Chapitre 19
« Très bien, alors, dit Fili quand ils furent assis à la table de la cuisine avec leur thé. Qu'est-ce qu'il y a d'autre sur cette liste ? » Thorin sortit une feuille de papier de sa poche et la défroissa. « Plus d'école, dit-il. Kili doit avoir un tuteur pour lui apprendre à lire et écrire. Bombur me dit qu'il faudrait du temps pour que les services sociaux lui assignent quelqu'un, j'ai donc offert de payer un tuteur privé. Je commencerai les entretiens avec des candidats le plus vite possible. - OK, ça m'a l'air d'un plan, dit Fili. » C'était un soulagement de savoir que Kili ne partirait pas dans une autre école – même Persa, où Fili avait été plutôt heureux lui-même. Kili ne devrait pas aller quelque part où ils ne pourraient pas garder un œil sur lui, surtout pas un endroit plein d'adolescents. « Nous avons convenu que, pour l'instant, Kili ne peut pas être autorisé à quitter la maison sans supervision, dit Thorin comme s'il lisait dans les pensées de Fili. Il est bien trop vulnérable à la suggestion. - OK, dit lentement Fili. » C'était vrai – définitivement vrai, étant donné à quel point Kili avait réussi à se foutre en l'air en moins d'une semaine à l'école. Mais en même temps, Kili avait seize ans, pas six, et Fili se souvenait de comment il était à seize ans – constamment à s'insurger contre les règles de Thorin – et pensait qu'une assignation à résidence semblait un peu extrême. « Alors, ça veut dire qu'il est coincé à la maison à moins que toi ou moi soyons là pour le sortir ? Ou – je veux dire, est-ce que tu veux que je commence à réviser à la maison... ? - Non, dit rapidement Thorin. Non, Fili, tu ne dois pas assumer plus de responsabilités, et tu ne dois pas négliger tes études. - Alors quoi ? dit Fili. Je veux dire, c'est pas comme si tu pouvais arrêter de travailler. - Je compte embaucher quelqu'un pour veiller sur lui, dit Thorin. - Quoi, comme un garde du corps ? demanda Fili. - Dans un sens. Peut-être plus comme un ou une baby-sitter, dit Thorin. Il ne lui sera pas nécessaire d'être formé au combat, ni même particulièrement fort. Il faudra juste que la personne puisse garder un œil sur Kili. » Fili y réfléchit. Un garde du corps ça semblait bizarre, exagéré, mais une baby-sitter – ouais, une baby-sitter pourrait marcher. Tant qu'ils trouvaient quelqu'un de gentil, quelqu'un qui n'allait pas penser que Kili était un taré et le laisserait faire ce qu'il voulait dans les limites du raisonnable. Quelqu'un en qui Fili pourrait avoir confiance. « D'accord, dit-il enfin. Ça m'a l'air bien. Oui, je veux dire, mais... » Il pensa à quelque chose, qui l'avait dérangé toute la journée, s'il était honnête. « Et quand il ira dans l'autre famille ? Qui va lui payer tout ça à ce moment-là ? » Thorin ne répondit pas immédiatement au début, il se contenta d'observer attentivement Fili de l'autre côté de la table. Au final, cependant, il se redressa et répondit : « Je suis prêt à continuer de payer, dit-il. C'est un faible prix pour être sûr qu'il reçoit l'aide dont il a besoin. - OK, dit Fili. Bien, c'est très bien. » Il regarda la table en fronçant les sourcils, pensant à l'autre famille. Qui ils étaient, ce qu'ils penseraient de Kili. Ils sauraient tout ce qui s'était passé – Bombur le leur dirait, certainement. Quand bien même. « En fait, dit-il, est-ce qu'il faut vraiment qu'il y aille ? Je sais qu'ils ont plus d'expérience et tout, mais – on a de l'expérience, maintenant, non ? On a vu tous ces trucs, et je me suis renseigné sur le SSPT, et – Kili se plaît ici, alors. » Il pianota sur la table. « Je veux dire, tu aimes bien l'avoir