CHERS LECTEURS
JE SUIS DESOLEE
JE VAIS ALLER ME PENDRE

Plus sérieusement, je m'excuse de cette longue année d'absence (ouais, un an pile aujourd'hui...). J'espère que vous ne m'en voulez pas trop... J'ai rencontré des difficultés avec l'intrigue, et j'ai du réécrire beaucoup de chapitres, bref, c'était chiant. Mais je n'abandonnerais jamais un fic, donc me revoicie, après si longtemps, pour vous proposez la suite de l'histoire !

Les chapitres sont plus longs, comme vous le remarquerez ;) Comme toujours, merci à ma bêta, Moira-chan, et à tous ceux qui ont mis des reviews pendant mon absence ! Spécial thanks à Zofra, qui est allée jusqu'à me mp pour savoir comment ça se passait :3

Bonne lecture !


Partie II - Complications en pagaille

Chapitre 25 : Retrouvailles


« Qu'est-ce que c'est ? demanda une voix grave.

- Euh… Ben… Son projet du moment. C'est… euh…

- Qu'est-ce que c'est ? répéta la voix, autoritaire.

- Je ne sais pas vraiment, il… il ne me dit pas tout, mais c'est celui qu'il a donné à… euh…

- Il l'a donné à qui ? »

L'homme à la voix grave commençait à s'impatienter, mais il resta impassible, le regard fixé sur son interlocuteur.

« Parlez, M. Nukafu, dit-il sévèrement. À moins que vous ne vouliez un procès…

- Il l'a donné à un jeune homme, mais je ne connais pas son nom, je le jure ! C'était un testeur, je crois, comme il venait de le mettre au point…

- Vraiment ? »

L'homme à la voix grave fut silencieux pendant un moment, et son interlocuteur s'agita, mal à l'aise.

« Mais vous devriez attendre… Enfin, euh, je veux dire, il va bientôt revenir, il vous expliquera tout ça bien mieux que moi…

- Ce ne sera pas nécessaire, M. Nukafu. J'ai tout ce qu'il me faut. »

L'homme eut un sourire narquois avant de se détourner et de marcher vers la sortie. Cette fois, il le tenait, pensa-t-il avec satisfaction.


Kuroko sortit de sa chambre et jeta un coup d'œil dans le salon. Ses parents n'étaient pas là, mais une note l'attendait sur le bar de la cuisine.

Tetsu-chan,

Ton père et moi ne sommes pas là !

Ta mère qui t'aime !

Voilà un mot très utile, pensa Kuroko en jetant le bout de papier à la poubelle. Ce faisant, il avisa la bouteille de bière à côté de l'évier et s'en étonna. Ses parents ne buvaient pas de bière seulement du vin. Il y avait bien eu une période où son père en buvait, mais cette dernière était révolue. La consommation d'un invité, peut-être ?

Avant qu'il n'ait le temps de réfléchir plus, la sonnerie de son portable détourna son attention. Il retourna dans sa chambre, là où il avait laissé l'appareil, et décrocha immédiatement en voyant qui l'appelait.

« Allo, Seijuro ?

- Bonjour, Tetsuya, répondit la voix familière du rouge à l'autre bout du fil. Comment vas-tu ?

- Bien, et toi ? »

La question était plus lourde de sens, le bleuté lui demandant implicitement si sa maladie était revenue.

« Je suis en pleine forme, Tetsuya. Tu es rentré ? »

Kuroko confirma. C'était bientôt la fin des vacances dans trois jours, ce serait la rentrée des classes, le début d'une nouvelle année scolaire. Il était parti en vacances avec ses parents dans leur maison de campagne, qu'ils avaient héritée du père de Kichiro et qui se trouvait dans le nord du Japon.

Akashi était quant à lui parti la semaine d'avant en Angleterre avec son père, ce qui faisait que les deux amoureux n'avaient pas pu se voir des vacances. C'était aussi la première fois qu'ils se parlaient, étant donné que Kuroko ne pouvait pas passer d'appel vers l'Angleterre – ni en recevoir – et qu'il n'y avait pas de réseau dans le fin fond de la campagne japonaise.

« Tu veux venir à la maison ce soir ? proposa Kuroko.

