidé à ne pas se laisser marcher sur les pieds même par une des légendes de la galaxie.
Elle leva un sourcil, visiblement amusée par son effronterie et la promptitude de ses répliques.
_ Pour que votre père vous donne le prénom de Palpatine, reprit-elle toujours aussi calmement, il devait le tenir en très haute estime.
_ Tout comme votre propre père d'après ce que j'ai entendu dire, remarqua-t-il de la même manière.
Elle eut un moment de pause, comme si la pique de Hux avait fait mouche. Il doutait cependant qu'elle se laisse déstabiliser aussi facilement.
_ Mon père, reprit-elle d'un ton qu'elle utiliserait sur un enfant un peu lent, a su reconnaître ses erreurs, ce que n'a jamais fait votre père, il me semble.
Il la fixa droit dans les yeux.
_ Mon père a su apprendre des erreurs du vôtre et a aidé l'Ordre à renaître des cendres de l'Empire.
Elle pencha la tête de côté comme pour le jauger.
_ J'ai des choses plus urgentes à faire que de débattre des mérites de nos géniteurs respectifs, reprit-elle. Même si la discussion pourrait se révéler enrichissante. Cependant mon cher Sheev… vous permettez que je vous appelle Sheev ?
_ Je ne préfèrerais pas, Leia.
De nouveau, elle marqua une longue pause pour le scruter. Et possiblement le juger.
_ Comme vous le voulez. Je disais donc, monsieur Hux…
_ Général.
_ Pardon ?
_ Général Hux.
Cette fois, elle eut pour lui un sourire condescendant qu'il détesta.
_ Vous m'en voyez désolée mais je ne reconnais pas votre titre comme légitime.
_ Considérez donc cela comme réciproque, fit-il un peu sèchement, piqué au vif.
La Résistance lui avait peut-être volé sa liberté mais jamais ils ne pourraient le démettre de ses mérites militaires.
Elle opina, comme si elle comprenait son point de vue.
_ Je disais donc, reprit-elle sans adresser davantage le sujet, monsieur Hux, que l'Ordre a fait de vous un de ses piliers en un temps jamais vu pour un jeune soldat. Et même si la position de votre père a dû jouer un…
Il serra les poings derrière son dos. Elle devait savoir qu'elle avait touché juste. Personne n'aimait voir ses accomplissements réduits à un simple piston. Et même si la remarque le blessait et qu'il n'avait qu'une envie, c'était de bondir de sa chaise et de lui crier au visage la réalité des choses, de son travail, de son implication, il se força à rester immobile, tordant juste avec nervosité ses doigts dissimulés derrière lui. Il ne répondrait pas à une provocation aussi ridicule.
_ … je suppose que vous devez tout de même avoir des qualités personnelles qui ont poussé Snoke à faire de vous ce que vous êtes aujourd'hui. Quelles sont-elles, monsieur Hux ? Qu'avez-vous montré à Snoke pour qu'il fasse de vous la figure forte de son armée ?
Hux fut tenté de répondre « mon cul », mais c'était mesquin, même dans sa position actuelle. Il ne voulait pas non plus qu'elle le prenne au mot et qu'elle s'imagine qu'il avait couché pour arriver là où il était aujourd'hui. La remarque sur les appuis de son père avait été bien suffisante.
Alors, il décida de recourir à un nouveau moyen de défense, le silence. Le projet Starkiller était la réponse qu'elle attendait. Mais elle n'aurait rien de lui. Il la laisserait dans l'ignorance de l'arme gigantesque qui un jour balaierait cette ridicule République et leurs alliés, laissant le champ libre au Premier Ordre pour réinstaurer un système de gouvernance efficace au sein de la galaxie. Et même s'il devait mourir en captivité, les plans étaient prêts et l'arme verrait le jour. Ce serait son dernier cadeau à l'Ordre. Il espérait juste que les livres d'histoire retiendraient qu'il en avait été l'instigateur.
Leia Organa le fixa longuement. Il était impossible pour lui d'évaluer le temps avec précision mais il estima que cela devait bien être une bonne dizaine de minutes. Il ne baissa pas le regard. Il n'ouvrit pas la bouche non plus.
