Elisa Ortega aimait son travail. Il n'y avait rien de tel que se réveiller le matin en sachant que dans quelques heures, des criminels sangloteraient en avouant des crimes qu'ils juraient jusqu'ici n'avoir jamais perpétré. Bien sûr, il y avait des règles à suivre. Après tout, quand bien même elle aimerait battre certains suspects comme plâtre, quand bien même elle souhaiterait user de techniques douteuses pour les faire parler, elle restait une femme d'horreur et suivait les régulations à la lettre.

Ce jour là, toutefois, les moyens peu honorables lui semblaient assez attrayants.

Le suspect qu'elle et quelques autres agents regardaient derrière le miroir sans tain était un homme au teint blafard qui ressemblait davantage à un rat qu'à un humain. Il se trouvait dans la salle d'interrogatoire, seul, les doigts et la jambe tremblant nerveusement.

Son comportement pourrait laisser penser qu'il était aisé de le faire parler, mais non. Rien de ce qu'elle ou ses collègues avait essayé n'avait fonctionné.

- Je n'arrive pas à croire que ce type nous pose tant de problèmes, commenta un d'eux avec exaspération.

Elisa ne pouvait l'en blâmer, cela faisait des heures qu'ils y étaient.

Un autre agent grogna son approbation en faisant craquer sa nuque puis ses jointures. Elisa grinça des dents au son que cela produisit. Le bruit d'articulations qui craque, c'était sa bête noire. Cela l'agaçait tellement, et lui donnait envie de crier…

Elle marqua un temps d'arrêt à cette pensée.

Agacait.

Malgré elle, elle repensa à un certain cours d'une certaine école avec une certaine personne causant une terreur infinie pendant toute une heure jusqu'à ce que l'enseignant le laisse partir en avance.

Elle regarda de nouveau le suspect. Méritait-il vraiment ça ?

Puis, elle se souvint que non seulement le suspect lui avait craché dessus tout en l'insultant de manière raciste, mais que c'était aussi à cause de lui qu'elle ratait la diffusion de sa série préférée.

Elle rit un peu, s'attirant l'attention de ses collègues, et tous deux frissonnèrent devant son expression.

- Je crois, commença-t-elle avec un sourire de requin, je crois que je sais comment le faire parler.


Spencer Reid aimait son travail. Ceci étant dit, il aimait aussi avoir des jours de libre, bien qu'ils soient peu nombreux et très espacés dans le temps. Ce jour là était un de ces jours miraculeux où il n'avait pas à aller travailler et il s'en réjouissait.

Puis, son téléphone sonna.

- Reid, répondit-il sans même regarder qui appelait.

Il avait l'habitude que ce soit un membre de son équipe, et fut surpris par la voix qui lui parvint.

- Salut Reid, c'est Elisa.

- Salut, répondit-il un peu maladroitement en se demandant pourquoi elle l'appelait.

Il avait gardé le contact avec John et elle, mais ils ne s'appelaient jamais.

- Ecoute, j'ai une faveur à te demander, commença-t-elle, et il put entendre la colère dans sa voix. On a un type ici…

- Ici, comme en Interrogatoire ? l'interrompit-il pour plus de précision.

- Non, dans ma cave où je tiens un club de combat clandestin. Bien sûr que oui en salle d'interrogatoire ! rétorqua-t-elle sèchement.

- Désolé, murmura-t-il en grimaçant.

- Bref, comme j'étais en train de le dire, on a un type ici qui refuse de parler. On a tout essayé question moyen légaux. Alors maintenant je m'en remets à des moyens un tout petit peu moins réglos en te demandant si tu voudrais nous filer un coup de main.

- Heu, Elisa, ce n'est pas que je ne veux pas, mais je ne pense pas avoir le droit de vous aider, lui dit-il nerveusement. Je pourrais avoir pas mal d'ennuis si je mets le nez dans une affaire à laquelle je ne suis pas assigné.

- Je me doutais que tu dirais quelque chose du genre. J'ai déjà parlé à mon boss et tu as les autorisations si tu veux nous prêter main forte, lui assura-t-elle.

Il poussa un soupir de soulagement.

- Cela ne me dérange as de vous aider, fit-il avec un sourire, qui vira bientôt à une expression malicieuse. Waouh, je ne pensais pas que le jour viendrait où…

- La ferme, aboya-t-elle dans le téléphone en sachant déjà ce à quoi il pensait.

- La Grande Elisa Ortega, Reine des Interrogatoires, me demanderait une faveur, conclut-il avec une certaine satisfaction.

- Je peux toujours te mettre une raclée au combat au corps à corps, alors je crois que tu ferais mieux de ne pas te réjouir de trop, gronda-t-elle, et il fit de son mieux pour arrêter de glousser de rire.