- J'aimerais beaucoup, mais mon père… »

Akashi n'avait pas besoin d'en dire plus. Son père, Masaomi, s'était donné pour but d'empêcher les deux adolescents de se voir. Il avait programmé leurs vacances dans ce but, et surchargeait l'emploi du temps de son fils.

« Il veut que j'assiste à un dîner, ce soir, continua le rouge. Apparemment, il veut me présenter un de ses plus proches amis, un avocat qui travaille pour l'entreprise familiale. Mais je soupçonne que c'est plus sa fille, Amanda, qu'il veut que je rencontre. »

Kuroko retint un soupir. Une autre lubie de Masaomi : faire défiler des filles devant son fils dans l'espoir qu'il aurait un coup de foudre pour l'une d'elles. Le bleuté ne l'avouerait jamais, mais il craignait que l'une d'entre elles ne finisse par accrocher l'œil d'Akashi. Bien sûr, le rouge ne lui ferait jamais ça mais il ne pouvait empêcher ses pensées de dériver vers des endroits peu joyeux.

« Demain, par contre, je pense pouvoir venir, ajouta Akashi. Tu me manques.

- Tu me manques aussi, Seijuro. »

Le rouge lui manquait horriblement. Son visage, ses yeux et ses cheveux rouges, ses lèvres… Sa voix, son odeur, la sensation de sa peau contre la sienne…

« Pour changer de sujet, comment étaient tes vacances ? »

Ils en discutèrent pendant un bon bout de temps. Kuroko lui parla des après-midi qu'il avait passés à lire, ainsi que de la fois où son père s'était mis en tête d'aller à la pêche alors qu'il n'avait aucune expérience dans le domaine, l'expédition s'étant finie par une baignade forcée. Le bleuté narra ensuite les aventures de sa mère, qui avait commencé à tricoter des chaussettes et des bonnets dans l'optique de les vendre, totalement imperméable au fait que l'hiver venait juste de se terminer. Finalement, il raconta à son petit ami comment il avait découvert un terrier de renard en faisant une randonnée en forêt et lui décrivit combien les renardeaux étaient mignons. Il omit cependant de préciser que leur fourrure rousse lui avait douloureusement rappelé les cheveux du rouge.

Ce fut ensuite au tour d'Akashi, qui commença par lui confier combien il détestait l'avion. Il avait beau avoir voyagé en un jet privé, le rouge n'avait pas du tout apprécié le trajet. Cependant, c'était à peu près le seul point négatif de son voyage : Londres était un endroit magique, selon lui.

Son père l'avait laissé seul, ayant des choses importantes à faire, donc Akashi avait eu tout le loisir de visiter la ville. Il avait visité les monuments les plus emblématiques, comme le Big Ben, la Tour de Londres, le Tower Bridge, des musées… Il avait voulu aller au Parlement, mais en raison d'un débat particulièrement épineux, les visites étaient interdites.

Akashi avait aussi déambulé dans les rues. Il aimait beaucoup l'atmosphère urbaine de la ville, qui comparée à Tokyo faisait pourtant bien plus rurale, avec ses maisons victoriennes et ses taxis noirs.

Le rouge conta tout cela à Kuroko, et lui fit savoir que la prochaine fois qu'il irait, il voulait que le bleuté soit à ses côtés. Bien que ce dernier se doute que ça n'arriverait pas de sitôt, il acquiesça avec enthousiasme.

« Le mariage homosexuel est légal, là-bas », fit observer Akashi, sa voix aussi atone que s'il parlait de la météo.

Kuroko sourit.

« Tu ne penses pas que d'ici qu'on soit en âge, il le sera aussi au Japon ? demanda-t-il, un sourire dans la voix.

- Non, je ne pense pas », répondit le rouge, dont le sérieux soudain fit froncer les sourcils au bleuté.

Kuroko ne connaissait pas grand-chose à la politique à vrai dire, il ne s'y intéressait pas vraiment. Akashi était sans doute plus à même de démêler les intrigues politiques qui agitaient le pays. Cependant, le bleuté s'était renseigné, et le Japon avait bel et bien fait des progrès vers la légalisation du mariage homosexuel avec les partenariats civils.

C'est alors qu'il réalisa. Akashi ne parlait pas de cela. Il se référait au 'd'ici qu'on soit en âge'. Il ne pensait pas survivre jusqu'à sa majorité, c'est-à-dire jusqu'à ses vingt ans.