ici, pas vrai ? » Thorin n'eut pas du tout l'air surpris par la question. « C'est ce que tu veux ? demanda-t-il. Tu veux qu'il reste ici définitivement ? - Euh, dit Fili. » Définitivement était un mot auquel il n'avait pas vraiment réfléchi. « Ben, c'est possible ? » Le visage de Thorin était très sérieux. « Je ne sais pas, dit-il. C'est quelque chose dont j'ai discuté avec Bombur, mais nous n'avons atteint aucune conclusion pour l'instant. Mais tu dois comprendre, Fili, que c'est une décision majeure. Kili a peut-être seize ans, mais il semble probable qu'il ait besoin de soins bien après qu'il soit devenu adulte. Il ne s'agirait pas juste de le laisser rester un peu plus longtemps. Il s'agirait de faire de lui un membre permanent de la famille. - OK, dit Fili. » C'était beaucoup. Plus qu'il n'avait vraiment envisagé. « C'est... Je n'avais pas vraiment... - Nous n'avons pas à décider maintenant, dit Thorin. Il ne doit pas rejoindre l'autre famille avant encore deux semaines. Et si nous décidons que c'est trop, sois assuré que je paierai ses soins spécialisés aussi longtemps qu'il en aura besoin. L'autre famille lui fournira un foyer stable, j'en suis persuadé. Il n'y a aucune pression sur nous pour choisir qu'il reste ici. - D'accord, dit Fili en hochant la tête avec soulagement. Ouais, OK. Je veux dire, on peut y réfléchir, peut-être. » Il allait y réfléchir. Un autre élément sur la liste des choses auxquelles il devait réfléchir. Vivre avec Kili était pire que de passer un diplôme de philosophie. Il soupira et contempla la liste de Thorin, mais il n'arrivait pas vraiment à la lire à l'envers de l'autre côté de la table. « Autre chose ? - Kili aura des séances avec le Dr Grey ou Bofur au moins 5 fois par semaine, dit Thorin. - Ouais, dit Fili. C'est bien. Ouaip, plus de thérapie. Plus de thérapie, c'est bien. - Bombur a suggéré que tu pourrais vouloir parler au DR Grey toi aussi, dit Thorin. - Moi ? dit Fili. Euh, non. Je suis pas cinglé. - Est-ce que tu penses que Kili est cinglé ? demanda Thorin, l'air mécontent. - Non, commença Fili. Je veux dire, oui. Je veux dire, non, c'est un mauvais terme. Il a – des problèmes mentaux. Mais... » Il s'interrompit. Peut-être qu'il était temps de revoir son vocabulaire, parce que vraiment, maintenant qu'il y réfléchissait, Kili était mentalement malade. Genre, peut-être même réellement fou, dans un sens. Mais si quelqu'un disait ça de Kili – si quelqu'un le traitait de cinglé – Fili se verrait forcé de lui mettre un pain, alors... Ouais, peut-être que Fili était un peu un connard, parfois. « En tout cas, dit Thorin, apparemment satisfait que Fili ait compris qu'il agissait comme un connard, la thérapie n'est pas réservée à ceux qui ont une maladie mentale diagnostiquée. Tu as été soumis à une forte tension par la situation avec Kili. Il est important que tu reçoives tout le soutien dont tu as besoin. - Je suis pas sous tension, dit Fili. C'est Kili qui est sous tension. C'est Kili qui a des problèmes. Je vais bien, je me sens juste mal pour lui, c'est tout. » Thorin l'observa silencieusement, et Fili s'agita, se souvenant de sa crise de larmes plus tôt. « Je veux dire, ouais, j'ai eu un petit craquage, mais ça va, je suis juste fatigué, dit-il. Je n'ai pas besoin de voir un psychiatre. Vraiment, Thorin. » Thorin resta silencieux un moment avant de répondre, et quand il le fit, ce fut sur ce ton extra-sérieux que Fili redoutait un peu. « Fili, dit-il. Je veux que tu saches que, de tous les problèmes imprévus qu'accueillir Kili a causés, le seul qui pourrait me faire changer d'avis sur sa présence ici, c'est