- Je serai là dans une demi-heure.

Sur ces derniers mots, il raccrocha. Puis, il soupira en regardant ses livres avec regret avant d'aller se préparer. En enfilant un pantalon qu'il portait rarement, son visage se para d'un autre sourire espiègle.

Elisa pouvait connaître sa technique, mais elle ne l'avait jamais vuevue dans toute sa splendeur.


Nat Marty était indéniablement neveux. Sa routine nocturne s'était déroulée comme d'habitude : courir les rues à la recherche de potentiels, parler au téléphone pour satisfaire les bonnes personnes, vérifier les bordels et points de rencontre, et ainsi de suite. C'était une bonne nuit jusqu'à ce qu'il décide d'acheter de l'héroïne à ce nouveau dealer dont tout le monde chantait les louanges.

Deux jours plus tard, voilà qu'il était dans une salle froide attendant que quelqu'un arrive pour lui parler.

Encore.

Il avait été arrêté au sujet de la drogue, mais le FBI avait d'une manière ou d'une autre son nom sur une liste et il avait été transporté du commissariat vers un endroit beaucoup plus sécurisé. Il avait aussitôt su à quel sujet ils allaient l'interroger, ce qu'il ignorait, c'est comment ils avaient obtenu son nom. Nat fixa la table d'un regard noir. Quelqu'un avait mouchardé et s'il sortait d'ici, il trouverait qui et lui tordrait le cou.

Il s'agissait probablement de ce Johnny qui avait disparu il y avait de cela quelques semaines. Ne jamais faire confiance à un gars nommé Johnny, ils ne savent pas la fermer.

Après ce qui lui semblait des jours avec pour seule compagnie le tic-tac de l'horloge et sa propre respiration, la porte finit enfin par s'ouvrir de nouveau. Nat leva les yeux, s'attendant à un autre type en costume, pour se retrouver à fixer l'arrivant avec stupéfaction.

Car la personne qui entra avait plus l'air de se rendre à une séance de photographie que dans une salle d'interrogatoire.

Le jeune homme était de grande taille et avait un joli teint pâle. Sa belle peau contrastait joliment avec la chemise vert olive dont quelques boutons étaient défaits, permettant ainsi d'entrapercevoir la base de son cou. Il portait une écharpe d'un violet sombre qui mettait en valeur son torse et incitait le spectateur à baisser les yeux. Ses longues jambes étaient magnifiquement moulées dans un jean noir qui semblait peint sur lui. Des bottes en cuir marron étaient assorties à la couleur de ses cheveux chocolat ébouriffés. Son visage était un chef-d'œuvre en lui-même avec deux yeux bruns, de longs cils sombres et des lèvres roses pâles étirées en un sourire.

Si seulement Nat avait rencontré cet homme dans la rue. Les patrons auraient adoré ce gars.

- Salut ! dit joyeusement ce dernier en s'asseyant face à Nat. Je suis Spencer Reid, c'est un plaisir de vous rencontrer, …

Il laissa sa phrase en suspend et lança à Nat un regard interrogateur.

- Nat, dit-il simplement, puisqu'il savait que les fédéraux avaient déjà son nom.

- Hoo, c'est mignon comme nom. Je vais vous appeler Natty, déclara Spencer avec audace en ouvrant un dossier face à lui. Voyons voir ça, ils m'ont donné ces informations sur vous pour qu'on ai quelque chose pour briser la glace. Ce n'est pas super quand les gens sont si prévenants ? lança Spencer avec un sourire rayonnant.

- Heu, ouais. Je suppose, bégaya Nat, pris de court par la tournure des événements.

Ce type n'avait pas l'air ni l'attitude d'un interrogateur. Qu'est-ce qui se passait ? Etait-ce une plaisanterie ?

- Alors, ça dit que vous vous occupez de trafic humain, lut Spencer, et Nat sentit son sang se glacer dans ses veines. Il savait qu'il était dans le viseur des autorités mais il ne savait pas vraiment s'ils l'avaient relié à ça jusqu'ici.

Foutu Johnny.

- Alors, dites-moi, est-ce que c'est à cause de vous que je me retrouve toujours coincé aux feux rouges ? demanda Spencer, l'air très sérieux.

- …pardon ? questionna Nat avec confusion.

Ce n'était pas la question à laquelle à l'attendait. Ca n'avait en fait pas le moindre sens.

- Est-ce que c'est à cause de vous que je me retrouve toujours coincé aux feux rouges ? répéta Spencer sans que son expression ne change.

- Non ? Je ne comprends pas la question.