« Ne dis pas ça, Seijuro. Une rechute est extrêmement improbable, et quand bien même, Hayate trouverait une solution.

- Tetsuya ? De quoi tu parles ?

- Et bien…

- Je voulais tout simplement dire que, bien que les partenariats civils soient autorisés dans quelques quartiers de Tokyo, je ne pense pas que le mariage deviendra légal d'ici nos vingt ans. Mais nous sommes tout de même au XXIè siècle, donc je pense que ça le deviendra avant que nous atteignions nos trente ans. »

Kuroko ne répondit pas, se giflant mentalement. Pourquoi devait-il tout rapporter à la maladie d'Akashi ? Et surtout, pourquoi pensait-il toujours que le rouge était aussi pessimiste ? Juste réaliste, se sermonna-t-il. Pas dépressif.

« Tu penses qu'on sera encore ensemble d'ici là ? » demanda alors Akashi, prenant complètement Kuroko au dépourvu.

Son ton n'indiquait aucun jugement personnel, et le bleuté réalisa que son petit ami utilisait la question comme un moyen pour eux de se projeter dans le futur. Ce n'était pourtant pas quelque chose que Kuroko voulait faire après tout, ils étaient ensemble maintenant, et c'était le plus important.

« Seul l'avenir nous le dira, Seijuro. Tu penses qu'Aomine-kun et Kise-kun le resteront ? »

Akashi se mit à rire, un son qui n'atteignait que trop peu souvent les oreilles de Kuroko. Ils se mirent donc à parler de leurs deux amis. Apparemment, leur relation était des plus chaotiques : ils se disputaient à la moindre occasion, pour recoller les morceaux l'heure suivante. Akashi pensait que leur caractère n'était pas du tout compatible du moins, il disait qu'ils étaient trop jeunes et qu'il leur faudrait un peu plus de maturité s'ils voulaient réussir à ne pas se chercher des puces toutes les cinq minutes. Kuroko les trouvait juste mignons.

Finalement, le moment de raccrocher vint et les deux amoureux se dirent au revoir, avec la promesse de se voir le lendemain.


Akashi s'observa dans la glace et soupira. Pourquoi devait-il porter un costume ? Son père avait insisté, et le rouge n'avait pas jugé nécessaire de se disputer là-dessus, alors il avait cédé. Leurs invités étaient si importants que cela ? Apparemment.

D'après les informations qu'Akashi avait réussi à collecter, Naoki Kohaku travaillait pour son père depuis des années, et ils étaient très proches. L'avocat avait beau être jeune (il surfait sur ses 30 ans), son père le considérait comme son égal. Et pourtant, le rouge n'avait jamais entendu parler de l'homme avant le coup de fil qu'il avait dû prendre pour son père.

Le diner serait donc une occasion pour eux de se rencontrer, bien que Naoki soit venu le voir à l'hôpital quand il était inconscient (Kuroko le lui avait dit). Il était un peu contrarié que l'avocat soit au courant pour sa maladie alors qu'ils ne se connaissaient pas, mais il ne pouvait en vouloir à son père d'avoir ressenti le besoin de se confier à quelqu'un.

Et Naoki venait avec sa fille, Amanda. À la manière dont son père la lui avait décrite, Akashi s'était rendu compte que c'était elle, le 'meilleur parti' qu'il voulait lui présenter. L'adulte avait insisté sur sa beauté et son intelligence, sur le fait qu'elle jouait au basket et, plus important encore, qu'elle était la fille de Naoki, qui était pratiquement de la famille (le fait que le rouge ne l'ait jamais rencontré ne semblait pas déranger son père). Cependant, Akashi se fichait comme de sa première chaussette de toutes ses qualités. Elle n'était pas Kuroko.

Il continua de s'observer, et souhaita que sa tenue soit un peu moins flatteuse. La veste, près du corps, soulignait les muscles fins qu'il avait regagnés en l'espace de quelques mois, et le bleu marine de l'ensemble contrastait avec ses cheveux et ses yeux rouges, les faisant ressortir. Akashi savait qu'il était beau, mais il n'avait jamais vraiment essayé de se mettre en valeur (à part peut-être quand il était avec Kuroko). Il espérait ne pas faire une trop forte impression à cette Amanda, pour qu'elle ne soit pas intéressée par lui, mais le costume sur-mesure rendrait la tâche difficile. Si le rouge arrivait à paraître insipide et dénué d'attrait excepté son apparence, peut-être que la jeune fille ne jouerait pas le jeu de son père. Après tout, elle n'avait sûrement pas envie d'être forcée de sortie avec quelqu'un et peut-être se retrouvait-elle-même dans la même situation que lui. Avec un peu de chance, ils pourraient en discuter et être simplement amis.