son impact sur toi. » Fili fronça les sourcils, sûr d'avoir mal compris. « Qu'est-ce que tu veux dire ? dit-il. Tu vas le mettre à la porte parce que j'ai pleuré ? Putain, non, Thorin, non, tu peux pas faire ça. - Non, non, dit Thorin en levant une main. Non, je n'ai aucune intention de le mettre à la porte. Ce n'est pas du tout ce que je veux dire. » Il marqua une pause pour réfléchir. « Ce que je veux dire c'est que tu es ma priorité numéro 1, Fili. Par-dessus Kili, par-dessus le travail, par-dessus tout. Tu es ce qui compte le plus dans ma vie depuis que ta mère est morte. Même si les besoins de Kili sont plus pressants, même si je veux beaucoup l'aider, tu ne dois jamais avoir l'impression que tu ne peux pas exprimer les doutes ou les difficultés que tu peux avoir avec la situation. Je sais que toi et moi n'avons jamais eu une relation très – démonstrative, mais avec Kili ici, avec les pressions que nous subissons tous, nous allons peut-être devoir changer ça. Si tu devais souffrir en silence au point que ça devienne dangereux pour ton bien-être.. » Il marqua une pause et secoua la tête. « Je devrais renvoyer Kili, dit-il enfin. » Fili se recula dans sa chaise, se sentant en quelque sorte étonné, à la fois rasséréné et énervé en même temps. « Wow, dit-il enfin. D'accord. Je veux dire, non, je suis pas vraiment d'accord. Tu peux pas juste – le renvoyer à cause de quelque chose que je fais. C'est injuste. - Oui, en effet, dit Thorin. Mais tu es mon neveux, et je suis prêt à être injuste si c'est nécessaire pour protéger tes intérêts. Alors si tu ne veux pas que ça arrive, c'est à toi de t'en assurer. - Tu veux dire en te disant si je me sens mal ? demanda Fili. Si je te tiens au courant, tu ne le renverras pas ? - Tu n'es pas obligé de me le dire à moi, si tu n'en as pas envie, dit Thorin. Tu peux le dire à Bombur, ou à Bofur. Tu peux parler au Dr Grey, si tu veux. Je te demande seulement de prendre soin de toi, en plus d'essayer d'aider Kili. Tu comprends ? - Ouais, dit lentement Fili. » Il comprenait en effet, supposa-t-il, même s'il trouvait toujours que c'était un peu une saloperie de la part de Thorin de dire ça. Mais Thorin ne voulait pas renvoyer Kili, il comprenait ça. Il voulait juste – il essayait d'être un bon parent. Et Fili pouvait lui accorder ça, vraiment. Peut-être même encore plus maintenant qu'il savait ce que c'était de regarder quelqu'un et d'être terrifié que cette quelque chose puisse lui faire du mal. « OK, ouais. Si ça devient trop, je te le dirai, c'est promis. Je ne veux pas parler au Dr Grey – je vais bien, vraiment – mais si j'en ressens le besoin – ouais, je te le dirai. - Bien, dit Thorin, l'air soulagé. Merci. - OK, dit Fili, content que la discussion soit terminée. C'était plutôt grave. Juste parce que je pleurais plus tôt ? C'est ça qui a tout amené ? » Thorin secoua la tête et offrit un petit sourire ironique à Fili. « C'est sur ma liste, dit-il. » Il poussa la liste sur la table, et Fili la saisit. Et ça y était, oui. Ce n'était pas le premier point – le dernier, en fait, il avait l'air d'avoir été ajouté après-coup – mais il y avait une flèche qui en partait et remontait jusqu'en haut de la page, avec un astérisque à côté et un grand chiffre 1 qui avait été entouré plusieurs fois. Ça disait faire un câlin à Fili et s'assurer qu'il sache à quel point il est important. Fili le lut plusieurs fois, puis secoua la tête et renifla avec amusement. « C'est la première fois que les Services Sociaux me prescrivent un câlin, dit-il. - Faisons en sorte qu'ils n'aient pas besoin d'intervenir la prochaine fois, dit Thorin.