_ Monsieur Hux, reprit-elle finalement, je sais que vous me cachez quelque chose. On n'atteint pas un grade tel que le vôtre sans de solides justifications. Je veux savoir quelles sont-elles. Et je le saurai. D'une manière ou d'une autre.
Elle laissa le poids de ses paroles tomber dans le silence de la pièce. Hux se retint de frémir. Sa vessie se crispa. Dans son dos coula une unique goutte de sueur. Le calme des mots ne dissimulait pas la force de la menace.
Il resta de marbre.
_ Où est donc passée votre langue si bien aiguisée, monsieur Hux ? poussa-t-elle de ce même ton plein de fermeté.
Hux se mit à compter dans sa tête. C'était un moyen simple de se focaliser sur autre chose que sur les questions qu'elle lui posait.
Il était arrivé à cent-vingt-sept quand elle soupira et secoua la tête.
_ Vous savez monsieur Hux, vous nous feriez gagner beaucoup de temps à tous les deux si vous coopériez immédiatement.
Cent-trente-trois, cent-trente-quatre…
Sa voix était déjà plus loin.
_ Je ne sais pas si à votre âge vous l'avez réalisé, monsieur Hux, mais la guerre n'est pas un sprint. C'est un marathon. Et j'ai beaucoup d'expérience en la matière. Et les moyens de vous garder dans cette cellule de nombreuses années si nécessaire.
Cent-soixante-seize, cent-soixante-dix-sept…
_ Bien, conclut-elle en posant les mains à plat sur la table. Je suppose que vous êtes aussi borné qu'impertinent.
Elle se leva et se pencha vers lui. Il redressa la tête. Vu d'aussi près, son visage accusait les années passées et elle avait plus de rides de grimace que de sourire.
_ Si vous changez d'avis, faites donc un signe à la caméra. Nous serions ravi de recevoir votre déposition quelle que soit l'heure, même en pleine nuit, lorsque votre âme sera peut-être torturée par les crimes du Premier Ordre.
Cette fois, il ne put retenir un reniflement et les coins de sa bouche se relevèrent imperceptiblement. Le Premier Ordre n'était pas plus criminel que la Résistance et sur le long terme, serait capable d'apaiser la galaxie, même s'il s'agissait d'un but réclamant quelques sacrifices. Mais au moins eux, contrairement à la République, assumaient les moyens de leur finalité.
_ J'ai bon espoir de vous faire changer d'avis monsieur Hux, reprit-elle, nullement décontenancée par son amusement. Après tout, vous restez un être humain.
Et sur cette dernière réplique, elle se retourna et sortit de la pièce à pas mesurés, son datapad sous le bras.
Hux pensait voir une fois de plus la porte qui se refermerait, le laissant seul avec son estomac vide et sa vessie pleine. Au lieu de cela, Organa partie, un gros costaud et deux gardes armés pénétrèrent dans sa cellule.
_ Ne faites pas un geste, prévint le costaud d'une voix hostile. Rien ne ferait plus plaisir à mes amis que de vous canarder si vous leur en donnez l'occasion.
Hux décida que ces types ne valaient même pas la peine qu'il ouvre la bouche. Défier Leia Organa était une chose, risquer bêtement de se faire tirer dessus par des grouillots de base en était une autre.
Les blasters pointés sur lui, Hux regarda l'homme qui lui avait parlé s'agenouiller près de sa chaise et libérer ses chevilles l'une après l'autre. Quand il se releva, Hux crut que le type allait lui mettre un coup de boule, peut-être pour venger le pilote à qui Hux avait cassé le nez. Il retint un mouvement de recul et le costaud ne poursuivit pas son geste à peine esquissé. A la place, il défit ses menottes et Hux résista à l'envie déchirante de frotter ses poignets meurtris.
Pas de signe de faiblesse ! se répéta-t-il pour la première fois depuis l'arrivée dans sa cellule.
Puis, sans un mot mais sans le quitter du regard, les trois hommes ressortirent de la pièce. A peine la lourde porte claquant dans sa serrure, Hux bondit de sa chaise et se précipita vers les toilettes.
Il y vomit un flot de bile, détestant l'idée qu'une caméra était pointée vers lui.
« *** »
Allongé sur son lit, Hux se demandait si l'ennui faisait partie de la torture envisagée par Leia Organa. Cela faisait maintenant plus de deux jours qu'il avait été enfermé et il n'avait toujours vu personne.