« Seijuro ! » appela son père depuis le rez-de-chaussée.

Akashi comprit que les invités étaient arrivés, et que son père voulait sûrement qu'il aille leur ouvrir. Avec un soupir, il descendit les escaliers sans se presser et marcha jusqu'à la porte d'entrée. Résigné, il l'ouvrit d'un geste assuré. Et les salutations qu'il s'apprêtait à faire faillirent mourir sur ses lèvres.

Elle était belle. Indubitablement belle. Elle fut la première chose que capta son regard, et il ne put s'en détacher pour ce qui lui sembla une longue et interminable seconde. Elle était grande, plus grande que lui ; musclée et toute en finesse, sa robe dévoilant juste ce qu'il fallait. Ses cheveux étaient une cascade de feu qui descendait dans son dos et sur sa poitrine, très longs mais très bien entretenus. Ses yeux en amande étaient d'un marron presque noir, et son regard était très perçant ; en outre, il était difficile de manquer l'étincelle d'intelligence qui y brillait. Elle avait de hautes pommettes, qui lui donnaient un air aussi hautain qu'élégant, et ses lèvres couleur cerise s'étiraient en un petit sourire.

Akashi était surpris : étant donné la situation, il s'attendait à rencontrer une fille standard persuadée que ses vêtements de luxe la rendaient magnifique, pas une jeune femme que la nature avait autant gâtée. Mais c'était une sorte de beauté superficielle, peu naturelle, qui surprenait et captivait, mais laissait une impression d'étrangeté.

Tout en se disant cela, il se reprit. Oui, elle était magnifique, oui, elle était captivante : mais elle ne semblait pas si sympathique que ça, avec ses sourcils dédaigneux et son expression moqueuse.

« Bonsoir, Kohaku-san, Amanda-san, finit par dire Akashi.

- Bonsoir, Seijuro-kun », répondit l'avocat, et Akashi tourna pour la première fois les yeux vers lui.

Sa fille avait fait forte impression, mais le père n'était pas dénué de charme non plus. Le visage sévère, il dégageait un charisme peu commun, avec ses cheveux noirs coupés courts et son maintien presque militaire. On lisait dans ses yeux marron une détermination, une volonté féroce et un sérieux exemplaire. Sa voix était grave, très grave, et totalement atone.

« Bonsoir, Seijuro-kun », le salua à son tour Amanda.

Akashi lui jeta un regard décontenancé. Elle avait prononcé le '-kun' avec un total manque de respect, comme si elle n'ajoutait la particule que parce qu'elle y était obligée. En outre, son ton était ennuyé, comme si elle aurait préféré se retrouver n'importe où plutôt qu'ici. Cependant, le sourire joueur qui ne quittait pas son visage indiquait qu'au contraire, elle s'amusait beaucoup.

Je sens que je ne vais pas l'aimer, celle-là, fut la première pensée du rouge.

Il ne se doutait pas que, de son côté, Amanda l'observait et en venait à la conclusion opposée, souriant intérieurement et se disant : Je sens que je vais l'adorer, celui-là.


C'était une vraie torture. À chaque seconde qui passait, Akashi se félicitait d'avoir tenu aussi longtemps. Mais le pire, c'était qu'ils n'en étaient qu'au plat principal.

Après qu'Akashi eut fait entrer les invités dans la maison, son père était venu prendre le relais. Il s'était montré très loquace et très chaleureux envers les Kohaku. Akashi ne le croyait pas jusqu'à ce moment, mais son père et Naoki semblaient vraiment très amis. Quant à Amanda, elle restait un peu en retrait, mais plus parce qu'elle n'avait pas grand-chose à dire que par timidité.

Le père d'Akashi avait ensuite conduit ses invités dans la salle à manger, après avoir demandé à son fils d'aller à la cuisine chercher l'entrée. Une fois qu'ils furent tous installés autour de la table, Masaomi et Naoki commencèrent à parler travail, et Akashi se désintéressa vite de leur conversation. Cependant, quand bien même il essaya de parler avec Amanda, cette dernière ne répondit que par des mots monosyllabiques. Il renonça donc à faire un quelconque effort de socialisation.