- Ouais, dit Fili en se sentant tout chaud. Ouais, faisons ça. »

****

Kili était encore endormi quand l'heure du déjeuner arriva. Après en avoirdébattu, Fili et Thorin décidèrent de nepas le réveiller, et quand le déjeuner fut terminé et le lave-vaisselle rempli, Thorin regarda sa montre et soupira.
« J'ai des courses à faire, dit-il. Je ne suis pas sûr...
- Hé, c'est bon, dit Fili. Vas-y. Je garderai un œil sur lui. »
Thorin eut l'air dubitatif.
« Tu n'avais pas des projets ce week-end ? demanda-t-il. Des amis à voir ?
- Nan, dit Fili. J'avais prévu de faire visiter la fac à Kili. Mais, tu sais, mes bras ne sont pas si forts que ça, donc je vais probablement devoir attendre qu'il se réveille.
- Si tu es sûr, dit Thorin.
- Pour l'amour du ciel, dit Fili en roulant des yeux. File. Le gosse va probablement dormir jusqu'à ce que tu reviennes, de toute façon. »
Mais ce ne fut pas le cas. Environ une demi-heure après le départ de Thorin, Fili monta à l'étage pour prendre des nouvelles de Kili et le trouva assis dans sa chaise de bureau, la couverture nettement pliée au pied du lit. Il fixait le vide, mais redescendit sur terre quand Fili frappa à la porte ouverte.
« Hey, dit Fili. Salut. Comment tu te sens ?
- Salut, dit Kili. »
Il passa une main sur ses yeux, et Fili devina aux marques d'oreiller sur son visage et au regard vague dans ses yeux qu'il venait de se lever.
« Je me suis endormi.
- Ça tu peux le dire, renchérit Fili avec un grand sourire. Tu as dormi la majeure partie de la journée. Tu as complètement raté Bombur.
- Oh, dit Kili. Désolé.
- Tu n'as pas à être... commença Fili. »
Puis il décida qu'il en avait eu assez. Il entra dans la chambre et s'assit sur le lit, face à Kili.
« Hey, dit-il, on peut passer un marché ?
- Hum, OK, dit Kili. Lequel ?
- Avant de t'excuser pour quelque chose, tu dois demander si c'est quelque chose pour lequel tu dois t'excuser, dit Fili. Qu'est-ce que tu en dis ? Ça te va ? »
Kili le fixa.
« Est-ce que je m'excuse trop ? Demanda-t-il. »
Fili ne put s'empêcher de renifler.
« Est-ce que Henry VIII a eu plusieurs femmes ?
- Hum, dit Kili, l'air éberlué devant la question. Je – sais pas ?
- Oui, petit génie, dit Fili. »
Il décida que ça ne valait pas la peine d'essayer d'expliquer – après tout, comment expliquer les aventures conjugales de Henry VIII à un alien ?
« Tu t'excuses trop. Genre, beaaaaaucoup trop, pour des trucs qui sont loin d'être ta faute.
- OK, dit Kili. Désolé. Um, je veux dire. »
Il jeta un regard inquiet à Fili.
« Est-ce que je dois – m'excuser pour ça ?
- Nope, pas le moins du monde, dit Fili. Mais tu devrais arrêter quand même.
- OK, dit Kili. Je vais arrêter.
- C'est bien, dit Fili. »
Il se sentait peut-être un peu coupable de tirer avantage de l'obéissance de Kili. En même temps, si ça voulait dire que le gosse commençait à se demander si les choses étaient vraiment sa faute ou pas, c'était forcément une bonne chose, non ?