- N'essayez pas de nier, mister. C'est forcément vous !

- Quoi ? Je n'ai pas le pouvoir de changer les feux de circulation !

- Bien essayé ! Nous savons que vous êtes trafiquant, qui ça pourrait être d'autre ?! demanda Spencer théâtralement en claquant ses mains sur la table.

- Qu'est-ce que le fait d'être trafiquant a à voir avec ça ?

- Tout le monde sait que les trafiquants sont les personnes qui se cachent dans les poteaux pour changer les lumières et réguler le trafic, je vous signale.

- Pardon ? s'entendit dire Nat après un instant de silence.

- Les trafiquants sont…

- Non. Arrête. Tu penses qu'il y a des gens dans les poteaux pour réguler le trafic ? questionna Nat avec incrédulité.

- Bah ouais, comment les feux pourraient changer de couleur sans quelqu'un pour le faire ?

- C'est stupide. Personne ne peut entrer dans ces poteaux, espèce d'imbécile, asséna brutalement Nat d'une voix irritée.

- Ah oui ? Alors comment ils sauraient que des gens veulent traverser la rue quand on pousse le bouton, hein ?

- C'est une machine ! Il y a un capteur, voilà comment c'est possible, tenta d'expliquer Nat.

Seulement Spencer ne voulait pas écouter.

- Oh, Natty, c'est le truc le plus fou que j'ai entendu de toute la journée. Des machines avec des capteurs, répéta-t-il avec un petit rire. Ce sont des trafiquants, tout le monde le sait. Vous n'avez pas à cacher ce que vous êtes.

- Je ne me cache pas dans les poteaux de feux de circulation ! s'écria Nat, perdant son sang-froid.

Le niveau de stupidité de ce type était stupéfiant.

- Je trouve des gens solitaires et les amène dans l'industrie du sexe underground ! Voilà ce que fait un trafiquant ! Voilà ce que je fais !

- Oh ? Alors, vous ne vivez pas dans les poteaux pour réguler le trafic ? demanda Spencer, l'air déçu.

- Pour la dernière fois, je n'ai rien à voir avec les feux de circulation !

- Mais alors, comment marche votre travail ? interrogea Spencer, et Nat était trop énervé pour réaliser la gravité de l'erreur qu'il s'apprêtait à commettre.

- C'est facile, je cherche des candidats potentiels dans les rues. Quand je trouve quelqu'un, j'envoie sa photo à mes patrons. S'ils l'aiment bien, je le suis, le drogue et l'envoie dans les bordels des patrons.

- C'est ridicule, nous n'avons pas de bordels ici, c'est illégal, rit sottement Spencer.

Nat fut surpris qu'il sache ce qu'était un bordel.

- C'est ce que tu crois, rétorqua Nat d'un air suffisant, fier de montrer son intelligence à ce bel homme. Il y en a cinq rien que dans cette zone, juste sous le nez des fédéraux.

- Je ne vous crois pas, chantonna Spencer.

- Pourquoi pas ?

- Je vous l'ai dit, c'est illégal. La police les aurait fermés si elle les avait vu.

- Attends, fit Nat en fronçant les sourcils. Tu crois qu'ils seraient simplement ouverts au vu et au su de tous ?

- Heu, oui ? Comment les gens sont supposés savoir où ils sont sinon ?

- Espèce d'idiot ! aboya Nat. Les bordels sont des endroits cachés qu'il faut trouver !

L'autre se redressa soudain sur sa chaise.

- Comme dans une chasse au trésor ? demanda Spencer, les yeux étincelants.

- Je…ouais, c'est ça, comme une chasse au trésor, répondit Nat avec lassitude.

- Je veux le faire ! Vous pourriez m'emmener ?

Nat observa à nouveau cet homme. Il était magnifique mais plus stupide qu'une poule sans tête. Il ferait cependant un excellent prostitué et serait trop occupé avec les habitués pour papoter.

- D'accord, mais en retour, tu travailles dans l'un d'eux. Je te laisse même choisir lequel, proposa-t-il malicieusement.

- D'accord, s'exclama joyeusement Spencer. Où est-ce qu'ils sont ?

- Il y en a un sur la 17ème qui ressemble à une laverie. Ca s'appelle Soapy's, tu l'as sûrement déjà vu. Il y en a un autre sur Lincoln dissimulé sous l'apparence d'un restau chinois appelé Lee's Take Out, et deux pâtés de maison plus loin un autre s'appelle Jessica's Boutique. Sur Washington c'est un endroit appelé Darla's Photography et sur Broadway, le dernier est une boutique pour animaux appelée Pugs'N Kittens.