Quand ils en arrivèrent au plat principal, Masaomi se mit à poser des questions à Amanda, et étonnamment, elle se montra beaucoup moins réticente à parler. En réponse aux questions du père d'Akashi, elle raconta les exploits du club de basket dont elle était membre au collège, puis elle parla du lycée qu'elle allait intégrer à la rentrée, une école nouvellement construite. Elle s'étendit sur ses résultats scolaires, puis sur ses capacités de chant qui étaient, selon elle, meilleures que n'importe quel membre des AKB48.

En gros, après avoir ouvert la bouche pendant plus de cinq minutes pour la première fois, elle réussit à dégouter complètement Akashi de sa personne. Il voyait bien que son père était très content et qu'il pensait avoir trouvé là le parti parfait pour son fils cependant, tout ce que le rouge voyait en Amanda était une jeune fille imbue d'elle-même, arrogante et vantarde au possible. Bref, pas du tout le genre de personne qu'il appréciait.

Au fur et à mesure que le repas progressait, Akashi se surprit à essayer de trouver au moins un point positif chez Amanda. Il se disait qu'elle ne pouvait pas être totalement détestable, et qu'elle devait avoir au moins un côté agréable il avait cependant toutes les peines du monde à le trouver. La jeune fille semblait faire tout son possible pour être insupportable : et pourtant, Masaomi hochait la tête à tout ce qu'elle disait, souriant légèrement et satisfait.

Le père d'Amanda, Noaki, ne souriait pas, lui. Il n'avait d'ailleurs pas esquissé un sourire depuis le début de la soirée. Son visage était un masque de marbre, plus stoïque qu'une planche de métal. Le seul moment où ses traits bougeaient était quand il ouvrait la bouche pour manger. C'en était presque effrayant.

Akashi aperçut pourtant des micro-expressions traverser le visage de l'homme quand sa fille se mettait à parler. Un sourire en coin par ici, un froncement de sourcil par-là, ou encore une moue approbatrice. L'avocat semblait totalement sous le charme de sa fille : dès qu'il la regardait, ses yeux s'adoucissaient et il avait l'air d'un père au foyer totalement gaga.

Quand le plat principal fut terminé, et qu'il fut temps de passer au dessert, Naoki aida Masaomi à débarrasser, laissant momentanément les deux adolescents seuls. Dès que les adultes se retrouvèrent hors de portée de voix, l'attitude d'Amanda changea du tout au tout.

Son visage perdit toute trace d'ennui, et elle abaissa le menton. Elle resta droite, mais cessa de mettre sa poitrine en avant : son sourire en coin s'évanouit, remplacé par un sourire nettement plus sincère. Elle posa un coude sur la table et appuya son menton dessus. C'était désormais une jeune fille différente qui se tenait en face de lui, et Akashi ne sut pas comment réagir.

« Tu es gay, déclara alors Amanda.

- Je… Pardon ? » s'exclama Akashi, pris au dépourvu.

Amanda se pencha encore plus en avant, les yeux plongés dans ceux d'Akashi.

« Qu'est-ce qui te fait dire ça ? finit par demander le rouge, voyant qu'elle ne parlait pas.

- Tu ne me désires pas. »

Akashi soupira, se demandant pourquoi les mots qui sortaient de la bouche de la jeune fille contrastaient si fortement avec sa nouvelle attitude. Cependant, elle ajouta, juste après :

« Enfin, je dis ça parce qu'apparemment, j'ai un physique assez avantageux. Tous les garçons que je rencontre essayent de me mettre dans leur lit. Mais pas toi. »

Akashi réfléchit à quoi répondre, intrigué par les paroles de la jeune fille.

« Je peux comprendre que tu penses ça, vu ton apparence. Je suis effectivement gay, mais même si je ne l'avais pas été, tu ne m'aurais pas attiré. Ta personnalité aurait refroidi toute pensée que j'aurais pu avoir à ton égard. Par ailleurs, je suis déjà avec quelqu'un. »

Amanda éclata de rire, un rire qui sonna comme un millier de coupes de champagne en train de se briser.