« Alors, tu as faim ?
- Hum, dit Kili. »
Puis son estomac gronda bruyamment.
« Ouais, je vais prendre ça pour un oui, dit Fili. Viens. Sandwich aux œufs frits ? »
Les sandwiches aux œufs frits n'étaient autorisés que le samedi dans la maison Écu-de-Chêne – une règle que Thorin avait mise en place quand Fili avait commencé à faire le dîner. Ces jours-ci, Fili n'en faisait même pas si souvent, mais il était quand même très doué, même si c'était lui qui le disait. Et la vitesse à laquelle Kili dévorait son sandwich semblait suggérer qu'il était du même avis.
« Alors je me disais... commença Fili. »
Puis il y eut le son de la porte de derrière qui s'ouvrait, et quelques instants plus tard Thorin apparut dans l'entrée de la cuisine.
« Tu es réveillé, dit-il à Kili.
- Ouais, dit Kili. Je suis d... »
Il s'interrompit et regarda Fili.
« Est-ce que je dois... ?
- Non, dit Fili. C'est bon. »
Il se tourna vers Thorin, qui fronçait les sourcils avec confusion.
« Tu as été faire du shopping, je vois ? »
Thorin décida apparemment que ça ne valait pas la peine de poser des questions, et entra dans la pièce, posant ses sacs sur la table. Fili fouina dans le premier et haussa les sourcils.
« Wow, dit-il. Ça en fait, du fromage.
- Je passais par hasard près de la fromagerie, dit Thorin. J'ai pensé que j'allais faire du stock.
- Oh, juste par hasard, hein ? dit Fili. On parle bien de celle dans All Saints' Passage ? Qui est loin de la route ?
- Celle-là, oui, dit Thorin en lui jetant un regard noir. »
Fili eut un sourire narquois.
« C'était juste pour être sûr, dit-il. Qu'est-ce qu'il y a dans l'autre sac ? »
Thorin l'ouvrit et sortit une bopite noire et carrée avec un tas de photos d'animaux dessus et les mots David Attenborough inscrits en bas.
« J'ai pensé, étant donné que la chaîne documentaire semble parler principalement des dinosaures... dit-il en tendant la boîte à Kili. »
Kili le regarda en clignant des yeux puis prit la boîte, les sourcils froncés.
« Qu'est-ce que c'est ? demanda-t-il. Um, je ne peux pas – je ne peux pas lire ce que ça dit.
- Des DVD, ditFili. Des documentaires sur la nature. Des millions, on dirait. 24 disques. Ça va te tenir un moment. »
Il adressa un grand sourire à Thorin.
« Tu passais par hasard près du magasin de DVD, sans doute ?
- Non, dit Thorin. J'y suis allé volontairement. »
Il se retourna vers Kili.
« Je voulais t'offrir quelque chose. Pour rattraper ce qui est arrivé.
- Tu... »
Kili regarda de nouveau la boîte de DVD, puis Thorin, puis de nouveau les DVD.
« Ils sont – pour moi ?
- Oui, dit Thorin. Un présent, si tu veux. »
Kili ne dit rien pendant une minute ou deux, retournant sans cesse la boîte dans ses mains. Puis il leva les yeux vers Fili.
« Comme les livres ? demanda-t-il. Je peux les garder ?
- Ouaip, exactement comme les livres, dit Fili. Ils sont à toi. Tu pourras les emmener avec toi si tu pars. »
Il n'avait pas eu l'intention de dire si – il avait eu l'intention de dire quand, parce que Thorin et lui étaient tombés d'accord pour ne pas parler à Kili de la possibilité qu'il reste tant qu'ils n'auraient pas décidé si ce serait le cas ou pas – et Thorin fronça les sourcils. Heureusement, Kili ne sembla pas remarquer.
« Wow, dit-il. Merci. »
Il leva les yeux vers Thorin.