Le temps n'était pas très difficile à estimer. Le soir, on éteignait sa cellule, le matin, on la rallumait, inondant ses yeux encore endormis de la lumière trop vive des néons. On lui servait également trois repas par jour. Là encore, il était surpris. La nourriture n'était pas pire… pas meilleure non plus… que sur le Finalizer. Une nourriture militaire, simple, trop cuite mais qui remplissait l'estomac.
A part ça, il n'avait pas grand-chose à faire.
La première fois, en plus du plateau repas, on lui avait fait passer des vêtements propres, d'une blancheur aussi immaculée que la cellule et qui lui donnait l'impression de passer ses journées en pyjama. Le t-shirt était un peu trop large au niveau des épaules, et le pantalon de toile pendait aux fesses. Il regrettait la coupe parfaite de ses uniformes, même s'il s'était débarrassé sans peine de celui qu'il avait porté lors de son enlèvement. Il sentait la sueur et le sang. Une voix anonyme lui avait ordonné de le passer par la trappe de la porte avec son plateau repas vide et il avait obtempéré.
Il avait également pensé, l'espace d'un instant, à ne pas manger, lorsque pour la première fois de la nourriture avait été glissée dans sa cellule. Mais ça aurait été contreproductif. Même s'il ne savait pas comment, il avait toujours dans l'idée de s'échapper et pour cela, il devait conserver un corps performant et un esprit clair.
Pour le moment, il n'avait pas vraiment de plan. Il avait fait le tour de sa cellule, mais il n'avait rien trouvé qui puisse l'aider. C'était un espace conçu pour qu'il ne puisse rien transformer en arme improvisée. Même récupérer le pied d'une chaise ou de la table se révèlerait difficile après un premier examen. En plus, avec la caméra qui tournait en permanence… Même sur ses plateaux repas, tout était découpé et on ne lui fournissait pour manger qu'une ridicule cuillère en plastique qui ne suffirait même pas à éborgner un nouveau-né.
Il n'avait même rien trouvé pour marquer le temps sur un des murs. Il avait tenté de gratter des marques avec le manche de sa brosse à dents mais il n'avait même pas réussi à entamer la couche de peinture épaisse. S'il était là pour des années, comme l'avait prédit Organa, il se voyait mal frotter le mur pendant une bonne heure pour arriver à un résultat.
Mais peut-être y viendrait-il un jour si les choses continuaient ainsi. Cela lui fournirait au moins une distraction.
L'autre solution à laquelle il avait songé, avait été de se mordre jusqu'au sang. Un calendrier de traces rouges sur les murs blancs serait du plus bel effet. Dommage que le sang ternisse en séchant. Ca l'avait dissuadé de le faire. Ca et la perspective de passer pour un dément. Il ne voulait pas être perçu comme s'il n'était pas en pleine possession de ses moyens et apte à assumer ses actes. Tout ce qu'il avait accompli jusqu'à présent, tout ce qu'il comptait accomplir si un jour il sortait d'ici, c'était et ce serait de sa pleine volonté. Et surtout, il ne voulait pas que la Résistance croit l'avoir déjà brisé en deux jours à peine.
Alors, à part pour l'heure du matin où il faisait des exercices physiques, mangeait son petit-déjeuner et se nettoyait au lavabo en regrettant amèrement l'absence de douche, il passait le plus clair de son temps à réfléchir sur les manières possibles de s'enfuir, depuis les plus réalistes jusqu'aux plus délirantes. En fait, avec le recul, elles paraissaient toutes délirantes.
Il soupira et se passa une main sur le visage. Un début de barbe commençait à crisser sous ses doigts. Il plissa le nez de dégoût. Il détestait ne pas être impeccable. C'était comme ses cheveux qui ne cessaient de lui tomber sur le front maintenant qu'il était privé de gel. Il s'agissait de détails qui dans sa situation auraient dû lui paraître insignifiants mais ils étaient le signe que la Résistance commençait déjà à le déposséder de ce qui faisait le vrai lui. Il ne se laisserait pas changer aussi facilement.