« Je sais, fit-elle. Je suis horrible. Mais ça ne me dérange pas. »

Akashi haussa un sourcil, impressionné par le culot de la jeune fille. Au moins, il lui avait trouvé une qualité.

« Ne t'inquiète pas, continua-t-elle. Je sais très bien ce que ton père veut qu'il se passe. Rassure-toi : je n'ai pas l'intention de m'engager dans une relation amoureuse avec toi. Je ne suis pas le genre de fille à m'attacher à un seul homme. Et puis, tu l'as dit, tu es déjà avec quelqu'un. Qui est l'heureux élu ? »

Un moment, Akashi crut qu'il allait pouvoir s'entendre avec elle. Elle semblait véritablement intéressée, mais alors qu'il ouvrait la bouche pour lui répondre, elle le prit de vitesse.

« Non, finalement, je ne veux pas savoir. Ça doit être un pauvre gars que je ne connais pas. »

Mis en colère, Akashi voulut lui dire ce qu'il en pensait, lui, de sa manière de traiter son petit ami de 'pauvre gars', mais Naoki revint de la cuisine et le rouge referma la bouche. Amanda reprit sa position d'avant, appuyée contre le dossier, un sourire condescendant au coin des lèvres et le menton levé pour regarder les autres de haut.

Akashi résista à l'envie de se prendre la tête entre les mains. Encore plus quand son père lui lança un regard éloquent, accompagné d'un mouvement de tête vers Amanda.

Le dessert arriva, et Akashi réalisa avec horreur que son père avait préparé un crumble aux pommes : un plat que le rouge détestait depuis sa plus tendre enfance. Était-ce trop demander à son géniteur que de savoir ce que son fils aimait ou n'aimait pas ? D'autant plus qu'Akashi était loin d'être difficile, et qu'excepté les plats à base de pomme, les algues et les sauces piquantes, il mangeait de tout.

Mais apparemment, Masaomi avait préparé ça pour Naoki : c'était son dessert préféré. Super ! Son seul réconfort fut qu'Amanda n'avait pas l'air très enthousiaste non plus, mais ce dernier disparut quand l'avocat dit à sa fille qu'elle n'était pas obligée de manger. Au moins un parent qui connaissait les gouts de son enfant.

Sous le regard sévère de son père, Akashi fut quant à lui forcé de manger sa part. Pendant ce temps, Masaomi reprit sa conversation avec Naoki concernant leur travail, ne s'intéressant apparemment plus à Amanda. Cette fois, le rouge décida d'écouter ce dont il retournait, n'ayant pas grand-chose d'autre à faire.

« Tu lui as reparlé du contrat ? demanda Masaomi.

- Oui. Il n'est pas encore sûr. Ses propos exacts étaient, si je me rappelle bien, que 'sa décision n'était pas encore définitive'.

- Si la prochaine fois que tu le vois il n'a pas pris sa décision, tu annules le contrat. Je n'ai pas besoin de m'associer avec des indécis. »

Naoki hocha la tête, du même avis que avec son patron.

« Quant à l'autre sujet que nous devions aborder, je ne pense pas que ce soit nécessaire. »

Masaomi haussa un sourcil, et Akashi, bien qu'il ne sache pas quel était cet autre sujet, se dit que son père allait répliquer qu'il se fichait de l'avis de l'avocat, mais au contraire, son père hocha la tête, semblant vraiment réfléchir aux paroles de Naoki.

« Ça ne me réjouit pas plus que toi, finit par répondre Masaomi. Mais aux temps désespérés, mesures drastiques.

- C'est tout de même plus d'un quart de tes employés, Masaomi », dit Naoki, très doucement.

Akashi écarquilla les yeux. Étaient-ils en train de parler d'un licenciement massif ? AGI était loin de la faillite, le licenciement économique était hors de propos, alors comment son père pouvait-il envisager une telle chose ? À moins que l'entreprise soit dans une mauvaise passe et qu'Akashi ne soit pas au courant…

Il aurait voulu en savoir plus, mais les deux adultes passèrent à autre chose. À la fin du dessert, Masaomi fit signe à son fils de l'aider à débarrasser, et ils se retrouvèrent seuls dans la cuisine.

« Alors ? fit l'adulte.

- Alors quoi ? répondit Akashi, bien qu'il sache exactement où son père voulait en venir.