« Ce sont tous des documentaires ? Sur les animaux et tout ça ?
- En effet, dit Thorin. Un grand nombre, je crois, mais probablement pas des millions.
- Wow, dit de nouveau Kili. Mais – et vous – je veux dire, est-ce que je devrais faire quelque chose ? Qu'est-ce que je devrais faire ? »
La question – qui la veille aurait juste été bizarre et presque incompréhensible – retourna l'estomac de Fili, et il intervint en secouant la tête.
« Tu n'as pas à faire quoi que ce soit, dit-il. Thorin voulait juste t'offrir quelque chose, c'est tout. C'est pour ça que c'est un présent, parce que tu n'as pas à faire quoi que ce soit en échange.
- OK, dit Kili. »
Mais il ne semblait pas très sûr de lui, son regard passant de Fili à Thorin.
« Est-ce que c'est bon ? Ça va ?
- C'est parfait, dit Thorin. Quand quelqu'un t'offre un présent, tu as juste à dire merci.
- Oh, oui, merci, dit rapidement Kili. Merci. »
Il serra le coffret DVD contre lui.
« Merci, dit-il une troisième fois.
- Il n'y a pas de quoi, dit Thorin. Et j'ai aussi quelque chose à dire. Je voulais te présenter mes excuses. »
Kili fronça les sourcils.
« Um, dit-il. OK ? Mais – je ne comprends pas.
- Si j'avais fait plus attention, j'aurais vu que tu avais des difficultés avec tes devoirs, dit Thorin. Il ne m'est pas venu à l'idée que tu ne savais peut-être pas lire, et pour cela, je suis désolé. Si je l'avais vu plutôt, je ne t'aurais jamais envoyé dans cette école.
Il ne précisa pas le reste – toutes les autres choses qui ne se seraient jamais produites – mais l'esprit de Fili termina la phrase pour lui.
« Oh, dit Kili. ok. Um, mais – c'était ma faute, je n'ai pas – j'avais peur que vous soyez en colère, alors je n'ai pas...
- Ce n'était pas ta faute, Kili, dit Thorin. En tant que tuteur, c'est mon travail de te protéger, et j'ai échoué. Quand j'y repense, il était évident que tu avais des difficultés. Alors je suis désolé. J'esp-re que tu te sentiras capable d'être honnête avec moi à l'avenir, sans craindre que je sois en colère contre toi. »
Kili serra davantage le coffret contre lui, les yeux comme des soucoupes tandis qu'il fixait Thorin.
« Vous êtes désolé ? dit-il.
- Je suis désolé, répondit Thorin. J'espère que je ferai mieux à l'avenir.
- Hey, dit Fili. Je suis désolé aussi, tu sais. Je veux dire, je sais que je t'ai fait peur, dans la voiture. Je sais que tu as eu vraiment peur. »
Il pensa à Kili, tremblant sous le lit pendant – combien de temps ? Beaucoup trop longtemps.
« Je ne l'ai pas fait exprès, je n'ai juste pas réfléchi. Je n'avais pas réalisé. Alors je suis désolé, moi aussi. »
Kili tourna ses yeux ronds vers Fili, alors. Il le fixa et le fixa, et s'il ouvrit la bouche au bout d'un moment, aucun mot n'en sortit. Pour être honnête, ça mettait Fili un peu mal à l'aise.
« OK ? dit-il. Donc – je suis désolé. Est-ce que tu vas bien ? »
La bouche de Kili se referma abruptement.
« Euh, dit-il avant de s'éclaircir la gorge. Ouais, je vais – bien. Bien, ouais.
- Tant mieux, dit Thorin. À l'avenir, nous veillerons à ce que tu reçoives l'aide dont tu as besoin pour être capable d'apprendre avec succès. »
Kili rentra un peu la tête dans les épaules, l'air misérable.
« Mais je ne peux pas retourner à l'école avant jeudi, dit-il. Ils ont dit que je ne pouvais pas.