Il serra les doigts et sentit son poignet le tirer. Il l'observa longuement. Un anneau violet le cerclait là où ses menottes avaient abimé la chair. Mais il n'y avait pas de trace d'infection. Juste une douleur lancinante de temps à autre. D'ici une dizaine de jours, il supposait qu'il n'en resterait plus rien.
Dommage, pensa-t-il. Le violet mettait au moins un peu de couleur dans le blanc de la pièce. Ca et ses cheveux roux. Sinon, entre la pâleur de sa peau et de ses vêtements, il pouvait probablement passer pour presque invisible, installé ainsi sur son matelas.
Il haussa un sourcil lorsqu'il perçut du bruit de l'autre côté de la porte de sa cellule. Habituellement, il n'entendait pas âme qui vive à part lorsqu'on lui apportait ses repas et il était bien trop tôt pour cela. Il avait rendu le plateau de son déjeuner peu de temps auparavant.
Il se redressa en position assise lorsque le verrou claqua. S'il s'agissait d'Organa, il se rallongerait dans l'instant et tenterait de dormir. Il n'avait vraiment pas envie d'affronter son air condescendant et moqueur. Pas lorsqu'il n'avait pas les armes pour répliquer.
Mais la silhouette qui se glissa par l'ouverture n'avait rien à voir avec Organa. Hux se mordit les lèvres pour ne pas faire remarquer que ce n'était pas là la salle de bain. En effet, l'homme était vêtu d'une longue tunique qui n'était pas sans rappeler le peignoir dans lequel Hux s'enroulait parfois en sortant de la douche, lorsqu'il avait un peu de temps devant lui. Ce qui ne lui était plus arrivé depuis qu'il avait été nommé Général, réalisa-t-il.
Puis le type se tourna vers lui et Hux retint un hoquet de surprise. Ce n'était pas l'homme en lui-même qui l'avait choqué, même si son visage était tout à fait particulier, avec un nez trop long, des lèvres trop épaisses et une myriade de grains de beauté qui lui donnait un faux-air d'adolescent boutonneux, alors qu'il devait avoir, à quelques années près, l'âge de Hux. Non, c'était plutôt ce qu'il représentait.
Entre les cheveux longs et la barbe éparse qui donnaient à Hux une furieuse envie d'attraper une paire de ciseaux ou un rasoir, et la tunique brune cachant une chemise légère, Hux était certain de ce à quoi il avait affaire.
Son père lui avait parlé de Darth Vader et de ses pouvoirs. De ces anciens guerriers capables de bouger des objets avec leur esprit, qui se combattaient à coup de sabres plutôt que de blasters et qui parfois rentraient dans la tête des autres. Hux avait plutôt considéré cela comme des mythes et de la superstition, même s'il avait déjà eu des doutes à propos du Leader Suprême à ce sujet…
Mais Hux était suffisamment cultivé pour savoir à quoi était supposé ressembler un Jedi. Et l'homme qui pliait désormais sa grande silhouette sur la chaise de métal un peu trop petite pour lui en était de toute évidence un. Ou du moins, il prétendait l'être.
C'était donc cela le plan d'Organa ? Le confronter à quelqu'un qui pouvait potentiellement lire ses pensées ? Hux fronça les sourcils et se mit à compter. Il espérait que ce serait une barrière suffisante contre les possibles pouvoirs de son interlocuteur. Il était presque certain que l'homme était un imposteur mais dans le doute…
Le soi-disant Jedi leva vers lui ses yeux sombres et Hux, malgré ses traits crispés, se força à soutenir son regard.
_ Général ? fit-il d'une voix grave qui aurait pu faire frémir Hux si les circonstances avaient été différentes.
Au lieu de cela, ce dernier s'enferma dans son silence mutin. Il n'avait pas parlé à Organa, il n'allait pas non plus parler à ce type. Même si celui-ci avait au moins la décence de l'appeler par son grade.
_ C'est moi qui serai en charge de vos interrogatoires, déclara-t-il avec un sourire encourageant qui creusa deux larges fossettes dans ses joues.
Décidément, son visage devenait de plus en plus grotesque de seconde en seconde, songea brièvement Hux en serrant la mâchoire avant de poursuivre son décompte.
Cinquante-trois, cinquante-quatre…
L'homme ne se laissa nullement déstabiliser par son attitude et continua son monologue sur le même ton badin.
_ Je m'appelle Ben.
(à suivre…)