- Ne fais pas le malin, Seijuro. Tu sais très bien de quoi je parle. »

Akashi s'appuya contre le plan de travail. Il regarda son père dans les yeux et lui dit exactement ce qu'il pensait d'Amanda.

« Je ne vois pas comment tu as pu penser pendant ne serait-ce qu'une seconde que ça pourrait marcher entre nous. Le basket est bien la seule chose que nous avons en commun ! Elle est superficielle, arrogante et égoïste. Elle est belle, je t'accorde ça, mais est-ce que tu pensais vraiment que l'apparence m'importait ? »

Masaomi eut un sourire en coin.

« Non, en effet, si tu y accordais de l'importance, tu ne sortirais pas avec Tetsuya. Mais, franchement, Seijuro, tu me déçois. Peut-être qu'Amanda a quelques défauts, mais ses qualités n'en sont pas moins nombreuses. »

Akashi serra les dents et décida de laisser passer le commentaire sur Kuroko, se disant qu'il ne serait pas avisé de commencer une dispute maintenant avec son père, surtout avec la conversation qu'ils étaient en train d'avoir.

« Elle est très intelligente, continua l'adulte. Je ne pense pas qu'elle puisse te de battre au shogi, mais elle te donnerait du fil à retordre. Elle est sûre d'elle et fiable. Elle a de la volonté à revendre elle est élégante et propre sur elle. Je ne vois pas ce que tu peux demander de plus ! D'accord, elle a un petit côté moqueur, mais je suis sûr qu'une fois que vous aurez appris à vous connaître, tu la trouveras bien plus amicale.

- C'est justement ça le problème, père. Je n'ai pas envie d'apprendre à la connaître.

- Et sans parler du fait qu'elle est la fille de Naoki, poursuivit Masaomi sans prêter attention à la remarque de son fils. Elle vient d'une famille plus que respectable, et avec les moyens. Rien à voir avec les Kuroko. »

Naoki entra dans la cuisine à ce moment, interrompant la remarque acerbe qu'Akashi allait lancer à son père. Il en avait assez que l'adulte dénigre sans cesse Kuroko et sa famille.

« Merci », fit Masaomi en prenant le plat qu'avait apporté Naoki.

L'avocat hocha la tête puis, après avoir lancé un regard à Akashi, retourna dans le salon. Le rouge avait profité de l'occasion pour se calmer, et décida d'attaquer sur un autre sujet.

« Père, pourquoi n'ai-je pas rencontré Naoki-san avant ? Vous avez l'air très proches, alors je trouve ça bizarre que tu ne l'aies jamais ne serait-ce que mentionné auparavant. »

Le père d'Akashi ne répondit pas, et cela ne fit qu'exacerber la curiosité de son fils.

« Quand vous êtes-vous rencontrés ? Et depuis quand travaille-t-il pour toi ? »

Masaomi secoua la tête.

« C'est une histoire pour une autre fois, Seijuro. Retourne dans le salon, et tâche de t'entendre avec Amanda. »

Akashi soupira, mais obtempéra. Il devrait chercher les réponses à ses questions par lui-même, si son père ne voulait rien lui dire. Une idée lui vint alors, et il se retourna vers son père.

« Est-ce que tu comptes me parler un peu d'AGI, plus tard ? »

Un rare sourire illumina le visage de son père, dans le sens où c'en était un sincère, pas celui qu'il affichait à la face du monde, froid et composé.

« Plus tard », répondit-il, et ça sonna comme une promesse aux oreilles d'Akashi.


Alors qu'il s'apprêtait à aller se coucher, Kuroko reçut un message d'Akashi.

Le dîner est enfin terminé : la fille est absolument détestable. Bilan : je t'aime et tu es la seule personne avec qui je veux être. – 22h10, Seijuro.

Kuroko sourit, soulagé. Il eut cependant un peu de peine pour cette Amanda. Elle devait être vraiment horrible pour qu'Akashi ne l'aime pas après tout, le rouge s'entendait facilement avec les gens. Mais peut-être que son jugement avait été biaisé par le fait que son père voulait qu'ils deviennent amis – et plus.

Vous avez fini tard, dis donc… C'était si horrible ? – 22h11, Moi.

La réponse ne se fit pas attendre.

Non, ce n'était pas non plus la mort… Je suppose que j'aurais même pu apprécier si Amanda avait été un peu plus bavarde et si mon père n'avait pas fait de crumble aux pommes. – 22h11, Seijuro.