- Oh, non, dit Fili. Merde, on ne t'a pas dit. Thorin, on ne lui a pas dit ?
- Tu ne retourneras pas à l'école, dit Thorin. Ni cette école, ni aucune autre école, d'ailleurs. Pas avant très longtemps en tout cas. »
Des yeux écarquillés s'installèrent de nouveau sur le visage de Kili.
« Pas d'école ? dit-il. »
Son regard passait de Fili à Thorin comme s'il n'osait pas tout à fait y croire. Son expression d'espoir incrédule donna envie à Fili de frapper un mur. Ou le visage de John.
« Pas d'école, dit Thorin. Tu devras quand même apprendre, mais tu le feras à la maison, avec un professeur particulier. Et tu apprendras à lire. Aimerais-tu apprendre à lire, Kili ? »
Kili hocha rapidement la tête, puis eut soudain l'air anxieux.
« Et si je n'y arrive pas ? dit-il. J'ai essayé de m'apprendre, mais, euh. J'étais trop stupide.
- Tu n'étais pas trop stupide, dit Fili en faisant de son mieux pour ne pas laisser sa colère paraître dans sa voix. Tu n'as juste pas eu les bonnes ressources. Mais tu as envie d'apprendre, pas vrai ?
- Ouais, dit Kili, presque dans un murmure. Ouais, oui. S'il vous plaît.
- Je suis heureux de l'entendre, dit Thorin. Alors tu apprendras. Il n'y a pas de date limite, Kili – ça n'a pas d'importance, le temps que ça prend ou si tu t'en sors bien. J'insiste juste pour que tu fasses de ton mieux. Peux-tu faire ça ?
- Oui, dit Kili. Oui. Je le promets. Merci. »
Il semblait au bord des larmes, et Fili décida que c'était bien assez de discussion sérieuse en une fois. « Cool, dit-il. Alors, est-ce que tu veux regarder un de ces trucs, ou pas ? Je veux dire, j'allais proposer qu'on sorte, mais la météo est pourrie et il commence à se faire tard. Mais on pourra sortir demain. Je veux dire, si tu en as envie.
- OK, murmura Kili.
- C'est décidé, alors, dit Fili. Thorin ? Je veux dire – tu as probablement du travail, mais qui pourrait résister à tant de répartie ? »
Thorin jeta un regard vers son bureau, mais secoua ensuite la tête.
« Le travail peut attendre, dit-il. Quel documentaire aimerais-tu regarder, Kili ?
- Euh. »
Kili cessa de serrer le coffret assez longtemps pour y jeter un œil.
« Hum. »
Il désigna l'une des photos.
« Celui-là ? C'est – un tigre ?
- Attends, laisse-moi jeter un œil, dit Fili. »
Il tendit la main, et après une brève hésitation, Kili tendit la boîte. Fili passa un moment à associer les photos aux titres, puis hocha la tête.
« La Vie des Mammifères, dit-il. Ça te va ? Ils ont, hum... »
Il parcourut le reste du regard.
« Les plantes, les oiseaux, les trucs froids, et – un tas de trucs. Des insectes, on dirait. »
Il leva les yeux vers Kili.
« Les mammifères, ça te va ?
- Comme les tigres ? demanda Kili.
- Les mammifères sont des animaux, dit Thorin. Ils se différencient des oiseaux, des reptiles, des poissons et des amphibiens. Les tigres, oui. Ainsi que les humains, les vaches, les baleines, les souris. Tu comprends ?
- O-Oui, ouais, dit Kili. OK. Ouais, les mammifères. C'est-à-dire – si vous voulez ?
- Rien de tel qu'un bon mammifère, dit Fili avec un large sourire. Viens, alors. Allons découvrir ce que ce tigre nous a réservé. » Et il ouvrit la marche pour sortir de la pièce, Kili et Thorin le suivant. Quelques minutes plus tard, cependant, il revint chercher le sac de fromages. (-)