- Hmm mais je suis déjà allé à Soapy's et Lee's et je n'ai jamais vu de bordel dans l'un ou dans l'autre. Je pense que vous me mentez Natty. Vous vivez bien dans un poteau pour réguler le trafic, vous essayez juste de m'embrouiller, l'accusa Spencer et Nat laissa brutalement tomber sa tête contre la tabe.

- Non, c'est faux ! Les bordels sont dans les caves ou les arrière-boutiques, imbécile ! S'ils étaient à la vue de tous, ce ne serait pas des endroits secrets ! s'écria Nat en tentant de retenir des larmes de frustration.

- …dans les caves ? demanda doucement Spencer.

- Oui.

- Eurk, les caves c'est sale, s'exclama Spencer en tirant la langue. C'est plein de moisi et ça a des odeurs bizarres. Je n'ai pas envie de travailler dans une cave, non merci !

Spencer se leva et se dirigea vers la porte.

- Mais tu as promis ! Allez, ce sera bien mieux que ton travail actuel, quel qu'il soit ! s'écria désespérément Nat.

Il sentit l'espoir naître en lui quand Spencer s'arrêta près de la porte. Le jeune homme se retourna alors et lança à Nat un drôle de regard.

- Être obligé de me prostituer ne peut en aucun cas être mieux que mon travail actuel, dit-il à Nat.

Celui-ci fronça les sourcils devant le changement radical de comportement.

- Ah oui, et qu'est-ce que tu fais ? demanda-t-il en ayant l'impression de rater quelque chose d'évident et d'incroyablement important.

Spencer lui sourit, et ce sourire avait quelque chose de diabolique.

- Je fais des profils de criminels. Et je travaille comme interrogateur sur mon temps libre, lui dit-il, les yeux étincelant d'amusement.

Il sortit alors et quand la porte se referma, toutes les pièces de puzzle se mirent soudain à leur place dans la tête de Nat.

Il avait oublié qu'il se trouvait dans une salle d'interrogatoire, il avait oublié qu'il était en train d'être interrogé. Spencer l'avait rendu tellement furieux et l'avait tant dérouté par sa stupidité qu'il en avait oublié où il se trouvait ! Il avait été piégé !

Il frappa à nouveau sa tête contre la table, en espérant s'assommer.

Au même moment, de l'autre coté de la porte, Elisa fixait Spencer sans y croire.

- Je pensais que ta technique ne pouvait pas être pire, et tu arrives habillé comme ça, dit-elle en secouant la tête et ayant toujours du mal à croire ce qu'elle venait de voir. Si je ne savais pas que ce type était impliqué dans du trafic d'être humain, je me sentirais mal pour lui, conclut-elle en jetant un œil au miroir pour voir que le suspect se frappait répétitivement la tête contre la table.

- Ce n'est pas comme si je pouvais porter autre chose que l'uniforme de l'académie, donc je n'ai jamais eu la possibilité de te montrer la technique dans son intégralité, admit Reid.

Il lui rendit le dossier et suivit son regard.

- Je n'arrive pas à croire qu'il m'ait dit tout cela. Tu avais l'air de dire qu'il était difficile de le faire parler.

- C'était le cas, rétorqua-t-elle avec un regard assassin. C'était le cas, jusqu'à ce que tu arrives. Je me demande pourquoi tu n'as pas été assigné à cette unité. Ta technique est sans faille, admit-elle avec une certaine réticence.

- Apparemment, les agents qui enseignent les techniques d'interrogations ont dit en haut que je serais trop fort et que les autres agents ne s'en remettraient pas, dit-il en haussant les épaules.

Il remarqua alors les deux agents qui continuaient de le fixer.

- Heu, est-ce qu'ils vont bien ?

Elle regarda également ses deux collègues qui fixaient Reid d'un regard vide, sans parvenir à croire ce qu'ils avaient vu, et Elisa soupira.

- Ils vont bien. Mais ouais, peut-être que t'avoir ici serait dangereux pour notre santé mentale. Reste au BAU.

- Avec plaisir, dit-il avec un sourire.


Cette technique est redoutable xD

Cette fois il s'agissait du dernier chapitre. Un immense merci à tous ceux qui sont arrivés jusqu'ici, ceux qui mettent des reviews, ou m'ajoutent dans leurs favoris. Je ne pensais pas que des traductions auraient beaucoup de succès mais quand je vois les stats et que je lis vos retours, je me dis que le temps et le travail que cela demande valent totalement la peine.

Edit : J'ai publié un sondage sur mon compte twitter ( malohkeh_) pour choisir le thème de ma prochaine traduction. Aucune inscription n'est nécessaire, n'hésitez pas à venir me dire ce que vous préférez parmi les choix proposés !