Kuroko secoua la tête. S'il y avait bien un truc qu'Akashi n'aimait pas, c'était le crumble aux pommes. Masaomi venait encore de redescendre dans son estime.

D'ailleurs, la façon dont il considérait l'adulte ne cessait de changer. Il n'arrivait pas à se former une opinion définitive : au début, il pensait qu'il ne l'aimait pas. Mais après, il s'était dit que finalement il n'était pas si terrible que ça. Ensuite, il avait été attendri par son histoire avec Sanada. Puis, il avait été presque dégouté par l'attitude de l'adulte lors du dîner que ses parents avaient organisé et pour finir, il le haïssait à cause de sa volonté de les séparer, son fils et lui.

Et maintenant, il en venait même à le mépriser. Kuroko ne jugeait habituellement pas les gens mais apparemment, Masaomi était l'exception à la règle.

Et oui, on a fini tard… J'ai pu faire un peu plus la connaissance de Naoki-san (tu sais, l'avocat). C'est assez intéressant de parler avec lui, mais j'ai l'impression qu'il me considère comme un enfant incapable d'avoir ses propres opinions sur des sujets complexes. – 22h13, Seijuro.

Kuroko continua d'échanger des messages avec Akashi pendant une bonne demi-heure, et après avoir convenu de l'heure à laquelle le rouge viendrait le lendemain, Kuroko lui souhaita bonne nuit. Il posa son téléphone sur sa table de nuit, s'allongea confortablement dans son lit et s'endormit, un sourire aux lèvres.


Bonne nuit. – 22h49, Tetsuya.

Akashi sourit et posa son téléphone sur son bureau. Décidément, cette soirée se finissait mieux qu'elle avait commencé. D'un mouvement fluide, il se leva de son siège et s'approcha de son armoire. Il se déshabilla et enfila son pyjama, avant de se diriger vers la salle de bain.

Il se brossa les dents, se passa un gant sur le visage puis revint dans sa chambre. Il s'apprêtait à se mettre au lit, mais sa gorge était sèche, alors il décida de descendre se prendre un verre d'eau. Il se racla la gorge, essayant de se débarrasser du mauvais pressentiment qui l'avait envahi, le même qu'il ressentait avant une crise. Il but son verre d'eau, et se sentit mieux. Tout en se sermonnant pour sa stupidité, il remonta les escaliers en marbre et retourna dans sa chambre.

Et c'est là qu'il se mit à tousser. Tout d'abord juste un petit peu, puis sa toux prit de l'ampleur, atteignant le même niveau que six mois auparavant. Il eut un moment de panique, croyant que la fibrose était de retour, mais heureusement, il se calma au bout de vingt secondes. Il se précipita devant son miroir, mais ne vit aucune trace de sang autour de sa bouche, ni sur sa main. Par ailleurs, il n'avait pas mal à la poitrine juste une gêne dans la gorge.

Akashi hésita. Devait-il aller le dire à son père ? Il ne voulait pas aller le voir pour une fausse alerte… Il devait juste avoir un chat dans la gorge. Et bien sûr, il irait voir Hayate demain matin, au cas où. Mais pas besoin d'embêter son père pour ça.

Il se glissa sous sa couette, mais il n'arriva pas à dormir tout de suite. Il n'arrêtait pas de se tourner et de se retourner, peu rassuré. Était-ce un signe que sa maladie revenait ? Ou juste une réminiscence ? Ou bien quelque chose qui n'avait rien à voir ?

Le rouge considéra l'idée d'appeler Kuroko, mais il ne voulait pas que le bleuté s'inquiète pour rien. Et puis, il devait déjà être en train de dormir. Il n'allait pas le réveiller pour quelque chose comme ça, même s'il aurait bien aimé avoir quelqu'un pour le rassurer.

Akashi soupira, puis décida de lire un peu. Il s'adossa contre son oreiller, et se plongea dans la lecture de son livre du moment. Au bout d'une demi-heure, il sentit que ses paupières commençaient à se fermer, et referma son livre. Il s'endormit peu de temps après, la tête pleine d'interrogations et d'angoisses.


A suivre ! La suite ne sera pas aussi régulièrement updater que pour la première partie, mais je ferais de mon mieux ^^

A toute !